vendredi, janvier 30, 2009

"Tu fais pleurer l'bon Dieu la la"



Le titre de ce billet vient du refrain d'une chanson: "pleure donc, pleure donc pas comme ça tu fais pleurer le bon Dieu". Pourquoi ce titre? Une réponse possible est que souvent, nous entendons affirmer que notre péché attristerait Dieu au point de le faire pleurer.

Cet anthropomorphisme me dérange. J'ai, je crois déjà écrit, que le jour du vendredi saint, au moment où Jésus "remet son esprit" mais le répand aussi, il y a eu non une tristesse et des larmes dans l 'Au-delà, mais une grande Joie, parce que Jésus en acceptant de mourir comme cela, ouvrait la voie à toute l'humanité qui pouvait désormais comprendre ce que c'est que d'aimer.

Après tout, Jésus en tant qu'être humain aurait pu faillir, et il ne l'a pas fait. Il aurait pu prendre la fuite et laisser ses disciples trinquer à sa place, il ne l'a pas fait. Il s'est laissé conduire comme une brebis à l'abattoir et pour le peuple qui vivait à ce moment là, le symbolisme de l'agneau était facile à comprendre. J'ai trouvé dans l'épître aux hébreux une phrase que j'aime: "Or, quand le pardon est accordé, on n'offre plus le sacrifice pour les péchés". He 4, 36. La mort de Jésus procure de manière définitive la reprise de la relation entre Dieu et l'humanité crée par Lui.

Mais la notion de pardon renvoie à la notion de péché, et le péché semble provoquer chez le Dieu créateur, une colère violente (et pas des larmes). Sa tendance est de détruire cette espèce "rebelle" à la nuque raide.

Si le mot de réconciliation apparaît si souvent dans la Bible, c'est que le péché provoque la colère de Dieu et déclenche une punition qui ne lève la faute que si elle est reconnue comme la cause du désastre. L'ampleur du désastre vécu soit individuellement soit collectivement, prend le sens de la manifestation du "dégoût" de Dieu. Elle met alors en route la conversion: changer de cap, pour choisir la vie.

Mais faire pleurer Dieu qu'est ce que cela veut dire? Le Dieu qui dit: Is 45, 7 "Je façonne la lumière et je crée les ténèbres, je fais la paix et je crée le malheur; c'est moi, le SEIGNEUR (YHWH), qui fais tout cela", j'ai du mal à me le représenter comme une maman attristée par le comportement de son ou de ses enfants. La souffrance "morale", celle qui fait monter des larmes, est une atteinte, une blessure, une modification dans un sens négatif, et cela pour moi, ne va pas avec la représentation du signifiant Dieu.

Je veux dire que que si j'ai le pouvoir de faire "pleurer" le Tout Puissant, le Créateur des Univers (comme on le chante) alors je me demande un peu qui est Celui là.

A la limite, il y a une sorte de chantage: si tu es gentil (obéissant) Dieu est content, comme tes parents le sont, mais si tu es méchant et si tu n'obéis pas, alors tu vas les rendre très malheureux et tu risques gros. Et si tu fais pleurer ta mère, à cause de ton inconduite, alors tu manques au commandement qui te dis "d'honorer ton père et ta mère" et tu vas te retrouver en enfer.

Pour Jésus qui a pleuré sur cette terre, les choses pourraient être différentes, sauf que si Jésus a connu la tristesse, la fatigue, la mort, aujourd'hui Il est aujourd'hui dans la gloire du Père et même si nous nous le représentons comme un homme de 33 ans, dans la force de l'âge, même si la la veille de sa mort il a versé des larmes de sang, ce Jésus là est le ressuscité, le Vivant.

Et pourtant, je peux comprendre avec mon vécu d'humain, ce qu'un Dieu d'Amour peut ressentir, mais sans que cela ne le mine. Lorsque l'on est parent et que l'on pense avoir fait tout ce qui est possible pour que son enfant ait le maximum de chances de réussir sa vie et qu'il ne le fait pas, alors il se passe quelque chose chez ce parent qui pour moi pourrait être proche de ce Dieu peut éprouver quand nous n'utilisons pas toutes nos potentialités.

Dans notre culture, quand un parent vit cette sorte d'échec, il peut connaître une grande tristesse, mais s'il est un parent, jamais il ne reniera son fils ou sa fille, et toujours il respectera sa liberté et toujours il attendra qu'il ou elle change. Peut-être même se remettra t il en question? D'une certaine manière je suis en train de décrire le comportement du père du fils prodige de l'évangile de Luc.

Cet homme là ne s'oppose au désir de son fils; il accepte de la laisser partir. Il l'aperçoit de loin quand le fils rentre, et en fait avant même qu'il ait prononcé une phrase apprise (je ne suis plus digne d'être appelé ton fils) il est ému, le prend dans ses bras et le réintègre dans la maison.


Je pense que lorsque Dieu regarde les créatures qu'il a finalement dotées de beaucoup de capacités, il a de bonnes raisons de trouver qu'il s'est planté. Mais comment un Dieu qui se dit amoureux de sa création, comment un Dieu qui envoyé son propre Fils pour nous indiquer le chemin pour aller vers Lui, pourrait-il réellement désirer la mort de l'espèce humaine? Cela ne colle pas, en tous les cas avec la représentation que j'ai aujourd'hui de Dieu.

Ce que je veux dire c'est que je peux m'émouvoir d'avoir comme Dieu un Père qui donne sans se lasser, qui laisse libre de avec ces dons ou de ne pas faire, et qui attend que le chemin s'ouvre.

Je peux quand je regarde ma vie, faire une sorte de bilan de ce que j'ai reçu, et convenir que ce j'ai donné n'est peut-être pas à la hauteur des dons que j'ai reçu et à ce moment là me tourner vers mon Dieu Père, et reconnaître ce négatif. Mais imaginer qu'Il puisse pleurer, NON.

Je dirai même que si je reconnais à la fois Sa richesse et ma pauvreté, Ses bras me sont ouverts. Et peut-être que moi, je peux verser des larmes de bonheur, car cela existe aussi.

Je peux remercier pour ce que j'ai reçu je peux reconnaître que je n'ai pas fait, et je peux m'extasier plus que m'excuser sur la fidélité de ce Dieu qui ne se détourne pas, qui reste présent.

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