vendredi, septembre 20, 2019

Un convive raconte ce qui s'est passé chez Simon le Pharisien: Luc 7,36-50

Cet épisode d'une femme qui vient, au cours d'un repas, prendre soin des pieds de Jésus et les oindre de parfum, se retrouve dans les autres évangiles, mais pas au même moment. 

La femme dont il est question ici n'a pas de nom, et c'est peut-être une bonne chose. 

J'ai voulu ici montrer l'étonnement d'un des convives qui a assisté à cette scène étonnante, mais très choquante pour lui: qui est cet homme qui a le pouvoir de pardonner les péchés? 


Un convive raconte.

Notre ami Simon, lui qui se targue de respecter la Loi comme personne, et d'être un juste, a comme souvent offert un repas. Il avait invité Jésus, et c'était l'occasion pour nous de voir de plus près cet homme dont on parle tant, cet homme qui parle de lui en se nommant le Fils de l'homme.

Il était donc là quand est arrivée une de ces femmes aux longs cheveux qui volent sur leurs épaules quand elles sortent, une de ces femmes qui sont de mauvaises femmes, qui passent parfois d'un homme à l'autre. Avant qu'on ait pu faire quoi que ce soit, elle était là, aux pieds de Jésus, à genoux. Et elle pleurait, et ses larmes mouillaient les pieds de Jésus, qui se laissait faire. On aurait dit un peu une maman entrain de laver les pieds de son enfant quand il rentre à la maison. Quand les pieds lui ont paru enfin propres, enfin c'est l'impression que j'ai eue, elle a cassé le col d'un flacon de parfum, peut-être que ce flacon lui avait été donné par un admirateur, parce que oui, cette femme est belle, très belle, et elle a oint les pieds de Jésus qui n'a rien dit, rien fait, mais qui souriait tout en mangeant, un peu comme s'il était au septième ciel. 
Je dois dire que j'étais un peu étonné, parce que nous savions tous que cette femme n'était pas recommandable. 

Et voilà que Jésus s'adresse à Simon et lui demande de l'écouter. Et il se lance dans une petite histoire de débiteurs qui ne peuvent pas rembourser leur dette et d'un créancier qui remet la dette aux deux, sauf que l'un doit 500 pièces d'argent et l'autre seulement 50. Et il pose une drôle de question, à savoir lequel des deux aimera le plus le créancier; moi, j'aurais parlé de reconnaissance, pas d'amour. Toujours est-il que Simon a répondu ce qui paraît logique: que c'était celui qui devait le plus, qui allait aimer le plus. Peut-être que reconnaissance et amour ça va ensemble pour certains. 

Jésus lui a dit qu'il avait bien répondu; mais moi je me demandais un peu où il voulait en venir.

Et puis là, il lui a fait remarquer que lui, Simon, n'avait pas été très hospitalier envers lui, car il n'avait pas proposé d'eau pour qu'il se lave les pieds, mais que la femme, elle, avait versé ses larmes pour lui laver les pieds. Puis il a continué en disant qu'il n'avait pas reçu de marques d'affection, qu'il était un peu comme une bête curieuse dans ce repas, alors que la femme, elle avait embrassé ses pieds, comme on embrasse les pieds de son bébé (ça c'est moi qui le dit); parce que pour embrasser les pieds de quelqu'un il faut soit beaucoup l'aimer, soit lui baiser les pieds en signe de respect, mais là, c'était bien de l'amour. Et pour terminer, il a parlé du parfum, comme d'une onction, et il a reproché à Simon de ne pas lui avoir donné une onction d'huile quand il était entré chez lui, alors que la femme, elle lui avait oint les pieds, en signe de respect, en signe d'amour. Un peu aussi comme s'il disait à Simon qu'il n'avait reconnu en lui, l'envoyé, celui dont parle le prophète Isaïe. 

Nous étions tous un peu mal à l'aise, parce que nous n'avions pas vu cela du tout dans ces gestes. Et Jésus alors a dit que les péchés de cette femme étaient pardonnés, parce qu'elle avait montré beaucoup d'amour. 

Et là, nous avons réagi en nous même. Car pour quoi se prend-il celui-là, pour remettre les péchés. Enfin il n'a pas dit "Je te remets ta dette", mais "Toute ta dette est remise", comme il avait déjà dit à un homme paralysé à Capharnaüm. Il ne lui a pas dit de rentrer chez elle, comme il l'avait dit à l'homme, mais il lui a dit d'être en paix, et de rentrer chez elle. Et je pensais qu'au lieu de verser ce parfum sur les pieds, en quelque sorte de le gaspiller, elle aurait mieux de vendre ce parfum et de donner l'argent à des pauvres, là elle aurait respecté un peu la loi. Mais non, il a juste dit "Sois en paix, ta foi t'a sauvée". 

Alors là, je crois que j'ai compris quelque chose. Cette femme que moi je méprise, cette femme que je regarde de travers, cette femme de la ville, quelque chose s'est passé en elle. Car, après les mots de Jésus, elle s'est mise debout, elle nous a tous regardés, elle l'a regardé lui; et elle est sortie, comme si elle était une reine. Elle était remplie de dignité, elle était transformée. Alors si Jésus est capable de faire cela, avec une telle femme, sera-t-il capable de changer nos cœurs si attachés à nos coutumes, à nos certitudes. Peut-être que je vais me joindre à ceux qui vivent au jour le jour avec lui. Je suis finalement très reconnaissant à Simon de m'avoir laissé partager le repas de ce jour, jour qui est comme une naissance aussi pour moi. 


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