mardi, avril 12, 2005

Les disciples d’Emmaüs.

Les disciples d’Emmaüs. Luc 24/13-33 .
« Notre cœur n’était il pas tout brûlant au-dedans de nous quand il nous parlait en chemin et nous expliquait les écritures ».

Deux hommes, enfermés dans le souvenir de ce qu’ils viennent de vivre, deux hommes traumatisés par la fin du rêve, la perte des illusions, peut-être aussi deux hommes qui ont peur.
On dit que ce peut être un homme et une femme. Cela ne change pas grand-chose. Ils sont enfermés dans leur silence, dans leur tristesse, dans leur souffrance.
Ils cheminent, ils sont comme murés dans leur souffrance, dans leur déception.Des mots, mais quels mots?

Un autre alors les rejoint. Leur parle, et voilà que le rythme change : ils marchaient un peu en somnabules et voilà une rupture : ils s’arrêtent.
Quand la tristesse est trop grande pour pouvoir en sortir seul la présence et le questionnement d’un tiers, peut permettre de sortir de l’isolement, de la « prison ».

L’autre interroge, pose des questions et permet certainement que des mots soient dits.
Car là au travers de l’histoire qu’ils racontent, on sent bien la désillusion, et cela à beaucoup de niveaux. Car comment faire maintenant confiance en ceux qui ont le pouvoir, les prêtres, alors qu’ils ont machiné la mort du juste… Comment faire confiance en Jésus, même si on ne trouve plus son corps, puisque de toutes les manières il s’est fait avoir, il ne s’est pas montré comme le messie attendu par Israël. Comment retrouver confiance en soi quand tout s’effondre ?

Alors maintenant, l’autre parce qu’il s’est fait oreille, peut se faire parole, donner du sens à ce qui semble être le non sens.

Alors la vie recommence un peu à circuler. Et voilà que l’heure de se séparer arrive, puisque personne ne sait où va l’autre, le troisième, le sans nom. La demande jaillit : " reste avec nous". Bien sûr, elle est comme sous tendue par le bon sens : il va faire nuit. La demande est normale, mais elle n’a pu se faire que parce que les deux se sont sentis reconnus, entendus, compris. Certains disent que la faim est un signe de vie. Car une autre demande se greffe " mange avec nous".

Et là dans le repas qui va commencer, il y a une reconnaissance ou une connaissance qui se fait.
Est-ce le geste, est ce la parole dite, est ce quelque chose d’autre, car le corps montré par cet homme n’est pas le corps avec des marques du crucifixion. Cela nous ne le savons pas.
Mais celui là, ce n’est pas n’importe qui. Celui là, il a un nom, celui là, il leur a fait quelque chose au-dedans. Celui là, c’est celui que leur cœur aime. Celui là c’est « Jésus le ressuscité ».

Non, la résurrection, ce n’était pas une histoire de bonnes femmes.

Et cet homme qui était dehors avec eux, qui était en dehors d’eux, cet homme qui ne savait pas ce qui s’était passé à Jérusalem, il passe au-dedans d’eux,on peut presque dire qu’il s’incarne en eux. Et il disparaît à leurs yeux, mais pas à leur cœur. Leur cœur devient brûlant
Passage du dehors au-dedans. Passage du dedans au dehors.

Leur cœur brûle, comme le buisson ardent brûle sans se consumer, comme si le feu de la Pentecôte était déjà là.

Mais on peut se poser une question sur cette sensation de brûlure. Dans les mécanismes qui structurent le bébé, il y a celui de l’identification. La mère extérieure petit à petit crée comme une trace dans le psychisme et certaines de ses caractéristiques sont intériorisées. C’est quand ces caractéristiques sont bien intégrées que la mère peut s’absenter, car à l’intérieur de l’enfant il perdure une présence.
Et je me demande si ce qui commence à vivre en eux, ce n’est pas le cœur de Jésus qui est dit "brûlant" d’amour. Et ils deviennent alors des figures du Christ, des témoins, des vivants.

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