jeudi, juillet 23, 2020

"J'ai vu le Seigneur" Jn 20, 18

Fête de Marie Madeleine. Jn 20, 11-18

Je pensais ne plus écrire de tels textes, mais en feuilletant mon blog, j'ai vu que certes il y  avait pas mal de billets, mais que je n'avais pas laissé cette femme, qui dans l'évangile de Jean, Marie de Magdala n'apparaît qu'à la fin: Jn 19, s'exprimer. 


Il faut dire aussi que le titre de La Vie Catholique: " Marie Madeleine, fille publique est l'amie intime de Jésus" m'a fortement déplu. Que cette femme ait choisi de vivre à la manière grecque oui, mais en faire une fille de joie qui vend ses charmes, qui se vend au plus offrant, non. Vivre comme on le disait après mai 68 d'une manière libérée, ce n'est pas se prostituer.


Marie de Magdala raconte…


J'étais là quand il a incliné la tête et quand il a cessé de respirer. 
J'étais là quand Joseph et Nicodème l'ont déposé dans ce tombeau neuf, dans le jardin.
 j'étais là quand ils ont roulé la pierre après l'avoir mis dans un linceul et l'avoir entouré d'aromates. 

J'étais chez moi, durant la Pâque, attendant avec impatience que le repos du Sabbat se termine pour que je puisse m'occuper du corps de celui que j'aime. Je suis encore comme paralysée par ce qui s'est passé. Pourquoi, pourquoi?
Je sais qu'il a dit qu'il reviendrait à la vie, mais quand on l'a vu comme moi, pendre sur cette croix, comment peut-on encore espérer cela? L'agneau de Dieu est mort.. Et moi, je pleure. 

Puis, dès que les ténèbres ne sont dissipées, je suis sortie pour aller voir son corps, le toucher une dernière fois, parce que c'est le travail des femmes de faire ça, pas celui des hommes, et que je ne leur fais pas trop confiance. Ont-ils bien mis les bandelettes? Ont-ils bien posé le suaire? Et les aromates? 

En arrivant, j'ai vu que le tombeau n'était plus fermé, que la pierre avait été roulée et mon cœur s'est affolé. Qui avait roulé la pierre?

Alors prise de peur, je suis allée chercher Jean et Pierre. Ils se sont habillés à la hâte, sont venus au pas de course, et ils ont constaté que le corps avait disparu. Jean avait un sourire étonnant quand il est ressorti de cette grotte tombeau. Je n'ai pas compris. 

Ils sont partis, moi, je suis restée. Et j'avais toujours cette peur au plus profond de moi. Où est-il? 

J'étais comme paralysée devant l'entrée de la tombe, ce couloir…. Impossible de bouger, j'étais comme une statue de sel, comme la femme de Loth. Puis j'ai bougé un tout petit peu, j'ai osé regardé et j'ai vu ou du moins j'ai cru voir deux personnages assis sur la pierre sur laquelle le cadavre avait été posé. 

J'ai remarqué que l'un était assis là où se trouvait sa tête, et l'autre là où se trouvaient ses pieds. Un peu comme les anges de l'Arche de l'alliance. Ils m'ont demandé pourquoi je pleurais. Quelle question.. J'ai  pensé qu'ils étaient vraiment idiots… Qu'est ce qu'ils faisaient là eux? Qu'est ce qu'ils attendaient? Pourquoi est-ce qu'ils ne me disaient pas où était le corps de mon Seigneur. 

Alors j'ai juste dit que je  ne savais pas où on l'avait déposé, mais en moi, je pensais que quelqu'un était venu emporter le corps, pour le laisser pourrir quelque part. Et cela, ce pouvait bien être une manœuvre de ceux qui l'avaient condamné à cette mort sur la croix. Lui voler son corps, lui voler sa sépulture pour qu'il ne repose pas en paix. 

Et ça pleurait toujours en moi et mes larmes coulaient.

Je suis ressortie à l'air libre, dans le jardin, et là j'ai vu un homme, grand, bien bâti et j'ai pensé que c'était le jardinier, enfin l'homme qui s'occupe des tombes dans ce jardin et qui sait bien que ce tombeau là n'aurait pas dû être utilisé. 

Il m'a demandé pourquoi je pleurais et qui je cherchais. Mais même si j'étais dans une sorte de brouillard, même si le soleil commençait à poindre, il s'est adressé à moi en me disant "femme". Jésus avait dit le même mot à sa mère, juste avant de mourir. Et cela me faisait bizarre d'entendre cela. 

Pourquoi je pleure, ça ne le regarde pas. Mais lui au moins, pas comme les hommes dans la grotte, il m'a demandé qui je cherchais, et ça c'était la bonne question.

Je lui ai répondu que je voulais qu'il me dise où il avait jeté le corps pour que je le reprenne. Il n'a pas répondu, enfin si, il a répondu...

Il a dit mon prénom, et là quelque chose s'est ouvert en moi. Je suis sortie de mes ténèbres, je suis sortie de mon doute, de ma peur, de mon envie de mourir. Quelque chose s'est retourné en moi, comme un bébé se retourne dans le sein de sa mère avant de naître.

C'était Lui, c'était Lui revenu à la vie, mais pas comme Lazare, qui a dû réapprendre à vivre quand il est sorti du tombeau.

Lui, la vie palpitait en lui, ça lui faisait comme un halo qui vibrait, comme une musique. Et ça me donnait envie de chanter, de m'unir à cette vibration qui sortait de lui..

Un seul mot est sorti de ma bouche: Rabbouni, parce que oui, il est le Maître, maître de la mort, la mort a été vaincue, il est le vivant, le Maître, pas celui qui sait ou qui enseigne, non il est tellement plus que cela. Il Est. 

 Je n'avais qu'une envie, le toucher, comme pour partager ce qui sortait de lui, mais il n'a pas voulu. Il a même anticipé ce que je voulais faire, poser ma main sur lui, pour sentir la chaleur de la vie. Il m'a demandé de ne pas le retenir. Mais je ne voulais pas le retenir, juste toucher..

Mais Il a sûrement ses raisons pour dire cela. Il a ajouté qu'Il qu'il n'était encore monté vers son Père ..

Monter vers son Père.. Et pourtant tant de fois il nous a dit qu'il demeurait dans le Père et que le Père demeurait en lui.

Et ce mot, monter, m'a fait penser à cette montée de la Galilée à Jérusalem, à ce long chemin des montées,  comme ces psaumes des montées, que nous chantons.  Monter à Jérusalem, monter vers la ville de son Père, monter vers le Temple, monter vers son Père…

Il allait donc monter vers Lui, gravir les échelons de l'échelle que notre père Jacob, avait vu en songe, retrouver son Père.

Pour moi, le ciel est ouvert, il n'est plus fermé; et et Celui qui réside dans le ciel, Celui dont nous ne prononçons pas le nom, celui que nous appelons le Seigneur, Celui qui, enfin c'est ce que je pense, parce qu'il a fait l'expérience de la mort de son Unique, est devenu le Père dont nous avons tant besoin, le Dieu qui se fait certes adorer, mais surtout aimer et qui aime, comme seul Dieu peut aimer. 

 Et une joie sans nom m'a envahie et j'avais envie de danser. J'avais été comme veuve pendant trois jours, je suis revenue à la vie, je suis une jeune mariée.  

Et comme Jésus le l'a demandé, je suis allée dire aux disciples que j'avais vu le Seigneur, qu'il était le Vivant, et qu'Il nous aimait et qu'il nous attendait. 

Mais l'ont ils cru? 

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