vendredi, septembre 20, 2019

La guérison de l'esclave d'un centurion - Lc 7,1-10.

C'est un texte bien connu, puisqu'à chaque messe on répète du moins partiellement la phrase prononcée par le centurion de Capharnaüm: "Seigneur je ne suis pas digne que tu viennes dans ma maison, mais dis seulement une parole, et ..."

Je mets des points de suspension, car la demande du Centurion concerne son esclave, alors que la notre, nous concerne. Ce qui m'a toujours frappée, c'est qu'on ne sait pas quelle parole Jésus a prononcé, puisqu'il loue la foi de cet étranger au peuple. 

Je me suis d'ailleurs demandé si, dans l'optique lucanienne, cette péricope n'était pas à rapprocher de celle que l'on trouve dans les Actes des Apôtres, à savoir celle du Centurion Corneille, comme si Luc voulait montrer que non seulement la bonne nouvelle sera accueillie dans les nations, et qu'elle est bien pour tous, mais que la foi de ceux que les juifs considèrent comme des impies est peut-être supérieure à la foi du peuple choisi. 

Cet épisode, j'ai eu envie de présenter sous deux angles différents, celui du centurion, et celui d'une personne qui entend ce qui se passe et qui le raconte ensuite à des amis.


Le centurion romain raconte....

Mon esclave fidèle, mon esclave qui a été comme un père pour moi, qui s'est occupé de moi et de mes fils, est là, tremblant de fièvre et je sais qu'il va mourir. Les médecins sont venus, mais ils disent qu'il n'y a rien à faire. Et pourtant, il y a bien ce Jésus, qui fait des miracles, seulement, même si j'admire sa religion, jamais il ne viendra chez moi qui ne suis pas juif. Mais s'il sait que j'ai donné mes deniers pour bâtir la synagogue dans laquelle il a parlé, dans laquelle il a pu guérir la main d'un homme; peut-être qu'il acceptera de rentrer dans ma maison pour guérir mon vieil esclave. 

Je me suis dit que je pourrais envoyer deux ou trois de mes amis, des notables juifs - parce que je peux quand même dire amis, même si je suis l'occupant - pour lui demander de venir chez moi, pour guérir mon esclave. Et ils sont partis à sa rencontre. 

Un peu de temps a passé, et je me suis dit que non, ça ne devait pas se passer comme ça. Il ne devait pas rentrer chez moi. Si mon empereur s'invitait chez moi, chez moi pauvre centurion de son armée, je me sentirais indigne d'un tel honneur. Mais là c'est moi, l'occupant, qui lui demande à lui, d'entrer chez moi, lui qui est tellement plus que César. Cet homme, il est différent de Jean le Baptiste que je suis allé écouter et qui m'a fait comprendre combien j'étais injuste envers cette population. Il y a en lui une puissance bien plus grande que celle qui est dans mon empereur. Il commande à la fièvre, il commande à la tempête, il commande à la lèpre. Sa parole est forte. 

Alors non, je ne vais pas lui demander de venir chez moi, je vais simplement lui demander qu'il prononce ces mots qui guérissent, qui sauvent. Et ces mots, parce qu'il est un homme pas comme les autres, un homme vraiment de Dieu, auront en eux la force de guérison. Ses mots ne reviennent pas sans avoir accompli ce qu'ils doivent faire. Cette phrase, elle n'est pas de moi, mais de l'un de leur prophètes, et elle parle de leur Dieu.. Je crois vraiment que cet homme, dont le nom veut dire "Dieu sauve", il est vraiment le messie.

Alors j'ai envoyé d'autres amis, pour lui dire de ne pas venir, que je n'étais pas digne de lui, que je reconnaissais sa puissance, et pour lui demander qu'il prononce simplement ces mots qui guérissent le corps et l'âme. Et j'ai attendu leur retour.

Seulement voilà, d'un coup mon esclave s'est redressé sur son lit, comme si quelqu'un l'avait pris par la main. Il a demandé à boire, et la fièvre était tombée. Mes amis sont arrivés à ce moment là et m'ont dit que Jésus avait dit qu'il n'avait jamais rencontré en Israël quelqu'un avait une foi en lui semblable à la mienne. Et j'ai eu l'impression que cela voulait dire que le salut dont il parle n'est pas seulement pour les juifs, mais pour toutes les nations, pour tous les hommes. Et cela m'a profondément réjoui. Peut-être qu'il voudra quand même entrer dans ma maison…




Quelqu'un qui est dans la foule, raconte.. 

Il est vraiment très fort ce Jésus de Nazareth. Il guérit, il chasse des démons, mais là il a guéri un homme sans même venir le voir, sans même le toucher et même sans paroles, je veux dire que souvent il menace la fièvre, il menace les éléments qui lui obéissent, mais là, rien. Juste une phrase: jamais je n'ai trouvé pareille foi en Israël.. Il parlait de ce centurion qui vit chez nous à Capharnaüm depuis des années. 

A force de nous côtoyer, je crois que ce centurion romain s'est rendu compte que son empereur, même si sa parole fait force de loi dans tout l'empire, même si sa puissance est grande, ne pouvait pas être considéré comme un Dieu. Et il a découvert notre Dieu, notre Dieu qui nous a fait sortir d'Egypte, notre Dieu qui nous a ramené de l'Exil, notre Dieu qui aujourd'hui visite son peuple dans la personne de ce Jésus, de ce Dieu qui est avec nous, de ce Dieu qui est notre force.

Ce centurion, qui est un homme de valeur, a un esclave âgé, auquel il tient beaucoup. On dit que cet homme l'a élevé, et l'a suivi depuis toujours. Mais il est tombé malade, et il est à l'article de la mort. Alors il a pensé à demandé au nouveau prophète de venir chez lui pour qu'il guérisse son esclave.

Il lui a envoyé en ambassade des notables, et Jésus s'est mis en route. Il n'était pas loin quand d'autres sont venus vers lui. Ils lui ont dit que leur ami ne voulait pas mettre Jésus dans l'embarras en lui demandant d'entrer dans une maison païenne. Et surtout ils lui ont dit que leur ami, qui a des hommes qui obéissent à ses ordres, donc à sa voix, était certain que si Jésus ordonnait à la fièvre de tomber, elle tomberait, parce que que lui était bien plus puissant qu'un simple centurion. 

Et là Jésus a été, comment dire cela, surpris, mais c'est bien plus que cela. Il s'est arrêté alors que nous étions tout près de la maison du centurion; et contrairement à ce que je pensais, il n'a pas prononcé de phrase pour chasser le démon qui rendait cet homme malade, il n'a pas prié. Non rien de tout cela. Il a juste dit que c'était la première fois de sa vie que quelqu'un qui n'appartient pas au peuple choisi, avait une telle foi en lui. 

Des amis m'ont certifié que l'homme s'est levé, qu'il avait retrouvé la santé, et cela sans que Jésus le touche.. Qu'est ce que Jésus a voulu dire quand il a parlé de la foi de ce Romain? Est-ce que les Romains, ces païens qui croient en des multitudes de Dieux et qui imaginent même que leur Empereur est un Dieu, ces impies, croiront en notre Dieu, grâce à cet homme? 

Je me pose beaucoup de questions, mais je suis sûr que s'il continue à faire de telles choses, ça finira mal pour lui. 

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