Pour expliciter un peu le billet précédent...
Dans la Bible, il est parfois questions de
brebis, de berger, de querelles aussi…
Le psaume 23 rappelle ou révèle que
Dieu est le berger qui s’occupe de sa brebis (ici le peuple Israël dans son
intégralité) et qu’Il veille sur elle et la protège. Dans l’évangile de Jean,
Jésus prend ce rôle : il est la porte qui permet aux brebis qui
connaissent sa voix d’aller et de venir (liberté) et il connaît ses brebis et
ses brebis le connaissent comme lui connaît le Père et que le Père le connaît.
Si le psaume 23 est d’une certaine manière sélectif, ici on passe dans
l’universel ce qui en soi est « la bonne nouvelle ». La brebis dépend
de son berger.
Mais outre les paraboles du jugement dernier
(Matthieu 25) où il est question de brebis et de chèvres qui représentent les
élus et les rejetés, il est aussi des récits qui parlent d’une brebis égarée et
de la joie du berger qui la retrouve. Un tel texte a été lu il y a peu de temps
(Mt18, 12-14) et alors qu’il est très simple, il m’a posé un tas de questions,
sur le berger, sur la brebis égarée et sur le troupeau…
Le texte de
Matthieu qui précède ce court passage est centré sur la place des petits (des
humbles, des sans instruction, des dépendants) et de la responsabilité future
des apôtres vis à vis de ceux là qui deviendront leurs brebis. Il est
intéressant de noter que ce passage commence par un questionnement :
« A votre avis, si un homme possède
cent brebis et qu’une d’elle vienne à s’égarer, ne va t il pas laisser les
quatre-ving-dix neuf autres sur la montagne pour s’en aller chercher
l’égarée ? »
Logiquement il
faudrait répondre par oui ou par non et on peut penser que les avis pourraient
être partagés. On peut aussi penser que ce berger là est un peu fou… Mais nous
n’avons pas la réponse des auditeurs. Peut être est il intéressant de savoir
comment nous nous aurions répondu, même si le berger a pris sa décision. Mais
il est évident que si l’on remplace brebis par enfant, la question ne se pose
pas !
Et l’histoire
continue en se centrant sur la joie de pasteur : « Et s’il parvient à la retrouver, en vérité
je vous le dis, il tire plus de joie d’elle que des quatre-vingt-dix-neuf
autres qui ne se sont pas
égarées ».
On peut
comprendre la joie du maître, mais en soi ce n’est pas très sympa pour les
autres qui ont respecté les consignes. Certes il n’est pas dit que le berger
l’aime plus ou d’avantage que les autres, mais on a l’impression que la joie
qui éclot est à la mesure de la peur ou de la peine ressentie. Faut il se
barrer du troupeau pour ressentir que l’on a de la valeur pour le berger ?
La finale de
cette courte histoire étant : «
Ainsi on ne veut pas chez votre Père qui est aux cieux, qu’un seul de ces
petits ne se perde ». La référence au Père qui est dans les cieux est
importante car il y a un lien entre ce qui se passe ici et ce qui se passe la
haut et ce qu’a fait le berger en permettant à la brebis de rejoindre le monde
de la vie est dans le désir du Père.
Par certains
côtés ce texte est quand même un peu rude pour les brebis qui restent seules
dans la montagne, même si cela peut signifier que le berger peut leur faire
confiance (ou confiance à d’autres gardiens). Peut être que ce qui est sous
jacent ici c’est que si la brebis (le petit) s’égare il y a une responsabilité
de ceux qui gèrent le troupeau et que les disciples auront à veiller pour que
cela n’arrive pas. D’ailleurs dans la suite du chapitre, tout ce qui est dit
sur le pardon peut aussi s’entendre comme : pardonner est bien supérieur à
exclure (tendance par trop humaine et par trop facile).
Dans l’évangile
de Luc, les choses sont un peu différentes, on n’est plus dans la montagne,
mais dans le désert Luc 15, 14-17, mais il est aussi question de la joie dans
le ciel pour celui qui se convertit car on est dans les paraboles (y compris
celle du fils prodigue) qui parlent de la miséricorde. Jésus répond aux
pharisiens qui lui reprochent de faire bon accueil aux pécheurs.
Mais que ce soit
chez Luc ou chez Matthieu, on trouve un berger et une brebis bien particulière:
celle qui n'est plus là quand on compte les têtes le soir et un troupeau. Et
j’ai eu envie de réfléchir un peu sur ces trois entités.
Une brebis n'est pas un agneau et elle pèse un certain poids! |
Prenons le
berger.
Je peux comprendre
qu'il soit heureux de l'avoir retrouvée sa brebis. Il a dû avoir un coup au
cœur en se rendant compte qu'elle manquait à l'appel. Il est parti à toute
allure, il l'a appelée, il a marché et là, il l'a retrouvée. Il lui a parlé et
sa voix l'a rassurée. Il a vu qu'elle aussi était effrayée, qu'elle était
fatiguée et il la prise sur ses épaules pour la ramener dans l'enclos et de là,
il va aller raconter aux autres bergers la chance qu'il a eue et le joie qui
est en lui. Il est fatigué parce que une brebis ce n'est pas un agneau et que ça pèse son poids, mais il est heureux. Et sa joie il veut la raconter, la
faire partager. Peut être que sa joie est à la mesure de sa peur. Peut être que
cela nous fait comprendre que le berger tient à nous, parce que qui peut dire
qu’il ne s’est jamais égaré… Ce
berger là, il n’en veut pas à la brebis et ce regard là est un regard qui
« sauve » car il ne juge pas.
Prenons la brebis,
celle qui s'est égarée.
Pourquoi s’est
elle égarée cette brebis ? Elle peut s'être égarée comme le fils prodigue
de Luc en voulant fuir le troupeau, faire sa vie, faire ce qu'elle a envie de
faire, être son propre maître, son propre Dieu. Les autres peuvent la regarder
comme mauvaise. Mais nous savons que Jésus est venu justement pour ces brebis
là alors qui sommes-nous pour juger? Et puis, elle peut aussi faire partie des
ces brebis décrites par Ezéchiel: les chétives, les malades, les blessées, les
égarées, les perdues (Ez 34,4) et là c'est différent, et nous nous ne savons
pas pourquoi elle s'est égarée et ce n'est pas à nous de juger.
Cette brebis là,
elle a retrouvé la sécurité, elle a aussi ressenti la joie de son maître dans
le corps à corps du retour. Ce qui lui est peut être demandé c'est justement de
témoigner de la joie de celui qui est parti pour elle.
Et je me suis
demandée si pour connaître cette joie d'être porté par le berger, il faut faire
de conneries (s'éloigner de l'enclos, aller vivre sa vie). Il est certain que
trouver de la miséricorde là où humainement on s’attend à un rejet, cela doit
changer complètement le regard sur le berger et sur l’amour qu’on lui porte.
Et maintenant
prenons le troupeau, parce que là les choses sont plus compliquées.
Il est intéressant
de noter la finale de la parabole : Luc 15, 7 : « Je vous le déclare, c'est ainsi qu'il y aura de la joie dans le ciel pour
un seul pécheur qui se convertit, plus que pour quatre-vingt-dix-neuf justes
qui n'ont pas besoin de conversion » car d’une part Jésus reconnaît que
des justes (même si le juste pèche un certain nombre de fois par jour) ça
existe (et si Lui le reconnaît pourquoi si souvent l’église fait elle comme si
c’était impensable) et que d’autre part c’est au ciel que la joie est grande.
Que le berger soit dans la joie, oui, mais que le troupeau le soit, cela n’est
pas si sûr. Notre sens de la justice est très aigu et il n’est pas si facile de
se réjouir pour accueillir celui qui revient, surtout quand il a commis des
fautes graves.
Si on revient à
l'évangile du fils prodigue, la réaction de l'aîné est quand même bien proche
de celle que nous aurions eue. Lui qui est resté dans l'enclos, qui a fait
le travail demandé et qui découvre que son père fait la fête pour son idiot de
frère qui est parti pour vivre comme un débauché, il se met en colère et peut
être n'a t il pas tort. Il a juste oublier cette phrase fantastique quand on y
pense:" tout ce qui est à moi est à toi". Objectivement cela doit
être difficile de voir la fête qui est faite pour le déserteur qui rentre,
quand soi-même on fait tout ce qu'on peut pour être un serviteur fidèle.
Mais si nous
raisonnons comme lui, le fils aîné (et il faut reconnaître si nous sommes un
peu honnêtes avec nous mêmes que notre première pensée risque d’être que ce
n’est pas juste, qu’il devrait payer, avant d'arriver à nous réjouir pour
lui ou pour elle) il faut bien reconnaître que contrairement à ce que nous pouvions imaginer nous ne
faisons pas partie de ces quatre vingt dix neuf justes qui d'après Jésus
n'auraient pas besoin de faire pénitence.
Alors au lieu de
se dire que la brebis égarée c’est l’autre, peut être pouvons nous reconnaître
que la brebis égarée c’est nous et que le berger est là pour nous, pour nous
aimer et être aimé.
Alors peut être
que au final, le troupeau est fait de brebis égarées qui ont un jour
entendu la voix du berger, qui sont connues de lui et qui le connaissent et qui
sont remplies de la joie de celui qui est prêt à donner sa vie pour elles.
1 commentaire:
Pour l'immédiat, je voudrais surtout te dire un grand merci pour ce billet qui m'apporte beaucoup, et qui pour moi comporte un enseignement spécifique.
à quelques jours de Noël, C'est bon de ressentir de la lumière et de la chaleur.
MERCI encore
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