vendredi, mars 26, 2010

Psaume 94: Jamais vous n'entrerez dans mon repos




"Vous n’entrerez pas dans le lieu de mon repos".

Ce psaume 94 est utilisé comme psaume d’entrée dans l’office des Laudes qui est je le crois un office de louanges. Or la finale de psaume : jamais ils n’entreront dans mon repos, me pose question.

Voici le psaume : (trad liturgique)

1Venez, crions de joie pour le Seigneur,
acclamons notre Rocher, notre salut !
2Allons jusqu'à lui en rendant grâce,
par nos hymnes de fête acclamons-le !

3Oui, le grand Dieu, c'est le Seigneur,
le grand roi au-dessus de tous les dieux :
4il tient en main les profondeurs de la terre,
et les sommets des montagnes sont à lui ;
5à lui la mer, c'est lui qui l'a faite,
et les terres, car ses mains les ont pétries.

6Entrez, inclinez-vous, prosternez-vous,
adorons le Seigneur qui nous a faits.
7Oui, il est notre Dieu ; +
nous sommes le peuple qu'il conduit,
le troupeau guidé par sa main.

(jusque là tout va bien, on est bien dans la louange et l’adoration de ce Dieu qui s’est choisi un peuple que l’on peut assimiler dans notre aujourd’hui à l’église) .

Aujourd'hui écouterez-vous sa parole ? +
8« Ne fermez pas votre coeur comme au désert,
comme au jour de tentation et de défi,
9où vos pères m'ont tenté et provoqué,
et pourtant ils avaient vu mon exploit.

(Là il y a un rappel qui peut effectivement nous concerner aujourd’hui, fermer ou endurcir, ne pas voir, c’est si facile).

10« Quarante ans leur génération m'a déçu, +
et j'ai dit : Ce peuple a le coeur égaré,
il n'a pas connu mes chemins.

(là c’est un discours presque normal qui est un constat, mais c’est après que ça se gâte…)

11Dans ma colère, j'en ai fait le serment :
Jamais ils n'entreront dans mon repos. »

(Et c’est la fin très abrupte de ce psaume).

Je suppose que les phrases clés sont celles ci : « aujourd’hui écouterez vous sa parole » ? (Chema Israël) phrase qui s’adresse à
nous aujourd’hui avec le rappel de ce que produire l’endurcissement du cœur (du moins avant la venue de Jésus) à savoir la rupture de la relation. Et « ne fermez pas votre cœur » qui reste un mécanisme toujours présent. Il n’en demeure pas moins que ce psaume introductif à l’office me pose quand même question. Je suppose que s’il a été choisi ce n’est pas pour rien, mais démarrer par une menace ne me plaît guère et à priori ne m’incite guère à entrer dans la louange, même s’il s’agit de considérer tout ce que Dieu a fait pour nous malgré tout.

Je comprends que Dieu soit déçu, mais il sait bien que la terre ne s’est pas faite en un jour (il est même bien placé pour le savoir) et que comme l dit la chanson« pour faire un homme, mon dieu que c’est long »

Ce verset m’a poussée à réfléchir sur la notion de repos le notre et celui de Dieu.



Sur les tombes on écrivait fréquemment « qu’il repose en paix ». Est ce que la mort est un repos ? Le repos serait il le contraire du mouvement, du faire. Le cercueil serait il un lieu où on peut se reposer enfin du travail accompli pendant toute une vie. Un lieu où le corps repose sur quelque chose qui le soutient ? Mais comme nous ne savons pas bien ce qui se passe après la mort, ne s’agit il pas d’un souhait: que là où se trouve le disparu, il puisse goûter le bon, le bien l’agréable. En d’autres termes qu’il soit heureux.

Quand je travaillais dans une maison d’accueil spécialisée une des phrases favorites d’une des résidentes était : « vendredi ROPO ». En fait comme elle ne connaissait pas les jours de la semaine, cela voulait dire qu’elle nous souhaitait d’être en congé ce qui était une sorte de cadeau de sa part: tu as le droit de partir de ne pas t’occuper de moi, de faire ce que tu veux. Notre repos étant alors ne pas travailler, ou plutôt ne pas être obligé de travailler !




Pour nous repos est associé à ne rien faire et à laisser faire les autres. On se repose pendant les vacances, c’est à dire qu’on ne travaille pas. On sort du quotidien pour être autrement (je dis être et non pas faire). Mais pour que ceci soit possible il est nécessaire de se sentir en sécurité. Quand le psalmiste dit « je me repose à l’ombre de tes ailes » il veut dire que ce lieu de repos est un lieu sécurisant, où il se sent à l’abri des vents mauvais, protégé.

On pourrait dire que le repos c’est finalement un lieu où l’on se sent bien, où l’on est en sécurité et où on ne fait que des choses qui semblent agréables (ce qui peut renvoyer au repos du guerrier !). Et pourtant curieusement se reposer quand on ne dort pas n’est pas si facile que cela. Rappelons nous les siestes de notre enfance…

De fait même si nous ne sommes pas dans l’action, même si nous nous reposons, (ne faisons rien de précis) notre corps lui ne connaît pas le repos, puisque notre cœur bat et nos poumons respirent. Il m’arrive de penser connaître le repos lorsque justement dans la respiration je goute les moments ou à la fin d’un inspiration ou d’une expiration je suis un peu comme la marée, étale. Pour moi le repos ce serait cet état là, un moment de transition, un moment sans action, un moment où je me sens être. Mais cette conception du repos m’est possible parce que je n’ai pas à gérer trop de douleurs physiques et que ma tête n’est pas trop prise par un déchainement de pensées. Mais j’aime ces moments d’arrêt ou je peux vraiment gouter l’arrêt, attendre que la respiration reparte d’elle-même. En fait le cycle complet de la respiration est pour moi un repos, la sensation d’être vivant..

Pour en revenir à la phrase du psaume 94, à priori elle peut se comprendre comme « vous n’entrerez pas dans le pays que je vous ai promis, qui sera le pays où avec vous je résiderai, vous protégerai. Ceci étant d’une certaine manière confirmé par le psaume 132 qui célèbre le transfert de l’arche à Jérusalem, le lieu choisi pour être la résidence du Dieu tutélaire.
Ce lieu (le temple) le lieu de la gloire de Dieu, s’il n’avait pas été un lieu de « majesté » aurait pu être le lieu où Dieu vient se promener à la brise du jour, un lieu de véritable rencontre (ce que Jésus confirme quand il parle de la prière du publicain et du pharisien). Mais peut-on mettre Dieu en cage ? N’est Il pas un dieu qui chemine ?

Un sens possible de ce mot de « repos » serait alors « demeure ». Dieu propose à l’homme un lieu ou où demeurer avec lui (c’est la thématique de l’évangile de Jean) « Si quelqu’un m’aime, mon père l’aimera et nous demeurerons en lui, et nous ferons en lui notre demeure »

Maintenant que Dieu « se repose » cela reste à voir. Après la création il est bien question de repos, mais cela je crois indique aussi que Dieu est capable de mettre comme un terme à une certaine activité, ce qui ne veut pas dire qu’il n’agit pas autrement. La phrase de Jésus « mon père est à l’œuvre jusqu’à présent et j’œuvre moi aussi » Jn5, 17. Ne montre elle pas que le faire est différent de l’être et que celui qui se nomme « Je suis celui qui suis » reste actif même s’il n’est pas dans le faire.
Entrer dans le repos de Dieu me semble être un désir très profond, qui peut se réaliser au moins partiellement dès aujourd’hui, quand nous cessons de nous agiter et de vouloir faire parce qu’il faut faire. Entrer dans le repos de Dieu, n’évite pas les vicissitudes de la vie mais qui permet de les affronter dans la paix et d’apprendre à demeurer.


1 commentaire:

TOURNESOL a dit…

Pour entrer dans le repos de Dieu
et écouter la parole de Jésus qui nous dit "Je vous donne ma paix... je ne vous donne pas comme le monde la donne" il faut PRENDRE SOIN DE L'ÊTRE"
De tout temps, nous aspirons à cela... Je viens de lire un livre qui montre cela
Prendre soin de l'être
Jean-Yves Leloup
Philon et les Thérapeutes d'Alexandrie-Spiritualités vivantes-ALBIN MICHEl