mardi, mars 04, 2008

"L'aveugle-né" Jn9,1-40

J'ai écouté avec beaucoup d'attention avant-hier dimanche ce chapitre de l'évangile de Jean (fort bien lu ce qui ne gâte rien) et j'ai été un peu surprise par l'anonymat de cet homme qui est d'une certaine manière réduit à son handicap, à sa pathologie . Dans les synoptiques on connaît des noms: Zachée, Bartimée l'aveugle de Jéricho, Lévi. Pourtant chez Jean cet anonymat est fréquent, je pense à la samaritaine, à l'officier qui demande une guérison, à la femme adultère.

Et ce qui m'a le plus étonnée c'est que ce mendiant qui est assis là ne demande rien, il est le signe pour que soit manifestée la gloire de Dieu. Il est une sorte de vecteur et ce rôle de vecteur il l'assumera parfaitement.Ne va-t-il pas essayer d'ouvrir les yeux de ces aveugles que sont parfois les pharisiens?

Je pensais aussi en arrière plan à la phrase de la Genèse: "Leurs yeux s'ouvrirent et ils virent qu'ils étaient nus", ce qui veut dire qu'il y a peut-être voir et voir...

Il m'a semblé que dans les "signes" retenus par Jean il y a cette constante: une guérison qui se fait en deux temps (va te laver pour l'aveugle, rentre chez toi pour l'officier qui demande une guérison, et même l'eau changée en vin goûtée par le majordome, rentre chez toi et ne pèche plus pour la femme adultère). Le paralytique de la "belle-porte" manifeste sa guérison en se levant, mais aurait-il été guéri s'il ne s'était pas chargé de son grabat comme le lui demande Jésus?  

Et cela m'a beaucoup interpellée: la confiance n'est pas seulement dans le fait de demander en sachant que l'on va être entendu, mais dans cet "entre deux" qui est entre la demande et la réalisation et durant lequel on a quelque chose à faire, on est actif, donc d'une certaine manière pour moi, co-créateur de la guérison. Il peut y avoir des signes que l'on refuse de voir dans cet entre deux, et de ce fait on imagine que l'on n'est pas exaucé alors qu'on n'a pas entendu ce qui était demandé. 

Si j'avais été cet aveugle, si un inconnu m'avait mis quelque chose sur les yeux, si on m'avait dit que ce quelque chose était un mélange de salive et de boue, j'aurais été dégoûtée, je me serais frotté le visage, mais je ne pense pas que je serais allée me laver en transgressant par dessus le marché la loi du jour du sabbat. Je serais restée à ma place et la guérison n'aurait pas eu lieu; j'aurais continuer à mendier et peut-être à pleurer sur moi: j'aurais laissé passer ma chance.

Heureusement que cet homme dont nous ne connaissons même pas le nom, et qui est un peu le prototype de ce que nous sommes -des aveugles dont les yeux ne sont pas ouverts- a été capable de faire confiance.

Sa guérison lui a permis de reconnaître en "l'homme" Jésus  (qui avait disparu à son regard), Celui que les yeux ne peuvent pas voir mais seulement contempler.   



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