lundi, novembre 24, 2008

"Si le christ n'est pas ressuscité" 1Cor 15, 15



"Et si Christ n'est pas ressuscité, notre prédication est vide, et vide aussi votre foi".

Nous connaissons tous ce texte de Paul qui va jusqu'à dire que si la résurrection n'a pas eu lieu,nous sommes les plus malheureux des hommes.

Il semble bien évident que si Christ n'est pas ressuscité, il n'y a pas de don de l'Esprit, et nous restons dans les ténèbres.

Mais ayant ces derniers temps essayé de réfléchir sur la notion de réconciliation (Paul ne parle-t-il pas pour lui-même d'un ministère de réconciliation) je me suis demandée si d'une certaine manière la résurrection ne peut pas être entendue comme le signe que désormais entre L'homme et son créateur, la paix est faite par le sang de la croix. Si la résurrection n'a pas eu lieu, alors Jésus a échoué dans son oeuvre de Salut, oeuvre qui pour moi est donner la Vie, faire des humains des vivants.

Je vais essayer de m'expliquer.

Si comme l'explique Paul dans le début de l'épître aux Romains, les hommes par leur inconduite et leur incapacité à reconnaître le Dieu Unique, ont provoqué la colère de celui-ci, il y a eu rupture de l'alliance proposée et risque de mort pour l'humain.

L'histoire d'Israël prouvant que chaque fois qu'il y a détournement (rupture de l'alliance proposée par Dieu), la colère de Dieu se manifeste sous forme de désastres qui semblent aller jusqu'à la disparition du peuple, qui perd sa ville et son temple.

Quand il y a rupture d'alliance, qui faut-il faire pour pour la rétablir?

Il y a une réponse donnée dans le dernier chant du serviteur (Isaîe 53:,4-5:En fait, ce sont nos souffrances qu'il a portées,ce sont nos douleurs qu'il a supportées,et nous, nous l'estimions touché,frappé par Dieu et humilié.
5 Mais lui, il était déshonoré à cause de nos révoltes,broyé à cause de nos perversités :la sanction, gage de paix pour nous, était sur lui,et dans ses plaies se trouvait notre guérison.

Je reviens à mon schéma de réconciliation.

Il ya donc rupture de l'alliance ou de la relation. La personne qui a rompu l'alliance ou la relation se rend compte qu'elle risque gros à avoir posé ce geste ou cet acte, ou cette parole et désire reprendre la relation (voir obtenir la protection, ce qui est montré dans la parabole de l'enfant prodigue). Pour cela il doit reconnaître explicitement sa faute (repentance?), demander le pardon. Celui ci ne pouvant être obtenu qu'après un acte qui vient en quelque sorte faire réparation. C'est cet acte qje Jésus suir la croix (agneau pascal) à posé comme signe de redemption (rachat).

La réparation ayant été acceptée, (sacrifice de la nouvelle alliance en son sang), la relation est ici non pas restaurée, mais transfigurée, et cela est manifesté dans la résurrection.

Je veux dire que le signe donné (qui renvoie quand même à ce que Jésus dit du signe de Jonas: redevenir vivant après trois jours passés dans le ventre de la baleine) montre que en Jésus, premier né de toute la création, la Vie est redonnée à l'humanité en sa plénitude, même s'il ne s'agit que d'un devenir ou d'un Ad Venir.

La résurrection est donc le signe que par la mort de Jésus sur la croix, le Père en acceptant ce signe de soumission et surtout d'amour inconditionnel pour l'humanité), redonne la vie qui semblait avoir été perdue dès que l'humain s'était détourné de la parole de son créateur.

Mais la Vie qui est ainsi donnée, est une vie autre, une vie qui n'a rien à voir avec le fait de ne pas connaître la mort, une vie qui nous permettra peut-être d'être amoureux de Dieu et amoureux de nos frères.

Alors oui si le Christ n'est pas ressuscité, oui notre foi est vaine est nous sommes les plus malheureux des hommes. Mais s'Il l'est, alors à nous la Vie dans sa plénitude.

samedi, novembre 15, 2008

Jacob, Moïse, Abraham : "Figures d'ombre"

Chaque fois que je lis en Gn32,24 le combat de Jacob contre cet inconnu qui vient l’assaillir à Yabbok, pendant la nuit qui le sépare de la rencontre avec son frère jumeau dont il a usurpé la place (droit d’aînesse et bénédiction), je me dis qu’il s’agit peut-être d’un combat contre l’Ange de Dieu, mais peut-être aussi du combat contre la figure d’ombre (celle qui cherche à détruire et qui a détruit) qui est en lui.

Ces figures d’ombre nous en portons tous et nous avons tendance à les fuir de peur qu’elles ne nous mettent à mal. Pourtant, tant qu’elles n’ont pas été affrontées elles restent toutes puissantes.

Jacob est né en tenant le talon de son frère, en s’y accrochant d’une certaine manière, comme s’il n’était pas dissocié de ce frère. Qui est-il ce bébé (qui sera le préféré de la mère) et qui s’arrangera pour prendre par la ruse (la force des faibles) les attributs de son frère ? Qui est-il cet homme qui prend la fuite et qui se fait berner par Laban et même par ses femmes? Jacob n’est pas un fort, il est un faible (comme nous tous).

Mais cette nuit là, il n’a pas le choix ; c’est lui ou l’autre, comme demain ce sera lui ou son frère qui sera la vainqueur. Alors là, il se bat. Il sort blessé de cette rencontre, mais il pourra affronter son frère, maintenant qu’il n’usurpe plus une identité qui n’est pas sienne (une des signification de ce prénom est usurpateur) et surtout il a reçu un nom nouveau à défaut d’une bénédiction. Or ce nom Israël qui est le nom générique des 12 tribus fait de lui un des pères fondateurs du peuple avec le quel Dieu a fait alliance. Quant au nom reçu Israël qui veut dire fort avec Dieu ou contre Dieu, je me demande si le contre ne doit être entendu dans le sens de tout proche, qui est tout contre, mais maintenant il est fort, la faiblesse est partie.
.
Si pour Jacob, il est relativement facile de comprendre ainsi ce combat, il me semble que ces mêmes combats se retrouve avec Moïse et Abraham.

En Ex4,34 l’auteur rapporte un épisode très étrange où l’Ange de Yahvé décide d’attaquer Moïse pour le tuer. Pourtant Moïse vient enfin de se décider à partir pour affronter le pharaon, ce qui ne lui sourit guère, malgré ce que Yahvé lui a dit, montré, et promis. Sa femme circoncit leur fils et répand le sang sur les pieds de Moïse ce qui fait de lui un père de sang.. Maintenant il est bien possible que le mot « pied » soit un euphémisme. Mais du sang, Moïse en a sur les mains si j’ose parler ainsi. N’est-il pas un assassin qui a fuit son pays pour ne par payer le crime dont il s’est rendu coupable ?.

Peut-être que cette peur d’être mis à mort pour cela le taraude encore, car y a t-il comme cela est dit dans l’alliance noachique un prix du sang à payer pour que la dette : soit abolie . Gn9,6 : « qui verse le sang de l’homme, par l’homme aura son sang versé ». Tant que le sang n’est pas versé, la figure d’ombre demeure et n’accepte de partir que lorsque la faute est reconnue et le prix payé, même si le prix est payé par le fils.

Il est certain qu’après cet épisode, le Moïse que demandait à Dieu d’en trouver un autre que lui pour faire sortir le peuple de l’esclavage, va devenir capable se rencontrer pharaon, de lui tenir tête et de devenir un Père du peuple choisi.

Quant à Abraham, le combat qu’il livre est celui qui se passe lors du « non sacrifice » d’Isaac. Or si on se rappelle l’histoire de ce patriarche, il a condamné son fils Ismaël à une mort certaine en l’envoyant avec sa mère dans le désert, avec une cruche d’eau et une miche de pain.. Nous, nous savons que l’Ange du Seigneur n’a pas permis la mort de ce fils, mais Abraham lui ne le sait pas. Alors on peut penser qu’il y a un prix du sang à payer. D’autant que pour conserver sa propre vie, Abraham est prêt à bien des compromissions, comme de se faire passer par deux fois pour le frère de sa femme. Comment Dieu va t il lui permettre de changer, de se déprendre de cette figure d’ombre ?

Car demander l’immolation de son fils, c’est le propre des Dieux cananéens comme ceux du roi de Moab. Et il n’est pas certain que Abraham qui vient quand même de Ur où on adorait des dieux mésopotamiens ait été capable de choisir YHWH comme l’unique. Alors il lui est demande de sacrifier son unique fils, pour que YhWH devienne son unique et que la peur ne soit plus en lui.

Dans ce texte le passage du nom Elohim à YHWH, montre bien que ce dont Abraham doit se déprendre c’est d’une certaine idolâtrie:

Gn9-10 : « Ils viennent au lieu que lui a dit l’Elohim, Abraham bâtit l’autel et prépare les bois. Il ligote son fils Isaac et le met sur l’autel au-dessus des bois. 10 Abraham lance la main et saisit le coutelas pour égorger son fils. 11 Le messager de YHWH crie vers lui des ciels et dit : Abraham, Abraham : Il dit me voici ».

Les dieux cananéens demandaient des sacrifices humains et pour Abraham, son Dieu à lui rentrait dans la même catégorie. Pour en faire son allié, il semble ne pas hésiter à obéir de peur de l’offenser et de disparaître lui. Or là, il s’agit aussi de détruire en lui une fausse image de Dieu, Dieu ne demande pas des êtres humains en sacrifice, mais une relation de confiance. Ce qui caractérise peut-être Abraham c’est même si c’est parfois tout à son honneur une certaine passivité. Je veux dire qu’il ne se révolte pas quand Sarah lui demande de mettre Agar et Ismaël dehors, il invente des moyens pour ne pas être mis à mort par Pharaon ou Abimelek en faisant passer sa femme pour sa sœur. En permettant à Abraham de ne pas immoler son fils, YHWH lui permet de devenir un homme libéré.

Quand Abraham retourne chez lui, il n’est pas fait mention d’Isaac. Peut-être que par ce combat une défusion des liens père fils a-t-elle pu se faire, le fils n’est pas l’objet du père.

De tels combats qui sont de durs combats car il s’agit de sortir de la peur et de l’esclavage que cette image d’ombre a sur nous, nous sont certainement proposés, mais sommes nous capables de les affronter ?

mercredi, novembre 12, 2008

"Qui mange ma chair et boit mon sang.." Jn 6, 56

"Qui mange ma chair et boit mon sang, demeure en moi et moi en lu"i. Jn6, 56

Je pense n’avoir pas fini de buter sur ce verset qui depuis fort longtemps me pose question. J’ai souvent pensé que si j’avais écouté ce discours sur le pain de vie, j’aurais fait comme la plus part des juifs présents, je serais partie (peut-être même en me bouchant les oreilles).

Il me semble avoir pourtant ces jours derniers, trouvé quelques éléments qui permettent de comprendre un peu mieux.

Il y a le paradoxe de la phrase. Quand nous ingérons de la nourriture, nous ne nous transformons pas en elle, elle se transforme en nous, elle nous donne l’énergie dont nous avons besoin pour vivre. Que communier au corps et au sang nous donne une énergie autre, oui, mais comment peut-on devenir l’Autre ?

Si le corps et le sang de Jésus nous permettent de nous transformer (ou de nous laisser transformer) en Lui, c’est qu’un processus autre est l’œuvre, comme celui qui permet de renaître d’en haut. Ces inversions du « naturel » sont fréquentes dans l’Evangile de Jean et difficiles à comprendre, même à entendre .Or quand Jésus propose ces inversions, c’est qu’Il se présente comme le Tout Autre, comme le Fils de Dieu. On passe de l’ordre charnel à l’ordre spirituel et les règles de dernier peuvent être bien différentes de celles qui régissent notre univers.

Peut-être est-il possible de dire que lorsque Jean l’évangéliste fait prononcer à Jésus de telles phrases, c’est qu’il veut nous faire comprendre que Jésus se situe dans sa filiation et avec une autre logique. Dans cette hypothèse, ltout le discours sur le pain de vie devient plus facile à entendre.

Par ailleurs si comme le fait remarquer Marie Balmary dans son livre « Abraham ou le sacrifice interdit » chaque fois que dans la Bible (en particulier dans la Genèse) qu’il y a séparation des éléments, c’est qu’il y a création, il est possible de penser que lorsque Jésus le soir de la Cène donne le pain comme son corps et le vin comme son sang, il y a création. D’une certaine manière le nouveau corps de Jésus (celui d’après la résurrection) est déjà présent et de ce fait notre recréation à nous.
Cette séparation en corps enveloppe (qui est en fait ce qui reste de l’homme après son décès, quand le souffle est parti) et sang (identité de la personne, essence, vie) donne lieu à une création. La mort annoncée, réalisée devient vie.

De même que nous participons à cette mort, car en mangeant et en buvant nous participons à la destruction, nous sommes vivifiés et transformés par la Vie qui nous est alors donnée.

Actuellement je pourrais dire que manger ce qui fait figure de chair à savoir le pain et boire ce qui fait figure de sang à savoir le vin permet d’une part de voir en Jésus l’agneau pascal dont on a mangé la chair rôtie le jour de la Pâques et dont le sang badigeonné sur les portes a permis le peuple d’échapper à la mort des premiers nés. Il y a bien là une notion de rédemption de salut : la mort sauve.

Mais surtout et d'autre part la séparation de corps enveloppe et du sang ne conduit plus à la mort mais à la vie. Chaque fois que nous participons à ce repas, c’est la Vie qui se manifeste en nous et qui nous permet petit à petit de nous identifier (devenir comme) à Jésus. Et là c’est bien Lui qui demeure en moi.Il devient alors possible de dire avec Paul, « Ce n’est plus moi qui vit, c’est le Christ qui vit en moi ».

mercredi, novembre 05, 2008

Peut-on chasser un Esprit de haine?

Le prêtre qui commentait il y a quelques jours le passage de Luc (Lc12,31-34) où les pharisiens mettent Jésus en garde contre Hérode, a centré une partie de son homélie sur la mission que se donne Jésus : chasser les démons.

Il a insisté sur le fait qu’il n’était pas question de voir le diable partout, mais de ne pas oublier que le démon existe et travaille insidieusement en nous.

Il a rapporté l’exemple suivant. Une personne, lors d’un temps de réconciliation demande à le voir et lui explique qu’elle a éprouvé une haine très violente à son égard et ce pendant plusieurs mois. A ce moment là en effet, le prêtre avait répondu par un non à une demande. Elle même a été surprise par la violence de sa réaction. Il lui a fallu tout ce laps de temps pour pouvoir en parler et se réconcilier.

Il est alors expliqué à cette personne que cette haine est liée au fait qu’elle a laissé en elle entrer le mauvais, ce qui peut être signifié par « l’esprit de haine ». Et comme Jésus a pour vocation de chasser les mauvais démons, il est alors possible de lui demander de chasser ce démon, (je suppose par une prière dite de délivrance).

Il a cependant été dit que cette manifestation est liée à un événement du passé qui a provoqué en son temps une blessure, donc une souffrance très importante, mais de cette blessure il n’est pas question.

Or pour moi, en tant que psy, c’est cela qui m’interpelle. Le non a réactivé une blessure et la haine s’adresse autant à l’événement récent qu’à l’événement passé. Il s’agit donc pour moi de dissocier ces deux faits. Le prêtre n’étant que le vecteur ou l’objet du transfert négatif de la personne.

Que ce « non « ait permis à cette personne, par le bais de sa colère actuelle, de se rendre compte à quel point la haine en tant que telle était quelque chose de mauvais, dont il fallait autant que faire se peut, se débarrasser, car c’est quelque chose de très toxique, cela me semble très positif.

Mais je ne suis pas sûre que prier pour mettre ce mauvais esprit à la porte soit suffisant. Certes je comprends la démarche proposée dans un cadre spirituel, mais elle me dérange.

La haine est toujours pour moi liée à une très grande souffrance (il y a eu un objet aimé qui vous a fait défaut à un moment donné et l’amour s’est transformé en haine, avec un désir de destruction. Ou autrement dit: si je ne peux avoir l’objet d’amour, personne ne l’aura et je le détruirai.

Il me semble qu’il aurait fallu déjà parler du contenu de cette « haine », parce que après tout il peut aussi s’agir non pas de haine, mais de « colère ». et surtout de violence? Et s’il s’agit de cela, alors oui, je crois qu’une prière est indispensable car la violence est ce qu’il y a d’animal en nous et qui bloque dans notre chemin vers notre humanisation.

La violence est en nous, présente, et elle ne nous est pas tombée dessus comme de l’extérieur. Elle est interne et non externe.

Or c’est aussi cela qui me dérange dans la notion d’Esprit de haine que finalement je trouve très culpabilisante. On pourrait penser que si cette personne a laissé la porte s’ouvrir à ce mauvais esprit, quelque part c’est de sa faute. Or si elle a été profondément blessée dans son enfance par quelqu’un de proche, elle a été victime et non agresseur.

Il y a un lien pathogène qu’il faut dénouer.

Ainsi il ne s’agit pas d’expulser un démon, mais de guérir une souffrance intense. Cette guérison n’est pas magique. Certes si Jésus le souhaite il peut guérir, mais le chemin le plus normal est celui du lâcher-prise qui permet de se rendre compte à quel point ce lien est mauvais pour la personne qui l’entretient à son insu puis de la compassion et enfin du pardon.

Pour pouvoir pardonner, je pense qu’il est nécessaire d’avoir vécu en soi même l’expérience du torrent d’amour déversé par le Seigneur qui balaye et purifie. C’est ce même torrent d’amour qui est présent en soi, qui peut alors se déverser vers l’autre et permettre le pardon.

Et prier pour que cet amour vienne envahir la personne en souffrance me semble préférable à une prière pour chasser un démon.