samedi, février 25, 2023

Mt 4, 1-11. Les tentations. Premier dimanche de carême. Février 2023

 Mt 4, 1-11. Les tentations après le baptême.

 

 

Curieux, ce texte, qui rapporte un épisode où les spectateurs étaient absents. Alors, que veut nous faire entendre le narrateur? Certainement l'importance du combat qui va se jouer entre le tentateur et le Fils du Très Haut, ce combat qui se joue encore et encore, avec tous ceux qui veulent être les maitres du monde, et qui se joue certainement en nous. Mais peut-être peut-on aussi faire un lien entre ce texte qui est à l'ouverture des évangiles synoptiques, juste avant le début de que l'on appelle la vie publique de Jésus, et un autre texte, qui lui non plus n'aura pas de spectateurs (ceux-ci étant endormis), à savoir la nuit à Gethsémani, nuit qui ouvre le temps de la passion. C'est cette nuit où Jésus subit à nouveau, avec sa mort toute proche, la tentation d'utiliser peut-être son pouvoir de Fils de Dieu et de faire sa volonté. Nuit qui inaugure un autre temps, un temps nouveau. 

 

On peut supposer que c'est Jésus qui a raconté cela à ses disciples. Ne nous dit-on pas souvent que Jésus les enseigne en privé. Et qui d'entre nous n'aimerait avoir été une petite souris pour écouter ce qui a été dit dans le secret? 

 

Comme je l'ai écrit dans le passé, on peut se demander s'il s'agit de tentations ou d'une sorte de mise à l'épreuve, ce qui évoquerait ce qui s'est passé pour Abraham, qui s'est trouvé sur une montagne, avec un choix à faire. 

 

Je renvoie à des textes antérieurs, très centrés sur cette notion d'épreuve, qui vont de  2009 à 2013. https://giboulee.blogspot.com/2009/11/les-tentations-de-jesus-au-desert.html

https://giboulee.blogspot.com/2013/05/epreuve-ou-tentation.html


 Le dernier billet, la complainte du diable; avec un peu d'humour on pourrait dire "damned".  

 


Ce que l'on sait, quand on reprend les écrits, c'est que Jésus vient de recevoir le baptême, qu'il y a eu une théophanie, même si elle est très discrète, et que ce sera avec la présence de l'amour du Père et de l'Esprit saint que Jésus s'affrontera au malin, qui va jouer sur la convoitise, sur l'orgueil, pour essayer d'empêcher le dessein de Dieu de prendre vie et force. Le combat est donc signifié clairement à ce moment où Jésus entre véritablement dans l'histoire.

 

Travail sur le texte

 

1 En ce temps-là, Jésus fut conduit au désert pour être tenté par le diable.

2 Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.

 

La manière dont Matthieu rapporte cet épisode montre qu'il y a là comme un passage obligé (on retrouvera cela autrement à Gethsémani). Il y a bien une lutte. Et, comme Moïse dans les temps anciens, Jésus sur la montagne, en présence de Dieu, ne se nourrit pas, pendant quarante jours et quarante nuits. Cela évoquerait ce deuxième temps dans la vie de Moïse, Ex 34, 27-28 . De la faim de Moïse il n'a jamais été question. Mais cela montre que Jésus est pleinement homme et qu'il a ses limites, même si la durée a une valeur symbolique.   

 

3 Le tentateur s’approcha et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. »

4 Mais Jésus répondit : « Il est écrit : ‘L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.’ »

 

Il y a ce "si", comme si le tentateur n'était pas tellement sûr. Peut-être que ce "si" fera écho à ces demandes de guérison où l'on sent le doute: "Si tu veux, guéris-moi de la lèpre", "Si tu peux, fais quelque chose", "viens à notre secours" dira le père de l'enfant épileptique. Mais le diable étant ce qu'il est, il s'agit bien de pousser Jésus dans ses retranchements. Quant à ce changement de structure, des pierres qui deviennent des pains, il m'a toujours fait penser à un conte de Grimm: petite table couvre toi, mais aussi à ces cœurs de pierre qui grâce à Jésus deviendront cœurs de chair.

 

5 Alors le diable l’emmène à la Ville sainte, le place au sommet du Temple

6 et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas ; car il est écrit : ‘Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre.’ »

7 Jésus lui déclara : « Il est encore écrit : ‘Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu.’ »

 

 

Là, ca bascule un peu dans le grand spectacle. Voilà Jésus qui se retrouve à Jérusalem, et au sommet du Temple. En fait, c'est difficile à imaginer. Peut-être au-dessus soit de la Géhenne soit du Cédron, mais on peut imaginer un bel à pic. Jette toi en bas: si tu es un homme tu te tues, si tu es le fils, tu n'as rien à craindre. Et la réponse de Jésus, qui répond à des citations par une citation, laisse le tentateur sur la faim. Jésus n'est pas Icare, Jésus ne se prend pas pour Dieu, Jésus est Dieu. 

 

8 Le diable l’emmène encore sur une très haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire.

9 Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai, si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. »

10 Alors, Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! Car il est écrit : ‘C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte.’

 

Et la chevauchée continue; voila une très haute montagne. Curieusement on peut penser au Mont Nébo, mais peut-être est-ce en dehors d'Israël. Et c'est la tentation de dominer le monde. Mais si cela c'est le but du mauvais, ce n'est en rien le projet de Jésus, et c'est encore un échec pour le Tentateur. Cette gloire là n'a aucun intérêt. 

 

11 Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s’approchèrent, et ils le servaient.

 

Quand je lis le début de ce verset, je pense à ce qui se passe pour la belle-mère de Pierre, "et la fièvre la quitta", fièvre qui signe de la présence maléfique. Et là, c'est ce qui se passe. Le mal s'en va. Et la place libérée permet à ces êtres d'en haut de servir celui qui sera le serviteur. 

 

Interprétations bibliques des tentations

 

La revue Christus: https://www.revue-christus.com/article/les-tentations-de-jesus-1114 fait remarquer que les tentations suivent ce qui est rapporté dans le livre du Deutéronome, après les évènements de l'exode. Dt8,3 renvoie à la manne; Dt 6,16 renvoie à l'épisode des eaux de Mériba où le Seigneur a été mis à l'épreuve, a été tenté; et enfin Dt 6,13 renvoie à la condamnation du culte des faux dieux: "Le Seigneur ton Dieu tu adoreras et à lui seul tu rendras un culte". 

 

Une autre interprétation https://www.gotquestions.org/Francais/tentations-de-jesus.html montre que les tentations de Jésus suivent trois modèles communs à tous les hommes:

 

La première tentation est celle de la convoitise de la chair (Matthieu 4.3-4), qui comprend tous les désirs physiques. Notre Seigneur avait faim et le diable l’a incité à changer les pierres en pain; Jésus a répondu en citant Deutéronome 8.3

 

La deuxième tentation était celle de l’orgueil de la vie (Matthieu 4.5-7). Ici, le diable a voulu se servir d’un passage des Écritures contre lui (Psaumes 91.11-12), mais le Seigneur a répondu par un passage contraire (Deutéronome 6.16), déclarant qu’il aurait tort d’abuser de son pouvoir. 

 

La troisième tentation était celle de la convoitise des yeux (Matthieu 4.8-10). C’était la meilleure voie possible vers la messianité, sans passer par la passion et la crucifixion pour lesquelles il était venu. Le diable, qui contrôlait les royaumes du monde (Éphésiens 2.2), était prêt à tout donner à Christ pour obtenir son allégeance. La nature divine du Seigneur frémit rien que d’y penser et il répondit fermement: «C’est le Seigneur, ton Dieu, que tu adoreras et c’est lui seul que tu serviras» (Matthieu 4.10, Deutéronome 6.13

 

Mais il me semble bien que la tentation la plus importante, serait bien d'affirmer dans le ici et maintenant sa divinité: changer les pierres en pain, et se jeter du faîte du temple, sont pour Jésus deux tentations qui ne sont que les médiations de la vraie tentation à laquelle il se trouve confronté: se prévaloir du titre de Fils de Dieu pour agir en conséquence. Or, manifester par des prodiges sa filialité divine reviendrait pour lui à succomber à la tentation fondamentale: « devenir comme des dieux » {Gn 3,5), décidant de tout souverainement.

 

Pour ma part, en me référant à ma formation de psychologue,  j'aurais tendance à dire aujourd'hui que l'on peut se référer aux stades qui structurent toute l'évolution de l'enfant, le stade oral, le stade anal et le stade phallique, qui sont tous sous-tendus par la toute puissance, la convoitise, le désir de posséder, d'être le plus fort, d'être invincible, pour oublier la dépendance et le relationnel.  

 

Ou pour le dire autrement: avoir à manger quand on veut, sans attendre (pas de frustration) et ne pas être dépendant. 

Tout dominer en étant le maître du monde, prendre de fait la place du père, et l'adulation de la mère, ce qui pourrait évoquer le stade anal, où l'enfant donne ou ne donne pas.

Et enfin, faire de son corps ce que l'on veut, ne pas être soumis aux lois communes, ce qui évoque un peu le stade phallique.

 

Mais comme cela est bien souligné dans les textes cités, la tentation serait bien de se servir de cette place de fils de Dieu pour manifester sa puissance, ce qui est contraire à la place du serviteur qui sera celle du Fils.


 

Comparaison des textes dans les synoptiques

 

Ce qui est un peu compliqué c'est que Matthieu et Luc, tout en étant très proches, ne mettent pas les tentations dans le même ordre. De ce fait, j'ai choisi, dans la deuxième colonne, d'inverser le texte de Luc, pour que l'on voit mieux le parallèle, le texte initial se trouvant dans la troisième colonne.  La deuxième tentation est en rouge et la troisième en bleu, ce qui permet aussi de les visualiser

 

Matthieu 4, 1-11

Luc 4, 1-11: modifié

Luc 4-11 normal

Marc 1, 12-13

01 Alors Jésus fut conduit au désert par l’Esprit pour être tenté par le diable.

02 Après avoir jeûné quarante jours et quarante nuits, il eut faim.

 

01 Jésus, rempli d’Esprit Saint, quitta les bords du Jourdain ; dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert

02 où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable. Il ne mangea rien durant ces jours-là, et, quand ce temps fut écoulé, il eut faim.

 

01 Jésus, rempli d’Esprit Saint, quitta les bords du Jourdain ; dans l’Esprit, il fut conduit à travers le désert

02 où, pendant quarante jours, il fut tenté par le diable. Il ne mangea rien durant ces jours-là, et, quand ce temps fut écoulé, il eut faim.

 

12 Aussitôt l’Esprit pousse Jésus au désert

03 Le tentateur s’approcha et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne que ces pierres deviennent des pains. »

04 Mais Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu. »

 

 

03 Le diable lui dit alors : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain. »

 

04 Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne vit pas seulement de pain. »

 

03 Le diable lui dit alors : « Si tu es Fils de Dieu, ordonne à cette pierre de devenir du pain. »

 

04 Jésus répondit : « Il est écrit : L’homme ne pas seulement de pain. »

 

13 et, dans le désert, il resta quarante jours

05 Alors le diable l’emmène à la Ville sainte, le place au sommet du Temple

 



06 et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, jette-toi en bas; 

 


car il est écrit : Il donnera pour toi des ordres à ses anges, et : 

 

 

 

Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »

 

 



07 Jésus lui déclara : « Il est encore écrit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

 

09 Puis le diable le conduisit à Jérusalem, il le plaça au sommet du Temple

 

et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, d’ici jette-toi en bas ;

 

10 car il est écrit : Il donnera pour toi, à ses anges, l’ordre de te garder ;

 

 


11 et encore : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »

 

12 Jésus lui fit cette réponse : « Il est dit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

 

05 Alors le diable l’emmena plus haut et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre.

 

 

06 Il lui dit : « Je te donnerai tout ce pouvoir et la gloire de ces royaumes, car cela m’a été remis et je le donne à qui je veux.

07 Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu auras tout cela. »

 

8 Jésus lui répondit : « Il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieuque tu te prosterneras, à lui seul tu rendras un culte. »

 

tenté par Satan

 

 

 

 

Il vivait parmi les bêtes sauvages.

08 Le diable l’emmène encore sur une très haute montagne et lui montre tous les royaumes du monde et leur gloire.


09 Il lui dit : « Tout cela, je te le donnerai

 

 

 

 

 

 

si, tombant à mes pieds, tu te prosternes devant moi. »

 

 

 

 

 

10 Alors, Jésus lui dit : « Arrière, Satan ! car il est écrit : C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, à lui seul tu rendras un culte. »

 

 

05 Alors le diable l’emmena plus haut et lui montra en un instant tous les royaumes de la terre.

 



06 Il lui dit : « Je te donnerai tout ce pouvoir et la gloire de ces royaumes, car cela m’a été remis et je le donne à qui je veux.


 

07 Toi donc, si tu te prosternes devant moi, tu auras tout cela. »



 

 

08 Jésus lui répondit : « Il est écrit : C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, à lui seul tu rendras un culte. »

 

09 Puis le diable le conduisit à Jérusalem, il le plaça au sommet du Temple


 

et lui dit : « Si tu es Fils de Dieu, d’ici jette-toi en bas ;

10 car il est écrit : Il donnera pour toi, à ses anges, l’ordre de te garder ;

 

11 et encore : Ils te porteront sur leurs mains, de peur que ton pied ne heurte une pierre. »


 

 

12 Jésus lui fit cette réponse : « Il est dit : Tu ne mettras pas à l’épreuve le Seigneur ton Dieu. »

 

 

11 Alors le diable le quitte. Et voici que des anges s’approchèrent, et ils le servaient.

 

 

3 Ayant ainsi épuisé toutes les formes de tentations, le diable s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé.

3 Ayant ainsi épuisé toutes les formes de tentations, le diable s’éloigna de Jésus jusqu’au moment fixé

et les anges le servaient.

 

 

 

Jésus raconte à ses disciples 

 

Je m'étais mêlé à la foule de ceux qui voulaient recevoir ce baptême donné par mon grand cousin Jean: ce baptême de purification, et qui montre que le désir de changer de vie est profond. Quand il m'a vu, il ne voulait pas que je participe à cela, puisqu'il n'y a pas de péché en moi et que personne ne pourra me convaincre de péché.


Il m'a même dit que c'était lui qui devrait être baptisé par moi, entrer dans les eaux du Jourdain, être totalement immergé pour faire cette expérience de mort et de retour à la vie, pour vivre cette transformation, mais je lui ai dit de laisser faire, que c'était le dessin de Dieu. Je suis entré dans les eaux de ce fleuve, qui va vers la mer de sel et qui essaye de l'assainir. Un jour, et cela c'est le prophète Ézéchiel qui l'a dit, cela sera possible, cette saumure sera transformée en eau saine: et c'est pour cela que j'ai été envoyé. J'ai été plongé dans cette eau, et c'était l'eau qui donne la vie.

 

Au moment où je sortais des eaux, j'ai vu comme une colombe venant du ciel se poser sur moi, cette colombe qui avait apporté un rameau d'olivier à Noé pour lui faire comprendre que la vie était là, cette colombe qui a été immolée pour moi au Temple de Jérusalem, cette colombe qui est bien plus qu'un oiseau, puisque c'est le souffle de mon Père qui est en elle, et qu'elle est l'Esprit. 


Cela Jean ne l'a pas vu, mais comme moi, il a entendu une voix venant du ciel qui disait que j'étais le Fils bien-aimé de mon Père, et qu'il trouvait toute sa joie en moi. Je sais que ma maman a exulté de joie quand elle a rencontré sa cousine Elisabeth et que l'Esprit s'est comme emparé d'elle, de Jean et de sa cousine. Et en moi aussi, savoir que je faisais toute la joie de celui qui m'a envoyé, cela faisait comme un torrent d'exultation un torrent d'amour. 

 

Je pensais retourner à Nazareth, mais en moi est née la certitude que je devais aller dans le désert, que je devais en quelque sorte refaire ce temps qui a été un temps où le peuple que mon père s'était choisi, ce peuple qui devait être comme son fils, avait durement appris l'obéissance. Et puis c'est aussi ce temps où notre père Moïse, a passé ces quarante jours durant lesquels la loi de vie lui a été donnée. Alors je suis parti.

 

Le désert, c'est bien sûr du sable, et des rochers. Et les étoiles la nuit, et le soleil qui cogne le jour. Le désert c'est le cœur à cœur. Le désert est lieu de révélation. Le désert, c'est le lieu de séjour du peuple qui venait d'Egypte; le désert c'est quarante ans de solitude et d'errance. 

 

Je savais que, comme Moïse, je ne devais ni manger, ni boire, devenir totalement dépendant de mon Père. 

 

Les nuits et les jours ont passé, et la faim est venue, une faim dévorante, une faim énorme. 


Il m'a alors semblé que je n'étais plus seul. Il y avait quelqu'un qui s'approchait de moi, que je devinais, et je me demandais si c'était réel ou pas. Et ce quelqu'un m'a adressé la parole. Il a dit que si j'étais le fils de Dieu, je pouvais transformer les pierres qui étaient autour de moi, ces pierres qui délimitaient le lieu que j'avais choisi, en pain. Et l'odeur du pain était là. 


Alors là j'ai su qui était ce quelqu'un. C'était celui qui avait proposé à Eve de consommer le fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, celui qui était sans cesse à l'œuvre pour faire du mal, pour tenter. Et il y avait ce "si tu es le fils de Dieu", comme si lui-même en doutait ou comme s'il voulait que je m'en serve, ce qui aurait mis à mal toute la sagesse de mon Père. 


Alors la phrase de la Torah, la phrase écrite par Moïse, est venue toute seule, cette phrase qui dit que l'homme ne vit pas seulement de pain, mais toute parole qui sort de la bouche de Dieu. C'est ce qu'a affirmé Moïse à mon peuple quand il lui parlait de cette nourriture donnée au temps du désert. C'est bien cela, cette parole,  qui avait été ma nourriture durant ces jours. Mais quand cette parole s'était tue, alors ma faim de pain est apparue


Comme mon peuple, je me suis nourri de la parole de mon Dieu, et elle m'a rassasiée; et un jour c'est moi qui deviendrai pain de vie pour mon peuple. Le diable ne peut pas le comprendre, mais il s'est tu, du moins le temps de trouver autre chose, car il ne voulait pas me lâcher.

 

Il m'a emmené dans le lieu qui est le lieu du repos de mon Père, le temple de Jérusalem; et du haut de la muraille, celle qui domine le Cédron, il m'a dit que si j'étais le fils de Dieu, je pouvais me jeter en bas, parce que les anges viendraient à mon secours, car Dieu ne voulait pas que mes pieds heurtent la pierre, que je m'écrase. Je dois dire que cela aurait pu me faire rire, si je n'avais pas été quand même aussi fatigué. Qu'il se serve de la parole des chants de louange pour me tenter, c'est comme s'il me singeait: je lui avais cité la Parole, et lui faisait de même. Je pense qu'il voulait savoir si je pouvais résister à la soif d'immortalité qui est en tout homme. Mais moi, je suis là pour que vous puissiez l'avoir cette immortalité, pour que vous soyez dans la vie; et pour cela je donnerai ma vie. 

 

Comme il avait échoué, il est encore revenu à la charge. Là, il m'a proposé de me donner tous les royaumes de la terre. Je reconnais qu'il m'a donné une vision de toutes ces grandes villes qui sont sur la surface de la terre, et que c'était très beau. Mais la condition, c'était que je prosterne devant lui. 

 

Quand j'ai entendu cela, mon sang n'a fait qu'un tour. Me prosterner devant lui! Il n'a vraiment rien compris. Qu'aurais-je à faire de cette prétendue gloire, de cette gloire terrestre, moi qui ai en moi la joie et l'amour de mon Père? 

 

Je l'ai chassé, comme je le chasserai chaque fois que cela me sera demandé par ces personnes qu'il a infecté de sa présence; et je l'ai chassé en lui disant dit que le seul que nous devons adorer et auquel nous devons rendre un culte c'est le Très Haut, le Créateur. Certes j'ai un peu modifié ce que Moïse nous avait ordonné, mais je dois dire que j'étais très en colère contre cet imposteur. 

 

Il s'est alors sauvé ce Satan, ce menteur dès les origines. Je sais que la guerre entre nous est une guerre sans relâche et qu'il fera tout pour me nuire.

 

Je me suis retrouvé seul dans le désert; et des anges sont venus; ils se sont mis à mon service, comme moi, je suis à votre service, vous qui êtes mes amis, vous qui avez abandonné qui sa barque, qui son champ, qui sa famille, pour vous conduire vers mon Père et son amour. 

 

Mais quand l'ultime tentation sera là, serez-vous avec moi?

samedi, février 18, 2023

Mc 9, 2-12 Transfiguration. 6° semaine du temps ordinaire. Février 2023


 

SAMEDI 18 FÉVRIER. Mc 9, 2-13

 

https://giboulee.blogspot.com/2022/03/luc-9-28-36-la-transfiguration.html

https://giboulee.blogspot.com/2022/02/marc-9-2-13-la-transfiguration.html

https://giboulee.blogspot.com/2012/02/petites-reflexions-sur-le.html

https://giboulee.blogspot.com/2011/02/illumination-transfiguration-mes.html

 

C'est un texte que j'aime, et de fait j'avais un peu peur que ce texte ne soit pas retenu dans la lecture continue de l'évangile de Marc, puisqu'on le retrouve au mois d'Août. L'an passé, une petite retraite centrée sur la lectio divina m'avait permis de retrouver "ma" bible de Jérusalem. C'est en laissant un peu le texte travailler en moi, mais ce n'est si simple, que le lien s'est fait entre cet épisode et les guérisons des chapitres 7 et 8, guérisons des sens, guérisons dont nous avons toujours besoin. 

 

J'espère que le lecteur ne m'en voudra pas d'avoir mis, dans la bouche de Pierre, des versets de Paul (épitre aux Colossiens) et de Jean. 

 

Travail sur le texte.

 

2 En ce temps-là, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne.

 

 Et il fut transfiguré devant eux

 

Curieusement cela sonne en moi comme lorsque Jésus, dans l'évangile de Marc, fait des guérisons: celle du sourd muet et celle de l'aveugle. Il les prend, les conduit à l'écart, et les guérit; et là il se donne à voir, on peut dire qu'il guérit leur cécité. Et ils vont entendre ce que personne n'avait entendu: il guérit leur surdité. Le miracle, c'est cette transfiguration, la présence de la Gloire en un homme.

 

3 Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille. 

 

Et voilà ce qu'ils voient: d'abord Jésus.

 

4 Élie leur apparut avec Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus. 

 

Ce qui m'étonne, c'est que Marc dit que les deux "Grands" leur apparaissent à eux, ils se montrent, et ils parlent avec Jésus, donc leur Jésus est en lien avec le ciel, et dans le ciel, il y a ceux qui sont vivants. 

 

5 Pierre alors prend la parole et dit à Jésus : « Rabbi, il est bon que nous soyons ici ! Dressons donc trois tentes : une pour toi, une pour Moïse, et une pour Élie. » 

6 De fait, Pierre ne savait que dire, tant leur frayeur était grande.

 

Intéressant, parce qu'on peut penser que Pierre, qui rapporte cela dans une de ses lettres, a eu très peur: peur du surnaturel, peur de ne pas survivre à cette vision, frayeur.

 

7 Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le ! » 

 

"Les couvrit de son ombre": cela renvoie aux psaumes, et là c'est leur surdité qui est comme guérie. Ils entendent la voix du Père, voix qui dans cet évangile ne s'était pas fait entendre.

 

8 Soudain, regardant tout autour, ils ne virent plus que Jésus seul avec eux. 

 

La vision est redevenue normale, la peur s'en est allée, mais leur yeux se sont ouverts, ou ont été ouverts, sur une autre dimension. 

 

9 Ils descendirent de la montagne, et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. 

10 Et ils restèrent fermement attachés à cette parole, tout en se demandant entre eux ce que voulait dire : « ressusciter d’entre les morts ». 

 

Et là, comme avec les autres guérisons, il y a l'interdiction de parler, de raconter, du moins tant que Jésus n'a pas accompli sa mission (dont il n'est pas parlé ici).

 

11 Ils l’interrogeaient : « Pourquoi les scribes disent-ils que le prophète Élie doit venir d’abord ? » 

12 Jésus leur dit : « Certes, Élie vient d’abord pour remettre toute chose à sa place. Mais alors, pourquoi l’Écriture dit-elle, au sujet du Fils de l’homme, qu’il souffrira beaucoup et sera méprisé ? 

13 Eh bien ! je vous le déclare : Élie est déjà venu, et ils lui ont fait tout ce qu’ils ont voulu, comme l’Écriture le dit à son sujet. »

 

Réflexions.

 

Ce matin, en pensant à cet épisode, je me suis rendue compte que je suis incapable de me représenter ce que les disciples ont vu de Jésus ce jour-là. Que veut dire un visage éblouissant, est-ce un visage lumineux, mais même lumineux, je n'ai pas vraiment d'images. Bien sûr il y a des tableaux, mais c'est bien autre chose. Alors quelle lumière? Et les vêtements? Comme si d'un coup, les vêtements on ne les voit plus. Souvent il est question d'être revêtu de la Gloire de Dieu. Peut-être que c'est cette lumière ou luminosité dont parlent les personnes qui ont vécu une NDE. Quelque chose qui fait que la réalité habituelle n'existe plus, mais tant qu'on ne l'a pas vécu, il faut juste faire confiance à ceux qui ont vécu cela. Les icônes ne peuvent en rendre compte. Lumière du dedans, lumière du dehors.

 

Puis, j'ai pensé que Pierre avait parlé de cet épisode dans une de ses épitres et qu'il a été plus sensible à ce qu'il a entendu qu'à ce qu'il a vu. Comme si la vision était de l'ordre de l'ineffable? 

 

2P16 En effet, ce n’est pas en ayant recours à des récits imaginaires sophistiqués que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais c’est pour avoir été les témoins oculaires de sa grandeur.

 

17 Car il a reçu de Dieu le Père l’honneur et la gloire quand, depuis la Gloire magnifique, lui parvint une voix qui disait : Celui-ci est mon Fils, mon bien-aimé ; en lui j’ai toute ma joie.

 

18 Cette voix venant du ciel, nous l’avons nous-mêmes entendue quand nous étions avec lui sur la montagne sainte.

 

Puis m'est venue l'impression que ce qui s'est passé ce jour-là est très semblable aux guérisons rapportées dans les chapitres 7 et 8 qui précèdent. Je m'explique.

 

Quand "des gens" conduisent à Jésus, soit un sourd-muet, soit un aveugle, Jésus prend la personne avec lui, la conduit à l'écart de la foule et aussi des personnes qui font la demande pour elle. Il fait ensuite des gestes et prononce des paroles; et une fois l'homme guéri, il y a interdiction de dire ce qui est passé. Et c'est aussi ce qui arrive pour les trois disciples, qui jouent un rôle particulier dans le récit de Marc: ils sont aussi les seuls à assister à la résurrection de la fille du Jaïre, ils seront les seuls à accompagner Jésus au soir de la Passion. Mais la guérison des sens, et l'ouverture du regard et de l'oreille, ne se feront que bien après, au matin de la résurrection; elle permettra de rendre témoignage de ce qui a été vu et entendu ce jour là.

 

 

 

Si on met en parallèle les passages de Marc 7, 8 et 9, en allégeant un peu le récit de la transfiguration, cela permet de bien voir ce qui se passe dans ces récits.

 

Marc 7

Mc 8, 22-26

Mc 9, 02-12

32 Des gens lui amènent un sourd qui avait aussi de la difficulté à parler et supplient Jésus de poser la main sur lui.

22 Jésus et ses disciples arrivent à Bethsaïde. Des gens lui amènent un aveugle et le supplient de le toucher.

02 Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux.

 

33 Jésus l’emmena à l’écart, loin de la foule, lui mit les doigts dans les oreilles, et, avec sa salive, lui toucha la langue.

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4 Puis, les yeux levés au ciel, il soupira et lui dit : « Effata ! », c’est-à-dire : « Ouvre-toi ! »

 

 

 

35 Ses oreilles s’ouvrirent ; sa langue se délia, et il parlait correctement.

 

23 Jésus prit l’aveugle par la main et le conduisit hors du village. Il lui mi de la salive sur les yeux et lui imposa les mains. Il lui demandait : « Aperçois-tu quelque chose ? »

 

 

 

 

 

 

24 Levant les yeux, l’homme disait : « J’aperçois les gens : ils ressemblent à des arbres que je vois marcher. »

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5 Puis Jésus, de nouveau, imposa les mains sur les yeux de l’homme ; celui-ci se mit à voir normalement, il se trouva guéri, et il distinguait tout avec netteté.

 

02 Six jours après, Jésus prend avec lui Pierre, Jacques et Jean, et les emmène, eux seuls, à l’écart sur une haute montagne. Et il fut transfiguré devant eux.

03 Ses vêtements devinrent resplendissants, d’une blancheur telle que personne sur terre ne peut obtenir une blancheur pareille.

 

 

04 Élie leur apparut avec Moïse, et tous deux s’entretenaient avec Jésus.

 

 

 

 

 

 

 

 

07 Survint une nuée qui les couvrit de son ombre, et de la nuée une voix se fit entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : écoutez-le ! »

 

 

36 Alors Jésus leur ordonna de n’en rien dire à personne ; mais plus il leur donnait cet ordre, plus ceux-ci le proclamaient.

 

 

26 Jésus le renvoya dans sa maison en disant : « Ne rentre même pas dans le village. »

09 Ils descendirent de la montagne, et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts.

 

 

 

 

Il me semble que cela permet de donner une autre saveur à un récit, certes imaginaire, que Pierre aurait pu faire, après la mort et la résurrection de Jésus.

 

 

 

Pierre raconte. 

 

À cette époque-là - c'était quand nous étions en Galilée avec Lui, peu de temps avant qu'il ne prenne la route de Jérusalem - le maître un matin nous a pris avec Lui. Nous, c'était moi Simon, et Jacques et Jean, les fils de Zébédée, ceux qu'il a appelés les fils du Tonnerre. Nous ne savions pas trop ce qui nous attendait. C'était déjà nous trois qu'il avait choisis, juste nous, quand il a redonné vie à la fille de Jaïre; et plus tard c'est à nous trois qu'il demandera de veiller et de prier au jardin des Oliviers; mais là nous avons été complètement nuls.   

 

Pendant que nous montions avec lui, et croyez-moi ça grimpait fort, et comme nous n'avions pas mangé grand-chose parce qu'il était très tôt, nous n'étions pas très très contents, pour dire ce qui est. 

 

En marchant il m'était venue une idée curieuse; parce que le Maître nous prenait à l'écart, loin des autres, loin des foules, dans le silence, ailleurs. L'idée c'était que les dernières guérisons que le maître avait accomplies, il les avait toujours faites à l'écart, comme s'il ne voulait pas être vu, comme s'il voulait que ce soit juste entre lui et le malade; d'autant que le malade, qu'il soit sourd ou aveugle, il ne savait pas qui était cet homme qui le prenait pas la main. Est-ce que Jésus allait nous montrer quelque chose de lui? Quelque chose que nous ne pouvions pas imaginer et qui nous transformerait? Et bien oui, c'est ce qui est arrivé. 

 

Une fois arrivés tout en haut, Jésus s'est mis à prier. Et là, il était devant nous; il n'était pas à l'écart comme trop souvent quand il prie, et qu'il faut aller le chercher. Là, il s'est montré à nous, mais comment vous raconter?


On parle de la Gloire de Dieu, on parle du visage de Moïse qui était trop brillant après avoir passé quarante jours sur la montagne sainte, mais ce sont des mots. Nous, nous avons vu Jésus autre, Jésus resplendissant; mais les mots sont impuissants. Il était là devant nous, il était là avec Moïse, il était là avec Elie, et nous avons vu tout cela de nos yeux. 


Moi, j'aurais voulu que ça dure, que ça ne s'arrête pas. Je ne sais pas ce qui m'a pris, mais j'ai dit à Jésus, et pourtant il y avait une partie de moi qui était dans une immense frayeur, que j'allais leur bâtir des tentes; comme si je pouvais mettre cet instant en cage. 


Et puis, après la lumière, il y a eu une nuée: comme je me représente la nuée qui envahissait la autrefois, durant l'Exode, la Tente de la Rencontre. De cette obscurité qui n'était pas ténèbre mais lumière, une voix s'est adressée à nous trois. Elle disait que Jésus était son Fils bien-aimé, et que nous devions l'écouter (et je crois lui obéir). 

 

Puis, tout est redevenu normal. 


Jésus nous a interdit de parler de cela à qui que ce soit, comme il l'a fait avec le sourd et avec l'aveugle; mais de toutes les manières, nous en étions bien incapables: il y a des choses qu'on ne peut pas décrire quand on a les vécues du dedans. 


Il a ajouté qu'il faudrait attendre qu'il soit ressuscité d'entre les morts. Et c'est bien parce qu'il est revenu à la vie que je peux, aujourd'hui, témoigner de ce que j'ai vu et entendu ce jour-là: Jésus est bien l'image du Dieu invisible, le premier-né de toute la création et nous sommes grâce à lui enfants de Dieu.