mercredi, novembre 11, 2020

Luc 17,11-20 La guérison des dix lépreux

Lc 17,11-20


Un texte bien connu. Jésus n'est plus très loin de Jérusalem. Un groupe de lépreux crient leur détresse et Jésus répond, mais d'une manière assez déconcertante. Il ne "guérit" pas - et cela fait un peu penser à la guérison de l'esclave du centurion, il donne un ordre: "Allez vous montrer aux prêtres". C'est tout, c'est simple; mais pas tant que cela quand on y pense.


En même temps, quand on est devenu un impur, un rejeté, on n'a plus rien à perdre. Et ils partent. Luc nous dit qu'ils sont tous guéris, tous les dix, mais que les juifs, ceux qui sont les "frères", ceux-là restent dans l'obéissance à l'ordre initial. Le seul qui revient sur ses pas, c'est un Samaritain, un étranger, un "pas frère". Sauf que du coup, frère, il le devient...

 

Le samaritain raconte

 

Je ne sais pas trop comment je me suis retrouvé dans ce village, au milieu de Juifs alors que je suis Samaritain, mais ma peau s'était couverte d'abcès, je suis allé voir un prêtre et il m'a obligé à rester là où j'étais, donc dans ce village qui recevait (enfin recevoir n'est pas vraiment adapté) des lépreux comme moi. 


Et depuis que je suis là, je survis. J'ai faim, je suis seul, je ne peux pas prier avec les autres, et mes vêtements tombent en loque. Nous sommes dix avec cette maladie, dix avec cette pourriture en nous, dix à attendre, mais à attendre quoi, je ne sais même pas. Bien entendu je n'ai pas de nouvelles des miens. 

 

Aujourd'hui, il y a eu comme une rumeur dans le village, ça bougeait dans tous les sens. 

 

Il y avait un grand groupe qui prenait la route de Jérusalem. Nous avons fini par comprendre que c'était Jésus de Nazareth qui était là, celui qui est capable de donner à manger à des foules, de guérir des malades, de tenir tête aux pharisiens.

 

Alors nous, les exclus, les dix, nous nous sommes postés sur la route, en gardant la distance prescrite; et tous ensemble nous avons crié, crié pour qu'il nous prenne en pitié, lui qui est un Maître. Prendre en pitié, c'est ce que disent les mendiants et nous sommes des mendiants, mendiants de pain, car nous avons faim, mendiants de vêtements car les nôtres sont tellement sales, mendiants de guérison, mais ça nous avons du mal à y croire. Avoir pitié, c'est aussi ce que demandent les pécheurs, et si nous avons cette maladie, c'est bien que nous avons péché, et que c'est notre punition, mais quelle punition… Alors oui, nous avons crié à Jésus, qu'il nous prenne en pitié.

 

Il n'a pas continué son chemin, il s'est arrêté. Il nous a tous regardés, les uns après les autres. Il n'a pas donné de pain, il n'a pas donné de piécettes, il nous a dit d'aller nous montrer aux prêtres. 

 

Nous montrer aux prêtres! C'est ce que l'on doit faire quand on est guéri. Je dis bien guéri. Nous avons baissé la tête, et nous sommes partis, mais en nous demandant s'il ne se moquait pas de nous. Pourtant, ça ne lui ressemble pas, d'après ce que j'ai entendu dire de lui. 

 

Nous avons marché, et tout à coup, il m'a semblé que ma main n'avait plus mal. Alors je l'ai regardée ma main, et elle était redevenue nette comme la peau d'un bébé. J'ai regardé mon autre main, j'ai regardé mes jambes et partout c'était pareil. J'étais redevenu pur. Et pour les autres, c'était pareil. Oui, nous pouvions nous montrer aux prêtres, offrir le sacrifice et redevenir des vivants. 


Alors, les autres, ils se sont encore plus hâtés pour faire constater leur guérison. Mais moi, il me semblait que ce n'était pas juste, pas bien. Il nous avait regardé avec amour, il nous avait parlé et maintenant nous étions étions guéris. 

 

Ce qui était bien c'était de rendre grâce au Très Haut qui avait mis un tel homme sur notre chemin; ce qui me semblait bien, c'était de crier ma reconnaissance et de lui dire merci pour ce qu'il avait fait. 

 

Alors j'ai fait demi tour. Et moi qui suis un Samaritain, j'ai entonné des psaumes d'allégresse qui bénissent le Très Haut. Et dès que j'ai aperçu Jésus, j'ai couru vers lui. Je n'ai rien dit, parce que je n'avais pas les mots, mais je me suis prosterné devant lui, et je serais bien resté comme ça, pendant des heures. Je me savais béni, aimé, sauvé. J'étais un homme nouveau. 

 

Lui, il a parlé des autres, qui avaient poursuivi leur chemin, pressés qu'ils étaient d'avoir leur certificat de guérison, et qui n'avaient pas jugé bon de prendre un peu de temps pour lui dire merci; car ce qu'il nous a donné là, c'était la vie. Et cela le rendait triste, et j'aurais voulu le consoler. Et je l'ai regardé à ce moment là. 

 

Lui aussi m'a regardé, il m'a dit de me relever et que ma foi m'avait sauvé. Et je sais bien que ce qu'il m'a donné va bien au-delà de la guérison de ma peau. Il a mis sa vie en moi, et je voudrais passer ma vie à le chanter. Peut-être que je vais devenir un musicien.. 

 

Mais je vais rentrer dans mon village, je leur parlerai de Jésus et je leur demanderai de bien l'accueillir si jamais il passe chez nous. Et moi, je le logerai dans ma maison. Il viendra chez moi, et ce n'est pas lui seul que je recevrai, mais aussi celui qui habite en lui, le Dieu de nos pères.

 

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