C'est un texte que j'aime bien. On trouve le parallèle dans Marc, mais dans le texte de ce jour, j'ai toujours du mal à me représenter le "Il le projeta en plein milieu et il sortit sans lui faire de mal". Marc parle de convulsions, et cela me semble plus réaliste. Mais restons dans la douceur lucanienne.
Au Prieuré St Benoît, le Père Paul a fait un parallèle avec la première lecture, l'esprit du monde, l'esprit mauvais, l'esprit de Dieu, Jésus; et l'homme au milieu, un peu comme un enjeu, à la fois victime du mal mais aussi complice.
J'ai laissé un homme qui a vécu cette scène raconter, mais comme il s'agit de l'évangile de Luc, je suis restée fidèle à cet évangile. C'est pour cela que je ne mentionne pas les premiers disciples, qui seront appelés plus tard, même si après cet épisode, Jésus est accueilli dans la maison de Simon.
Le texte.
31 En ce temps-là, Jésus descendit à Capharnaüm, ville de Galilée, et il y enseignait, le jour du sabbat.
32 On était frappé par son enseignement car sa parole était pleine d’autorité.
La suite sera vraiment une démonstration de cette autorité. Jésus vient de Nazareth, où ça ne s'est pas très bien passé pour lui; on peut espérer qu'ici cela sera différent;
33 Or, il y avait dans la synagogue un homme possédé par l’esprit d’un démon impur, qui se mit à crier d’une voix forte :
34 « Ah ! que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. »
Je sais qu'on a beaucoup disserté sur le "perdre": vouloir notre perte, vouloir nous chasser de ce qui nous appartient, et nous condamner. Et la reconnaissance est: 'tu es le saint', (le béni) de Dieu, mais cela n'en fait pas le fils.
Ce qui me frappe aussi, c'est (il faudrait certainement voir d'autres traductions) le "d'une voix forte", car ce sont les mêmes mots qui sont employés pour Elisabeth, mais elle, elle est rempli de l'Esprit Saint.
35 Jésus le menaça : « Silence ! Sors de cet homme. » Alors le démon projeta l’homme en plein milieu et sortit de lui sans lui faire aucun mal.
Et c'est la démonstration de l'autorité: tais-toi, lâche ton emprise, sors. Et va au diable. C'est peut-être plus net ici que chez Marc: mais oui, Jésus est bien venu pour qu'ils soient mis dehors, pour que les hommes soient libérés du Mal.
Et la réaction de l'esprit est étonnante. Il doit obéir à plus fort que lui, mais il le fait avec une certaine esbroufe. Pour moi, l'homme est manipulé comme s'il était une marionnette, et en soi, c'est une image terrible de la force du mal. Mais le mal ne peut pas résister.
36 Tous furent saisis d’effroi et ils se disaient entre eux : « Quelle est cette parole ? Il commande avec autorité et puissance aux esprits impurs, et ils sortent ! »
37 Et la réputation de Jésus se propageait dans toute la région.
Ce qui est étonnant ici, c'est la réaction de l'assistance, l'effroi. Et cela on le retrouvera lors de la pêche sur le lac (la réaction de Simon: éloigne-toi de moi, car je suis un homme pécheur. Un grand effroi l'avait saisi lui et ses compagnons). On retrouve là ce qui se passe lors des théophanies rapportées par le livre de l'Exode.
On retrouve le même épisode chez Marc, mais précédé par l'appel de Simon, d'André et des fils de Zébédée.
Mc 1,21-28 | Lc 4,31-37 |
21 Ils entrèrent à Capharnaüm. Aussitôt, le jour du sabbat, Jésus se rendit à la synagogue, et là, il enseignait.
22 On était frappé par son enseignement, car il enseignait en homme qui a autorité, et non pas comme les scribes.
| 31 En ce temps-là, Jésus descendit à Capharnaüm, ville de Galilée, et il y enseignait, le jour du sabbat.
32 On était frappé par son enseignement car sa parole était pleine d’autorité.
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23 Or, il y avait dans leur synagogue un homme tourmenté par un esprit impur, qui se mit à crier :
24 « Que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. »
| 33 Or, il y avait dans la synagogue un homme possédé par l’esprit d’un démon impur, qui se mit à crier d’une voix forte :
34 « Ah ! que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu |
25 Jésus l’interpella vivement : « Tais-toi ! Sors de cet homme. »
26 L’esprit impur le fit entrer en convulsions, puis, poussant un grand cri, sortit de lui.
| 35 Jésus le menaça : « Silence ! Sors de cet homme. »
Alors le démon projeta l’homme en plein milieu et sortit de lui sans lui faire aucun mal.
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27 Ils furent tous frappés de stupeur et se demandaient entre eux :
« Qu’est-ce que cela veut dire ? Voilà un enseignement nouveau, donné avec autorité ! Il commande même aux esprits impurs, et ils lui obéissent. »
| 36 Tous furent saisis d’effroi et ils se disaient entre eux :
« Quelle est cette parole ? Il commande avec autorité et puissance aux esprits impurs, et ils sortent ! »
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28 Sa renommée se répandit aussitôt partout, dans toute la région de la Galilée
| 37 Et la réputation de Jésus se propageait dans toute la région.
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Un homme raconte.
Souvent, le jour du shabbat dans notre synagogue de Capharnaüm, nous invitons à parler des personnes que nous ne connaissons pas vraiment, mais qui sont venues assister au service. Ce jour-là, il y avait Jésus, un homme de Nazareth qui, un peu comme Jean - celui qui baptise sur les rives du Jourdain, a un message à annoncer, à promulguer.
On raconte, mais faut-il croire tout ce qu'on raconte, qu'après avoir été baptisé, alors qu'il était en prière, les cieux se seraient ouverts, qu'une colombe serait apparue et qu'une voix aurait dit: "tu es mon fils bien-aimé, en toi Je trouve ma joie." Ce qui voudrait dire que cet homme est celui qui est choisi par l'Éternel.
D'autres racontent aussi, qu'ensuite il serait parti dans le désert, qu'il y serait resté aussi longtemps que notre père Moïse lorsque ce dernier était parti à la rencontre du Très-Haut, qu'il serait demeuré quarante jours sans boire ni manger, et qu'il en serait revenu changé, lui qui est le fils d'un simple charpentier. Et depuis il enseigne avec autorité, en Galilée. On dit même qu'il a fait des guérisons.
J'ai été surpris, agréablement surpris par ses commentaires des textes. Il parle avec autorité, avec conviction, il ne répète pas des enseignements connus, on ne s'ennuie pas, et je me demande où il a pu apprendre tout cela. C'est étonnant.
Et tout à coup, l'un d'entre nous lui a coupé la parole. Il s'est mis à crier, à hurler. Son visage était méconnaissable, complètement tordu, et sa voix était étrange. Il est certain qu'il devait être possédé. Et il hurlait, ou du moins quelqu'un en lui le faisait crier en se servant de sa bouche: "Que nous veux-tu Jésus de Nazareth, es-tu venu pour nous perdre? Je sais qui tu es, tu es le Saint de Dieu".
Cela a jeté un froid, une grande peur. Nous nous regardions tous, interloqués. Qu'est ce qui se passait? Pourquoi cet esprit impur se manifestait-il? De quoi avait-il peur, ou de quoi avaient-ils peur tous ces esprits mauvais puisqu'il parlait en leur nom à tous.
Si seulement cet homme Jésus pouvait nous en débarrasser, de ces esprits impurs, ce serait un tel soulagement. Car ils nous rendent malades, ils nous harcèlent, nous dominent, parfois nous font mourir.
Il a ensuite ajouté, que lui, l'esprit mauvais, savait qui était Jésus. Il a affirmé qu'il était le Saint de Dieu.
Ce qui m'a le plus étonné, c'est que Jésus n'a pas discuté avec lui. Il l'a chassé avec autorité en disant simplement: Tais-toi, sors de cet homme.
Et là, il s'est passé quelque chose. Celui qui avait proféré ces paroles était au fond de la salle, et d'un coup, comme s'il était une marionnette, il s'est retrouvé en plein milieu, devant l'armoire qui contient les rouleaux. Comme s'il avait été projeté là par une force stupéfiante; et dans la minute qui a suivi, son visage s'est détendu, sa respiration est redevenue normale et il était là, au milieu de nous, paisible comme si rien ne lui était arrivé.
Je dois dire que par contre, nous tous, nous étions un peu effrayés par ce qui venait de se passer et que nous nous demandions, enfin moi je me demandais, qui était cet homme qui commande aux esprits impurs et qui se fait obéir d'eux, et d'où lui venaient ces paroles qu'il nous avait dites avant la manifestation du Malin.
Ce que je sais moi, c'est que mes yeux ont vu quelque chose qu'ils n'auraient jamais pensé voir, qu'ils ont entendu quelque chose qu'ils n'avaient jamais entendu, et que le règne de Dieu était là, au milieu de nous. Béni soit Dieu de venir visiter son peuple.
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