samedi, septembre 10, 2011

B comme Baptême

B comme Baptême.




Pourquoi ai-je pensé à ce mot ? Peut-être parce que comme beaucoup de mots employés dans nos églises, il me semble avoir un peu perdu de son sens, de sa portée. Mettre un peu d’eau sur la tête d’un enfant, certes avec les mots « je te baptise… », c’est bien, mais est ce que ce rituel là est suffisant non pas pour que ce qui doit advenir advienne c’est à dire l’entrée dans une autre réalité, dans autre famille[1], mais pour qu’il signifie réellement quelque chose: passer de la mort à la vie. Quelle mort, quelle vie ?  

Une définition de ce mot : « immersion rituelle par laquelle on accède à la vie spirituelle » montre me semble t il que ce mot a perdu de sa force. 


Une immersion, c’est être mis totalement dans un milieu que l’on ne connaît pas, c’est être plongé dans un milieu qui vous saisit du dehors et peut-être du dedans ; c’est un milieu qui va provoquer un changement : l’accès à la présence de l’Esprit saint en soi. 


Quand dans les feuilletons qui fleurissent sur les chaines de télé, un policier est en « immersion » dans un milieu, il perd tout contact ou presque avec son milieu à lui, il prend la manière d’être et de penser du groupe pour arriver à y prendre une place, des responsabilités, mais la difficulté est bien de continuer à rester ce qu’il était et ce qu’il est : un flic. L’immersion pouvant dans ce cas être dangereuse, mais ne l’est elle pas ?


Ce mot on le trouve uniquement dans le nouveau testament, avec le personnage de Jean qui propose un baptême par immersion dans le Jourdain. Ce passage dans l’eau signifiant d’une part une purification par l’eau, mais aussi le changement indispensable pour pouvoir accueillir celui qui doit venir, celui qui va juger, puisque c’est comme cela que dans les synoptiques que Jean voit Jésus.





On peut imaginer que la prédication du baptiste crée une peur et en cela il serait un peu comme Jonas à Ninive qui crie : encore 40 jours et Ninive sera détruite, et que cette peur provoque le repentir et la conversion. Entrer dans le Jourdain  c’est dire « j’ai fait des choses mauvaises, sales, je les laisse dans l’eau du Jourdain, je les abandonne, et je vais changer parce que ces eaux m’ont purifié comme jadis elles ont purifiée l’eunuque de sa lèpre. (2R5,14). La lèpre du mal (du péché) part et il est possible alors de vivre autrement et c’est cet autrement qui fait que celui qui doit venir ne me condamnera pas. .


Même si les représentations iconographiques montrent un Jean qui verse de l’eau sur la tête, on peut se représenter les choses autrement. Je veux dire qu’on peut être complètement immergé dans le Jourdain. Si on maintient la tête dans l’eau, sous l’eau il y a perte du souffle, il y a angoisse et l’eau devient un milieu où l’on peut mourir. 


Cette expérience de mort et de vie est une expérience fondamentale pour l’humain. D’abord parce que nous avons tous quitté un milieu d’eau pour aller dans un milieu d’air et que cela nous a donné la vie (la naissance) et parce que ce passage nous le faisons et refaisons de nombreuses fois dans notre existence. Le baptême c’est aussi le passage. Passer d’un état à un autre, aller d’un avant à un après, changer parce que ce passage nous change.

Quand Jésus dit : Lc 12, 50 : « Je dois être baptisé d’un baptême et quelle n’est pas mon angoisse jusqu’à ce qu’il soit consommé » ou dans Mc 10, 39 :  " Pouvez vous boire la coupe que je vais boire et être baptisé du baptême dont je vais être baptisé ?" je pense comme le dit Paul qu’il s’agit de la mort. De la mort on ne ressort pas. Lui en est ressorti mais transformé, tout Autre, même si dans sa vie terrestre il était déjà autre.


Pour Jésus, il y a peut être eu aussi immersion dans un autre monde, celui de la victime. Jusqu’à son arrestation Il est le maître, il est celui qui enseigne, celui qui guérit, Celui qui dirige. Quand il bascule dans ce monde des victimes (certes il réalise la prophétie de Isaie 53) mais il fait aussi cette expérience des victimes : être humilié, nié, bafoué et surtout être abandonné. Car si l’évangéliste Jean fait dire à Jésus  Jn16, 32 « qu’il n’est jamais seul » il n’en demeure pas moins que l’abandon  que ce soit celui des siens ou celui de son Père,(Ps 22 crié sur la croix) Jésus l’a vécu dans tout son être..

Ces deux mondes, celui où l’on devient victime et celui de la mort, sont des mondes que l’on ne traverse pas impunément. Tout l’être est concerné. Et c’est peut être cela que l’on oublie un peu aujourd’hui dans le baptême des enfants. La robe blanche c’est joli, les dragées aussi, mais le baptême c’est passer par la mort.

Peut être que le fait de parler du baptême du feu pour les soldats pourrait permettre de mieux comprendre ce que le baptême fait en nous. La petite phrase de l’épître aux Hébreux He 10,31 : « il est terrible de tomber dans les mains du Dieu vivant »traduit peut être ce qui se passe dans le baptême.
Quand un soldat est pour la première fois de sa vie, confronté (même s’il s’y est préparé) au feu de l’ennemi, aux obus, il se passe quelque chose dans tout son être. Tous ses sens sont à l’épreuve, le voir, l’odorat, le toucher, l’audition, même le goût. Tout son être du plus externe au plus interne subit quelque chose qui le dépasse, qui l’enveloppe, qui crée aussi en lui de la peur mais peut être aussi autre chose. Ce qu’il a vécu là, qui est une sorte de mort aussi à ce qu’il était avant, fait de lui quelqu’un d’autre. On peut presque parler d’une initiation.

Je crois que baptême pour nous cela devrait être quelque chose de ce type. C’est un évènement qui nous prend totalement complètement, qui nous fait entrer dans une mort,  et qui parce que nous en ressortons vivants nous transforme, fait de nous de re-nés. Peut être qu’il serait bon de reprendre un baptême par immersion (comme cela se fait dans beaucoup d’églises évangéliques) pour les adultes et simplement d’avoir un accueil dans l’église pour les enfants, pour que eux-mêmes fassent la découverte du désir de ce passage.

Peut être que le baptême dans l’Esprit qui pour moi est une immersion de tout l’être (‘dehors et dedans) dans l’Esprit Saint, soit pour certains la manifestation de ce passage. Ce baptême là (mais est ce le bon mot) , du moins pour ce que j’ai pu en expérimenter prend tout le corps, tout l’être. Il s’agit vraiment à un moment, même si c’est bref dans le temps de s’abandonner totalement à quelqu’un (quelque chose oserai je dire) que finalement on ne sait pas forcément définir (est ce le feu, est ce le vent, est ce l’eau, est ce la chaleur, est ce le froid …) mais qui vous enveloppe (immerge) et qui ouvre à du neuf. Ce neuf étant peut être la manifestation de l’homme vivant et le baptême c’est au final cela : faire de nous dès maintenant des vivants.


[1] Oui, je sais, ce n’est pas la bonne réponse, mais le baptême est aussi le signe de l’appartenance à l’église qui permet en révélant Jésus d’entrer dès maintenant dans la vie éternelle

2 commentaires:

AlainX a dit…

votre analyse est intéressante… On pourrait y ajouter des aspects sociologiques et politiques des religions…

Baptiser un maximum et dès le plus jeune âge, permet d'accroître les statistiques de la population chrétienne… A moindre frais…
Cela permet au pape de prétendre qu'il y a des milliards de chrétiens…

Combien de « baptisés », n'en ont pas grand-chose à faire, et s'en moquent comme de leur première couche-culotte…

D'où les demandes croissantes de « débaptisation »…

Giboulee, a dit…

Bonsoir AlainX,

je ne suis pas sûre que les demandes de débaptisation viennent de là, de toutes les manières cela ne concerne plus qu'une toute petite frange...