vendredi, août 07, 2020

Transfiguration, Mt 17, 1-9: "Ne parler de cette vision à personne avant que le fils de l'homme soit ressuscité d'entre les morts".

 

Quand on lit attentivement les trois textes qui parlent de cet événement, que seuls trois apôtres ont vu, Pierre, Jacques et Jean - les mêmes qui avaient pu assister la "ressuscitation" de la fille de Jaïre (Lc 8,41-56) - on se rend compte que ces trois hommes ne doivent pas en parler avant que Jésus ne ressuscite. 

 

Dans tous les cas, cette "vision" est suivie par guérison de l'enfant épileptique. Quant au contexte, on peut dire, malgré les différences, que cette vision vient après la première annonce de la passion et la réaction de Pierre qui se fait traiter de Satan comme quelqu'un qui vient entraver le projet du salut, ou des disciples qui sont décontenancés.

 

Matthieu 17

Marc 9

Luc 9




09: En descendant de la montagne, 

 

Jésus leur donna cet ordre : « Ne parlez de cette vision à personne, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts. »

 

 





09 Ils descendirent de la montagne, 

 


et Jésus leur ordonna de ne raconter à personne ce qu’ils avaient vu, avant que le Fils de l’homme soit ressuscité d’entre les morts.

 

10 Et ils restèrent fermement attachés à cette parole, tout en se demandant entre eux ce que voulait dire : « ressusciter d’entre les morts ».

 

36 Et pendant que la voix se faisait entendre, il n’y avait plus que Jésus, seul.

 

 

 

 Les disciples gardèrent le silence et, en ces jours-là, ils ne rapportèrent à personne rien de ce qu’ils avaient vu.

 



 

J'ai toujours considéré cet épisode, qui est une sorte de théophanie, comme un tournant dans la vie de Jésus. À partir de ce moment là, Jésus prépare ses disciples à ce qui va se passer et qui les conduira à voir un homme défiguré, à peine reconnaissable. C'est d'ailleurs je pense pour cela que les rencontres avec le Ressuscité ont été si difficiles. Comment reconnaître, en cet homme qui vous aborde sur une route entre Jérusalem et Emmaüs, un homme "normal", sans la moindre cicatrice qui pourrait évoquer les sévices dont il a été victime. 

 

Alors la question qui s'est posée à moi, c'est "quand". Quand les trois se sont-ils résolus à en parler aux autres?

 

On sait que Pierre en parle dans une de ses lettres: 2P 1,16 En effet, ce n’est pas en ayant recours à des récits imaginaires sophistiqués que nous vous avons fait connaître la puissance et la venue de notre Seigneur Jésus Christ, mais c’est pour avoir été les témoins oculaires de sa grandeur.

17 Car il a reçu de Dieu le Père l’honneur et la gloire quand, depuis la Gloire magnifique, lui parvint une voix qui disait : Celui-ci est mon Fils, mon bien-aimé ; en lui j’ai toute ma joie.

18 Cette voix venant du ciel, nous l’avons nous-mêmes entendue quand nous étions avec lui sur la montagne sainte.

 

Ce qui est intéressant dans ce texte, c'est que Pierre insiste sur ce qu'il a entendu; au moins autant que sur ce qu'il a vu, lui qui voulait comme figer le temps en dressant ces trois tentes pour Moïse, pour Elie et pour Jésus. Alors j'ai imaginé qu'il a raconté ce vécu après la Pentecôte, car avec le don de l'Esprit, les évènements passés prenaient un autre sens; et c'est cela qu'il fallait transmettre pour que cette théophanie soit connue de tous. 

 

Pierre raconte

 

Mes frères et mes sœurs, il y a eu autrefois, et pour moi autrefois, c'est durant la vie de notre Maître, quelque chose dont il nous avait interdit de parler, à moi et aux fils de Zébédée. Vous vous souvenez peut-être qu'alors que nous étions dans la région de Césarée de Philippe; il nous avait pris avec lui tous les trois, seulement tous les trois, nous qui avions dans le passé assisté à la résurrection de la fille de Jaïre. 

 

Nous avions gravi la montagne et nous étions bien fatigués. Je pensais un peu à notre Père Moïse qui était monté sur la montagne du Sinaï, mais je ne sais pas trop pourquoi j'avais cette pensée. Nous, quand nous sommes fatigués, nous essayons de lutter, mais en général nous dormons. Lui, ça nous le savons, il prie. 

 

Alors oui, nous nous sommes endormis tous les trois, mais c'était un sommeil étrange, dormions-nous ou pas? Il y avait une petite brise, et le soleil était un peu voilé. Et voilà que tout à coup nous vu Jésus, mais un Jésus comme nous ne l'avions jamais vu. On aurait dit que son enveloppe de chair était partie et que sous cette enveloppe apparaissait un être lumineux, brillant, rayonnant, réfléchissant la Gloire qui est celle qui entoure le Très-Haut.

 

Avec cette torpeur, impossible de parler. Et nous avons vu qu'il conversait avec deux hommes qui eux ne brillaient pas de la même lumière que Lui. L'un était Moïse, l'autre Elie. Elie, nous l'avons reconnu à son manteau, Moïse aux rayons de son visage. Je crois qu'ils parlaient de ce qui allait se passer, de cette montée vers Jérusalem, mais de cela, je ne suis pas sûr.

 

Il y avait une sorte de beauté, une sorte de quiétude. Et je me suis entendu demander à Jésus s'il voulait que je dresse trois tentes, une pour lui, une pour Moïse, une pour Elie. J'aurais voulu que ce temps ne s'arrête pas. J'avais à peine fini de parler qu'une nuée lumineuse est apparue, elle est descendue sur l'endroit où nous étions. Et cette nuée, elle était cette nuée qui avait guidé le peuple dans le désert autrefois, mais aussi cette nuée qui était dans la Tente du Témoignage et qui était le lieu de la Présence. 

 

Une voix douce et forte s'est fait entendre. Elle nous disait que Jésus était le fils bien aimé du Très Haut, et que le Très Haut, dont nous devinions l'infinie présence avait fait reposer en son Aimé toute sa Joie et que nous devions l'écouter.

 

Mais je crois que c'était trop… Nous ne sommes pas Moïse qui avait fait l'expérience de la présence du très Haut, dans la grotte où il s'était caché (Ex 34), ni Elie (2R 2), enlevé dans un char de feu. La crainte nous a envahis. Tous les trois nous nous sommes mis à plat ventre sur le sol, remplis de terreur. Et nous avons alors senti un contact sur notre épaule. C'était Jésus, redevenu le Jésus que nous connaissons, qui nous rassurait; mais qui nous a demandé instamment de ne parler à personne de cette vision. Il a parlé de vision, je ne pensais pas qu'une vision pouvait nous mettre dans un monde autre. 

 

Il a ajouté, que nous devions pas en parler avant que le Fils de l'Homme ne soit ressuscité d'entre les morts. Qu'est ce qu'il voulait dire? Il avait bien dit, avant que nous ne montions avec lui, que de très mauvaises choses devaient lui arriver, que le Fils de l’homme souffrirait beaucoup, qu’il serait rejeté par les anciens, les grands prêtres et les scribes, qu’il serait tué, et que, trois jours après, il ressusciterait, mais vu sa réaction quand naïvement je lui ai dit que je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour cela n'arrive, on ne lui posait plus de questions.

 

Ce que je crois, mes frères, c'est qu'il voulait que cette vision nous permette de voir, sous son visage qui allait être défiguré par les coups des soldats, par la fatigue, par la torture de la croix, le visage rempli de lumière de celui qui fait totalement la volonté de son Père, et qu'ainsi nous soyons prêts à l'accueillir quand il serait ressuscité d'entre les morts. Et ce visage défiguré, il était déjà là, au jardin des Oliviers, mais je n'ai pas su ou pas voulu le regarder; et parfois je m'en veux. Je crois qu'il aurait juste voulu que je sois là avec lui; et au lieu de cela, j'ai dormi. 

Mais vous savez combien cela a été difficile pour nous, et que ce n'est vraiment que maintenant, depuis que nous avons été baptisés dans son Amour, que nous pouvons parler de cette vision et en témoigner. 

Oui, Jésus que nous avons côtoyé sur notre terre, est bien le Fils du Très Haut, il est vrai homme et vrai Dieu. 

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