dimanche, février 27, 2011

"Ce qui rend impur" Marc 7, 14-23





Évangile de Jésus-Christ selon saint Marc 7,14-23.
Jésus appela la foule et lui dit : " Ecoutez-moi tous, et comprenez bien.
Rien de ce qui est extérieur à l'homme et qui pénètre en lui ne peut le rendre impur. Mais ce qui sort de l'homme, voilà ce qui rend l'homme impur. » 
Quand il eut quitté la foule pour rentrer à la maison, ses disciples l'interrogeaient sur cette parole énigmatique. 
Alors il leur dit : « Ainsi, vous aussi, vous êtes incapables de comprendre ? Ne voyez-vous pas que tout ce qui entre dans l'homme, en venant du dehors, ne peut pas le rendre impur, 
parce que cela n'entre pas dans son cœur, mais dans son ventre, pour être éliminé ? » C'est ainsi que Jésus déclarait purs tous les aliments. 
Il leur dit encore : « Ce qui sort de l'homme, c'est cela qui le rend impur. Car c'est du dedans, du cœur de l'homme, que sortent les pensées perverses : inconduite, vols, meurtres, 
adultères, cupidités, méchancetés, fraude, débauche, envie, diffamation, orgueil et démesure. 
Tout ce mal vient du dedans, et rend l'homme impur. » 


J'ai entendu cette "bonne nouvelle" au cours d'une messe de semaine et.... Et, je sais bien que ce que Marc veut montrer (et après tout n'est il pas un disciple de Paul, qui lui a dû se battre pour ne pas imposer le rituel juif aux convertis venus d'ailleurs) que se focaliser sur le pur et l'impur est un faux problème. Qu'il est moins grave de se mettre à table sans se laver les mains, que de dire du mal de l'autre. Et même que ne pas se laver les mains n'est pas grave du tout. Seulement nous sommes imprégnés presque à notre insu de ces notions de pur et d'impur. 
Seulement je n'ai pas pu m'empêcher de penser à deux autres choses. 




          La première  elle est un peu bête... Parce que le pur et l'impur ce n'est pas si simple. Faut il avoir l'estomac vide pour recevoir le corps du Seigneur? Les personnes de ma génération ont vécu avec le fait que pour recevoir le corps du Christ, il fallait être à jeun depuis un certain nombre d'heures. Ceci je suppose pour que dans l'estomac ou dans la bouche le Pur ne soit pas  en contact avec les aliments "normaux" qui du coup devenaient impurs. Pour aller à la messe certains dimanches, je faisais plus de 5 kms à pieds en pleine montagne, à jeun pour respecter la règle. N'était ce pas un peu fou? Jésus n' est Il pas  attentif aux personnes qui restent trop longtemps sans manger et fait pour elles la multiplication des pains...  Peut être faisait on une confusion entre le respect que l'être humain doit à son Dieu et une certaine pureté. J'aimerai mieux que la notion "faire de la place à Celui qui devrait prendre toute la place" soit dite. 


Il fallait aussi ne pas être en état de péché, ce qui d'une part est impossible et qui d'autre part évacue la parole de Jésus: Je ne suis pas venu pour les bien portants mais les pécheurs. Il fallait d'une certaine manière être "tout propre"  se mettre dans une sorte de cocon de pureté (impossible en général) et du coup on en venait à se sentir coupable de communier, alors que justement Tu nous dis: "celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi et moi en lui, donc...là encore il y a peut-être confusion entre pur et propre, impur et sale. 


Et puis quand Jésus touche un lépreux c'est le lépreux qui est purifié, alors ce n'est pas mon impureté qui va attaquer Jésus. Dire ou faire croire que ce serait lui manquer de respect, ne pas reconnaître sa divinité, c'est peut être un peu  tiré par les cheveux... Il m'arrive parfois de dire avant de recevoir le pain et le vin" dis seulement une parole et je suis guérie", pas dans le futur, aujourd'hui. 


      La seconde, elle est beaucoup plus grave. Il y a des choses (qui ne sont pas des paroles) qui sortent du corps  (et non du coeur encore que ...) de l'homme et qui créent une souillure dans le corps de la femme. 
Je sais bien  que Jésus  voulait faire comprendre ces querelles sur les aliments étaient stériles et que ce qui sort comme paroles peut faire du mal mais surtout rend impur celui qui les prononce. L'impureté c'est ce qui se joue dans le coeur car si je déverse de l'impur je risque fort de faire du mal à mon prochain. Je peux lui faire du mal, le rendre malheureux. 


Seulement voilà, je connais beaucoup de femmes qui ont été obligées d'avaler ce que certains hommes voulaient déverser en elle. En soi le sperme n'est pas impur, mais dans certains cas il l'est. L'homme qui fait cela ne se sent pas impur, il se sent dans son droit, celui d'humilier, de détruire un être (souvent une enfant ou une femme) qu'il considère comme un objet. Lui devrait être honteux de son acte, mais voilà c'est la femme qui se sent avilie, détruite, qui n'ose plus se regarder, qui imagine que cela est inscrit sur son front et qui peut aller jusqu'à vouloir ne plus exister.Cette honte elle perdure toute la vie, elle fausse la relation avec les autres, elle détruit, elle dégrade elle fait mourir. Dans le récit de la destruction de Sodome, ce n'est pas le viol qui est sanctionné mais la relation entre hommes. Que les filles de Lot soient livrées aux habitants de la ville, ne semble poser aucun problème. Ce qui laisse à supposer que dans l'inconscient collectif le viol est quasiment normal, banalisé. Les femmes sont des objets d'échange, elles ne sont pas des filles de "la mère des vivants: Eve" mais des objets.   


Alors cet évangile m'a donné envie de crier, de protester, aussi de consoler toutes les femmes qui ont été souillées et qui n'ont même pas le droit de le dire et de le faire reconnaître. L'impureté ne retombe pas sur celui qui a souillé volontairement un corps qui n'était pas le sien, qui n'était pas à lui, mais pas sur celle qui subit, qui se sent polluée, voire même tuée.Là on est bien au delà de registre de la la faute, du péché, on rentre dans le mal. 


Une Pasteure qui commentait l'évangile du paralytique disait: porter son lit c'est sortir du statut de victime pour devenir témoin. Pour sortir de la honte, il faut pouvoir la dire, il faut pouvoir non pas l'exhiber mais la mettre à distance de soi pour ne plus en être infestée infectée. Il faut pouvoir dire, et cela c'est être témoin de ce qui a été vécu dans le corps et ce qui se vit encore jour après jour.Quand Jésus dit au paralytique: lève toi, il s'agit d'une sorte de résurrection: sors de la paralysie qui t'empêche de vivre, rentre dans ta maison (dans ce corps dont tu as été dépossédé).


Je ne sais pas si cela nous pouvons le dire à celles que nous connaissons et qui nous ont fait le cadeau de nous parler de ce vécu qui les fait basculer dans un certain innommable, mais c'est ce que nous pouvons demander c'est qu'elles puissent se lever, chacune à leur manière, et être lavée de cette honte qui les paralyse encore trop souvent et de la culpabilité qui va avec. Il est possible que le pardon entendu comme "lâche" le lien soit à un moment donné ce qui permet de se sentir purifié, mais cela demande un travail qui ne dépend pas de la volonté et qui peut prendre toute une vie. 


  



vendredi, février 25, 2011

"Il descend de la montagne" Marc 9, 19


« Il descend de la montagne. » Marc 9,19

"Prenant la parole, Jésus leur dit : « Génération incrédule, jusqu'à quand serai-je auprès de vous ? Jusqu'à quand aurai-je à vous supporter ? Amenez-le-moi. "

Quand Jésus descend de la montagne après l’épisode de la transfiguration il trouve une foule, il trouve des disciples qui n’ont pas réussi à guérir, il trouve des scribes qui doivent peut être mettre le bazar en discutaillant avec les disciples, il trouve un père pas content et le moins qu’on puisse dire, c’est que Lui non plus n’est pas ravi de ce qu’il trouve. 

On a un peu l’impression que Jésus en a plein les bottes, qu’il aimerait se reposer, rentrer en Lui et c’est impossible, il lui faut agir pour convaincre qui il est, alors que nous les lecteurs nous venons de le voir dans la gloire. D'une certaine manière on a l'impression que quand Jésus est absent, ça ne tourne pas rond...

Cela m’a fait penser à Moïse lorsque alerté par le bruit de la musique il descend avec Josué de la montagne. 

Il trouve une foule qui fait la fête, il trouve son frère qui n’a rien compris (ils m’ont demandé alors j’ai fait…) il trouve un échec. Moïse cela nous le savons pique son "épique colère". Il détruit les tables écrites par Dieu, il détruit le veau d’or (qui devait être creux) et fait boire la poudre au peuple, et il implore Dieu. bref il essaye de remettre un peu d'ordre et de réinstaurer la foi comme jésus le fait avec le père de l'enfant malade.

Pourquoi ce parallèle entre ces deux là ? Je pensais à ce qui se passe quand on revient chez soi après un temps pris pour soi avec Dieu. Il est souvent difficile de reprendre le cours de la vie…Peut être a t on le droit de manifester que ce n’est pas évident de descendre de la montagne…

vendredi, février 18, 2011

Illumination, transfiguration, mes balbutiements...

Transfiguration, illumination, unification.  

Il m’est venu une nuit, l’idée que l’illumination que cherchent et trouvent certains sages de l’inde et la transfiguration (de Jésus mais aussi de Moïse et d’Elie) pouvaient avoir quelque chose de commun ; d’une certaine manière le rapport à la mort change totalement.

J’ai essayé de mettre des mots, mais ceux ci sont plus un balbutiement qu’autre chose, mais malgré tout, cette perception d’une autre finalité pour ce que nous appelons la mort m’a d’une certaine manière ouvert les yeux, sans que je puisse expliquer comment et surtout a modifié ma perception de la mort.

            « Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent »Luc 24,31

Ce verset de l’évangile des disciples d’Emmaüs, évoque un peu pour moi un bébé dont les yeux s’ouvrent, un passage de la mort à la vie. Leurs yeux s’ouvrent après que le pain ait été rompu, donc d’une certaine manière brisé,  mis en morceaux, donné pour être mangé, détruit. Ce que je veux dire c’est que le pain (figure du corps) est fait pour être mangé, détruit. On parle du pain de vie, mais ce n’est pas la seule dimension. Un peu comme si Jésus (qu’ils n’ont pas reconnu dans l’homme qui marchait avec eux) est reconnu dans le pain rompu, dans la mort. Ce n’est que partagé que le pain donne la vie..

La mort nous fait peur, nous n’aimons pas en parler. Jésus dit certes « Je suis le chemin, la Vérité et la Vie » mais cela n’a été rendu possible que parce qu’il a eu un rapport particulier à la mort. Parce qu'il l'a acceptée, désirée, peut être même aimée. 

L’écriture disait « Malheur à l’homme pendu sur le bois » maintenant il est possible de dire : «  Béni soit l’homme qui a désiré et accepté d’être pendu au bois de la croix », Béni celui qui a « fait » par la mort, la vie. Béni soit celui qui a rendu la mort source de vie. 

Je pense mais sans le démontrer qu’en Jésus le combat entre la mort et la vie s’est terminé, qu’il s’est créé autre chose  (une unification qui élimine le clivage et donc le conflit) et que c’est cela qu’est né pour nous ce que Celui que nous appelons l’Esprit Saint.

On raconte que lorsque Henri de Saux est tombé sur le sol en courant après un autobus, terrassé par un infarctus, son visage rayonnait… Ce rayonnement c’est peut être l’unification qui se produit et en particulier quand la mort  cesse  d’être rejetée mais quand elle devient soi. Je veux dire quand le clivage entre la vie et la mort cesse, quand il ne s’agit plus d’un combat entre l’une et l’autre, mais lorsque la mort devient visage de la  vie et la vie visage de la mort.

Je me suis alors demandé si je ne pouvais pas faire une sorte de parallèle entre la transfiguration et l’illumination. 

A partir de ce moment (la transfiguration), la manière d’être de Jésus change. Il y a juste avant dans l’évangile de Luc la première annonce de ce qui va arriver et Pierre réagit fort mal. Et même si Jésus interpelle Pierre (comme il a interpelé la tempête en son temps) peut être que pour Lui la tentation est là. 

Après la transfiguration c’est - du moins pour moi- un autre Jésus C’est comme un tournant. Et il est dit que Jésus parle avec Moïse (dont le visage reflétait la gloire de Dieu, Ex 32, 27-29) et Elie (qui disparaît sur un char de feu) de son départ à Jérusalem donc de sa mort( Lc 9, 31). Comme si à partir de ce moment là la mort devient ce qu’il y a de plus important pour Lui, parce que c’est non pas en la préférant à la vie, mais en en faisant partie intégrante de Lui même que la présence de Dieu qui était déjà là se manifeste autrement.

Or ce qui est frappant dans la transfiguration c’est que Jésus parle avec Moïse et Elie de son départ  à Jérusalem, donc de sa mort. Peut être que à ce moment là dans la vie de l’homme Jésus, il s’est produit quelque chose qui a fait que la peur de la mort qu’il devait avoir comme un tout à chacun s’est transformée. Il n’y avait plus la mort et la vie, il n’y avait plus la mort ou la vie, il y avait autre chose, il y avait la joie de la vie et la joie de la mort, la paix de la vie et la paix de la mort.

Cette Gloire qui est sur le visage de Moïse, peut aussi traduire quelque chose de cet ordre. Que s’est il passé après qu’il ait écrit de sa main à lui les nouvelles tables de la Loi ? Car « il fut donc là avec le SEIGNEUR, quarante jours et quarante nuits. Il ne mangea pas de pain, il ne but pas d'eau. Et il écrivit sur les tables les paroles de l'alliance, les dix paroles. Que s’est il passé pendant cette « absence » pendant ce temps de contact avec Dieu ? Quelle purification a t il vécu ? On raconte qu’à 120 ans Moïse ne voulait pas mourir et que c’est un baiser de Dieu qui lui a permis de partir..  Mais ce baiser montre la proximité de Moïse avec son Dieu, cette relation ou la mort devient vie

Peut être que la théophanie qui suit l’entretien de Jésus avec Moïse et Elie va dans ce sens. 

On parle souvent de combat, entre le bien et le mal, là peut être faut il sortir de cette notion de combat avec le triomphe d’une partie sur l’autre et passer à quelque chose ou la mort et la vie sont les aspects d’une même réalité. Jésus sur le Mont Thabor, parle de sa mort avec ceux qui représentent la Loi et les prophètes (et pour Elie qui est parti sur un char de feu, on peut aussi penser à l’illumination).

Or parler de sa mort, (de sa montée à Jérusalem) montre la place de celle ci dans la vie de Jésus. On peut presque dire que toute sa vie est ordonnée en fonction de sa mort, que celle ci a pour lui une dimension autre. C’est par elle qu’il va devenir Lui ce qu’Il était le Vivant.

Arrivée à ce point de là, je me rends compte que Là je ne suis pas capable d’expliquer cette intuition, de la mettre en mots. Mais que ce que les apôtres ont vu ce jour là, sur cette montagne là, c’est autant la Gloire de Dieu que l’homme totalement en union avec Dieu, sans conflit sans confusion, sans retour aussi.

Or je crois que Jésus est venu nous donner un autre regard sur la mort. La mort donne la vie, on n’a pas à la chercher parce qu’elle est là, mais elle est aussi importante que la vie.

Il y a un passage en nous qui se fait qui permet de comprendre cela, de la regarder non comme une mauvaise chose, mais comme une bonne chose, qui permet de ne pas la rejeter, mais de savoir que c’est par sa mort que Jésus est vivant à jamais et que cela nous est proposé, que si nous changeons (ou si l’Esprit change notre regard sur la mort et peut être aussi sur le mal) alors nous participons à la transfiguration, nous voyons le monde autrement et Dieu aussi.

Quand Jésus dit : celui qui veut être mon disciple qu’il prenne sa croix et qu’il me suive, peut être faut il entendre, qu’il reconnaisse que la mort n’est pas mauvaise, qu’il ne faut pas la fuir (puisque jésus ne l’a pas fui) qu’il en fasse quelque chose qui devienne de la vie.

En d’autre termes peut être que au lieu d’avoir honte de nos limitations, de nos fragilités, il nous faut les accepter comme partie intégrante de nous, ne pas les opposer avec culpabilité à une certaine idée de la vie, mais les bénir parce que les accepter, nous accepter, cela fait de nous des vivants.

jeudi, février 10, 2011

"Responsabilité" première partie

Responsabilité et relation: « Cherchez moi le responsable »


J'entends si souvent dire dans ma pratique professionnelle: " je ne peux pas faire telle ou telle chose parce que je suis responsable d’elle (ou de lui), ou bien encore: implicitement je me suis engagé à " que j’ai eu envie de réfléchir sur cette notion de responsabilité. 


Car dès que l’on emploie cette phrase, on y accroche celle dite par le Petit Prince : « je suis responsable de ma rose ». Etre responsable oui, mais si être responsable veut dire que cela m’empêche de vivre, ne faut il pas se poser des questions ? Se sacrifier oui, mais jusqu’à quel point. On ne parle plus guère du masochisme, mais pourtant cela reste un piège et je ne pense pas que marcher derrière Jésus consiste à mettre sur nos épaules un fardeau dont Il est justement venu nous soulager.


Dans le premier livre de Simone Paccot (l'évangélisation de profondeurs), il est fait mention de personnes qui se sont tellement senties responsables de certains de leurs proches que cela devenait un esclavage. Si Jésus est venu c’est bien pour nous sortir de l’esclavage, pour briser des liens qui sont parfois pathogènes car ils conduisent à la mort (on enchaîne les prisonniers pour qu’ils ne puissent pas se sauver) mais parfois on est tellement habitué à  porter les chaines qu’on ne s’en rend plus compte.


Si le mot responsable apparaît à différentes reprises dans le premier testament, il n’y a qu’une occurrence de ce mot (moteur : http://unbound.biola)  dans le second :Matthieu 27,24 « Voyant alors qu'il n'aboutissait à rien, mais qu'il s'ensuivait plutôt du tumulte, Pilate prit de l'eau et se lava les mains en présence de la foule, en disant : « Je ne suis pas responsable de ce sang ; à vous de voir ! ». En d’autres termes, si un jour sanction il doit y avoir, elle sera pour vous, pas pour moi, ce qui renvoie au « juridique » ce qui est normal pour un procurateur.


Le Larousse donne 5 définitions de ce mot, les deux premières sont  juridiques.  

1-Qui doit rendre compte devant une autorité de ses actes ou des actes de ceux dont il a la charge : Les parents sont responsables des dommages causés par leurs enfants mineurs. (Ceci se comprend puisqu’un enfant n’a pas les capacités de jugements qui se développeront avec l’âge). 2-Qui est l'auteur ou le coupable de quelque chose, et doit en supporter les conséquences : Être responsable de la mauvaise gestion du service..  Seule la dernière définition 5-Qui est réfléchi, sérieux, qui prend en considération les conséquences de ses actes, renvoie à ce que j’aimerai mettre derrière cette notion. La responsabilité est fort importante, car une personnes jugée irresponsable (malade mentale) ne peut être punie de ses actes..


Dans un billet précédent je parlais de la question posée à Caïn : « Où es ton frère » et de la réponse de ce dernier : « Suis je responsable de mon frère ? » ce qui sous entend : « mon frère je ne suis pas censé savoir ce qu’il fait, c’est un adulte, ce n’est pas mon problème », ce qui est aussi une manière de dire  (ce qui est un peu gonflé puisqu’Abel est mort par ses mains) « Je ne suis pas responsable de mon frère, si tu veux le voir, débrouilles toi pour le trouver ». Cela peut s’appeler un mensonge…Mais tout se passe comme si Caïn refusait d’être le grand frère responsable, voire coupable des frasques su petit. Le lien entre responsabilité et culpabilité est très fort.


Demander à un enfant d’être responsable de ses frères et sœurs (ou de ses parents, que la demande soit explicite ou implicite) est une sorte de non sens, c’est faire peser sur ses épaules un poids qu’il lui est impossible d’assumer car un enfant est un enfant et raisonne comme un enfant. Peut être que Dieu en donnant l’interdit de ne pas manger de l’arbre du bon et du mauvais,  a mis sur les épaules d’Adam quelque chose de trop lourd compte tenu de son inexpérience… Je crois qu’il y a des rabbins qui pensent que si Adam n’avait pas mangé prématurément le fruit de l’arbre de la connaissance du bien et du mal (ce qui fait de nous des Dieux) YHWH le lui aurait donné. Adam était il vraiment responsable de son geste?


Une de mes amies quand elle était âgée de 7 ans, devait surveiller son grand père atteint d’un cancer des poumons et l’empêcher de fumer. Comment une petite fille de cet âge là peut elle tenir tête à son grand père et l’empêcher de fumer car en plus elle l’aimait et savait que cela était un plaisir pour lui. Le jour où il a été surpris par sa femme, celle ci a donné une paire de claques à mon amie et lui a dit que si son grand père mourait pendant la nuit, ce serait de sa faute. Je vous laisse imaginer la nuit qu’elle a passée. Heureusement le grand père n’est pas mort cette nuit là.


Pour en revenir au premier Testament et en regardant (exprès) avec le petit bout de la lorgnette) que lit-on ? On y lit qu’un humain a été crée à l’image et à la ressemblance de Dieu (mais oui et ce n’est pas rien)  de ce Dieu qui crée le bonheur et le malheur (Isaïe 45) et qui a crée son propre malheur en coupant ou en ne coupant la relation avec Dieu.


Tout ce qui arrive de négatif (que ce soit les 40 ans dans le désert, l’exil, l’occupation grecque ou romain) doit être compris comme lié à la responsabilité soit individuelle soit collective de ce peuple choisi.


Or spontanément la responsabilité on aime bien la renvoyer sur une autre. Qui d’entre nous, n’a pas entendu cette phrase : « cherchez moi le responsable » qui ouvre les différents clips publicitaires d’une certaine compagnie d’Assurances. Il n’est pas toujours facile de trouver un équilibre entre : je suis responsable (en grande partie) des choix ou actes que je pose et c’est de la faute de l’autre si je suis aujourd’hui dans lune situation impossible. Le « qu’est ce que j’ai fait au bon dieu pour mériter cela » est une phrase automatique quand nous sommes dans le malheur. Le responsable c’est Lui et c’est après lui qui nous sommes fâchés, parce que parfois c’est plus facile de faire porter le chapeau à un autre que de reconnaître qu’une certaine passivité peut être aussi responsable d’un certain mauvais. Spontanément aussi quand quelqu’un que nous n’aimons pas souffre dans sa vie, il est bien difficile d’échapper à la réflexion : bien fait pour lui ! D’accord on s’en mord la langue après, n’empêche que..


Etre  « le » responsable quelle charge ! C’est avoir La solution et de fait le dernier mot. Mais c’est aussi être passible de punition en cas d ‘échec. Nous savons que dire à quelqu’un « je vous tiens pour responsable » signifie « si quelque chose arrive, ce sera de votre faute, pas de la mienne et je pourrais pour accuser voire vous traîner en justice et vous me le payerez ».

Quand Antoine de Saint Exupéry fait dire au Petit prince : « Je suis responsable de ce que j’ai apprivoisé, je suis responsable de ma rose », je me demande s’il est possible d’être responsable de quelqu’un (je ne parle pas des enfants dont nous sommes et parents et tuteurs –au sens fort-) mais de ceux qui nous rencontrons au fil des jours et des années,  et avec lesquels sous prétexte de responsabilité, nous nouons des liens qui nous donnent de l’importance, du poids, mais qui peuvent être mortifères. Nous nous attachons à l’autre pour l’aider, mais est de cela dont il a besoin ? Peut être pendant un certain temps, mais il faut bien qu’une cordée se défasse quand elle a atteint son sommet.


C’est bien à cause de cette « responsabilité » (et s’il lui arrivait quelque chose pendant mon absence)  que le Petit Prince choisit de mourir pour regagner sa planète. La morale heureuse est que cela a réussi, mais qu’en savons nous ? Le corps débarrassé de son poids a peut être dérivé ailleurs…


Etre responsable d’une certaine manière cela donne une assise, cela donne du poids, ce qui permet de comprendre pourquoi dans une fratrie les aînés sont parfois ravis en prenant la place des parents de faire payer aux petits leur existence… Mais il me semble que si nous avons à être en relation avec nos « frères » nous n’avons pas à nous « charger » d’eux, car il n’y a qu’un seul Berger, même si parfois nous le trouvons un peu gonflé de laisser le troupeau pour aller s’occuper d’une brebis qui n’en a fait qu’à sa tête et qui est tombée dans un creux de rocher.

"Responsabilité" suite


Etre responsable d’une certaine manière cela donne une assise, cela donne du poids, ce qui permet de comprendre pourquoi dans une fratrie les aînés sont parfois ravis en prenant la place des parents de faire payer aux petits leur existence… Mais il me semble que si nous avons à être en relation avec nos « frères » nous n’avons pas à nous « charger » d’eux, car il n’y a qu’un seul Berger, même si parfois nous le trouvons un peu gonflé de laisser le troupeau pour aller s’occuper d’une brebis qui n’en a fait qu’à sa tête et qui est tombée dans un creux de rocher.

Cela fait de moi le nécessaire de l’autre, le besoin de l’autre, mais cela permet d’oublier (car je risque de penser à sa place, de savoir ce qui est bon pour elle et d’imaginer ressentir ce qu’elle ressent) quelle est sa demande, son désir. Combler sous prétexte de responsabilité les désirs de l’autre conduit bien souvent à la catastrophe relationnelle.

Pour l’avoir vécu je sais m’être laissée entraîner à créer parfois des liens beaucoup trop forts et qui n’avaient pas leur raison d’être et qui au lieu de permettre la vie et la liberté conduisaient à l’enfermement. Cela fait cependant toucher du doigt la phrase de Paul :Rm 7,19 : puisque je ne fais pas le bien que je veux et commets le mal que je ne veux pas. Etre responsable c'est aussi non pas maîtriser ni contrôler la relation, mais l'ajuster et pour cela la passer au crible de l'Esprit Saint. 

En d’autres termes  créer des liens oui, mais pas n’importe comment. Le lien ne doit jamais se transformer pas en câble qui empêche de bouger, de vivre d’agir. Si le lien se rigidifie, si en son nom je m’empêche de vivre (je dois me sacrifier pour elle pour lui, parce que sans moi il ou elle ne pourra pas se débrouiller, c’est d’une certaine manière créer quelque chose de mortifère.

Après le miracle de la multiplication des pains, il est rapporté que Jésus sachant qu’ils voulaient le faire roi (je dirai mettre le grappin sur lui, en faire leur chose) partit dans la montagne et renvoya ses disciples sur la mer. Car là aussi dans une relation il est nécessaire de ne pas se laisser « manger » par l’autre, et c’est cela être responsable dans le bon sens du terme : trouver la bonne distance pour que la liberté demeure, pour que l’étouffement ne s’installe pas. 

Il n’est pas bon de laisser l’autre se cramponner à vous, car le risque de tomber à deux dans le gouffre est trop grand. Je pense que les règles qui fonctionnent dans une thérapie sont justement là pour éviter cette sorte de fusion. Mais le lieu thérapeutique est une chose, les relations amicales une autre.

Couper un lien quand il se transforme en câble avec une ancre au bout est difficile et ne se fait pas sans casse (sans blessure), mais c’est la séparation de la maman de son fœtus qui permet le vie. S’en rendre compte est une première étape, mais s’en dégager en est une autre et cela peut être douloureux, un peu comme une naissance.

Si Jésus passe autant de temps à « délier » ce n’est peut être pas pour rien, car des liens nous en créons, nous en avons crées et certains d’entre eux peuvent être mortifères. Les dénouer c’est aller vers la vie et cela c’est bien le Salut.

Quand Jésus nous demande de nous décharger sur Lui de nos fardeaux, je ne pense pas qu’Il nous demande de laisser choir l’autre, de le laisser tomber, de l’abandonner (ce qui serait une mort pour celui ci)  mais de ne plus faire de ce « porter » une fin en soi et de trouver une relation où l’un n’entraîne pas l’autre dans le gouffre.

La réaction de Jésus qui dit à Pierre  «  Passe derrière moi Satan »Mt 16,23 veut peut être dire que à ce moment là, Pierre veut se saisir de Jésus, en faire sa chose, son objet, disposer de lui (pour le sauver) mais que ce n’est pas ce qui lui est demandé. Il se croit responsable de Jésus parce qu’il l’aime, mais est cela aimer ? Sa responsabilité sera l’annonce de la bonne nouvelle, mais pas de décider ce qui est bon pour Jésus. Ce qui est l’œuvre de Jésus c’est d’accomplir ce que dit son nom « Dieu sauve ».

Jamais personne n’a osé dire que Jésus en tant que chef de communauté pouvait être responsable de la trahison de Judas. Si l’évangéliste Jean note que le « diable «  était entré en lui (et aussi qu’il faisait nuit), c’est que face à la tentation nous sommes responsables de nous mêmes et que les choix sont les nôtres. Il est parfois bien difficile de ne pas laisser « la ténèbre nous parler ».
Il est étonnant d’ailleurs que ce soit lui et non pas Matthieu qui s’y connaissait en argent (collecteur d’impôts) qui ait été chargé de la gestion financière du groupe. Peut être était il plus instruits que les « pécheurs » de Capharnaüm, peut-être était il très seul avec une éducation plus poussée ? N’est il pas le seul à appeler Jésus « Rabbi » ? Peut être que le groupe de disciples à quelque chose à voir avec ce que nous appelons facilement la trahison de Judas. A défaut de responsabilité (Juda est responsable de son ou de ses choix) peut être faut il parler de solidarité les uns envers les autres. La guérison du paralytique est obtenue grâce à l’aide des porteurs de civière qui ne se laissent pas démonter par des difficultés qui semblent insurmontables. 

La responsabilité est de fait un poids terrible, car si nous ne réussissons pas à faire ce qu’on attendait de nous (et ceci peut être extrêmement vague, non dit, suggéré, imaginé même) alors nous avons échoué, nous nous sentons nuls, voir coupables. L’échec de l’autre ou des autres devient notre échec. Et je crois que le piège est là …

L’échec de l’autre n’est pas mon échec mais le sien et de fait je ne peux même pas être sure qu’il en soit un.

La mort de Jésus sur la croix est bien un échec total et pourtant ? Il est allé au bout de ce qui lui était demandé  être lié sur une croix pour délier tous les faux liens, toutes les fausses responsabilités pour que la vie soit manifestée.       

vendredi, février 04, 2011

Obéissant jusqu'à la mort et à la mort sur une croix Ph 2, 8


II L’obéissance à Dieu est elle suffisante pour échapper au malheur ?[1] 

Quand on lit le premier testament il semble bien que tous les désastres qui arrivent au peuple choisi soit la conséquence de la désobéissance aux ordres de l’Eternel. Les chapitres 3 et 4 de la Genèse montrent bien le lien entre le malheur et le refus d’obéir.

Mais faire ce lien « j’obéis, tout me réussit » ou « je ne me soumets pas et il m’arrive les pires ennuis » crée en nous un raisonnement que nous avons tous pratiqué quand nous étions des enfants, à savoir : j’ai fait une bêtise, il (elle) est fâché contre moi, il ne m’aime plus, mais si je m’amende, alors il m’aimera à nouveau. Il suffirait donc de changer, de demander pardon pour que tout redevienne comme avant. 

Or les enfants qui ont vécu des maltraitances dans leur enfance, sont obligés à un moment de leur vie de reconnaître que ce qu’ils ont subi ils n’en sont pas responsables, ils sont victimes du Mal. Croire que l’obéissance seule fait des miracles, c’est d’une certaine manière faire l’économie du mal et il est plus facile de croire en un Dieu qui punit, qu’en un Dieu qui  laisse faire le mal.

J’aime beaucoup le psaume 44, car il pose bien la question du malheur qui s’abat sans qu’il y ait eu désobéissance. Je sais très bien si l’on cherche la petite bête (et ce que font chapitres après chapitres les amis de Job) on peut toujours trouver quelque chose qui expliquerait, mais dans ce cas quelle est notre représentation de Dieu.

Voici ces quelques versets :

18Tout cela nous est arrivé, et nous ne t'avions pas oublié, nous n'avions pas démenti ton alliance ; 19notre cœur ne s'était pas repris, nos pas n'avaient pas dévié de ta route, 20quand tu nous as écrasés au pays des chacals et recouverts d'une ombre mortelle.

21Si nous avions oublié le nom de notre Dieu, tendu les mains vers un dieu étranger, 22Dieu ne l'aurait-il pas remarqué, lui qui connaît les secrets des cœurs ?

Ils montrent bien comment le malheur qui s’abat individuellement ou collectivement devient incompréhensible (et pierre d’achoppement) quand le lien avec un  refus de soumission ne peut être fait. Le  malheur devient incompréhensible.

Comme le psalmiste nous avons envie de crier :24/  Lève-toi ! Pourquoi dors-tu, Seigneur ? Eveille-toi ! Ne nous rejette pas à jamais !

Tous nous sommes confrontés au malheur dans notre vie (à des joies aussi bien entendu,) mais bien souvent nous aimerions comprendre si oui ou non nous sommes responsables de ce qui nous tombe dessus. Combien de fois ai-je entendu dire : il ne méritait pas ça, lui qui est si gentil, si généreux si…

Si c’est la désobéissance est la cause du malheur, il devrait suffire soit de demander pardon (enfin là je mets des bémols) soit de changer de comportement (de devenir gentil comme on dit aux enfants) pour que celui a puni (rejeté, abandonné) reconnaisse le changement et ne soit plus méchant avec moi.

Cela fonctionne d’une certaine manière dans l’éducation des enfants, mais la plus part des enfants savent que même s’ils font des bêtises, même s’ils sont punis, ils ne perdent pas l’amour de leurs parents. 

Mais chez les enfants qui ne sont pas aimés -et cela existe-, c’est un moteur de ce type qui existe et qui existera toute leur vie, car la soif d’amour est incommensurable. Il vaut mieux croire que l’on est puni pour quelque chose de mal (même si on ne sait pas ce que c’est) que de reconnaître que l’agresseur est mauvais et qu’il ne changera jamais. Si ce qui est subi est « gratuit » si ce n’est pas lié à des actes mauvais, faits volontairement, alors cela n’a aucun sens, c’est monstrueux, cela prouve que le mal existe, que celui qui m’a donné la vie est mauvais gratuitement et cela est encore plus insupportable. Il y a de quoi devenir fou…

Je connais quelqu’un qui m’a dit : « moi je sais que Dieu ne me sauvera pas, que j’irais en enfer, car s’Il m’a laissée vivre ce que j’ai vécu, c’est que je suis tellement mauvaise qu’il n’y a aucun espoir pour moi ». Inutile de dire à quel point ceci m’a non seulement heurté, mais aussi posé des questions sur le christianisme qui avait été inculqué à cette personne. Quel serait ce Dieu qui juge un enfant ?

Faire un lien (comme cela est fait dans le premier testament entre non obéissance et malheur) est peut être plus acceptable que de considérer le malheur comme une réalité de notre univers, réalité qui comme je l’ai écrit ailleurs est un excellent moteur (lutter contre la maladie,  l’injustice, la souffrance sous toutes ses formes), mais qui reste difficile à concevoir si l’on imagine que Dieu serait un papa tout bon qui ferait que aucune pierre ne vienne rouler sous les pas de ses enfants : « il a donné ordre à ses anges pour qu’à la pierre ton pied ne heurte Ps 91,11.

Le lien entre désobéissance (péché si l’on se réfère au religieux) et malheur est comme inscrite en nous. Bien entendu l’éducation y est pour beaucoup et l’obéissance aux parents (qui connaissent les dangers alors que l’intelligence de l’enfant se développe lentement) est nécessaire pour survivre et pour vivre en société.

Nous apprenons tous par essais erreurs et cela est indispensable. Personne ne peut apprendre à marcher sans tomber. Il faut s’être heurté plusieurs fois à un coin de table pour apprendre à faire le détour, mais les règles que l’on donne à un enfant de 3 ans (ne monte pas sur un tabouret) ne durent pas éternellement et se modifient jusqu’au moment où celui qui fut un enfant est devenu capable de se débrouiller seul (ou à peu près) dans le monde qui l’entoure.

Que l’obéissance soit nécessaire, oui car elle permet la vie sociale, mais obéir qu’est ce c’est ? Timothy Radcliff dans son premier livre,  disait que le vœu d’obéissance avait été pour lui un soulagement, car il n’avait plus à se poser de questions, il n’avait plus à choisir. Encore faut il que celui qui représente l’autorité ne soit pas dans la perversion et malgré tout obéir nécessite réflexion. L’obéissance doit aller dans le sens de la vie, pas dans le sens de la mort. Je ne pense pas qu’on apprenne l’humilité par l’humiliation.

Quand Paul dit de « Jésus qu’il a été obéissant jusqu’à la mort et la mort sur une croix » de quelle obéissance parle t il ? Il s’agit me semble t il d’une relation tellement profonde que obéir ce n’est pas être dans le faire, mais c’est être en relation. Peut-on imaginer que du temps de sa vie terrestre, Jésus attendait de son Père un planning de sa journée : aujourd’hui tu guéris un lépreux, demain tu envoies tes disciples en mission, demain tu sauves l’humanité… etc…

L’obéissance de Jésus consiste t elle à obéir à des ordres ? Je pense que la réponse est non. Et le but de l’obéissance devrait être cela :passer du faire (avec le risque de la bonne conscience) à l’être : cela je le fais parce que je t’aime et que cela te fait vivre en moi.

Dans la multiplication des pains, Jésus commence par bénir avant de rompre et de faire distribuer. C’est à dire que la relation est première. Et si Jésus est le nouvel Adam c’est que contrairement au « premier homme », il ne prend jamais la place de son père, il est dans ce que j’appellerai une dépendance amoureuse et c’est cela qui serait pour moi l’obéissance.

Jésus tout obéissant qu’il fut, n’a pas échappé au malheur : mourir à 33 ans en est un, et pour lui et pour sa mère. Mais ce malheur n’est pas une punition (même si nous l’avons cru puni Isaïe 53). Cette mort donnée à quelqu’un qui ne la subissait pas comme un châtiment, se transformera en source de vie.  

Obéir pour nous c’est trop souvent poser des actes conformes à ce qui nous est demandé. Pour Jésus, obéir c’est être dans la relation permanente et profonde avec le Tout Autre, ce qui Lui permet à chaque instant d’être créateur.

Si l’obéissance devient un carcan, si elle ne débouche pas sur la vie, alors elle est lettre morte. Elle est justement cette Loi dont la croix nous a sauvés.

Je ne sais pas si la crainte du seigneur est le début de la sagesse, mais je crois que l’obéissance qui est d’abord relation, exclue la crainte et permet (à notre niveau) que l’écoute de la parole devienne vie.




[1] Où pourrait on dire aujourd’hui que le fait de donner sa vie à jésus est une garantie de réussite ? 

Adam où es-tu? Caïn où est ton frère?

                       OBEIR  DESOBEIR 


Introduction.

La question de l’obéissance (c’est l’un des vœux demandé aux clercs ou aux personnes consacrées) est une vraie question.

J’ai vu récemment à la télévision un « Maigret » qui se passait dans un hôpital tenu par des religieuses. La règle de cet ordre interdisait tout contact avec les visiteurs et la transgression de cette règle conduisant à une punition. Or là, la désobéissance à la règle (ici glisser un papier dans la poche du célèbre commissaire) était nécessaire et permettait de comprendre que l’accident n’en n’était pas un mais un meurtre.

Alors qu’est ce que obéir ? Ne pas parler, obéir à « la règle » allait dans le sens du mal alors que normalement la règle doit aller dans le sens du bien ou du meilleur. Jésus n’a t il pas montré que s’en tenir à la Loi peut rendre aveugle et sourd : «  Vous dites nous savons et votre péché demeure » Jn9,41.

Une des définitions du Larousse est : « Se soumettre à la volonté de quelqu'un, à un règlement, exécuter un ordre par exemple  Obéir à ses parents, à la loi ».
Mais l’obéissance doit elle être aveugle ? Qui a sur nous ce pouvoir qui nous oblige à nous soumettre ? Devons nous nous sentir coupables si dans certains cas nous ne nous laissons pas faire ? L’obéissance nous permet elle d’avoir « une bonne vie » (ce qui est le message du premier testament) ou fait elle de nous des robots ?

 Bref la question de l’obéissance me « travaille » comme on dit. Le lien classique entre obéir et récompense ou désobéir et malheur, permet (j’y reviendrais de se poser la question du mal).

Plusieurs billets seront consacrés à cette réflexion sur les conséquences du non 
obéir.

Le premier ce centrera sur la notion de perte, d’exclusion (chapitres 3 et 4 de 
la genèse) et plus précisément sur la notion de territoire, sachant qu’avoir un territoire donne l’impression d’exister.

Le second, à partir de quelques versets du psaume 44, posera (à ma manière) la question du mal.

Le troisième lui voudrait poser la question de la « responsabilité ». Suis-je responsable de ma rose et suis-je coupable s’il lui arrive quelque chose. N’y a t il pas une confusion entre aimer et être responsable entre responsable et solidaire.
_____________



I OBEIR DESOBEIR : UNE  QUESTION DE TERRITOIRE.



Dans la Genèse, la possession de la terre est quelque chose de fondamental. C’est comme une récompense de l’obéissance. Ainsi en Genèse 13,14  «  Le SEIGNEUR dit à Abram après que Loth se fut séparé de lui : « Lève donc les yeux et, du lieu où tu es, regarde au nord, au sud, à l'est et à l'ouest. 15Oui, tout le pays que tu vois, je te le donne ainsi qu'à ta descendance, pour toujours. 16Je multiplierai ta descendance comme la poussière de la terre au point que, si l'on pouvait compter la poussière de la terre, on pourrait aussi compter ta descendance. 17Lève-toi, parcours le pays en long et en large, car je te le donne. » 18Abram vint avec ses tentes habiter aux chênes de Mamré qui sont à Hébron ; il y éleva un autel pour le SEIGNEUR.

Si Abram est une sorte de prototype de l’obéissance, le début de la Genèse montre bien que la sanction liée à la non obéissance est la perte du territoire.

 En effet dans le chapitre 3 de la Genèse, le désobéir provoque l’exclusion du couple d’un lieu où la vie quotidienne semblait merveilleuse et bien différente de ce que l’on vit au jour le jour sur notre planète. Dans le chapitre 4, suite au meurtre d’Abel, l’exclusion du clan familial est prononcée comme sanction.
La désobéissance  a provoqué l’exclusion. Je ne dis pas l’abandon car le Dieu de la Genèse ne continue à parler et à mettre en garde ceux qu’il a créé.

Mais dans notre manière de lire les événements cela donne bien souvent ceci: « tout malheur est la conséquence d’une désobéissance » (cf le livre de Job qui se bat contre cette affirmation) ce qui est loin d’être toujours le cas, car le mal existe : Isaïe ne fait-il pas dire à Dieu : « Je façonne la lumière et je crée les ténèbres, je fais la paix et je crée le malheur ; c'est moi, le SEIGNEUR (YHWH), qui fais tout cela ».Is 45, 7

Il est possible de relire ce qui se passe pour pour Adam puis pour Caïn en terme de perte de territoire, territoire de l’intime, territoire de la famille.

1 « Adam où es-tu ? » ou l’histoire de la perte du territoire de l’intimité.

Le Dieu de la Genèse est un Dieu très proche des humains. Il converse avec eux, leur pose des questions qui mettent ceux ci dans l’embarras et aux quelles comme des enfants pris en faute, ils répondent à côté de la plaque, car ils ont peur de la réaction de l’adulte (on pourrait dire du parent). Il en va ainsi pour Adam et Caïn.

A la question « où es-tu »Adam répond par « J’ai eu peur… ». Puis il  plaidera non coupable en renvoyant la faute sur Eve qui la renverra sur le serpent. Tout le monde sera puni mais surtout tout le monde sera exclu.



L’homme n’aura plus accès à ce territoire ou Dieu se promène à la brise du soir, où les arbres donnent de bons fruits, où les animaux ne sont pas des dangers. La sanction est l’exclusion de ce territoire d’intimité et de douceur. Par certains côtés ce territoire fait penser à un utérus maternel (intimité totale avec la mère), qu’il faut quitter, mais dont la nostalgie demeure. Seulement il est plus facile de faire son deuil d’un tel lieu si on y est pour quelque chose. Sinon l’autre qui vous met dehors, en toute connaissance de cause, est un être abominable.
Et puis savoir que l’on a été mis dehors par sa faute, cela laisse presque intact la possibilité d’y revenir un jour (même si le Dieu a mis des anges avec des épées devant la porte. Et d’un certaine manière le salut c’est bien cela : retrouver l’intimité perdue.

Cet écrit de la Genèse montre le lien qui est fait chez l’être humain entre désobéissance et abandon : ce dernier surtout dans le psychisme de l’enfant est toujours vécu comme a conséquence d’un acte mauvais.

L’exclusion est une de nos terreurs des plus archaïques  et des plus profondes: être tout seul, être abandonné ne pas pouvoir se défendre, ne pas avoir de bras qui vous entourent, qui vous retiennent qui vous empêchent de tomber et de vous abimer dans le vide.

Il me semble que les 5 premiers commandements du livre de l’exode montrent comment ne pas commettre cette faute où l’on fait comme si Dieu (l’Autre) n’existait pas, où l’on doute de lui et de sa parole, bref où l’on prend sa place.

Prendre la place de l’autre c’est ne pas respecter les limites, entrer dans la confusion et cela engendre la mort, mais aussi la violence comme cela est démontré dans l’histoire de Caïn. On dit aujourd’hui que le « manger de tous les arbres sauf de celui de la connaissance » est un interdit structurant, car il oblige à s’imposer une limite et les limites c’est pratiquement tout le travail de la création dans le début de la Genèse. En ce sens, l’homme est bien à l’image de Dieu. Ne dit on pas aussi que le sabbat, le repos de Dieu est comme une limite qu’Il s’impose. Dieu cesse de travailler pour travailler car il a terminé ce qu’Il avait prévu.

Pour en revenir à la question posée posée par Dieu, certes Adam dit Je, mais d’une certaine manière il ne prend pas la parole, il ne se dit pas « ça a été plus fort que moi, j’ai gouté du fruit de ton arbre, et je n’aime pas trop ce que ce fruit a fait en moi ». Il renvoie sur l’autre et il ne se situe plus comme sujet. On pourrait dire que lorsque l’humain ne parle plus en « je » il se coupe de la relation avec celui qui lui dit « tu ».il projette ensuite l’abandon sur l’Autre, parce que c’est beaucoup plus facile. Alors un lien se fait entre « je suis dehors parce que je suis méchant ». Et tout abandon devient signe d’une punition donc d’une faute. 

2-Caïn où est ton frère ? » Perte du territoire familial, clanique.

A la question « où est ton frère », Caïn répondra « suis je le gardien de mon frère», ce qui revient à dire que ce n’est pas son problème, pas sa responsabilité. En cela il a d’une certaine manière raison d’autant que son frère est un adulte, mais ce dont il est responsable c’est de n’avoir pas su museler « la bête tapie en lui », la bête de l’envie, la bête qui conduit au meurtre.
Peut être que si Caïn avait répondu à la question : « mon frère est dehors je l’ai tué, je n’ai pas su maîtriser la bête (de l’envie) tapie en moi », peut être qu’il n’aurait pas été exclu de la famille, du clan. En « tu-ant » Caïn a tué un « tu » un autre, un différent de lui, mais aussi un semblable à lui. Ce qui est frappant dans le texte c’est que Caïn va au champ avec son frère et qu’il n’y a pas de mot, mais une gestuelle : il se jetta, il se dressa, Abel n’a pas la parole.

 Si prendre la place de Dieu (l’éliminer d’une certaine manière) conduit à l’ exclusion d’un territoire que l’on pourrait presque qualifier de maternel (utérus) tuer l’autre pour prendre sa place provoque une autre exclusion territoriale, celle du clan.

C’est un deuxième cercle d’exclusion : sortir de la sécurité de ceux qui parlent comme vous, qui ont les mêmes valeurs, les mêmes structures. Ne plus profiter de la protection du groupe. Caïn en tuant son frère l’a exclu  (d’une manière radicale) de la famille, dont lui à son tour (sorte de loi du talion) sera exclu  avec les risques que cela comporte. Ultérieurement (exode et lévitique) le meurtrier sera mis à mort.

Les fautes liées au « frère » sont l’objet des 4 derniers commandements, la pivot étant celui qui est lié aux parents… parents qui font une sorte de synthèse entre Dieu père (et mère) et Dieu frère en tout homme, mais commandement aussi qui n’est pas sous forme négative..

L’explication de l’exclusion (de la perte, du manque)  est donc la conséquence d’une non obéissance. Quand le peuple choisi se  retrouvera en exil, c’est comme cela qu’il comprendra son histoire. Parce qu’il s’est détourné, parce qu’il a transgressé, il se retrouve tout seul au milieu d’étrangers.

La quête de sens est certainement une des caractéristiques de l’être humain. Mais peut être serait il nécessaire de sortir du lien abandon désobéissance pour entrer dans une autre relation et avec nos proches et avec Dieu. Car ce que j’ai souligné comme d’autres avant moi, c’est qu’il ne s’agit pas tant d’une désobéissance que du fait de ne plus se situer comme un être de parole, comme un Je face à un Tu que ce soit Dieu ou le semblable.

Il est normal que je pose des actes qui ne sont pas bons, mais que si je reconnais  (ce que Caïn n’a pas fait) que ces actes sont mauvais, alors je me mets dans une position de relation avec l’autre, je reste dans la relation je n’esquive pas ma responsabilité et de reste un être de parole.

3 La reconquête du territoire : Jésus.

 Dans la bible on note une évolution sur la transmission du péché. On trouve dans l’exode la phrase suivante : Ex 34,7 « Je suis YHWH, qui garde sa grâce à des milliers, tolère faute, transgression et péché mais ne laisse rien impuni et châtie les fautes des pères sur les enfants et les petits-enfants, jusqu'à la troisième et la quatrième génération ».

Cette manière de voir la faute renvoie un peu à ce que nous connaissons dans le vendetta : la faute sera vengée bien des générations plus tard, donc pas de pardon tant qu’il n’y a pas eu « réparation ».

Quelques siècles plus tard, Ezéchiel pourra écrire. : Ez18, 20  «  Celui qui a péché c’est lui qui mourra ! Un fils ne portera pas la faute du père ni un père la faute de son fils : au juste sera imputé sa justice et  au méchant sa méchanceté », On en revient à la responsabilité individuelle.

Il est d’ailleurs intéressant de remarquer que dans le Psaume 89,31-33   Dieu ne rend pas David responsable des fautes de sa descendance. La descendance sera punie, mais Dieu ne chassera pas David pour autant : je ne lui retirerai pas mon amour…

Obéir finalement qu’est ce que c’est ? L’exode fait dire au peuple : « nous ferons et nous obéirons (ou nous écouterons dans d’autres traductions) ». Ex 24,7 Il y a un lien entre obéir, écouter agir.

Or l’écoute est fondamentale, elle permet le discernement.

Il ne s’agit pas d’obéir de manière robotique, parce que cela nous détruit, même s’il faut apprendre à obéir (je suis toujours surprise quand je regarde certaines séries policières françaises par ces phrases autoritaires ; taisez vous, asseyez vous, qui ne sont pas respectueuse du tout). Obéir au pouvoir pour ne pas avoir d’ennuis, pourquoi pas, mais cela c’est de la crainte.

Si Jean écrit : Au commencement était le verbe » c’est bien que la parole est le fondement. Chaque fois que nous travestissons la parole nous perdons le contact avec le divin qui est en nous. L’obéissance qui repose sur la peur, est une sorte de leurre. La véritable obéissance repose sur l’amour qui fait que l’Autre est présent en soi et que cette présence accueillie fait de l’être humain un Je capable de se laisser modeler par la relation amoureuse.

Le cadeau que nous a fait Jésus en se montrant « obéissant jusqu’à la mort sur la croix » c’est le don de l’Esprit qui rétablit la relation à l’autre, qui nous rend notre liberté. Et qui nous rend la possibilité d’être dans une obéissance qui conduit à la vie, à la liberté. Elle nous permet de retrouver l’intimité perdue et de devenir le lieu de la présence de Dieu : nous demeurerons en lui…

L’obéissance, la vraie est là pour faire de nous des être de parole, des êtres sur lesquels on peut compter, pas des robots. Obéir, écouter, c’est être en relation, c’est laisser souffler en nous le vent de l’Esprit et se laisser saisir et guider par lui.