dimanche, décembre 26, 2010

"Ceci est mon sang versé pour vous"Luc 22, 20

Quand le soir de la Cène Jésus dit: "ceci est ma chair, ceci est mon sang" cela évoque la phrase qu'Il dit à Pierre:Mt16, 19 "ce n'est ni la chair ni le sang qui te l'on révélé mais mon Père qui est dans les cieux." En d'autres termes Jésus se définit pleinement comme homme.

Quand un soldat meurt pendant une guerre, on dit qu'il a donné son sang pour sauver sa terre. Quand Jésus dit "ceci est mon sang versé pour vous et pour la multitude" il fait comprendre qu'il va mourir dans un combat contre le mal et que ce sang versé va donner à chacun de nous la liberté. Ce combat perdure encore, c'est pourquoi cette phrase s'adresse aujourd'hui à chacun de nous.

C'est pour moi que ce sang a été versé. Ce qui veut dire que oui j'ai du prix aux yeux de Dieu. Cela me confère une réelle dignité, car si Dieu (Jésus= Dieu sauve)  accepte de mourir pour "je", c'est que j'en vaux la peine.

La mort de Jésus (puis-je dire au champ d'honneur) rend la liberté (ou permet d'accéder) à la vie dans l'Esprit et c'est cela la renaissance. Elle me permet d'accéder au divin qui est enfoui en moi et de le vivifier pour qu'il se réalise dans l'Amour.

Noël 2010.

vendredi, décembre 17, 2010

Pouvoir dire "Abba" à Dieu



Il y a un certain nombre d'années j'ai écrit un texte qui s'intitulait: "Quand il est impossible de dire père à Dieu": http://www.portstnicolas.net/Quand-il-est-impossible-de-dire.html. Il m'arrive encore bien souvent de ne pas pouvoir donner ce nom à Dieu  et je connais beaucoup de personnes qui comme moi en sont incapables.

J'en connais d'autres qui ont une relation avec leur "Papa céleste", qui s'imaginent pouvoir aller dans ses bras, être sur ses genoux. Cela me pose question. Moi j'en suis incapable, car malgré tout Dieu est pour moi le Tout Autre, Celui qu'on ne peut posséder.

La prière du "Notre Père", que nous disons à chaque eucharistie, est précédée d'un texte qui si nous l'écoutons montre bien que dire "Père" au créateur des Univers n'est pas si simple.

Les mots utilisés sont:
- "Comme nous l'avons appris du Sauveur" (ce qui fait référence aux évangiles de Matthieu et Luc qui sont pourtant assez différents),
- "Et selon son commandement": là je me demande d'où sort cette phrase, car le seul commandement donné par Jésus est dans l'évangile de Jean: "Aimez vous les uns les autres comme je vous ai aimés..."
Maintenant si la phrase utilisée par Jésus: "Quand vous priez, dites..." est un commandement, je trouve que c'est une manière curieuse d'interpréter cette phrase.
- "Nous osons dire": "oser" montre qu'il faut un certain culot et que d'une certaine manière on ne sait pas trop comment le Dieu tout puissant va réagir....

St Paul écrit dans la lettre aux Romains (8,15): "Aussi bien n'avez vous pas reçu un esprit d'esclaves pour retomber dans la crainte, vous avez reçu un esprit de fils adoptifs qui nous fait crier Abba! Père".
Il faut bien admettre que nous avons besoin de l'aide de l'Esprit donné par Jésus, cet esprit qui fait de nous ses frères pour pouvoir ainsi nommer Dieu. C'est bien "l'esprit qui vient au secours de notre faiblesse et qui intercède pour nous"(verset 26).

Dans le premier testament le terme Père (qui est un mot qui signifie littéralement"le père" ou "Ô Père!" n'est cité que 15 fois. Les termes utilisés pour s'adresser à Dieu renvoient davantage à la royauté. Ce mot utilisé par les enfants pour s'adresser à leur père et exprime à la fois un peu de l'intimité qui se dégage du terme "papa" et le respect que sous entend le mot père. Il est en même temps familier et respectueux. Mais c'est aussi un titre honorifique donné aux rabbins juifs des premiers siècles de notre ère.

Il me semble donc que pouvoir dire Père à Dieu n'est possible que si l'Esprit en fait parle en nous, ce qui montre que ce n'est pas si évident que cela.

Et pourtant....



J'ai vu il y a quelques temps un film qui racontait l'histoire d'un petit garçon asiatique qui avait perdu sa maman et qui pensait que s'il devenait moine il pourrait la retrouver, la voir. Je n'ai pas vu le début du film. Mais à un moment le moine qu'il nomme "Vénérable" et qui est un peu comme un père pour lui doit partir faire des provisions pour l'hiver et ne revient pas au moment prévu.

Ce qui est intéressant c'est que l'enfant qui se trouve abandonné et livré à lui-même est persuadé qu'il a fait quelque chose de mal et que cet abandon est une punition de sa supposée méchanceté. En d'autre termes le sens donné à la solitude est la punition. Il découvre un petit temple un peu en ruine dédié à la "déesse de la miséricorde". Il a comme un coup de coeur pour cette statue. Il commence par restaurer ce lieu et parle avec beaucoup de respect à cette déesse qui est certainement une figure maternelle. Un jour il quitte le temple en disant: "Ô déesse, je vous aime et je vous respecte, est ce que vous permettez que je vous appelle maman". Il s'incline et il sort.

J'ai trouvé cela très beau. Et je me suis dit que la partie infantile qui est encore vivante en moi pouvait parfaitement s'adresser ainsi à Dieu qui est aussi le Dieu de la miséricorde.

Laisser vivre ou revivre cette partie là ("si vous ne redevenez semblables à de petits enfants" disait Jésus), c'est une sorte de grâce. C'est découvrir cette joie et ce plaisir, mais en aucun cas ce n'est de la familiarité.

Dans le film, cet enfant est le premier enfant à avoir connu l'Eveil. Pour moi retrouver le contact avec l'enfant qui est en moi est un très beau cadeau. A moi de l'utiliser....

mercredi, décembre 15, 2010

"Des réflexions sur le lâcher prise"



Cette nuit j'ai fait un rêve, un vrai rêve, pas un rêve éveillé. J'étais dans une maison et il me fallait descendre pour rejoindre d'autres personnes. Mais voilà il n'y avait pas d'escalier. Je devais sauter et me lâcher. Je pouvais quand même descendre en me laissant tomber d'abord d'un palier sur l'autre en lâchant la rampe car s'il n'y avait pas marche il y avait une sorte de rambarde, qu'il me fallait enjamber puis me laisser tomber un peu plus bas. 
Puis pour aller au rez de chaussée, c'était plus compliqué, il fallait que je me laisse tomber le long d'une très grande armoire. M'accrocher au sommet de l'armoire et me laisser glisser le long des portes sans pouvoir m'accrocher à quoi que ce soit.

Dans le rêve il y avait l'impression de glisser, un peu comme sur des skis... (il faut peut être que l'on retrouve dans le rêve des sensations diurnes). 

Ce rêve je pense l'avoir fait deux fois la même nuit. Il s'agit bien au sens fort de lâcher prise, de ne pas se cramponner soit à la rampe soit à l'armoire pour aller là où je dois aller, à la limite pour retrouver les autres

Dans ce type de rêve, l'impression de descendre presque en volant est très agréable. Mais il faut que le désir de descendre soit suffisamment important pour que la peur de lâcher soit vaincue. Je sais que j'avais à retrouver des objets qui avaient été mis à tort dans un camion de déménagement et que j'étais avec beaucoup d'autres à attendre que le camion soit suffisamment vidé pour que je puisse récupérer ce qui y avait été mis par erreur.

Ce que je veux dire, c'est que pour me lancer comme cela dans un certain vide, il fallait que je me sente attendue et l'envie de réaliser quelque chose soit plus forte que la peur.

Il me semble aujourd'hui que pour pouvoir arriver à ce lâcher prise dont on parle tant (étape avant le pardon), pour ne ne pas se cramponner au passé, ne pas se cramponner aux souvenirs, même s'ils sont destructeurs, il est important non seulement de ne pas être seul, mais aussi d'avoir un but, quelque chose d'autre à faire.

On ne peut lâcher prise comme ça, tout seul. Il faut qu'il y ait quelqu'un qui vous attende, et qui d'une certaine manière vous réintroduise dans un autre monde, un monde qui a existé mais qui a été comme oblitéré par le vécu de la petite enfance.

Cet autre peut être un thérapeute, un ami, Dieu, mais on ne peut pas se lancer dans le vide s'il n'y a personne pour vous accueillir. Il faut pouvoir déposer auprès de quelqu'un sa peur, sa trouille, son possible vertige, sans être jugé, pour pouvoir se lancer dans ce qu'on croit être le vide, mais qui ne l'est pas vraiment.

Quand un bébé vient au monde, il y a en lui un réflexe dit "archaïque" que l'on nomme le "grasping réflexe", la capacité de s'accrocher et de ne pas lâcher prise. C'est ce qui permet aux bébés singes de rester accrochés à la fourrure de leur mère pendant qu'elle se déplace. Ce réflexe il est en nous et je me demande si quand un traumatisme intervient dans la petite enfance ou dans l'enfance, quand les repères sont perdus en particulier quand les limites ne sont pas respectées, ce  réflexe (s'accrocher à quelque chose envers et contre tout, en particulier à une représentation mauvaise de soi et à la culpabilité) ne permet pas, malgré la douleur de la crispation de se sentir un peu exister.

Le travail de lâcher cette image est extrêmement difficile et ne peut se faire que si un autre est là, un autre qui comprenne que cette crispation a crée une manière d'être au monde qui n'est peut être pas la bonne, et qui peut aussi créer dans tout le corps des douleurs. Je me demande d'ailleurs si la fibromyalgie que l'on trouve si fréquemment chez les personnes ayant vécu une ou des agressions sexuelles dans leur enfance ne peut pas avoir aussi  une origine psychique.

Dans un billet ancien sur le lâcher prise, je disais que lorsqu'on peut se débarrasser de la haine, qui est dirigée contre celui qui vous a fait du mal, alors la vie change car le lien inconscient ou conscient qui demeure entre soi et l'agresseur est enfin détruit: on détruit enfin la relation avec la personne qui vous a fait du mal qui vous a tuée. J'employais l'image du ballon que l'on laisse partir.

Aujourd'hui je dirai que l'important c'est de se dégager de la haine de soi, de la honte de n'avoir pas pu, pas su résister à l'agression, c'est de sortir de la culpabilité car la faute est du côté de l'autre or l'autre quand il est un parent, il y a toujours une partie de soi qui aime. Je me demande d'ailleurs si ce n'est pas pour cela qu'il est si difficile de se dégager de l'emprise que l'agresseur a toujours sur sa victime. 

Reconnaître cette haine est quelque chose de difficile, parce que ce n'est pas bien de haïr ou de détester et que l'on reste persuadé que si l'autre vous a fait telle ou telle chose c'est qu'on l'a mérité parce qu'on a été méchant.

C'est une pensée infantile dont il est difficile de se débarrasser, et cela fait presque peur de la lâcher parce qu'elle a donné une sorte de sens (je dirai de non-sens) à l'existence que l'on a vécu jusque là.

Pour lâcher ces références, la présence d'un autre est nécessaire car cet autre réintroduit dans un monde de vie. Il est indispensable de s'appuyer sur quelqu'un pour faire le saut, pour lâcher tout un  système de pensée qui même s'il est un système parasite,est connu donc malgré tout sécurisant. 

On parle beaucoup de blessures, de guérison à l'heure actuelle. A la limite celui qui ne guérit pas de ses blessures reste un mauvais, un qui n'a pas pris les moyens de se libérer.Je ne crois pas que ce soit si simple. Il y a blessure et blessure: les blessures d'amour propre, les blessures dites narcissiques, les blessures liées à la maladie, au handicap mais aussi ces blessures qui ont détruit toute l'estime que l'on pouvait avoir pour soi, ces blessures qui font de vous des personnes mauvaises et honteuses. Il s'agit là des blessures liée à une agression sexuelle dans la petite enfance par quelqu'un en qui on avait toute confiance. Ces blessures là, il ne suffit pas de parler pour qu'elles soient guéries.

Certes il est important de savoir que l'on n'est pour rien dans ce qui est advenu, que l'on est victime que l'on n'est pas le mauvais, le nul. Mais si cette étape est importante, elle n'enlève pas magiquement les flash back, elle ne permet pas de s'aimer à nouveau soi-même. 

Cette haine de soi est tenace. Et le pardon pour moi, ce serait que ces personnes cessent de se haïr elles-mêmes.Ce n'est pas un pardon accordé à l'agresseur, c'est d'abord un pardon adressé à soi et peut être que ce pardon là ne peux exister que si un Autre est capable de vous regarder avec amour. C'est peut être pour cela que les "groupes" sont devenus tellement important dans de telles démarches;  

Quand Jésus dit:

" Mt  11  28« Venez à moi vous tous qui êtes fatigués de porter un lourd fardeau et je vous donnerai le repos. 29Prenez sur vous mon joug et laissez-moi vous instruire, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez le repos pour vous-mêmes. 30Le joug que je vous invite à prendre est facile à porter et le fardeau que je vous propose est léger. »

 il propose de lâcher un poids que l'on connaît très bien, de l'enlever de ses épaules, (et là je pense qu'on a besoin de l'aide d'un autre quelqu'il soit) pour le remplacer par un autre fardeau qui cette fois n'est pas fait pour mettre au sol, mais pour pouvoir cheminer sur cette terre qui est là notre. Il s'agit de remplacer un joug de mort par un lien de vie, mais cela n'est possible que parce qu'un Autre est là. 

On peut pour certaines choses lâcher prise tout seul, mais lorsque la blessure a détruit en profondeur la notion même d'existence, je pense que la présence d'un d'un Autre est nécessaire. Je ne suis pas sûre que l'on puisse renoncer à un lien pathologique parce qu'on sait qu'il est pathologique. Il faut que quelqu'un puisse se réjouir que ce lien soir rompu et qu'un nouvel enfant vienne au monde. C'est peut être cela la Joie.




A suivre.... 

lundi, décembre 06, 2010

Marie de Magdala: Matthieu 28.


Nous avons terminé la lecture de l’évangile de Matthieu et je me suis rendue compte que je connaissais peu le dernier chapitre. Que ce chapitre vienne étayer celui de Marc, certainement, mais la figure de l’Ange du Seigneur assis sur la pierre roulée m’a interrogée, m’a peut être permis de relire ce texte autrement.

Je dois dire qu'il  m’a fait penser à l’Ange qui parle à Gédéon dans le livre des Juges : "Salut à toi vaillant guerrier". Vision ou réalité, peu importe, l’important c’est que quelque chose s’est passé, quelque chose qui ne rentre pas dans notre logique. Il aurait pu me faire penser à l'ange qui se manifeste à Joseph, mais cet ange là est bien proche des anges du premier testament, de l'Ange de YHWH. 

Alors je me suis mise dans la peau de Marie de Magdala et voilà comment elle raconte.







« Inutile de dire que je n’ai pas beaucoup dormi et que ce sabbat, il n’en finissait pas de finir.

Dès que les étoiles qui annoncent le jour nouveau se sont levées, moi et mon amie Marie, nous sommes parties vers l’endroit où Joseph avait déposé le pauvre corps de mon Seigneur. Dans quel état ils l’ont mis ce corps. Joseph l’a mis tel quel dans un drap, mais ce n’est plus un corps. Ce n’est que plaies.. Nous allons lui rendre sa propreté, sa dignité et nous ferons ce que les femmes doivent faire pour un mort. Nous avons apporté ce qu’i faut pour l’embaumer.

Nous nous demandions un peu comment nous ferions pour déplacer la pierre et si les gardes qui ont été postés devant nous laisseraient faire.

Avant hier, nous avions passé du temps devant cette « bouche » qui avait avalé Celui en qui nous mettons encore aujourd’hui notre foi; nous attendions je ne sais quoi, mais derrière la pierre roulée par Joseph, il y avait le silence coupé par le bruit des gardes qui ne se gênaient pas pour faire du bruit. Et nous avons dû partir, préparer le sabbat, faire comme d’habitude…

Quand nous sommes arrivées il s’est passé quelque chose d’inimaginable. Il y a eu comme un tremblement de terre, nous avons eu l’impression que la terre s’ouvrait sous nous, comme pour laisser sortir quelque chose. Nous avons vu la pierre se déplacer comme si une main la faisait rouler. Nous avons vu comme une figure de lumière (et nous nous sommes demandées si ce n’était pas cela la résurrection, Jésus qui serait devenu l'Ange du Béni)  qui a pris possession de la pierre en s’asseyant dessus.

Les gardes qui nous inquiétaient tellement ont du voir la même chose que nous, car une crainte sacrée les a comme renversés et ils sont tombés au sol. Si nous n’avions pas été aussi surprises, peut être que cela nous aurait fait rire, voir ces hommes en armes, morts de peur.

Puis celui qui était assis sur la pierre nous a parlé. Sa voix qui aurait pu être violente était douce à nos oreilles. Elle nous disait de ne pas avoir peur, que Jésus était ressuscité comme il l’avait dit, que son corps n’était plus là. 

Il nous a même invitées à entrer pour voir qu’il n’y avait plus de corps. Du coup cela faisait de nous, les femmes, des témoins. 

Il nous alors dit d’aller prévenir rapidement sans repasser par chez nous tous les autres que le Maître était vivant et qu’Il les attendait en Galilée. Là malgré tout, nous nous demandions s’ils nous croiraient ou non, car à part notre parole quel signe avions nous à leur donner et la parole des femmes tout le monde sait qu'elle n'a pas beaucoup de valeur. Pour Jésus oui, elle en avait mais pour les autres…

Nous avons obéi et voilà que le Maître est venu lui-même au devant de nous. Il nous a saluées, Il s’est laissé touché et nous avons touché de vrais pieds, un vrai corps. Il faut être deux pour avoir un  témoignage valide et là nous étions deux. Il nous a redit la même chose : aller en Galilée où Il nous attendrait.




Nous avons alors annoncé la nouvelle aux autres, à tous les autres, mais même s’ils se sont mis en route, ils ne nous croyaient pas vraiment. Mais nous, nous étions dans la joie, car Il était revenu de la mort, Il avait vaincu la mort et il était la Vie. Nous l’avions entendu, touché. Notre joie était parfaite, nous étions entrés dans la joie qu’Il nous a avait promise.