brèves...

Quand on regarde cette tête d'agneau attentivement, on peut y voir une tête d'homme...

 Jn 6, 54 "Celui qui mange ma chair et boit mon sang". J'entends dans cette phrase deux choses. La première c'est que Jésus se présente comme l'Agneau (dont on mange la chair au moment de la Pâque). Il est l'agneau du sacrifice qui commémore la libération mais qui permet aussi aux familles de faire corps entre elles. La seconde c'est que si  on peut boire le sang, ce qui était interdit par la loi donnée à Noé: puisque le sang c'est la vie et la vie appartient à Dieu, c'est que par sa mort, Jésus fait de nous des fils de Dieu, qu'il nous divinise et que c'est cela la vie éternelle.

Luc 23,34 Père pardonne leur... Je me demande si cette phrase rapportée par Luc ne peut pas être comprise ainsi: le Dieu du premier testament est connu comme un dieu vengeur. Jésus demande à son Père de renoncer à toute vengeance car en acceptant Lui de mourir, il crée une nouvelle relation entre l'humain et Dieu et désormais la nouvelle terre et le nouveau ciel sont là. Certes Jérusalem a été détruite mais une génération entière a vécu avant cette destruction et on ne peut donc pas dans une vision simpliste la comprendre comme une vengeance.

Mt 5,7 "Bienheureux les miséricordieux, ils obtiendront miséricorde".; La miséricorde humaine n'est pas la miséricorde divine. Il me semble que la miséricorde humaine peut faire si l'on peut dire l'économie du pardon. Elle ne condamne pas, elle remet la faute, (il n'y a plus de vengeance, plus de punition) mais elle n'a pas forcément à entrer dans le pardon. Une grâce présidentielle lève la sentence, mais ne pose pas la question du pardon. Dans l'évangile du fils prodigue, le Père n'applique pas la sentence (vivre comme un ouvrier, ne plus être fils) mais au contraire redonne à cet homme qui se présente devant lui sa place de fils. Sommes nous capables de cela?  Le pardon change le regard que l'on a sur celui qui a commis la faute et le restaure. Arriver à changer son regard sur l'autre,il me semble que c'est cela "être libre". mais seule la force de l'Esprit peut permettre ce miracle.

Pasteur, berger, pêcheur: Jn21.

La finale de l'évangile de Jena, Jn 21 a fait couler beaucoup d'encre sur les "est ce que tu m'aimes"?

Une pensée m'est venue ce matin et la voici. Pierre dans cet épisode est présenté comme un pêcheur, son ancien métier. Etre pêcheur c'est être sédentaire. Quand on a une maison à Capharnaüm, on rentre chez soi tous les jours.

Par contre être berger ou pasteur, c'est partir pour trouver les bons herbages pour les brebis ou les moutons, c'est être nomade. Dans le premier testament les conflits entre les pasteurs nomades (comme Abraham) et les sédentaires (rois des contrées) sont nombreux.

Alors ne peut-on pas, au delà de ce qui se passe dans l'intime entre Jésus et Pierre penser qu'il s'agit là d'un envoi en mission?

Ce qui est demandé à Pierre c'est de ne pas reprendre ses anciennes habitudes (peut-être ne pas ressasser ce qui est arrivé, ce qu'il n'a pas fait ou pu faire malgré sa grande gueule), c'est d'accepter d'être délocalisé, de se laisser conduire par l'Esprit Saint et ainsi de continuer à marcher et à suivre celui que son coeur aime. Alors ainsi il deviendra et pasteur et pêcheur d'hommes comme Jésus le lui avait promis.

Pécheur, pêcheur....

Pêche, pêcher, péché, pécheur, pêcheur.

Ce qui est bien avec la langue française, c’est que certains mots peuvent avoir plusieurs sens selon la manière dont ils sont écrits. A l’oreille, le pêcher est un arbre qui donne de beaux fruits, gouteux, beaux à regarder et à toucher… et le péché est quelque chose de destructeur car il est lié à la convoitise et il fait de fait du mal à l’humain.

Dans le même ordre on a pécheur et pêcheur et c’est ce que Jésus dit à Pierre : je ferai de toi le pêcheur de poissons un pêcheur d’hommes. Et il ne semble pas que Jésus ait reproché à Pierre sa trahison mais de n'avoir peut être pas assez aimé.  

Je voudrais aujourd’hui rapporter quelque chose qui m’est arrivé au cours d’une session de prière du cœur en janvier dernier au prieuré d’Etiolles. Il y sera question du passage du mot pécheur au mot pêcheur et de ce que cela a changé pour moi. 

 La prière du cœur se cale sur la respiration : à l’inspiration on dit « Seigneur Jésus Christ fils de Dieu » et à l’expiration : « aie pitié de moi pécheur ». En ce qui me concerne, il m’arrive d’avoir du mal à suivre cette scansion, d’en trouver d’autres et surtout de laisser tomber le mot pécheur, non pas que je ne me reconnaisse pas comme telle,  puisque pour moi c’est une caractéristique de l’humain, de sa pesanteur, mais parce que je ne me définis pas comme telle. Alors je dis simplement: aie pitié de moi. Et si on réfléchit, ce simple "moi" peut déjà aller très loin.

La session dure deux jours pleins, du vendredi soir au dimanche après midi. Si cette prière s’appelle « prière du cœur » c’est que (en tous les cas pour moi) c’est une prière qui prend petit à petit tout l’être, qui est une prière de tout le corps et donc aussi du cœur, si on considère que le cœur « biblique » est le centre de l’individu. 

Le dimanche matin, durant une des assises, à un moment où certainement le mot pécheur prenait de la place, j’ai vu une très belle canne à pêche, avec un beau moulinet, une canne superbe. Cette canne elle était pour moi, elle était belle. Et j’ai « comme entendu » : « Je vais t’apprendre à pêcher ». Et cela c’était important, car je n’ai jamais pratiqué la pêche sous quelque forme que ce soit, sauf peut être la pêche à la crevette..  Et j’ai compris que cette canne je devais m’en servir. Pêcher c’est attraper quelque chose. Et moi j’avais cette image d’une belle canne et ça me disait que le péché ce n’était peut être pas cela l’important, et que la pêche l’était beaucoup plus.

Recevoir une image c’est toujours un cadeau. Entendre des mots c’est encore autre chose. Qui parle ? Est Je ? est ce Moi ? Est ce l’insaississable ? Ce que je sais c’est que je venais de vivre quelque chose d’important, un peu comme à la toute première session qui date d’une dizaines d’année où j’ai -pendant un temps de manducation de la phrase- été envahie par une grande chaleur essentiellement dans le ventre, qui ne m’a pas quittée de toute la nuit et qui pour moi était effusion de l’Esprit.

Arrive la célébration du dimanche. A la sortie je parle avec différentes personnes, et…. on m’indique une jeune femme en larmes que je vais voir. Elle me dit qu’elle est évangélique, qu’elle  est triste (à en mourir) qu’elle veut que quelqu’un lui impose les mains, qu’elle a besoin de la Paix. Il y a peu de frères au prieuré sauf le frère Benoît qui ont l’habitude d’imposer les mains, et le frère Benoît a déjà disparu. Pour être assez proche des charismatiques je sais que les chrétiens évangéliques pratiquent beaucoup plus que nous cette manière de prier, d’intercéder et aussi de bénir. Alors je sais que ce qui se passe là c'est la concrétisation du  « je vais t’apprendre à pêcher ».

Je n’ai jamais imposé  les mains, même si je pose souvent mes mains sur certaines personnes qui viennent me voir. Et là c’était impératif. Il y avait quelqu’un en grande demande, en grande attente et moi je venais de recevoir ma canne à pêche, alors je m’en suis servie et j’ai dit des mots que je n’avais pas prévu, qui sont venus tout seuls, qui coulaient. J’ai transmis la Paix qui était en moi mais qui ne m’appartient pas.

En fait pour moi, pêcher ce n’est pas tant sortir quelqu’un de son milieu pour le mettre dans un autre que de lui donner ou plutôt de lui transmettre la force dont il a besoin pour « être » un vivant.

Un de mes fils vient d’enregistrer un disque, sur la pochette il est écrit «  Waiting a sign ». Je ne sais pas quel signe il attend, mais ce signe que j'ai reçu lors de cette session confirme aussi le travail que je fais avec certaines personnes que je reçois, un travail au niveau d’une écoute par le toucher et sous le souffle de l’Esprit Saint qui traverse, qui me traverse, un souffle dont personne n’est propriétaire. Je sais que je ne suis pas faite pour la pêche au filet, cela c’est le travail des prédicateurs, mais pour ce travail là.

Pour terminer ce billet sur une note un peu humoristique, quand un célébrant démarre la célébration par le « Je confesse à dieu » ( ce que je n'apprécie que peu), je vois dans la mer des casiers remplis de "pensées, d’actions, de paroles et  d’omissions" «  et je me demande où je vais pêcher, mais le temps que je choisisse c’est déjà fini et je souris au lieu de me battre la poitrine!