mercredi, septembre 12, 2012

A propos de l'Evangile de Luc.


Evangile de Luc.

La reprise de l’évangile de Luc en lectionnaire de semaine, m’a titillé les méninges. Certes je pourrais aller lire de très savants auteurs, mais je n’en n’ai pas envie.

Quand on démarre la lecture au chapitre 4, on est un peu saisi par les différences dans le relation des événements avec les autres synoptiques. Jésus a été baptisé (j’y reviendrai peut-être) tenté dans le désert. Il commence son enseignement, (que dit-il, comment s’y prend-il on ne le sait pas, qui rencontre t il  on ne le sait pas). 

Il débarque chez lui à Nazareth. Il s’y affirme comme étant l’envoyé. Que les gens se posent des questions c’est relativement normal. La phrase qu’il emploie « médecin guérit toi-même » est curieuse car en fait elle est comme un précurseur de ce qui se passera sur la croix : "qu’il se sauve lui même" diront les prêtres. De quoi devrait il être guéri pour convaincre les autres de son authenticité, de sa force, de sa divinité ? 

Après la tentative de meurtre, il se retrouve à Capharnaüm, et après la célébration du shabbat il entre dans la maison de Pierre dont on a jamais entendu parler jusque là. Et pourtant Pierre sera un personnage central. Puis c’est la pêche dite miraculeuse et l’appel des quatre s’appuie sur un miracle impressionnant et une reconnaissance de la divinité de Jésus par Pierre. 

Pierre sera finalement dans tout l’évangile une sorte de faire valoir de Jésus. Mais on ne sait pas grand chose de lui. On saura par Paul qu’il est marié, mais la belle –mère dont il est question au chapitre 4 est elle la mère de sa femme ou la femme du père de Pierre… Bien entendu cela n’a pas d’importance, puisque ce qui compte c’est la guérison qui confirme ce qui vient de se passer à la synagogue : sors de cet homme, sors de cette femme. 

Ce qui est curieux c’est que Luc accole déjà les deux prénoms alors que le nom de Pierre ne sera donné qu’au chapitre 6. Mais il me semble surtout que ce qui différencie Luc des autres évangélistes c’est l’introduction de deux héros (si l’on peut dire), Jean le Baptiste et Jésus.

Ces deux hommes qui sont parents, (Elisabeth étant la cousine de Marie) sont issus de deux couples particuliers. Deux vieux pour Jean,  un vieux (enfin on le suppose) et une toute jeune pour Jésus.  Une des familles n’a pas de descendance et en souffre, (Elisabeth et Zacharie) l’autre (Marie et Joseph)  théoriquement n’en veut pas mais ce n’est pas dit dans les écritures canoniques.

Ensuite on a deux annonces très semblables faites par l’Ange du Seigneur deux réponses à la fois semblables mais différents puisque Zacharie qui met un peu en doute la parole adressé perdra le parler durant la grossesse de sa épouse alors que Marie s’ajuste à la demande. Deux prénoms donnés avant la naissance, puis deux enfants qui viennent au monde l’un « bien au chaud dans une maison » l’autre  « dans une étable ». Entre ces deux enfants un lien dès le tout début : « l’enfant a tressailli en mon sein » preuve que l’embryon porté par Marie était bien germe d'Esprit Saint.

L’un et l’autre portent des prénoms qui d’une certaine manière les structureront. Jean qui signifie « Dieu fait grâce » annoncera bien cela sur les bords du Jourdain. Un libérateur va venir, mais pour sortir de l’esclavage de l’envahisseur et de l’esclavage du péché, il faut à la fois changer de conduite et accomplir un rituel de purification : être plongé dans les eaux du Jourdain, y laisser tout l’impur pour être purifié. Mais celui qui doit venir est présenté comme un Dieu de vengeance et non comme un Père.

L’autre prénom « Dieu sauve », sera comme mis en activité dès le début de la vie publique, car le fils de Marie sauve et guérit les personnes qui viennent à lui, qu’elles reconnaissent ou non leur péché d’ailleurs. Il y a une largesse, une abondance qui sont certainement de l’ordre de divin. Jésus comme Josué (même prénom) feront entrer dans la terre de Dieu.  

Leur destin a des points communs.

Jean annonce la venue de celui qui doit venir, pour cela il prêche la conversion (faire ce qu’il faut pour ne pas être jeté au feu par celui qui vient, image violente d’un Dieu justicier) Jésus annonce qu’Il est celui qui vient pour que ce que son prénom signifie (Dieu sauve) soit accompli (guérison, enseignement).

Jean pratique un signe le baptême dans l’eau. Jésus proposera le baptême dans l’Esprit.

L’un et l’autre meurent de mort violente à peu de temps d’intervalle. L’un par l’ordre du roi Hérode, l’autre par ordre de Pilate procurateur de Judée. L’un comme l’autre meurent parce qu’ils ont parlé: L’un parce qu’il a rappelle la Loi l’autre parce qu’il a revivifié la Loi. L’un a déplu au roi, l’autre a déplu au sacerdoce. Curieusement les deux personnages qui ordonnent leur mort n’ont pas envie de la donner, mais ne peuvent résister à la pression sociale.

Les disciples du premier viennent chercher le corps et le mettent dans un tombeau, mais personne ne sait où ce tombeau se trouve. De résurrection ou d’enlèvement il n’est pas question. Le corps de Jésus est mis dans un tombeau lui aussi par des disciples mais le corps disparaît, et l’histoire des deux hommes se différencie, quoique l’un et l’autre ont des disciples qui essaiment dans le monde romain.

On peut enfin noter que Jean le Baptiste est souvent une référence pour Jésus : aux pharisiens qui lui somment de dire qui il est (Luc 20, 4), il répond par un questionnement sur Jean : «  le baptême de Jean venait il du ciel ou des hommes ? Et cette dispute confortent les pharisiens dans leur décision de faire mourir cet homme qu’ils ne peuvent reconnaître pour le Messie.

Deux héros, deux histoires, deux fins différentes. Dieu fait grâce (Jean) pour que tous les hommes soient sauvés (Jésus). L’un et l’autre sont nécessaires pour comprendre l’histoire de la Présence de Dieu dans notre monde. 

2 commentaires:

AlainX a dit…

J'aime bien cette analyse que tu fais.
J'en retiens ceci, principalement :
on n'est pas « sauvé » contre son gré.
Être sauvé suppose une coopération active.
Autrement dit un vouloir
(j'espère ne pas avoir compris de travers…)

Une phrase m'intrigue :
" « l’enfant a tressailli en mon sein » preuve que l’embryon porté par Marie était bien germe d'Esprit Saint."

Une preuve ?

Giboulee, a dit…

Bonjour Alain, Luc raconte que dès que l'ange la quitte, elle aussi quitte Nazareth pour se rendre chez sa cousine. Ce qui veut dire que c'est le tout début de la grossesse et que quand elle arrive chez sa cousine, elle n'a pas un gros bedon.. C'est encore un germe de bébé et ce germe là, provoque une effusion de l'Esprit que Elisabeth ressent dans son ventre (l'enfant qui tressaille) que dans son cerveau (si je puis dire) car elle reconnaît en Marie la mère de son Sauveur.

Voili voilou..