Je suis le paralytique que Jésus a guéri à Capharnaüm. Il fut un temps où je marchais comme tout le monde et puis petit à petit cela s'est grippé en moi et je suis devenu dépendant des autres, incapable de me mouvoir. Inutile de dire que cela m'était insupportable et que cela a agi sur mon caractère et que j'en voulais beaucoup à D ieu, béni soit-Il (encore que pour moi, Il ne l'était pas).
Je me demandais ce que j'avais bien pu faire pour que cela m'arrive. Certains disaient que c'était une punition parce que j'étais un peu trop porté sur le vin et sur les filles, mais ça c'est ce que eux disaient.
Mais malgré tout j'ai conservé des amis. Et un jour ils sont venus tout excités disant qu'il y avait un type qui allait de ville en ville en Galilée, qui disait que le royaume de Dieu était là, mais surtout qui guérissait les malades et les infirmes à tour de bras. Ils voulaient absolument que j'aille le voir. Alors comme je n'avais plus rien à perdre, j'ai accepté d'aller voir ce guérisseur, ce Jésus de Nazareth.
Par le bouche à oreilles on a appris qu'il était à Capharnaüm et nous y sommes partis. Comme je suis devenu lourd à force de ne pas me bouger, il a fallu 4 copains pour porter mon brancard. Mais quand nous somme arrivés, nous nous sommes rendus compte que nous n'étions pas les seuls. Incroyable le nombre de gens qui étaient là. On nous a dit que la maison était remplie de gens de la haute, des scribes, des prêtres, des pharisiens. Je me demandais pourquoi ils étaient là et pourquoi ils prenaient toute la place, car la porte était fermée, il y avait des gens dehors comme nous qui attendaient.
La maison était pleine, tellement pleine qu'on ne savait plus ou mettre les pieds et personne ne voulait ouvrir un chemin vers le guérisseur.Moi, j'aurais bien fait demi tour, mais paralysé comme je le suis, que pouvais-je faire? Mes amis ont refusé de se croire battus. Ils n'avaient pas fait tout ce chemin pour rien. Il ne m'avaient pas trimballé pour rien. Alors ils ont eu une idée: passer par le toit. Eux ils sont montés sur le toit, ils ont enlevé des tuiles et ceux d'en bas se sont rendus compte que quelque chose de pas normal se passait. Ils ont dû se demander ce qui allait leur tomber dessus! Mais ils n'ont pas ouvert la porte pour autant.
Alors on m'a ficelé sur mon brancard, je ne sais même pas comment ils ont fait pour me hisser sur le toit, parce que j'ai commencé à avoir peur, peur de cette peur qui vous prend au ventre, qui vous empêche de crier... Je me suis retrouvé devant ce trou. En bas il y avait de la lumière. Moi j'avais froid et peur. Je ne sais pas comment ils m'ont fait descendre, mais j'ai eu l'impression que j'allais mourir, que ma dernière heure était arrivée et d'un coup m'est revenu tout ce que j'avais fait de mal dans ma vie et cela se bloquait en moi. j'avais l'impression à la fois d'être dans un cercueil que l'on descendait en terre et que j'allais glisser, glisser et que rien ne pouvait me retenir.
Et puis brusquement, mon brancard était au sol, moi dessus, vivant. Le guérisseur s'est tourné vers mes amis qui n'étaient pas peu fiers d'être arrivés à me faire descendre sans me tuer... Il les a regardés d'abord eux, puis moi.
On aurait dit qu'il savait ce que je venais de vivre (toute ma vie qui avait défilé devant moi, avec tout ce que j'avais loupé) et il m'a dit que mes péchés étaient pardonnés. Mes péchés je venais de les voir tous défiler devant moi et il y en avait un sacré paquet qui me pesait sur les épaules. Pas étonnant que je ne puisse plus marcher.Bien sûr je n'étais pas venu pour ça, mais cette phrase a été au plus profond de moi, dans le puits qui est moi et elle a lessivé, tout ce bourbeux qui était en moi et j'avais envie de danser de joie. Je me sentais à nouveau vivant, même si j'étais toujours couché sur mon brancard.
C'est là ou ceux qui prenaient toute la place dans la maison ont commencé à ronchonner et à dire que personne ne pouvait pardonner les péchés sauf Dieu. Mais moi, je savais bien que j'étais pardonné, que j'étais tout léger, que le poids de mon péché ne pesait plus sur moi et quand jésus -puisque c'est le nom du guérisseur- m'a dit de me lever, de prendre mon brancard et de rentrer chez moi, cela ne m' a posé aucun problème parce que j'avais déjà retrouvé ma vigueur.
Du coup, je n'ai pas même pas attendu mes amis, je suis sorti, j'ai respiré l'air du dehors, parce que dedans il faisait rudement chaud et mes amis sont arrivés. Ils m'ont dit que tout le monde était dans l'admiration de ce que cet homme était capable de faire (et aussi de river leur clou à tous ces gens porteurs de belles robes), et nous, on a pris le chemin du retour.
On imaginait tout ce qu'on allait pouvoir raconter aux autres de mon village, et la fête qu'on allait faire tous ensemble et je me disais que les copains c'est vraiment une belle chose. Alors j'ai pu moi aussi bénir mon D.ieu et le bénir d'avoir envoyé cet homme Jésus.
2 commentaires:
Excellente « réécriture contemporaine » de ce récit. J'aime beaucoup comment tu dis les choses et la vigueur redonnée par le pardon des péchés, qui n'est pas seulement d'ordre psychologique, mais tient d'une sorte d'alchimie « psycho-spirituelle ».
Cela a attiré mon attention sur un aspect. Dans ton récit, le paralytique est assez passif, et même il a la trouille. Ce sont ses copains qui agissent et décident de le passer par le toit. Lui, il subit plus ou moins.
J'aurais aimé le voir plus actif, plus participatif, donnant lui-même des ordres à ses copains : allons-y soyons audacieux ! hissez-moi sur le toit !
Ceci n'est pas une critique de ton texte, puisque tu es très en phase avec le texte original qui fait la part belle aux copains du gars, qui ne dit pas grand-chose, si ce n'est rien.
Peut-être parce que je suis moi-même handicapé j'aurais aimé le voir plus proactif !!…
Mais à mon avis il y a plus que cela, et autre chose en ce qui me concerne.
Autrement dit ta réécriture me donne à réfléchir…
Cela m'amènera peut-être à écrire quelque chose chez moi…
Bonjour Alain,
comme tu le sais j'ai travaillé dans un centre de rééducation fonctionnelle, avec beaucoup d'enfants lourdement handicapés, donc peu actifs...
Quand les lèves malades électriques sont arrivés dans les dortoirs, j'ai voulu tester ce que cela faisait d'être pris par cette espèce de grosse pince en plastique, soulevé, déplacé et reposé. Je dois dire que j'avais peur que l'AMP fasse n'importe quoi avec la commande électrique et au fond de moi je n'étais pas rassurée du tout. Cela explique un peu ce que j'ai écrit.
Rester aux commandes (parce que c'est ce que tu dis) prendre des initiatives, c'est ce que j'ai essayé de faire comprendre à ceux qui semblaient subir, mais qui devaient pour rester des vivants être capable de dire non, être capable d'anticiper...
Quand j'accompagnais des enfants qui devaient être endormis, je leur demandais d'être actifs: poser des questions, regarder pour raconter à la mère comment c'était dans la salle, etc etc. Donc là je te rejoins.
Je dois dire qu'en écrivant ce billet je pensais beaucoup à toi. Merci d'y avoir réagi.
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