samedi, décembre 27, 2008

Moi Paul de Tarse.


Il s'agit d'une intervention que j'ai faite dans le cadre de l'année Saint Paul, pour ma paroisse.

Comme il s'agit d'un texte assez long, il m'a paru plus simple de le proposer en téléchargement: http://www.plestang.com/docs/moi-paul-de-tarse.doc

Il est tout à fait possible de sauter l'introduction pour aller directement au "corps du texte" après le plan. .

mercredi, décembre 17, 2008

Du lâcher prise au pardon.


Du lâcher prise au pardon.

On dit très souvent dans les milieux chrétiens que même si on a été victime d’abus qui ont provoqué des blessures très graves, il faudrait (je mets exprès au conditionnel ) pardonner à la personne qui a le rôle d’agresseur ou de persécuteur.

Que cela s’appuie sur une réalité psychologique : pardonner permet un allègement de la culpabilité (on devient le tout bon après avoir été le tout mauvais), je n’irai pas à l’encontre d’une telle affirmation, mais comment oublier ce qui vous a été fait, comment oublier la souffrance, la douleur ? La mémoire peut-elle se nettoyer comme celle d’un disque dur ?

Que pour les chrétiens cela s’appuie sur un certain nombre de phrases évangéliques et en particulier sur la dernière phrase de la prière enseignée par Jésus : "pardonne nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés", c’est évident. Seulement sur la croix Jésus n’a pas dit qu’il pardonnait à ses bourreaux, mais Père pardonne leur, parce qu’ils ne savent pas ce qu’ils font. Ce qui revient à dire que le pardon appartient à Dieu et que Lui seul peut pardonner. C’est d’ailleurs ce qui est rétorqué à Jésus quand il remet les péchés du paralytique (Mc2, 5). Mais remettre est-ce pardonner ? Remettre une dette ce peut être annuler la dette ou différer le remboursement.

En d’autres termes le pardon n’est pas une chose que l’on peut faire tout seul, et un être humain doté d’une mémoire n’est pas fait pour oublier facilement les sévices qu’on lui a fait subir.

Et pourtant le pardon est possible, mais c’est ce qui clôt un chemin et non ce qui l’ouvre. Je veux dire qu’il y a d’abord un long travail de deuil, qui permet de déboucher sur le « lâcher prise » puis sur la compassion et enfin sur le pardon .

Le deuil.

Il est nécessaire dans un premier temps (qui peut être très long) d’accepter de regarder la personne qui vous a fait du mal comme quelqu’un dont il faut se séparer car elle est toxique . Or ceci est très difficile. Il s’agit de faire le deuil de quelqu’un de vivant, de quelqu’un qui bien souvent a été quelqu’un de très important pour vous. Il faut en faire son deuil.

Les travaux d’Elisabeth Kübler-Ross qui portent sur le deuil montrent qu’il y a un certain nombre de phases qui sont indispensables. Or pour quelqu’un qui a été confronté par exemple à un abus psychologique, il lui faut sortir de du déni (car il n’est pas permis de dire que cette personne a été mauvaise), arriver ensuite à exprimer sa colère, or exprimer de la colère est très dangereux, car toute colère qui renvoie à une critique, est elle aussi interdite et de ce fait elle est bien souvent transformée en tristesse qui est une sorte de sentiment racket, car la tristesse, elle est socialement admise. Ensuite vient une phase de dépression, car il faut bien reconnaître la perte puis enfin l’acceptation.

Ce processus est déjà un processus qui prend du temps et qui demande un accompagnement.

De mon point de vue, ce travail va permettre d’accéder au lâcher prise qui n’est pas le pardon, loin de là.
Il s’est noué avec la personne abusive des liens extrêmement forts; même s’il n’y a plus de contacts avec cette personne, elle est tellement présente encore dans le psychisme qu’elle demeure vivante, parfois elle se manifeste sous la forme d’une petite voix critique, pleine de reproches. Cette voix il est nécessaire de décider de ne plus vouloir l’entendre.

Le Lâcher Prise.

Jacques Salomé décrit la relation comme une écharpe dont chaque personne tient un bout. L’image de l’écharpe est quelque chose d’assez léger. Mais quand il y a eu une relation toxique avec quelqu’un de son entourage, ce n’est pas une écharpe, mais un véritable câble, et il faut couper les filins qui le composent.

Quand on reconnaît que le fait de couper ces liens est une très bonne chose pour soi, qu’elle est tout bénéfice, car on ne sera plus bloqué par un poids qu’on n’a pas demandé à porter, alors le lâcher prise devient possible. Il faut quelque part arrêter d’espérer que l’on pourra changer la personne qui vous a fait du mal et que consacrer une partie de son énergie à cela, ne sert à rien, si ce n’est à aller de désillusion en désillusion, ce qui empêche justement de se détacher.

C’est une démarche qui peut sembler égoïste, mais qui est vitale. Il faut peut-être pour qu’elle soit possible avoir récupéré une image de soi de bonne qualité, d’où l’importance de l’accompagnement.

Pour ma part quand je me trouve en train de remâcher quelque chose avec quelqu’un qui m’a fait du mal, je m’oblige à me voir avec une paire de pinces coupantes pour sectionner le lien. Et je refais cela autant de fois qu’il est nécessaire, jusqu’à que je ressente en moi une sensation de légèreté, de libération, car il s’agit bien de libération. On est très doué pour se mettre sur les épaules des choses qui n’ont pas y êtLre. Et comme on n’arrive à rien, on se sent coupable ce qui renforce le lien comme dans un cercle sans fin.

Je sais que certains thérapeutes utilisent des symboles pour manifester cette libération. Une image que j’aime beaucoup est celle du ballon rempli d’air ou d’hélium. Moi je tiens la ficelle qui va au ballon, et ce ballon d’une certaine manière, je le retiens prisonnier. Si je lâche la ficelle, je n’ai plus besoin d’utiliser ma force pour quelque chose qui ne sert à rien, donc tout bénéfice pour moi, mais surtout je laisse l’autre d’aller sur le chemin qui est le sien et je crois que cela est important quand on en veut à quelqu’un qui est décédé. Peut-être a-t-il un chemin à vivre dans l’au-delà et qui suis-je pour l’alourdir, le bloquer avec ma rancune, ma rancœur, ma colère.

Je ne dis pas que cette démarche est facile, elle devient possible au bout d’un certain temps et je pense que pour les chrétiens l’aide de l’Esprit saint est une grande force.

La Compassion.

Quand cette étape est franchie, et comme je l’ai dit, elle donne une extraordinaire sensation de plénitude, de joie et de paix (quelque chose est enfin derrière et ne viendra plus jamais menacer), on peut regarder la personne qui vous a persécuté autrement et peut-être même avoir de la compassion pour elle. Si elle a fait cela c’est qu’elle même avait du subir des choses difficiles, seulement elle n’était pas obligée de les faire vivre aux autres. La compassion pour moi, c’est aussi souhaiter que la personne un jour se rende compte de ce qu’elle a subi et de ce qu’elle a commis et qu’elle puisse changer, mais cela n’est pas de mon ressort, car je ne la « porte » plus. Et il est aussi possible d’élargir cette compassion à toutes les personnes qui comme elles sont devenues mauvaises parce que la vie a été trop dure avec elles, et à toutes les personnes qui ont été victimes.
Mais ceci n’est pas le pardon. Cela permet de revivre, d’être heureux, de ne plus se sentir responsable ni coupable de ce qu’on n’a pas su faire pour réparer l’autre, mais pardonner c’est autre chose : ce serait faire comme si ce qui a été fait pouvait être comme gommé, annulé, et cela nous les humains nous ne sommes pas capables de le faire.

Le Pardon.

Il y a un terme que les chrétiens utilisent beaucoup pour parler de Dieu, c’est le mot de miséricorde (le cœur de Dieu serait touché par la misère de l’homme). C’est un mot avec lequel j’ai eu pour ma part beaucoup de mal, car d’une certaine manière il me rabaissait, je le ressentais avec une note de condescendance. Et puis il est arrivé que ce mot se transforme pour moi et il est devenu « torrent d’amour ».

Le torrent d’amour que Dieu peut déverser est tellement puissant qu’il peut d’un coup enlever toutes les scories, toutes les grisailles. Il ne reste plus rien sauf cet amour qui est là et qui reste et demeure dans son cœur. Cet amour là est capable d’effacer la faute.

Quand j’ai fait cette expérience, car pour moi il s’agit d’une expérience, j’ai vraiment compris que lors du sacrement de réconciliation c’était de cela dont il s’agissait, que Dieu lui pouvait effacer de sa mémoire (pardon pour l’anthropomorphisme), le souvenir de ce qui avait été « pas assez bien » ou même « mauvais »." Vos péchés seraient ils rouges comme l'écarlate" ils deviendront blancs comme neige" fait dire Isaïe au Seigneur et le Père du fils prodigue oublie tout quand il aperçoit son fils amaigri mais vivant.

Et parce que moi j’avais vécu cette expérience là, je pouvais pardonner ou plus exactement laisser le torrent d’amour qui était en moi aller vers l’autre, pour qu’il soit lui aussi comblé. En d’autres termes je peux désirer donner à celui qui m’a fait du mal le meilleur que je connaisse, pour qu’il arrive à la vie.

Et ceci est extrêmement différent du lâcher prise qui ,je le croyais jusqu’il y a peu de temps, était tout ce dont j’étais capable.

Mais si pour moi qui n’ai pas vécu d’abus, il m’a fallu tout ce temps pour entrer dans cette joie, je maintiens que demander à des personnes abusées, blessées au plus profond d’elles-mêmes, je pourrais dire mutilées, de pardonner comme tout préalable à une reconstruction psychique est un non sens, sauf bien sûr, si l’Esprit Saint se manifeste, ce qui est toujours possible.

lundi, novembre 24, 2008

"Si le christ n'est pas ressuscité" 1Cor 15, 15



"Et si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est vide, et vide aussi votre foi".

Nous connaissons tous ce texte de Paul qui va jusqu'à dire que si la résurrection n'a pas eu lieu,nous sommes les plus malheureux des hommes.

Il semble bien évident que si Christ n'est pas ressuscité, il n'y a pas de don de l'Esprit, et nous restons dans les ténèbres.

Mais ayant ces derniers temps essayé de réfléchir sur la notion de réconciliation (Paul ne parle-t-il pas pour lui-même d'un ministère de réconciliation) je me suis demandée si d'une certaine manière la résurrection ne peut pas être entendue comme le signe que désormais entre L'homme et son créateur, la paix est faite par le sang de la croix. Si la résurrection n'a pas eu lieu, alors Jésus a échoué dans son oeuvre de Salut, oeuvre qui pour moi est donner la Vie, faire des humains des vivants.

Je vais essayer de m'expliquer.

Si comme l'explique Paul dans le début de l'épître aux Romains, les hommes par leur inconduite et leur incapacité à reconnaître le Dieu Unique, ont provoqué la colère de celui-ci, il y a eu rupture de l'alliance proposée et risque de mort pour l'humain.

L'histoire d'Israël prouvant que chaque fois qu'il y a détournement (rupture de l'alliance proposée par Dieu), la colère de Dieu se manifeste sous forme de désastres qui semblent aller jusqu'à la disparition du peuple, qui perd sa ville et son temple.

Quand il y a rupture d'alliance, qui faut-il faire pour pour la rétablir?

Il y a une réponse donnée dans le dernier chant du serviteur (Isaîe 53:,4-5:En fait, ce sont nos souffrances qu'il a portées,ce sont nos douleurs qu'il a supportées,et nous, nous l'estimions touché,frappé par Dieu et humilié.
5 Mais lui, il était déshonoré à cause de nos révoltes,broyé à cause de nos perversités :la sanction, gage de paix pour nous, était sur lui,et dans ses plaies se trouvait notre guérison.

Je reviens à mon schéma de réconciliation.

Il ya donc rupture de l'alliance ou de la relation. La personne qui a rompu l'alliance ou la relation se rend compte qu'elle risque gros à avoir posé ce geste ou cet acte, ou cette parole et désire reprendre la relation (voir obtenir la protection, ce qui est montré dans la parabole de l'enfant prodigue). Pour cela il doit reconnaître explicitement sa faute (repentance?), demander le pardon. Celui ci ne pouvant être obtenu qu'après un acte qui vient en quelque sorte faire réparation. C'est cet acte qje Jésus suir la croix (agneau pascal) à posé comme signe de redemption (rachat).

La réparation ayant été acceptée, (sacrifice de la nouvelle alliance en son sang), la relation est ici non pas restaurée, mais transfigurée, et cela est manifesté dans la résurrection.

Je veux dire que le signe donné (qui renvoie quand même à ce que Jésus dit du signe de Jonas: redevenir vivant après trois jours passés dans le ventre de la baleine) montre que en Jésus, premier né de toute la création, la Vie est redonnée à l'humanité en sa plénitude, même s'il ne s'agit que d'un devenir ou d'un Ad Venir.

La résurrection est donc le signe que par la mort de Jésus sur la croix, le Père en acceptant ce signe de soumission et surtout d'amour inconditionnel pour l'humanité), redonne la vie qui semblait avoir été perdue dès que l'humain s'était détourné de la parole de son créateur.

Mais la Vie qui est ainsi donnée, est une vie autre, une vie qui n'a rien à voir avec le fait de ne pas connaître la mort, une vie qui nous permettra peut-être d'être amoureux de Dieu et amoureux de nos frères.

Alors oui si le Christ n'est pas ressuscité, oui notre foi est vaine est nous sommes les plus malheureux des hommes. Mais s'Il l'est, alors à nous la Vie dans sa plénitude.

samedi, novembre 15, 2008

Jacob, Moïse, Abraham : "Figures d'ombre"

Chaque fois que je lis en Gn32,24 le combat de Jacob contre cet inconnu qui vient l’assaillir à Yabbok, pendant la nuit qui le sépare de la rencontre avec son frère jumeau dont il a usurpé la place (droit d’aînesse et bénédiction), je me dis qu’il s’agit peut-être d’un combat contre l’Ange de Dieu, mais peut-être aussi du combat contre la figure d’ombre (celle qui cherche à détruire et qui a détruit) qui est en lui.

Ces figures d’ombre nous en portons tous et nous avons tendance à les fuir de peur qu’elles ne nous mettent à mal. Pourtant, tant qu’elles n’ont pas été affrontées elles restent toutes puissantes.

Jacob est né en tenant le talon de son frère, en s’y accrochant d’une certaine manière, comme s’il n’était pas dissocié de ce frère. Qui est-il ce bébé (qui sera le préféré de la mère) et qui s’arrangera pour prendre par la ruse (la force des faibles) les attributs de son frère ? Qui est-il cet homme qui prend la fuite et qui se fait berner par Laban et même par ses femmes? Jacob n’est pas un fort, il est un faible (comme nous tous).

Mais cette nuit là, il n’a pas le choix ; c’est lui ou l’autre, comme demain ce sera lui ou son frère qui sera la vainqueur. Alors là, il se bat. Il sort blessé de cette rencontre, mais il pourra affronter son frère, maintenant qu’il n’usurpe plus une identité qui n’est pas sienne (une des signification de ce prénom est usurpateur) et surtout il a reçu un nom nouveau à défaut d’une bénédiction. Or ce nom Israël qui est le nom générique des 12 tribus fait de lui un des pères fondateurs du peuple avec le quel Dieu a fait alliance. Quant au nom reçu Israël qui veut dire fort avec Dieu ou contre Dieu, je me demande si le contre ne doit être entendu dans le sens de tout proche, qui est tout contre, mais maintenant il est fort, la faiblesse est partie.
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Si pour Jacob, il est relativement facile de comprendre ainsi ce combat, il me semble que ces mêmes combats se retrouve avec Moïse et Abraham.

En Ex4,34 l’auteur rapporte un épisode très étrange où l’Ange de Yahvé décide d’attaquer Moïse pour le tuer. Pourtant Moïse vient enfin de se décider à partir pour affronter le pharaon, ce qui ne lui sourit guère, malgré ce que Yahvé lui a dit, montré, et promis. Sa femme circoncit leur fils et répand le sang sur les pieds de Moïse ce qui fait de lui un père de sang.. Maintenant il est bien possible que le mot « pied » soit un euphémisme. Mais du sang, Moïse en a sur les mains si j’ose parler ainsi. N’est-il pas un assassin qui a fuit son pays pour ne par payer le crime dont il s’est rendu coupable ?.

Peut-être que cette peur d’être mis à mort pour cela le taraude encore, car y a t-il comme cela est dit dans l’alliance noachique un prix du sang à payer pour que la dette : soit abolie . Gn9,6 : « qui verse le sang de l’homme, par l’homme aura son sang versé ». Tant que le sang n’est pas versé, la figure d’ombre demeure et n’accepte de partir que lorsque la faute est reconnue et le prix payé, même si le prix est payé par le fils.

Il est certain qu’après cet épisode, le Moïse que demandait à Dieu d’en trouver un autre que lui pour faire sortir le peuple de l’esclavage, va devenir capable se rencontrer pharaon, de lui tenir tête et de devenir un Père du peuple choisi.

Quant à Abraham, le combat qu’il livre est celui qui se passe lors du « non sacrifice » d’Isaac. Or si on se rappelle l’histoire de ce patriarche, il a condamné son fils Ismaël à une mort certaine en l’envoyant avec sa mère dans le désert, avec une cruche d’eau et une miche de pain.. Nous, nous savons que l’Ange du Seigneur n’a pas permis la mort de ce fils, mais Abraham lui ne le sait pas. Alors on peut penser qu’il y a un prix du sang à payer. D’autant que pour conserver sa propre vie, Abraham est prêt à bien des compromissions, comme de se faire passer par deux fois pour le frère de sa femme. Comment Dieu va t il lui permettre de changer, de se déprendre de cette figure d’ombre ?

Car demander l’immolation de son fils, c’est le propre des Dieux cananéens comme ceux du roi de Moab. Et il n’est pas certain que Abraham qui vient quand même de Ur où on adorait des dieux mésopotamiens ait été capable de choisir YHWH comme l’unique. Alors il lui est demande de sacrifier son unique fils, pour que YhWH devienne son unique et que la peur ne soit plus en lui.

Dans ce texte le passage du nom Elohim à YHWH, montre bien que ce dont Abraham doit se déprendre c’est d’une certaine idolâtrie:

Gn9-10 : « Ils viennent au lieu que lui a dit l’Elohim, Abraham bâtit l’autel et prépare les bois. Il ligote son fils Isaac et le met sur l’autel au-dessus des bois. 10 Abraham lance la main et saisit le coutelas pour égorger son fils. 11 Le messager de YHWH crie vers lui des ciels et dit : Abraham, Abraham : Il dit me voici ».

Les dieux cananéens demandaient des sacrifices humains et pour Abraham, son Dieu à lui rentrait dans la même catégorie. Pour en faire son allié, il semble ne pas hésiter à obéir de peur de l’offenser et de disparaître lui. Or là, il s’agit aussi de détruire en lui une fausse image de Dieu, Dieu ne demande pas des êtres humains en sacrifice, mais une relation de confiance. Ce qui caractérise peut-être Abraham c’est même si c’est parfois tout à son honneur une certaine passivité. Je veux dire qu’il ne se révolte pas quand Sarah lui demande de mettre Agar et Ismaël dehors, il invente des moyens pour ne pas être mis à mort par Pharaon ou Abimelek en faisant passer sa femme pour sa sœur. En permettant à Abraham de ne pas immoler son fils, YHWH lui permet de devenir un homme libéré.

Quand Abraham retourne chez lui, il n’est pas fait mention d’Isaac. Peut-être que par ce combat une défusion des liens père fils a-t-elle pu se faire, le fils n’est pas l’objet du père.

De tels combats qui sont de durs combats car il s’agit de sortir de la peur et de l’esclavage que cette image d’ombre a sur nous, nous sont certainement proposés, mais sommes nous capables de les affronter ?

mercredi, novembre 12, 2008

"Qui mange ma chair et boit mon sang.." Jn 6, 56

"Qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi et moi en lu"i. Jn6, 56

Je pense n’avoir pas fini de buter sur ce verset qui depuis fort longtemps me pose question. J’ai souvent pensé que si j’avais écouté ce discours sur le pain de vie, j’aurais fait comme la plus part des juifs présents, je serais partie (peut-être même en me bouchant les oreilles).

Il me semble avoir pourtant ces jours derniers, trouvé quelques éléments qui permettent de comprendre un peu mieux.

Il y a le paradoxe de la phrase. Quand nous ingérons de la nourriture, nous ne nous transformons pas en elle, elle se transforme en nous, elle nous donne l’énergie dont nous avons besoin pour vivre. Que communier au corps et au sang nous donne une énergie autre, oui, mais comment peut-on devenir l’Autre ?

Si le corps et le sang de Jésus nous permettent de nous transformer (ou de nous laisser transformer) en Lui, c’est qu’un processus autre est l’œuvre, comme celui qui permet de renaître d’en haut. Ces inversions du « naturel » sont fréquentes dans l’Evangile de Jean et difficiles à comprendre, même à entendre .Or quand Jésus propose ces inversions, c’est qu’Il se présente comme le Tout Autre, comme le Fils de Dieu. On passe de l’ordre charnel à l’ordre spirituel et les règles de dernier peuvent être bien différentes de celles qui régissent notre univers.

Peut-être est-il possible de dire que lorsque Jean l’évangéliste fait prononcer à Jésus de telles phrases, c’est qu’il veut nous faire comprendre que Jésus se situe dans sa filiation et avec une autre logique. Dans cette hypothèse, ltout le discours sur le pain de vie devient plus facile à entendre.

Par ailleurs si comme le fait remarquer Marie Balmary dans son livre « Abraham ou le sacrifice interdit » chaque fois que dans la Bible (en particulier dans la Genèse) qu’il y a séparation des éléments, c’est qu’il y a création, il est possible de penser que lorsque Jésus le soir de la Cène donne le pain comme son corps et le vin comme son sang, il y a création. D’une certaine manière le nouveau corps de Jésus (celui d’après la résurrection) est déjà présent et de ce fait notre recréation à nous.
Cette séparation en corps enveloppe (qui est en fait ce qui reste de l’homme après son décès, quand le souffle est parti) et sang (identité de la personne, essence, vie) donne lieu à une création. La mort annoncée, réalisée devient vie.

De même que nous participons à cette mort, car en mangeant et en buvant nous participons à la destruction, nous sommes vivifiés et transformés par la Vie qui nous est alors donnée.

Actuellement je pourrais dire que manger ce qui fait figure de chair à savoir le pain et boire ce qui fait figure de sang à savoir le vin permet d’une part de voir en Jésus l’agneau pascal dont on a mangé la chair rôtie le jour de la Pâques et dont le sang badigeonné sur les portes a permis le peuple d’échapper à la mort des premiers nés. Il y a bien là une notion de rédemption de salut : la mort sauve.

Mais surtout et d'autre part la séparation de corps enveloppe et du sang ne conduit plus à la mort mais à la vie. Chaque fois que nous participons à ce repas, c’est la Vie qui se manifeste en nous et qui nous permet petit à petit de nous identifier (devenir comme) à Jésus. Et là c’est bien Lui qui demeure en moi.Il devient alors possible de dire avec Paul, « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi ».

mercredi, novembre 05, 2008

Peut-on chasser un Esprit de haine?

Le prêtre qui commentait il y a quelques jours le passage de Luc (Lc12,31-34) où les pharisiens mettent Jésus en garde contre Hérode, a centré une partie de son homélie sur la mission que se donne Jésus : chasser les démons.

Il a insisté sur le fait qu’il n’était pas question de voir le diable partout, mais de ne pas oublier que le démon existe et travaille insidieusement en nous.

Il a rapporté l’exemple suivant. Une personne, lors d’un temps de réconciliation demande à le voir et lui explique qu’elle a éprouvé une haine très violente à son égard et ce pendant plusieurs mois. A ce moment là en effet, le prêtre avait répondu par un non à une demande. Elle même a été surprise par la violence de sa réaction. Il lui a fallu tout ce laps de temps pour pouvoir en parler et se réconcilier.

Il est alors expliqué à cette personne que cette haine est liée au fait qu’elle a laissé en elle entrer le mauvais, ce qui peut être signifié par « l’esprit de haine ». Et comme Jésus a pour vocation de chasser les mauvais démons, il est alors possible de lui demander de chasser ce démon, (je suppose par une prière dite de délivrance).

Il a cependant été dit que cette manifestation est liée à un événement du passé qui a provoqué en son temps une blessure, donc une souffrance très importante, mais de cette blessure il n’est pas question.

Or pour moi, en tant que psy, c’est cela qui m’interpelle. Le non a réactivé une blessure et la haine s’adresse autant à l’événement récent qu’à l’événement passé. Il s’agit donc pour moi de dissocier ces deux faits. Le prêtre n’étant que le vecteur ou l’objet du transfert négatif de la personne.

Que ce « non « ait permis à cette personne, par le bais de sa colère actuelle, de se rendre compte à quel point la haine en tant que telle était quelque chose de mauvais, dont il fallait autant que faire se peut, se débarrasser, car c’est quelque chose de très toxique, cela me semble très positif.

Mais je ne suis pas sûre que prier pour mettre ce mauvais esprit à la porte soit suffisant. Certes je comprends la démarche proposée dans un cadre spirituel, mais elle me dérange.

La haine est toujours pour moi liée à une très grande souffrance (il y a eu un objet aimé qui vous a fait défaut à un moment donné et l’amour s’est transformé en haine, avec un désir de destruction. Ou autrement dit: si je ne peux avoir l’objet d’amour, personne ne l’aura et je le détruirai.

Il me semble qu’il aurait fallu déjà parler du contenu de cette « haine », parce que après tout il peut aussi s’agir non pas de haine, mais de « colère ». et surtout de violence? Et s’il s’agit de cela, alors oui, je crois qu’une prière est indispensable car la violence est ce qu’il y a d’animal en nous et qui bloque dans notre chemin vers notre humanisation.

La violence est en nous, présente, et elle ne nous est pas tombée dessus comme de l’extérieur. Elle est interne et non externe.

Or c’est aussi cela qui me dérange dans la notion d’Esprit de haine que finalement je trouve très culpabilisante. On pourrait penser que si cette personne a laissé la porte s’ouvrir à ce mauvais esprit, quelque part c’est de sa faute. Or si elle a été profondément blessée dans son enfance par quelqu’un de proche, elle a été victime et non agresseur.

Il y a un lien pathogène qu’il faut dénouer.

Ainsi il ne s’agit pas d’expulser un démon, mais de guérir une souffrance intense. Cette guérison n’est pas magique. Certes si Jésus le souhaite il peut guérir, mais le chemin le plus normal est celui du lâcher-prise qui permet de se rendre compte à quel point ce lien est mauvais pour la personne qui l’entretient à son insu puis de la compassion et enfin du pardon.

Pour pouvoir pardonner, je pense qu’il est nécessaire d’avoir vécu en soi même l’expérience du torrent d’amour déversé par le Seigneur qui balaye et purifie. C’est ce même torrent d’amour qui est présent en soi, qui peut alors se déverser vers l’autre et permettre le pardon.

Et prier pour que cet amour vienne envahir la personne en souffrance me semble préférable à une prière pour chasser un démon.

mercredi, octobre 15, 2008

Genèse et décalogue.

Nous travaillons en groupe le livre de la Genèse et nous avons passé pas mal de temps sur les "fautes" du couple originel et de leur fils Caïn.

Si dans tous les cas, on peut dire que ces fautes, ces ratés, sont sous-tendus par la convoitise, il me semble que le péché dit des origines renvoie à notre capacité à ne pas tenir compte de la présence de Dieu dans notre vie (toute puissance, liberté), et que le péché de Caïn est plus centré sur la relation à l'autre..

Dans le décalogue on a la même partition: 5 commandements centrés sur Adonaï, et 5 commandements centrés sur la relation avec l'autre.

Je peux donc penser que au moment de la rédaction de ce texte (je parle de la Genèse), les lecteurs pouvaient faire le lien avec le livre de l'Exode ou du Deutéronome et comprendre que ces péchés des origines étaient aussi les péchés qui avaient mené le peuple dans la perte de leur terre et dans l'exil.l.

mardi, octobre 07, 2008

Dialogue.

Au cours de la célébration eucharistique, on peut parler d'un dialogue entre le célébrant et l'assemblée. Si aujourd'hui, parce que la messe est en français et si les choses ont changé depuis Vatican 2, il est possible de s'associer pendant les prières eucharistiques aux prières dites par le prêtre ( encore que pour moi qui ai connu la messe en latin, beaucoup de phrases sont spécifiques du prêtre et ne concernent pas l'assemblée) il n'en demeure pas moins que dans les dialogues, le peuple est sans cesse rappelé à sa condition de "pécheur", de pas beau, de mauvais, de pas capable.

Il m'est arrivé de dire sur un mode de boutade que le début de la célébration, c'est un peu comme dans les groupes d'alcooliques anonymes, où chacun dit qu'il est alcoolique. Là chacun se dit "pécheur" et cela c'est sa fonction, sa caractéristique.

Pourtant, il me semble que l'accent porté sur cette relation de pécheur, de mauvais (même si elle montre l'impact de Jésus "Sauveur"), place quand même l'être humain dans une position singulière, un peu comme si tout en lui est mauvais.

Je veux dire par là, que les phrases prononcées par l'assemblée, démarrent réellement avec le "confitéor", qui même s'il est aussi induit et prononcé par le célébrant, il ne laisse pas beaucoup de place à la possibilité de faire "bon". .Je veux dire que si on reconnaît que l'on a péché par pensée, par action et par omission, reste-t-il un domaine où l'homme serait "juste"?

Dieu sait qu'il est difficile de maîtriser ses pensées, de s'en sentir responsable (même si ce sont les nôtres) et coupable (c'est à dire pas bon, mauvais, pécheur) , alors qu'on n'est pas capable de les empêcher d'affleurer. Je me permets de penser que parfois il est nécessaire (à défaut de bon) que l'agressivité puisse se prononcer surtout quand elle ne passe pas dans les actes et que une fois reconnue elle permette de prier pour l'autre qui nous a énervé.

Les actions peuvent être mauvaises, mais elles sont aussi le moyen de nous exprimer. Alors qu'il y ait des loupés, oui, mais parfois une action même si nous n'en sommes pas fiers, peut aussi avoir du bon. Quant à l'omission, s'il faut entendre par là, "tout ce que j'aurais du faire et que je n'ai pas fait", je trouve pour ma part que c'est redoutable.

Reconnaître ma fragilité, mes échecs, oui, mais me regarder comme incapable de faire quoique ce soit de bon alors que mon désir le plus profond est que l'Esprit travaille en moi, pour me permettre de répondre à son désir à Lui sur moi, cela me semble très différent.

Ensuite on passe au" Kyrié," et les mots de l'assemblée sont la demande de la Pitié. Ce mot de Pitié est quand même un mot très fort. A quelle image renvoie-t-il? Pour moi à celle de la personne qui est en train de mourir, et qui attend que celui qui passe là, le sauve.

Ce mot de pitié est repris dans l'Agnus.

Aujourd'hui je m'interroge sur la phrase que nous prononçons en réponse à celle du prêtre au moment de la communion. Je veux dire que le célébrant nous adresse une béatitude: "Heureux ceux qui sont invités au repas du Seigneur" et pour cela il y a de quoi se réjouir, puisque c'est d'une certaine manière la promesse du futur qui se réalise dans le ici et maintenant. Et au lieu de nous réjouir, on nous dit encore et toujours que nous ne sommes pas dignes de le recevoir (comme le dit à juste titre le Centurion),et on demande là une guérison. Peut-être que cette parole devrait nous purifier, mais cette parole personnelle je reconnais être un eu sourde mais je ne sais pas l'entendre. Mais du coup on perd tout la joie d'être invités au festin et je trouve cela bien dommage.

On pourrait remplacer pitié par miséricorde (comme cela est dit après le chant du kyrié) , mais curieusement, même si je sais le sens de ce mot, cela ne ma va pas, car on fait miséricorde à quelqu'un qui est dans la misère en levant sa dette, et cette représentation de Dieu pour moi, est réductrice.

On n'est pas avec Dieu dans une sorte de donnant donnant. Avec Dieu il y a surabondance. Et si je remplace dans ma tête et dans mon coeur, ce mot par "torrent d'amour" alors oui, là je suis en relation avec un Dieu qui est rempli d'un amour brûlant, débordant, pour moi. Cet amour un peu comme un torrent d'eau, entraîne loin de moi certaines scories, et aussi comme un torrent de feu, les brûle et en moi vient le désir que ce torrent détruise, brûle, ce qui me sépare de celui que j'aime.

Je ne peux certes pas au cours d'une célébration, me dissocier de l'assemblée en remplaçant pitié, miséricorde, par torrent d'amour, parce que cette assemblée est le "corps" dans le quel je suis et que je contribue à créer, mais chaque fois que c'est possible j'ai en moi cette image vitale un peu comme le buisson ardent de Moïse, qui me révèle ce qu'est l'Amour inconditionnel.

jeudi, septembre 18, 2008

"De la charité à la foi."

Si on lit l'épître aux Corinthiens(une des premières épîtres datée de 54) et en particulier le chapitre 13, on voit que Paul met toute son insistance sur la charité (on dit l'Amour aujourd'hui). La charité est plus forte que la foi, celle qui transporterait les montagnes. On peut penser que celui qui vit de cette charité là, est ajusté au désir de Dieu qui est Amour et que, devenu "juste" il sera "sauvé" c'est à dire connaîtra la vie éternelle en participant à la gloire de Père, avec le Fils et dans l'Esprit.

Si on travaille l'épître aux Romains(qui est très postérieure 57), il semble bien qu'il y ait quelque chose de très différent dans le discours de Paul. C'est la foi, c'est à dire la confiance absolue en la Parole (ou la Promesse) qui donne le salut. La démonstration à partir d'Abraham qui est justifié parce qu'il a cru (peut-être contre toute espérance) dans la Parole, est si l'on veut exemplaire, quoique pour ma part, je la trouve très rabbinique (mais cela c'est mon point de vue).

Du coup, il y a chez Paul, une sorte de glissement, voir de clivage qui s'introduit, avec la question des oeuvres et de la foi. Suffit-il de croire pour être sauvé?

Paul lui a fait l'expérience que c'est la rencontre avec Jésus, ressuscité par la volonté du Père, qui a provoqué en lui une changement radical, qui a fait de lui un homme nouveau, possédé par l'amour de ce Jésus qu'il avait voulu persécuté en persécutant la communauté naissante.

Le Juste est-il celui qui a cru en Jésus mort et ressuscité pour le salut du monde ou celui qui agit dans l'amour. Il semble bien que ce soit celui qui mette sa foi dans le Seigneur qui soit le nouveau Juste. Mais si on regarde la trajectoire de Paul, il semble évident que cette foi est passée dans les actes, puisqu'il s'est mis immédiatement à annoncer l'évangile et à vivre plus que dangereusement pour son Seigneur.

Pourtant il oppose la foi et les oeuvres. Sauf que les oeuvres (me semble-t-il), ce sont pour lui les signes d'appartenance à la religion originaire de Jésus, à savoir essentiellement la circoncision, la pratique de la loi, et la séparation d'avec les "impies".Or Jésus s'est Lui-même souvent mis en porte à faux vis à vis d'une observance de la loi qui tue, qui en fait une lettre morte. Paul continue donc bien le message évangélique.

Il me semble quand même que beaucoup de juifs qui observent et accomplissent la loi, sont de très "saints" hommes(et femmes) et que pour eux il n'y a pas de confusion entre l'observance et l'actualisation de la Parole (Thora).

Il y a cependant une phrase, dans l'épître aux Galates- qui est une épître antérieure à l'épître aux Romains, mais postérieurs à la première aux Corinthiens- une phrase pour moi très importante et qui aurait peut-être évité la querelle autour de la justification par la foi.

Voici cette phrase: " En effet, dans le Christ Jésus ni circoncision ni incirconcision ne comptent, mais seulement la foi opérant par la charité".

La foi si elle ne s'exprime pas par la charité, n'est pas suffisante pour justifier et donner le Salut.

Pensées vagabondes à propos de la pécheresse pardonnée.

Quand j'écoute une lecture, très souvent il y a un mot qui s'impose à moi, surtout quand la traduction me surprend. Ce fut le cas aujourd'hui pendant la lecture de l'épisode de la pécheresse pardonnée en Lc7, 36-49.Si la Bible de Jérusalem (qui est un peu ma référence) dit, "et voici qu'une femme qui dans la ville était une pécheresse, la traduction liturgique elle emploie une phrase beaucoup plus lapidaire: "Survint une femme de la ville, une pécheresse.Et c'est le mot "ville" qui a fait écho en moi. Pour beaucoup d'entre nous, la ville n''est pas un lieu recommandable. C'est un lieu de danger, où tout peut arriver et quelqu'un qui vient de la ville n'est pas forcément recommandable.

Alors voilà cette femme qui entre, alors qu'elle n'est pas invitée, qui s'installe directement aux pieds de celui qui lui a été invité et qui est peut-être à la place d'honneur, donc bien en vue. Cela me fait alors un peu penser à Marie, la soeur de Marthe qui elle aussi est tout contre Jésus, puisqu'elle assise à ses pieds.

Et cette femme, dont on ne nous dit rien si ce n'est qu'elle est une pécheresse, et que nous considérons comme une madame qui vend ses charmes, fait en fait pour Jésus ce qu'elle sait si bien faire, donner du plaisir. EN général nous scotomisons les faits pour rester sur l'affect: elle arrosait ses pieds de larmes. Mais si on reprends les gestes qui sont décrits et d'ailleurs énumérés par Jésus, les larmes mais surtout les baisers et l'onction (massage) pour faire pénétrer le parfum, sont des gestes à connotation érotique. Ces gestes donnent du plaisir à celui qui les reçoit. D'une certaine manière, elle fait pour Jésus ce qu'elle sait faire, mais elle le fait gratuitement et avec tout l'amour dont elle capable.

Ceci montre bien la transformation qui s'est faite en elle.

Et j'aime à penser que c'est cet amour là qui lui a valu le pardon de ses nombreux péchés, et non pas seulement ses larmes.

mercredi, septembre 17, 2008

"Le fils de la veuve de Nazareth".

En écoutant hier l'épisode de la résurrection du fils de la veuve de Naïm, veuve dont on ne connaît pas le nom (Lc7,11-17), je me disais, puisque cette résurrection n'est pas consécutive à une demande, qu'elle peut être lue autrement.

Ce jeune homme, fils d'une veuve, n'a pas de descendance, comme le fils de la veuve de Nazareth. Comme lui, il est fils unique (même si on ne sait pas bien ce qu'il en est des "frères de Jésus").

Mais lui, il a un "bel ensevelissement" tout le monde est là, autour de sa mère et autour de corps. Pour Jésus, cela sera fait à la sauvette, à la tombée de la nuit, avec bien peu de monde et sûrement pas des pleureuses professionnelles.

Il est dit au début de ce texte que Jésus était suivi de ses disciples et d'une foule nombreuse. Le soir de ce vendredi, on peut compter les personnes sur le bout des doigts.

C'est la compassion de Jésus pour cette femme dont on dit que la condition de veuve était une des pires qui soit en Israël à cette époque, qui semble être à l'origine du miracle.

La phrase:"ne pleure pas" peut avoir son écho dans la phrase adressée à Marie-Madeleine: "femme pourquoi pleures-tu?". Peut-être que Marie qui gardait toutes ces choses dans son coeur, si elle a entendu parler de ce miracle, elle qui était veuve, a pu savoir dès ce moment que son fils ne l'abandonnerait pas.

Quant à la phrase "Jeune homme lève-toi", nous ne savons pas comment s'est passée la résurrection de Jésus, mais lui aussi s'est levé et est redevenu vivant, pas cependant comme le jeune-homme: Il est devenu "Le Vivant".

Marie, la veuve de Nazareth, qui avait perdu son fils unique, qui n'avait pas pu l'enterrer correctement, a pu être elle aussi consolée.

mercredi, septembre 03, 2008

"L'endurcissement".

La lecture de l'office de ce jour (3 septembre) est un texte du livre de Jérémie dont je relève le verset suivant:" Sachez bien cependant que, si vous me tuez, vous serez coupables - vous-mêmes, cette ville et ses habitants - du meurtre d'un innocent, car c'est vraiment le SEIGNEUR qui m'a envoyé prononcer toutes ces paroles pour que vous les entendiez."Jr 26,15.

Il me semble que Jésus aurait pu dire exactement la même chose aux grands prêtres: vous n'avez pas reconnu que c'est le Seigneur qui m'a envoyé prononcer toutes ces paroles.

Et il est alors possible de penser que comme jadis pour Pharaon , il y a eu un endurcissement du coeur et des oreilles des prêtres. Malgré toutes les oeuvres que Jésus a faites (qui sont l'inverse de celles de Moïse) ils ont refusé de voir.

Leur refus (comme jadis celui de pharaon), a permis que Jésus puisse devenir l'Agneau Pascal.

S'ils avaient reconnu en Jésus le Messie, quelle aurait été notre histoire?

Qui a endurci le coeur des prêtres? Les dessins de Dieu demeurent bien curieux...

mardi, septembre 02, 2008

"Brèves suite"

Il y a longtemps que je me pose des questions sur la messe et plus particulièrement sur les "prières eucharistiques". Il m'a fallu du temps pour accepter qu'elles ne puissent être comprises que par des initiés sauf peut-être celle pour les enfants.

Mais mon questionnement est par rapport au mot sacrifice, qui revient comme un leit-motiv. Or curieusement ce mot ne figure pas dans les évangiles sauf quand Jésus cite Isaïe. Jamais Jésus ne dit qu'il s'offre en sacrifice. Alors?

Si sacrifice est "faire du sacré" alors cela c'est une des rôles spécifiques des prêtres qui dans toutes les religions offrent des sacrifices.

Et de fait les prières qui sont dites ne sont pas celles de l'assemblée, mais celles d'un homme qui a choisi ou qui a été choisi comme prêtre et qui parle à un Dieu Père d'une manière assez étonnante, comme s'il oubliait (un peu) que le Dieu de Jésus est un Dieu d'Amour.

Quand on admet cela, on peut passer à autre chose...

petite note: je sais bien que les évangélistes parlent du "sang versé pour les multitudes" ou du "sang versé pour vous", mais Jésus n'emploie pas ce mot de sacrifice. L'important étant peut-être de "faire mémoire", c'est à dire d'actualiser la présence de Jésus ressuscité.

lundi, septembre 01, 2008

"Brèves".

Je ne sais pas si la souffrance subie par Jésus a été rédemptrice, mais je sais que Jésus est mort dans la souffrance et que ceci est ce qui se passe pour pratiquement tous les humains.

Je sais aussi que toute transformation se fait dans la violence, donc quand il s'agit d'humain dans la souffrance.

Quand Jésus dit à ses disciples: "prenez et manger, ceci est mon corps livré pour vous", le simple fait que ce pain soit "mangé" par les disciples est en soi une destruction totale, figure de ce qui va arriver au corps de Jésus par la mort. Pour que le corps renaisse (c'est vrai de l'alimentation qui devient source de vie, parce qu'il y a destruction et transformation), il doit d'une certaine manière disparaître.

lundi, août 25, 2008

"Tu es Pierre..."

C'était l'évangile de la messe d'hier.

En l'écoutant je pensais à Jonathan, le fils de Saül qui compte sur un signe pour savoir s'ils doivent attaquer ou non un poste de garde Philistin. Voici le texte: "S'ils nous disent: montez vers nous, nous monterons car Yahvé les aura livrés en nos mains: cela servira de signe" (1Sam, 14, 10).

Et je me disais que quand Jésus pose à ses disciples la question "et vous qui dites vous que je suis", peut-être ne savait-Il pas que Pierre répondrait le premier. Peut-être avait Il pensé: le premier qui répond, ce sera celui là qui sera le rocher sur lequel mon église sera construite. Peut-être a-t-Il été le premier surpris. Mais il faut bien faire avec ce que Dieu choisit et même si ce Simon a la tête dure comme comme de la pierre, sa réponse est le signe que c'est celui là qui permettra à la communauté de vivre après le Départ.

vendredi, août 01, 2008

"Délivre nous du mal"



Cette phrase est celle qui termine la "prière de Jésus" à son Père, l'exemple de la prière. Si je me réfère aux prières de l'Ancien Testament (je pense ici au livre de Tobie ), je crois que cette demande qui est la dernière est de loin la plus importante. 

Je ne pense pas que "délivre nous du mal" veuille dire, enlève le malheur ou ne laisse pas le "malin" s'insérer à l'intérieur de nous, par ruse. Je crois que le Mal est quelque chose qui est présent en permanence, qui habite en nous et en dehors de nous, qui nous rend parfois sourd et aveugle à tout ce qui nous entoure et qui nous enferme sur nous même. Le mal, nous sommes tellement dedans que nous ne le voyons pas ou plus. Quand on est habitué à vivre dans le brouillard, on ne peut plus voir le contour du monde qui nous entoure.

On dit souvent que l'enfer est pavé de bonnes intentions et je crois que cela est très vrai et dit autrement la phrase de Paul: quand il se plaint de ne pas arriver à faire le bien qu'il veut.

Nous sommes dans un monde où pour "voir" réellement ce qui se passe en nous et autour de nous, il faut que notre regard change ou qu'il soit changé par ce que je nomme l'Esprit Saint. Je ne dis pas que le bien ou le bon n'existe pas, mais en général nous nous en rendons compte, alors que le mal dans lequel nous baignons, nous ne nous en rendons même pas compte. Et cela nous rend malgré notre bonne volonté, notre désir de faire du bien, peut-être pas aveugles, mais certainement mal voyants.  

Je repensais ce matin (encore me direz vous) au texte de la genèse qui rapporte ce que l'on appelle la "chute". Le Serpent a proposé aux humains de devenir "comme des Dieux". Cela c'est notre illusion (et même quand nous essayons d'être bons, c'est un peu notre désir: être comme, imiter). Or ce qui advient  au couple primitif c'est une désillusion totale:" leurs yeux s'ouvrirent et ils virent qu'ils étaient nus". La désillusion qui va avec l'ouverture des yeux nous confronte à la perte, à la frustration, au mal. Ce n'est pas mal d'être nu, mais c'est dangereux d'être fragile, vulnérable, de se voir dans sa petite réalité mortelle. 

Quand les religions orientales parlent du moyen de sortir de la souffrance qui serait d'être sans désirs, je pense aujourd'hui qu'il s'agit davantage de sortir de l'illusion qui est source inévitable de souffrance mais qui est aussi un moteur de l'être humain. 

Le bien à l'état pur n'existe pas dans notre monde, le mal est toujours là qui masque les choses, les transforme, les défigure sans que nous en soyons réellement conscients.

Seul la présence de l'Esprit peut nous ouvrir les yeux et nous permettre de nous rendre compte combien notre vision est déficiente. Il ne s'agit pas de s'en sentir coupable, parce que cette cécité est le propre de l'humain, mais d'apprendre petit à petit, doucement, humblement  à reconnaître le mal pour pouvoir en être délivré.  




"et la lumière  luit dans les ténèbres et les ténèbres ne l'ont pas saisie" Jn1, 3

dimanche, juillet 27, 2008

"Le chant du monde".


Quand je faisais partie des guides de France, il y a avait un chant qui se terminait par "le chant du monde va s'élever" ou "va commencer".  Je ne me souviens plus des autres paroles (1). 

Pourquoi ce bout de phrase? En fait il  est venu clore des réflexions que je me faisais ce matin. Hier en effet nous assistions à concert essentiellement pour piano. Il y avait un morceau introduit par son créateur. Celui-ci  parlait de la musique comme d'une matière que l'on peut travailler pour en faire sortir des sons ou des sonorités nouvelles. Je dois reconnaître que ce qu'il sait en faire est très beau. Mais cette notion de travail sur la "matière" musique est nouvelle pour moi. 

Cela m'a donné l'image d'un tailleur de pierre ou de bois, qui est capable de voir dans la masse ce qui pourra en sortir. C'est vrai aussi pour ceux qui sont des stylistes et qui créent en fonction de la matière du tissu. Le compositeur rentrerait donc dans cette catégorie de personnes qui sont un peu des visionnaires, qui voient ou entendent ce que d'autres ne peuvent ni voir, ni entendre, ni imaginer.

Et à partir de là, m'est venu l'idée que Dieu désirait peut-être que chacun d'entre nous puisse  chanter selon une note de musique, sa note de musique et que comme  le tailleur de pierre, Il nous taille avec son ciseau pour que la note sonne juste.Et cela peut prendre beaucoup de temps, d'autant que c'est à son oreille à Lui, que ça doit sonner juste, et c'est pour cela que bien souvent nous ne comprenons rien à ce qui nous arrive, à ces épreuves qui nous tombent dessus. 

Alors peut-être à certains moments quand beaucoup d'humains ont été travaillés par le ciseau de Dieu, un chant peut s'élever, le chant de l'Univers, le chant de l'Homme, le chant de l'Esprit. Il naît alors une musique qui donne de la joie à Dieu, de la joie au monde , de la joie à nos frères humains.

C'est peut-être un rêve, mais c'est le mien aujourd'hui.

(1) réveille toi belle ma mie, réveille toi c'est le matin
réveille toi belle ma mie la nuit est loin.

La haut les eucalyptus ont parfumé le vent. 

réveille toi belle ma mie, réveille toi, c'est toi c'est le matin, 
réveille toi le chant du monde va se lever.  

mercredi, juillet 09, 2008

"Préoccupations de femmes".


Je viens de lire un livre pour moi passionnant de I. Fisher(1) consacré aux femmes des débuts de l'histoire d'Israël. J'attends le tome 2 avec une certaine impatience.  

A propos d' Agar qui meurt de soif à côté d'un puits, elle écrit: "Dieu n'enlève pas l'épreuve, mais il est dans l'épreuve."
Pour moi ce genre de phrase justifie la lecture de tout un livre, car elle m'apporte beaucoup et peut me servir d'ancrage.

Elle insiste entre autre sur les rencontres qui se font auprès des puits, rencontres importantes, que ce soit pour Jacob qui rencontre Rachel, pour le serviteur qui doit trouver une femme pour Isaac et pour Moïse qui rencontre les filles du prêtre Jéthro. 

Le travail des femmes est de puiser de l'eau, mais aussi d'abreuver le bétail et pour cela, il faut d'une part que le puits soit accessible, donc que la dalle qui le recouvre soit poussée et que les hommes aient terminé de donner à boire à leur propre bétail.Il leur faut souvent attendre, ce qui explique la surprise de Jethro quand ses filles reviennent rapidement avec leur petit bétail du puits;. 

Je savais bien que les puits n'avaient pas de margelle, mais je n'avais pas pensé qu'ils n'étaient pas forcément très accessibles, car il faut bien éviter l'évaporation. Une pierre doit être posée sur l'ouverture et retirée à certains moments de la journée. 

Je suppose que quand Jésus parle du boeuf qui est tombé dans un puits un jour de sabbat, c'est que comme tout travail est interdit ce jour là, la surface du puits est dégagée, ce qui n'est pas le cas le reste de la semaine. 

Alors, on peut bien penser qu'une des préoccupations des femmes de tous les temps, puisque puiser l'eau semble être leur tache (d'où peut-être l'intérêt le jour de la Cène de l'homme qui va puiser de l'eau, ce qui semble très étonnant dans cette culture) sera "qui va déplacer la pierre", car la pierre est lourde. 

Et là on retrouve la préoccupation des femmes au matin de Pâques: "qui nous roulera la pierre".

Sous la pierre du puits se trouve l'eau qui est source de vie, sous la pierre du tombeau se trouve le vide qui montre que la vie est là.

(1)Imtraud Fischer: des femmes avec Dieu. Cerf 2008


vendredi, juin 20, 2008

"L'olivier sauvage"



                              Un Olivier sauvage

Ceux qui connaissent les écrits de Paul     savent qu'il compare (épître aux Romains chapitre 11) les nouveaux convertis  d'origine non juive, à des rameaux d'olivier sauvage, qui seraient greffés sur le tronc de l'olivier franc qui représente Israël. Outre le fait que la technique de greffe m'a toujours parue très curieuse (mais je veux bien admettre que cela soit voulu par l'auteur), il m'a souvent semblé que le sang neuf pouvait avoir du bon... 

On peut dire aussi que Paul met en garde contre un certain orgueil, voir un certain mépris à l'encontre du peuple qui a donné naissance au Messie. 


En lisant tout à fait par hasard dans le premier livre des Rois les chapitres consacrés à la construction du Temple, j'ai trouvé quelque chose qui m'a profondément réjouie, quant au choix du bois choisi pour façonner les chérubins entre les ailes desquels la gloire de Dieu résidera.

 Si dans l'Exode on parle beaucoup du bois d'acacia (qui est un bois dur et résistant, dont on dit qu'il serait aussi le bois de la Croix), Salomon a choisi pour l'aménagement du Saint des Saints (le Débir), de façonner les chérubins entre les ailes desquels réside la Gloire de Dieu en bois d'olivier sauvage recouvert d'or. La porte du Débir est elle aussi en olivier sauvage.

Alors pourquoi de l'olivier sauvage? Bien sûr il s'agit peut-être d'une problème de traduction et je ne suis pas experte en la matière, mais dans ce bois sauvage, j'entends un bois fort, qui n'a pas été domestiqué, qui est là dans toute sa vitalité, qui n'a jamais non plus subi des coups de serpes, qui n'a pas été taillé ni entaillé. 

 Les païens sont peut-être ainsi à l'état brut, pas taillés (polis comme une pierre est polie par le joaillier) par la pratique de la loi (dont on sait quand même ce qu'en dit Paul), mais ils, deviennent à leur tour des temples du Dieu vivant. 

 Alors, vive l'olivier sauvage et ses fruits...

 

Quelques informations sur l'olivier sauvage, dont le bois se travaille en ébénisterie.




mercredi, juin 18, 2008

"L'arbre de la vie".


"Il bannit l'homme et il posta devant le jardin de l'Eden les chérubins et la flamme du glaive fulgurant pour garder le chemin de l'arbre de la vie".Gn3,24

Si je laisse fonctionner mon imaginaire en l'étoffant par ce que j'ai lu de contes et de la mythologie, je peux imaginer qu'il existe quelque part, dans un jardin un trésor, un arbre merveilleux qui donne l'immortalité. Mais l'accès est défendu par un dragon qui veille jour et nuit et qui met à mort tout être humain qui tenterait de pénétrer dans le jardin pour s'emparer de l'arbre de la vie. 

Cet arbre, il a ses racines dans la terre, ses ramures dans le ciel, sur le plan symbolique, il est enraciné dans l'humain et il va vers le divin. Ses fruits (ou ses feuilles) sont très désirables pour le mortel. Encore faut il se mettre d'accord sur ce que l'on entend par vie éternelle.  

Si je suppose que la vie éternelle est une vie de Dieu, (et non pas une vie qui ne connaît pas la mort finitude) alors s'emparer de cet arbre peut signifier devenir Dieu. Mais ce n'est pas en s'emparant de cet arbre par la force ou la violence que la vie divine sera transmise. 

Jésus, certes est censé sauver l'être humain du péché qui l'a rendu inapte à voir Dieu en prenant sur lui le péché (cf serviteur souffrant, Is 53), mais aujourd'hui, j'ai envie de me représenter Jésus comme le héros qui vient en combattant le dragon qui barre l'accès au jardin, ouvrir le chemin perdu et permettre à l'humain de devenir à l'image et à la ressemblance de Dieu. 
 
Le dragon, ce n'est pas par la force ou la violence qu'il est vaincu, parce que ces armes là, il les connaît trop bien.Il est vaincu par ce que celui qui vient se laisse brûler par le feu de l'amour et le feu de la violence et de la haine disparaît et le chemin, le passage, la Pâque peut advenir et l'homme est sauvé. 

Voilà le fruit de ma distraction pendant l'homélie de ce jour.

J'aime tant cette iumage du passage qui est rétabli ou ouvert et qui permet à l'homme d'accéder à son désir le plus profond, être non pas Dieu, mais être comme Dieu: "j'ai dit: vous êtes des fils du très haut, vous tous" Ps 82,6. 

lundi, juin 16, 2008

"Comme quoi"


Comme quoi, on n'a jamais fini de remâcher l'écriture, même des textes que l'on croit bien connaître. 

Ce matin je repensais à l 'Eden tel qu'il est décrit dans la Genèse, et je me disais que le fait qu'il y ait des anges et un glaive de feu qui barrent l'accès à l'arbre de la vie montre bien la force de l'interdiction de retourner dans ce lieu qui peut être lieu de convoitise pour l'humain. 

J'ai toujours pensé que ce lieu pouvait aussi symboliser la relation primitive avec la mère toute bonne et toute puissante, relation qui ne peut durer et dont l'enfant doit s'extraire avec un regret qui perdurera toute sa vie et le poussera (et c'est cela l'important) à explorer tout l'extérieur qui lui est donné. 

Et du coup j'ai repensé au texte dit de la tentation (peut-être pourrait-on dire de l'épreuve) et il m'a semblé (ce dont je ne m'étais jamais rendue compte, comme quoi...) que durant toute cette séquence, Adam est présent et c'est effectivement ce que dit le narrateur: 

Gn3,6.  La femme vit que l'arbre était bon à manger et séduisant à voir, et qu'il était, cet arbre, désirable pour acquérir le discernement. Elle prit de son fruit et mangea. Elle en donna aussi à son mari, qui était avec elle, et il mangea.


La position d'Adam, est assez ambigüe assez étonnante. Le héros de la Genèse, celui autour duquel tout tourne, c'est Adam. Eve est certes issue de son côté, mais j'ai l'impression qu'elle fonctionne plus en "faire valoir" que comme personne. Et peut-être que son rôle dans cette séquence était de permettre à Adam d'exister, de parler, de s'interposer, de dire non, de faire respecter le Nom de son créateur, de Le faire exister au travers de sa parole. Cela c'est peut-être le travail de l'humain (et cela aujourd'hui me plaît assez comme idée du rôle de l'humain).

Adam, s'il est présent, écoute, regarde, mais n'agit pas, ne parle pas, se tait. Il attend...

Eve mange et il ne se passe rien. Elle teste d'une certaine manière, elle est le goûteur. Et parce qu'il ne se passe rien, parce que à ce moment là, le ciel ne lui tombe pas sur la tête, alors Adam mange et c'est quand lui mange, (se remplit la bouche)  leurs yeux à tous les deux s'ouvrirent.

Gn3,7. 
Alors leurs yeux à tous deux s'ouvrirent et ils connurent qu'ils étaient nus; il cousirent des feuilles de figuier et se firent des pagnes.

L'épreuve n'a pas été réussie et les autres épreuves vont commencer, à commencer par l'exclusion de ce jardin, qui restera toujours dans le coeur de l'homme comme un lieu à reconquérir.

Ce qui me semble aussi important c'est que à partir de cet échec (désobéissance) deux sentiments apparaissent: la peur et la honte et ces deux affects signent bien souvent l'échec d'un système éducatif où l'enfant est porteur de tout le mauvais. Mais ceci est une autre histoire et j'y reviendrais peut-être.




dimanche, juin 01, 2008

"Bâtir une maison sur le roc ou sur le sable" Mt 7,21-27

J'aime bien cet évangile, surtout la fin qui pour moi, fait un peu ritournelle et qui se retient bien. 

"Tout homme qui écoute ce que je vous dis là et le met en pratique est comparable à un homme prévoyant qui a bâti sa maison sur le roc.
La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, la tempête a soufflé et s'est abattue sur cette maison ; la maison ne s'est pas écroulée, car elle était fondée sur le roc.
Et tout homme qui écoute ce que je vous dis là sans le mettre en pratique est comparable à un
homme insensé qui a bâti sa maison sur le sable.
La pluie est tombée, les torrents ont dévalé, la tempête a soufflé, elle a secoué cette maison ; la maison s'est écroulée, et son écroulement a été complet."»


Ces versets m'ont toujours fait penser à l'histoire des trois petits cochons. La morale de ce conte étant que pour se défendre contre le souffle du loup (qui symbolise le mal, la violence, la destruction la dévoration), il faut avoir pris la "peine" de construire une vraie maison, une maison bâtie sur le roc et non sur le sable. Et pour avoir cette maison là, il faut certes prévoir que la tempête peut arriver, mais surtout dépenser du temps et de l'argent., c'est à dire que "pratiquer", mettre dans sa vie ce que Jésus demande, si humble et si doux soit-Il n'est pas facile. Isaïe reproche au peuple de "fatiguer" Doei, mais nous, il faut bien nous fatiguer, même si nous avons la force de l'Esprit Saint en nous. 

Mais je me disais aussi, que la maison peut certes s'entendre comme un contenant, mais aussi dans la dimension temporelle:  (la maison de David par exemple). Pour qu'une maison tienne, (et cela n'a pas été vraiment le cas de lignée davidique) il est indispensable de s'appuyer sur les commandements et les préceptes et de ne pas se détourner du Dieu Unique. Construire sa maison sur le roc, c'est pratiquer ce que Jésus vient de dire dans les deux chapitres précédents. D'une certaine manière c'est aussi faire entrer le psaume 119 dans sa vie. 

On peut évoquer les psaumes qui comparent Dieu à un rocher sur lequel on peut et doit d'appuyer. Cela c'est un des thèmes récurrent des psaumes et des livres de Sagesse: celui qui s'appuye sur YHWH, celui là se maintiendra ( je parodie un peu la phrase de Isaïe 6,9: si vous ne me tenez pas, vous ne vous maintiendrez pas"). 


Mais ce qui m'a aussi frappée, mais vraiment dans l'après coup, ce sont les mots de prévoyant et de insensé qui sont les mots utilisés par un autre évangéliste  (Luc) pour la parabole des vierges sages et des vierges folles. Pour entrer dans le royaume, car c'est bien cela la fin de la parabole, il faut allumer sa lampe à la parole, lui donner de quoi se rallumer et ne pas croire que appeler Jésus par son nom sera suffisant. "Il ne suffit pas de me dire Seigneur Seigneur pour être sauvé mais de faire la volonté de mon Père". 

samedi, mai 24, 2008

Une histoire de petit chaperon rouge: 2Sam 13.


Il était un fois un fils de roi, qui se nommait Amnon (Fidèle). Il était l'aîné des fils du roi David. Sa mère était Ahinoam de Yisréel. Un de ses demi-frères, Absalon avait pour mère une princesse, ce qui n'était pas son cas et il espérait  bien, maintenant que la royauté de son père semblait affermie et qu'il avait son propre palais à Jérusalem, faire un beau mariage, un mariage princier.

Seulement, dans le palais de son père, il y avait tous les enfants du roi et en particulier la soeur d'Absalon, la belle Tamar qui était la petite fille du roi de Geshur. 

Et Amnon en était devenu amoureux fou. Il la voulait, n'osait pas le dire et en perdait l'appétit. Il se mourait d'amour pour elle. Des amoureux transis, nous en connaissons tous. Mais il ne peut faire comme son père le roi David avec Betsabée. Lui ne peut l'envoyer chercher pour la connaître. 

Alors cela le travaille et il en perd le sommeil et l'appétit. 

Un de amis (qui semble plutôt être un oncle) cherche à comprendre ce qui se passe et lui conseille de faire le malade (comme le loup de la fable qui se transforme en grand-mère affaiblie et malade), et de demander au roi David que sa soeur vienne chez lui pour lui donner à manger. 

Un ordre du roi ne se transgresse pas, de même que le petit chaperon rouge ne met pas en question l'ordre de sa maman d'aller apporter de quoi manger à la grand-mère, même s'il faut pour cela traverser une forêt dangereuse.

Et voilà Tamar qui va chez son frère, avec ce qu'il faut pour faire des gâteaux, qui les prépare devant lui, les fait cuire et le sert. Mais ce n'est pas cette nourriture là qui intéresse le jeune homme. Ce qu'il veut c'est comme le loup: croquer du corps. 

Alors il lui demande de passer dans sa chambre (loin du regard des autres) ce qu'elle fait (peut-être que cela elle aurait du le refuser) et ce n'est pas les gâteaux qui sont saisis, mais la jeune femme (et le loup se jeta sur elle et la mangea). C'est elle qui est consommée. 

Malheureusement il n'y a pas de chasseurs pour ouvrir le ventre du loup (il y en aura un mais ce sera Absalon et il ne rendra pas à sa soeur l'honneur volé). Et l'histoire finit mal pour le petit chaperon rouge, d'autant que par un mécanisme psychologique elle devient objet de dégoût: Amnon n'en veut plus. Il refuse de l' épouser (ce qui aurait permis un "avenir" à cette jeune fille). 

Ce retournement m'a toujours paru très finement observé. Ce qui compte pour Amnon c'est de posséder un objet, mais une fois l'objet possédé, il perd tout son attrait et il devient mauvais, et menaçant car il va pouvoir révéler ce qui a été fait. De ce fait il devient impératif de le faire disparaître (de le tuer).  L'objet du désir devient objet de répulsion car il devient porteur de toute la violence interne d'Amnon. 

Que peut faire une femme face à un homme désirant qui de plus va la rendre responsable d'avoir suscité son désir?  Et qui du coup va se mettre à la haïr pour cela? 

Mais si on reprend la "geste davidique" racontée dans le deuxième livre de Samuel, de David, cet épisode qui conduira à la mort d'Amnon, puis à celle d'Absalon frère de Tamar est la conséquence de la convoitise de David pour la femme de Urie le hittite et de la mise à mort de ce dernier (même si David ne le fait pas de sa propre main). Car il lui a été signifié par le prophète Natan que même si la maison de David subsistera à jamais, l'épée ne se détournera plus jamais de sa maison (2SAM12,10). 

Il y a donc une logique qui n'est pas forcément celle qui nous plait: si YHWH fait mourir l'enfant de Bethsabée, pourquoi faut-il encore atteindre toute la dynastie? Mais la mort de cet enfant et les luttes entre les fils permettront l'avènement de Salomon, l'enfant remplacement...  

Ce texte, nous l'avons lu en groupe et c'est en le lisant avec d'autres que cette analogie avec les contes de Perrault (repris par les frères Grimm) m'est apparue, comme quoi la bible est un livre plein de surprises.