lundi, juillet 29, 2019

Un collègue de Matthieu se pose des questions sur les paraboles: Mt 13

Les paraboles du royaume: Mt 13


Le chapitre 13 de l'évangile de Matthieu est consacré à une nouvelle forme d'enseignement de la part de Jésus, l'enseignement en paraboles. Jésus essaie de faire comprendre ce que l'on peut entendre ou comprendre du mystère du royaume des cieux. Des paraboles, il y en aura d'autres, et ceux auxquelles elles s'adressent (la parabole de vignerons homicides par exemple) seront bien comprises par les prêtres et les scribes présents à ce moment là. Mais bien souvent, de nos jours, les "homélies" se centrent sur la moralisation de ces textes, et je me demande si c'est ce que Jésus voulait ou aurait voulu. 

Cette manière de parler n'est pas nouvelle dans la Bible, puisque Salomon s'exprimait déjà ainsi; et cela permet aux auditeurs de penser que Jésus est un nouveau Salomon, donc le roi choisi après David pour gouverner le peuple; mais elle semble quand même pas mal déconcerter les disciples - qui lui demanderont d'expliquer clairement la parabole de l'ivraie - et donc a fortiori la foule. 

A cette foule, Jésus dit: "qui a des oreilles pour entendre, qu'il entende", ce qui pour moi sonne un peu comme "Ecoute Israël"; et qui fait, de lui, la parole de Dieu; parole qui comme le dit le prophète Isaïe (Is 55), ne reviendra pas sans avoir porté son fruit.

Mais peut-être que Jésus, comme le prophète Isaïe, fait déjà l'expérience d'une foule versatile, dont les yeux ne sont pas ouverts, dont les oreilles sont bouchées, et qui ne peuvent entendre et comprendre que Dieu a envoyé son fils pour sauver autrement que par des guérisons ou des miracles. 


J'ai essayé de me demander comment quelqu'un de bonne volonté, dans la foule des anonymes qui écoutent Jésus, a pu recevoir ces petites histoires, d'autant que Jésus dit bien que, s'il a choisi à partir de ce moment là d'utiliser cette manière de parler, seuls les disciples en auront les clés. Et j'ai imaginé qu'un ancien collègue de Matthieu, un de ceux qui avaient participé au repas donné par ce dernier quand il a été appelé, va le voir et lui demande de l'aider à comprendre. 

Un ami de Matthieu raconte:

Quand mon ami Matthieu, le collecteur d'impôts qui était à l'entrée de la ville, a suivi cet homme étonnant qui se nomme Jésus, j'étais là. J'ai assisté au repas qu'il a donné ensuite. Lui, Matthieu, fils de Lévi, il a tout quitté pour le suivre. Moi, je n'ai pas été appelé ainsi, mais la transformation de mon ami m'a étonné, interloqué, et depuis, j'essaie d'écouter ce que raconte ce Jésus; et chaque fois qu'il parle, j'écoute. 

Il y a quelques jours, il était sorti de la maison de Simon, qui maintenant se nomme Le Roc, et il était allé sur le rivage. Moi je n'étais pas loin, et je n'étais pas le seul à le guetter. Très vite il y a eu plein plein de monde, plein d'éclopés, plein de possédés; mais lui, ce jour-là, il n'a guéri personne. 

Il a demandé à Simon de monter dans sa barque et s'est un peu éloigné; et il s'est mis à parler, mais pas comme d'habitude.. 

Il s'est mis - comme certains rabbins - à parler en racontant des petites histoires. Ces histoires, elles ont en principe une morale. Parfois elles font penser à des contes pour enfants. Et il a raconté une histoire étonnante, une histoire qui parle je pense du Très Haut, mais qui le transforme en semeur. Peut-être que le semeur c'est aussi Jésus, mais je ne suis pas trop sûr. Et ce semeur, il ne sème pas dans le champ,  prêt à recevoir le grain. Non il sème partout, il sème à tout vent, presque comme s'il était aveugle. Moi je pense qu'il est un fou ce semeur, et en même temps qu'il est plein d'espoir. Il veut utiliser tout ce qui pourrait produire du grain.

Alors, il sème sur le sol sec, tellement sec que la graine ne peut pas s'enfoncer; et lui il dit que les oiseaux du ciel vont se régaler, mais que du coup, pour le rendement, ça sera zéro.

Ensuite, il sème sur un terrain où il y a ces espèces de rochers qui affleurent à la surface de la terre, et là, oui ça va pousser au bout d'un certain temps. Seulement voilà, il n'y a pas assez de terre, alors quand le soleil donnera, ça va brûler sur place; et rendement à nouveau zéro. 

Puis il sème là où il y a des ronces. Sous les ronces, la terre est là et après tout, la terre fait bien pousser les ronces; ces ronces qui sont aussi la punition d'Adam: au lieu de porter du grain, la terre porte des ronces qui étouffent tout. Un terrain avec des ronces, c'est un terrain qui n'est pas entretenu. Alors semer là, quelle drôle d'idée. Bien sûr, avec la terre, ça a poussé un peu, mais finalement le rendement est nul. Comme si la terre se retournait contre le travail du semeur.

Et puis le semeur est arrivé là où la terre avait été retournée et préparée; et là, il y a eu du rendement. Et Jésus n'a rien ajouté; moi je suis resté sur ma faim. Il a juste dit: "Que celui qui a des oreilles , qu'il entende". Moi des oreilles, j'en ai, mais je n'ai pas trop compris. 

Ce que j'ai retenu c'est que par trois fois c'est du zéro pour le rendement et que par trois fois, il y a du rendement. Alors, cela fait finalement du cinquante-cinquante, ce qui n'est pas si mal. 

Après il a raconté une autre histoire. Il a parlé d'un homme qui a semé du bon grain dans son champ, enfin ses serviteurs ont fait ça. Et puis pendant la nuit il y a son ennemi qui est venu planter de l'ivraie. Et c'était facile, parce que le terrain venait d'être préparé. Et puis le temps a passé. Et d'un coup les serviteurs ont vu l'ivraie qui pointait en même temps que le blé. Ils ont cru que c'était le maître qui avait fait ça, mais il les a détrompés. Il leur a expliqué que c'était son ennemi qui l'avait fait pendant la nuit. Alors eux ont demandé s'il fallait arracher l'ivraie; ce n'était pas une mauvaise idée, mais lui a dit qu'il fallait attendre la moisson et que là, on séparerait les deux et qu'on brûlerait l'ivraie.

Et là encore, il n'a rien ajouté, il n'a rien expliqué. Bon, moi je pense que là, il ne doit pas s'agir d'un homme, mais du Seigneur, et que l'ennemi c'est le Satan, mais je ne suis pas trop sûr de moi. Et je me suis demandé si le champ, ce n'était pas moi, avec ces pensées qui sont en moi et qui ne sont pas bonnes et qui m'empêchent de faire le bon que le Très Haut me demande de faire.

Un autre jour, il a raconté encore d'autres histoires; il a parlé d'un homme qui doit cultiver un champ qui ne lui appartient pas, et qui trouve un trésor. Et là, au lieu de prévenir le propriétaire, il vend tout ce qu'il a et achète le champ: et le trésor est pour lui. Puis dans la foulée, il a parlé d'un homme qui est négociant en perles. Les perles, ce doit être toute sa vie pour cet homme; et il en trouve une d'une telle beauté et d'une telle forme qu'il vend tout pour l'avoir à lui. J'admets qu'on puisse faire cela. Mais qu'est ce qu'il veut nous faire comprendre? Est ce que pour mon ami Matthieu, Jésus est la perle rare? 

Matthieu a bien voulu m'expliquer comment il faut comprendre ces paraboles. On dit qu'autrefois Salomon parlait et interprétait les paraboles. Peut-être que Jésus est aussi un nouveau Salomon, un nouveau roi, qui nous donnera notre vraie place. Bon cela c'est mon rêve. 

Matthieu a dit que seuls ceux qui Le suivent ont reçu du Très haut de connaître les mystères du royaume de Dieu, mais pas nous, la foule. Donc ça veut dire que ce qu'il nous raconte, c'est une manière de parler du royaume des cieux. Il s'est plaint que notre cœur s'alourdisse, que nos oreilles soient devenues dures, que nos yeux soient incapables de voir; et que du coup nous ne pouvons pas nous convertir...

 Et c'est vrai qu'avec la vie que nous menons ce n'est pas facile de vivre comme de bons juifs, comme ces justes dont parlent nos écritures. Mais lui, il a guéri les aveugles, les sourds, les lépreux... Alors peut-être qu'il nous guérira de notre aveuglement et de notre surdité. Et je me dis que s'il explique le sens de ses histoires à ceux qui lui sont proches, c'est pour qu'ils nous expliquent, à nous, ce qui s'est dit là. J'ai de la chance, moi, avec mon ami Matthieu.

Ainsi la première histoire: il paraît que c'est un semeur qui ne lance pas du grain, mais des paroles. Et ces paroles, quand elles tombent sur un cœur sec (c'est comme cela que j'ai envie de raconter à mon tour), elles ne peuvent pas entrer en profondeur; et même si on a trouvé bien ce qu'il disait, le Mauvais s'arrange pour qu'il oublie. 

Quand elles tombent sur un sol pierreux - et moi j'ai envie de parler du cœur de pierre qu'un jour Dieu remplacera par un cœur de chair, lui, il dit que oui ça lève, mais que ça ne dure pas. Ce sont un peu des girouettes. Ils oublient vite. 

Quand elles tombent sur des ronces, et pour moi un terrain avec des ronces, c'est soit un terrain pas entretenu, soit un terrain encombré déjà par pas mal de choses; un cœur pas facile à atteindre. Lui il dit que c'est un cœur qui dans un premier temps est tout feu, tout flamme, mais que quand la vie avec ses ennuis arrive, eh bien cela se passe comme si tout était étouffé, comme un feu qui prend vite et qui s'éteint faute d'aliments. 

Et puis la bonne terre, qui attend, elle retient la parole; et la parole - c'est ça qui est important - à son tour elle va produire quelque chose. Et quand mon ami Matthieu m'explique, je trouve que la parole, en lui, porte beaucoup de fruits. 

Bien sûr, je me suis demandé quelle sorte de terre j'étais, quelle sorte de cœur j'avais. En fait je ne sais pas trop, je me dis que la parole parfois il faut du temps pour qu'elle se niche en soi et fasse son chemin. Simplement je veux continuer à écouter et entendre son enseignement.

Après, il m'a expliqué la parabole de l'ivraie, qui est plus simple. Elle concerne le présent, à savoir qu'il y a toujours du bien et du mal, et qu'à la fin des temps le mal, et ceux qui font le mal, iront brûler à tout jamais; et ça c'est une bonne nouvelle. Il m'a aussi dit que Jésus avait dit qu'à la fin des temps les anges jetteraient un filet sur tous les hommes, et qu'ils feraient le tri pour enlever les méchants du milieu des bons. Là, ça me plaît bien.. 

Seulement la question que je me pose, c'est bien de savoir si moi, tel que je suis, avec mon métier, avec ma famille, est-ce que je serai capable de porter du fruit, au moins un peu, pour que le royaume advienne. Il faudra que je demande à Matthieu, et qu'il m'explique quand lui aura compris…

Je sais que pour pousser, le grain a besoin d'eau. Quand l'eau est là, un terrain sec peut produire. Je sais aussi que quand il y a des ronces, il faut les couper, les arracher; et la terre produit. Et je sais aussi qu'après une bonne pluie, ces terrains où il y a de la roche produisent des fleurs magnifiques. Alors moi je vais demander au très haut qu'il fasse pleuvoir sur notre terre, sur la terre de mon cœur, pour qu'elle donne des fleurs et des fruits..



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