Il est possible que j’ai écrit autour de ce
mot que j’aime bien, car pour moi, il n’y a pas de sensiblerie dans ce mot,
mais la notion de souffrir avec.
Mais dans la représentation de souffrir avec,
il y a l’idée que soi-même on n’est pas dans cet état là (maladie, souffrance,
pauvreté, solitude, abandon et que sais-je encore) et que d’une certaine
manière on est dans une position « haute » par rapport à l’autre,
l’objet de la compassion (si je puis dire) qui lui est en position basse.
Ceci d’ailleurs explique que souvent les
personnes en souffrance ne veulent pas de pitié ou de compassion, elles ne
veulent pas être des « objets » de notre mansuétude, mais elles
veulent se savoir reconnues d’abord comme « sujet en souffrance certes, mais
comme sujet ».
Et ce que bien souvent nous avons à faire (j’allais dire à
être) c’est cela : reconnaître en cette personne un sujet à part entière,
avec son histoire, son passé, son présent et son devenir.
La compassion ce n’est pas avoir de la pitié pour
quelqu’un, ce n’est pas essayer de lui donner ce qu’il y a de bon en nous pour
en quelque sorte chasser le mauvais qui existe en lui (c’est déjà pas mal de
faire cela) mais la compassion est quelque chose de beaucoup plus exigeant et
en cela elle est transformante.
La compassion c’est non pas souffrir avec,
mais d’une certaine manière souffrir comme. C’’est d’une certaine manière
accepter de « se laisser » mettre à la place de l’autre (j’emploie
exprès le passif).
C’est de souffrir de sa souffrance, de se dire que même si
on ne comprend pas pourquoi il a réagi de telle ou telle manière, c’est comme
cela qu’il a réagi.
C'est regarder cela sans jugement, sans critique.
C’est
être intimement convaincu que l’on ne sait absolument pas ce que l’on aurait
fait ou ce que l’on serait devenu si on avait été confronté à la même
situation.
C’est (et cela peut paraître un peu fou) d’une
certaine manière se laisser prendre par l’autre, sans être lui (car il ne
s’agit pas de rentrer dans une fusion mortifère pour l’un et l’autre) mais
c’est de ressentir de l’amour pour lui, au point de vouloir le porter et porter
ce qui l’a mis dans cet état.
Cela nécessite aussi une grande humilité.
Je crois aujourd’hui que quand on dit que Jésus
qu’il « porte » le péché du monde (je pourrais dire toute cette
souffrance qui est sous tenue par l' envie, par la jalousie, par le
besoin de posséder) Il ne devient pas cela, mais prendre cela, porter cela, Lui donne d’être dans
notre humanité.
Il devient nous, Il prend sur Lui ce qui est de nous, Il le
porte non pas à notre place mais avec nous, Il nous en libère, mais en aucun cas il n’est contaminé
par cela et c’est pour cela qu’Il
peut l’enlever, ou du moins le mettre sur Lui pour que nous en soyons libérés, allégés.
Accepter de se laisser comme pénétrer par ce
qui peut faire souffrir l’autre, c’est peut être cela le début de la compassion
et cela nécessite une grande humilité, car c’est renoncer à faire pour essayer
d’être.
Je ne pense pas que nous en soyons capables,
je crois par contre que le souffle de Dieu peut nous permettre cela, mais petit
à petit, un jour après l’autre, à son rythme à lui. Quand Il se met à faire
vibrer en nous la corde de la compassion, peut être faut il d’abord qu’elle se
brise pour être remplacée par une autre qui vibrera « juste » au cri
de l’autre, en accord avec son « son » à lui.
2 commentaires:
Merci pour cette définition.
Compassion : C'est un mot que je n'aime pas, avec lequel je me suis toujours sentie mal à l'aise. Certainement parce que je pense que les gens le prennent dans sa première définition.
Ta définition me plait beaucoup. Difficile à appliquer, mais c'est bien dans ce sens qui faut aller.
L.
J'aime bien ton essai pour définir la compassion.
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