samedi, novembre 08, 2025

LUC 14, 1-23. UN REPAS CHEZ UN PHARISIEN UN JOUR DE SHABAT.

LUC 14, 1-23. UN REPAS CHEZ UN PHARISIEN UN JOUR DE SHABAT. Un convive bien mal-élevé.

 

 

Ce chapitre 14 de l'évangile de Luc, est un chapitre qui est "distillé" pendant près d'une semaine, dans la liturgie catholique (messes de semaine). Cela m'a conduit en travaillant sur les différents fragments, de laisser parler différentes personnes, pour essayer de montrer quelles ont pu être leurs réactions face à quelqu'un qui semble s'inviter à un repas le jour du sabbat (je peux donc imaginer que c'est le repas du vendredi soir, ce repas où l'on attend le retour du prophète Elie), un repas qui de nos jours est un repas familial, mais qui là semble avoir une autre dimension. 

 

Ce n'est pas un repas qui se passe dans la paix et dans la joie. D'emblée Jésus est confronté à un dilemme. Il y a un homme infime, qui a du mal à se mouvoir. Doit-il ou non lui rendre la santé. Lui est-il permis ou non, bien ce que soit un jour où aucun travail n'est admis de rendre le repos à cet homme? On peut peut-être dire les choses ainsi. Pour nous, la guérison nous semble normale, mais pour des juifs ultra-pratiquants, pour lesquels la loi doit être respectée dans le moindre détail, et là, ce n'est pas un détail, il y a transgression et donc possibilité de tuer cet individu. Ex 31, 14 et Nb 15, 32-36. Sauf que Jésus fait remarquer à juste titre que si quelqu'un tombe dans un puits, il n'est pas question de le laisser mourir, même si c'est le jour du sabbat. La vie prime. Or c'est bien la fonction de Jésus, donner la vie, il donnera sa vie pour cela, et il est prêt à la donner pour cet homme.  Mais bref, c'est un invité qui ne se conforme pas aux règles de la Tora, ou qui ne semble pas s'y conformer. 

 

Il se permet ensuite de faire toute une série de réflexions, un peu difficiles à entendre. Nous savons nous que du moins dans l'évangile de Luc, Jésus fait feu de tout bois, pour en tirer un enseignement. Là, il fait remarquer que certains essayent de s'emparer des meilleures places

Et il en tire un enseignement qu'il conclue par la sentence suivante : qui s'élève sera abaissé, et qui s'abaisse sera élevé. Si l'on évoque cet autre repas où Jésus lavera les pieds de ses amis et ce qu'écrira Paul bien des années plus tard ( il s'est abaissé devenant obéissant jusqu'à la mort et à la mort sur la croix), on peut penser qu'il parle de lui et montre un peu qui il est, mais pour les participants, cela n'a pas dû plaire.

 

Ensuite, il fera remarquer à son hôte, qu'inviter des personnes qui peuvent "rendre" l'invitation ce n'est pas cela qui plait vraiment à Dieu. La suggestion d'inviter ces personnes qui sont "interdites" de temple, qui sont pauvres et pour lesquelles ce sera Dieu qui rendra à la fin de temps, n'a pas dû, être entendue avec plaisir. 

 

Enfin, la réponse qu'il fait à l'un des convives qui lui croit avoir compris quelque chose et qui finalement s'en vante un peu, et qui compte bien se retrouver admis au repas dans le royaume de Dieu, a dû être un peu de l'ordre de la douche froide. Oui, il y aura des multitudes qui entreront dans la salle du banquet, mais pas ceux qui ont reçu l'invitation en bonne et due forme et qui le jour où elle peut être honorée, l'ont déclinée purement et simplement.

 

Bref, si je puis me permettre, un convive bien mal élevé ce Jésus de Nazareth. 

 

J'ai donc laissé parler un certain nombre de personnes, que ce soit l'hôte, un convive, un autre convive. Mais pour la lecture, il m'a semblé plus facile de regrouper tous ces textes en un seul, en notant simplement qui raconte. Puis de présenter comment j'en suis arrivée là (réflexions et analyse des textes) et peut-être de laisser ensuite Jésus raconter. 

 

 

LES RÉCITS

 

Versets 1-5 : une guérison. Un pharisien raconte. 

 

Nous avions prévu avec notre ami Joseph, que Dieu le bénisse, que si Jésus s'arrêtait dans notre bourgade, un jour de Sabbat, nous nous arrangerions pour l'inviter et lui tendre un piège. Pour qui se prend-il cet homme qui défend ses disciples qui froissent du blé un jour de sabbat, qui guérit un paralytique et le renvoie avec son grabat, qui pardonne les péchés, qui vient de guérir dans une synagogue une femme bossue? 

 

De fait, il s'est invité tout seul, avec juste trois disciples, comme s'il savait ce qui l'attendait ! 

 

De notre côté, nous avons fait chercher un homme rempli d'eau, des pieds à la tête et qui pouvait à peine tenir debout. Nous lui avons même donné de l'argent. Nous allions bien voir s'il allait oser une fois de plus s'asseoir sur la loi donnée à notre Père Moïse. 

 

Quand il a vu David, l'infirme, il nous a questionné. Il nous a demandé s'il était permis ou non de faire une guérison le jour du sabbat. Pour nous c'est non, mais pour les autres, ces illettrés, c'est oui, et nous nous sommes tus. Bien sûr il a dû se dire que "qui ne dit mot consent". 

 

Alors il s'est approché de l'homme, l'a aidé à se mettre debout, et il fallait de la force pour cela. Et nous avons vu que littéralement David se dégonflait, qu'il redevenait lui-même, qu'il était guéri. Je dois reconnaître que cela fait quand même quelque chose, mais quand même, pas le jour du Sabbat. Puis Jésus lui a dit de s'en aller, ce qu'il a fait. 

 

Il nous alors regardé avec une certaine sévérité et nous a posé une question. Nous les questions c'est notre fort, mais là, il nous a demandé ce que nous faisions si notre fils ou notre bœuf tombe dans un puits le jour du Sabbat? Nous savons bien que nous irions immédiatement les sortir de là. Mais c'est vrai qu'il nous a eu et cela a renforcé notre colère. Mais que pouvions nous rétorquer !

 

 

Les versets 7-11 : ne pas choisir ce qu'on pense être la meilleure place. Un convive raconte.

 

Lui, il s'est invité tout seul. Enfin, ce n'est pas tout à fait vrai, parce que nous cherchons comment nous débarrasser de lui, et nous voulions voir s'il ferait une guérison le jour du Repos. Du coup, nous étions assez nombreux. 

 

Comment a-t-il remarqué qu'il y a eu une certaine pagaille pour avoir les meilleures places, celles où on est sûr d'être servi en premier, de manger chaud, et d'être aussi avec des amis à soi, je veux dire, ne pas se retrouver avec n'importe qui. C'est vrai qu'il y a tout un art pour placer les gens lors d'un repas. 

 

Je dois dire que je n'ai pas trop aimé ce qu'il a dit, et pourtant il avait raison. Bien souvent dans les synagogues, nous les pharisiens, nous aimons bien prendre les meilleures places, nous faire remarquer par notre piété. 

 

Il nous a fait remarquer à juste titre que si quelqu'un plus considéré arrive un peu en retard, le maître de maison nous demandera de lui céder notre place et que ce sera la honte pour nous.

 

Il a ajouté une jolie sentence, ça je dois le reconnaître! Il a dit que quiconque s'élève sera abaissé et qui s'abaisse sera élevé. N'est pas ce que disait Anne, la mère du grand prophète Samuel :  l'arc des forts est brisé, mais le faible se revêt de vigueur,  ou le seigneur rend pauvre et riche, il abaisse et il élève ou encore le prophète Isaïe, quand il parle de ce serviteur méprisé, compté pour rien et qui verra la lumière et la connaissance le comblera. 

 

Je dois reconnaître que cette phrase, je la garderai au fond de mon cœur, que je la répèterai et que finalement ce mal-élevé je le remercie.

 

 

Les Versets 12-14 : inviter les démunis : L'hôte raconte.

 

 

Je m'attendais à tout sauf à ça. Il a mangé à ma table, et lui, contrairement aux autres qui pourront m'inviter à la leur, il ne m'invitera pas à la sienne. Sauf que lui, il mange avec les prostituées, les collecteurs d'impôts, alors pas question de manger avec lui. 

 

Il n'a pas tort, je dois le reconnaître quand il dit que de préférence j'invite ceux qui pourront me rendre mon invitation ou qui ne sont pas venus les mains vides. Mais bon de là à inviter tous ceux qui n'ont même pas le droit d'entrer prier dans le temple, je veux dire les estropiés, les boiteux, les aveugles, je suis désolée, mais je ne suis pas prêt, même qi comme il l'affirme, à la résurrection des justes, cela me sera rendu, et surtout si j'entends bien, c'est grâce à cela que moi j'entrai dans le royaume de mon créateur. Peut-être faudrait-il que je réfléchisse un peu, mais là je ne suis pas prêt.

 

 

Les versets 15-23. La parabole du repas "snobé" par ceux pour lesquels il avait été préparé. Celui a dit "heureux celui participera au repas dans le royaume de Dieu raconte"

 

 

On m'avait dit bien des choses sur Jésus de Nazareth. Ce jour- là, je l'ai vu et j'ai vu comment il était. Il ne mâche pas ses mots et ce n'est pas comme cela qu'il va se faire des amis, mais est- ce qu'il veut. Toujours est-il que ce jour de Sabbat, il a guéri un homme de son infirmité. Au fond de moi, Shabbat ou pas, il a eu raison. Comment supporter de voir un homme souffrir autant. Bien entendu, les bien-pensants étaient furieux, mais que pouvaient-ils faire? Mais comme je l'ai dit, ce n'est pas comme ça qu'il va se faire des amis. Des ennemis, il en crée en veux-tu en voilà.

 

Après, il s'est un peu moqué de ceux qui se précipitent pour avoir les meilleures places dans les repas, et il a fait remarquer à notre hôte qu'inviter de personnes qui peuvent vous réinviter ensuite, c'est bien mais pas suffisant. Inviter tous ceux que lui Jésus fréquente, ces estropiés, ces infirmes, ces rejetés, c'est peut-être cela que désire notre Père des Cieux. Et je dois dire que ce qu'il disait me parlait aussi dans mon cœur. Ce qu'il dit c'est comme du vin nouveau, comme une parole neuve.  Il me rendait heureux, un peu comme si un carcan se brisait.

 

À ma grande surprise j'ai pris la parole et j'ai dit : heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu. Pourquoi ai-je sorti cette phrase? Tout le monde m'a regardé, mais au fond de moi, je sentais que ce ne serait pas donné à tout le monde, et peut-être que ceux qui sont tellement certains d'être des justes, n'y participeront pas. Et même moi, est ce que j'y participerai? Je ne sais pas.

 

Il m'a regardé avec un petit sourire en coin et il a raconté une histoire curieuse. 

 

Il a parlé d'un homme qui donnait un grand repas, et qui avait invité beaucoup de monde. Seulement les invités ont tous trouvé de bons prétextes pour décliner l'invitation. Oui les motifs étaient valables, seulement ils savaient bien qu'ils étaient invités et ils ont fait comme s'ils avaient oublié. À croire que ça ne leur faisait pas plaisir d'avoir été choisis alors quand tant d'autres ne l'étaient pas. Je sais bien qu'une parabole est une parabole, mais je me disais que peut-être ils avaient oublié la date et qu'ils ne pensaient plus que ce repas, ce grand repas arriverait. Et Oublier les promesses du Très Haut, nous nous sommes très forts pour ça, je dois le reconnaître.

 

Je me suis demandé ce qui allait arriver. Et Jésus a continué son histoire. Il a dit que le Maître s'était mis en colère, et il y avait de quoi. Et qu'il voulait que beaucoup participent à son repas, mais que les premiers, même s'ils le voulaient ne puissent plus entrer. Pour cela il fallait remplir la salle et la salle était immense. Alors le serviteur est allé sur les places et sur les rues de la ville et il a convié tous les pauvres, tous les estropiés, tous les boiteux à entrer. Et cela m'a fait rire, parce que tous ceux-là, ils ne peuvent pas rendre, tous ceux-là ils ne peuvent pas entrer prier dans la maison du Seigneur, ils en sont exclus, et maintenant, ils avaient leur place. Et cela me donnait envie de jubiler. 

 

Le serviteur avait pourtant écumé toute la ville, mais la salle n'était pas remplie. Le Maître l'a renvoyé en lui disant d'aller sur tous les sentiers, sur toutes les routes et d'inviter tout le monde et même s'ils n'osaient pas venir, parce qu'ils étaient sales, et mal vêtus, ça n'aurait pas d'importance, ce qui comptait c'est de remplir, que la salle soit pleine à craquer et que les premiers, même s'ils changeaient d'idées, ne trouvent plus de place, qu'on puisse leur fermer la porte au nez comme eux l'avaient fait. Les invités ne goûteront pas le repas. 

 

Peut-être que ça peut ne pas paraître juste, et au fond de moi je me demande qui sont tous ces appelés. Est-ce que le maître de maison, si je n'oublie son invitation, si je ne me noie pas dans la vie de tous les jours, si je lui laisse sa place, voudra bien m''ouvrir quand mon heure sera venue? Peut-être que ce Jésus de Nazareth, voudra bien me donner un laisser-passé, pour que je puisse gouter avec lui la joie de savourer ce repas, préparé par notre Dieu, parce que je sais bien que c'est de lui, le Très Haut, qu'il s'agit. 

 

 

Réflexions et analyse des textes.

 

Les verset 1-5

 

Le texte

 

01 Un jour de sabbat, Jésus était entré dans la maison d’un chef des pharisiens pour y prendre son repas, et ces derniers l’observaient.

02 Or voici qu’il y avait devant lui un homme atteint d’hydropisie.

03 Prenant la parole, Jésus s’adressa aux docteurs de la Loi et aux pharisiens pour leur demander : « Est-il permis, oui ou non, de faire une guérison le jour du sabbat ? »

04 Ils gardèrent le silence. Tenant alors le malade, Jésus le guérit et le laissa aller.

05 Puis il leur dit : « Si l’un de vous a un fils ou un bœuf qui tombe dans un puits, ne va-t-il pas aussitôt l’en retirer, même le jour du sabbat ? »

06 Et ils furent incapables de trouver une réponse.

 

 

Réflexions

 

Certes la première guérison fait beaucoup penser à la guérison de la femme courbée du chapitre précédent. C'est un jour de Sabbat, donc un jour où tout travail est interdit, y compris une guérison surtout pour une maladie chronique. Je veux dire que d'un point de vue humain, il n'y a pas d'urgence ! Sauf que pour Jésus, il y en a une, il s'agit de libérer quelqu'un qui est comme emprisonné dans son propre corps, que ce soit par cette scoliose, que ce soit par cette maladie, qui si elle installée depuis longtemps, ne permet plus de se mouvoir. 

 

Dans les deux cas, il y a la réaction de ceux qui savent, et qui sont ulcérés par le comportement de Jésus. Dans les deux récits, Jésus leur fait remarquer que le jour du Sabbat, "on ne laisse pas son âne ou son bœuf mourir de soif, donc qu'on le délie pour le conduire à l'abreuvoir". Pour cela il faut bien délier. C'est ce que lui, Jésus fait.

 

Dans les deux péricopes, il pose la question du permis et du défendu. Même si la question est différemment posée, cela revient au même. Est-il permis oui ou non de faire une guérison le jour du Sabbat. 

 

Au chapitre 13, on peut penser que si la femme courbée est là, c'est que, soit elle vient régulièrement à la synagogue pour écouter les enseignements, soit parce qu'elle a entendu par le "bouche à oreilles " que Jésus est présent. Vu la réaction du Chef de la synagogue, j'opterai plutôt pour cette solution. Il récrimine en disant, " vous avez six jours pour vous faire guérir, pourquoi venez- vous justement le jour du repos ".  Il est autant en colère après la femme qu'après cet homme qui semble ne rien respecter de la Loi. Le fait que cette femme soit délivrée de son infirmité ne compte pas pour lui. La loi a été trahie.

 

Cette femme compte tenu de son infirmité, ne voit que ses pieds et elle ne peut donc pas regarder Jésus. C'est lui qui la distingue dans cette assemblée, qui la regarde. 

 

Elle ne demande rien, elle espère. Et elle est remarquée, elle qui ne regarde personne ! 

 

Au chapitre 14, il semble que les choses soient différentes, puisque l'auteur nous dit que les pharisiens et les docteurs de la loi l'observent. 

 

C'est donc qu'il y a quelque chose de pas très catholique, si je puis me permettre. Cet homme qui a dû mal à se mouvoir, a été conduit là, un peu comme une provocation. Est-ce que cet homme qui ne respecte pas le sabbat, va-t-il réitérer? 

 

On retrouve là, la polémique de la guérison de l'homme à la main desséchée (atrophiée) un jour de Sabbat, du chapitre 6 de ce même évangile.

 

9 Jésus leur dit : « Je vous le demande : Est-il permis, le jour du sabbat, de faire le bien ou de faire le mal ? de sauver une vie ou de la perdre ? »

10 Alors, promenant son regard *sur eux tous, il dit à l’homme : « Étends la main. » Il le fit, et sa main redevint normale.

 

*Je crois que dans l'évangile de Marc, il est dit, promenant sur eux un regard navré de colère, ce qui traduit bien la tristesse de Jésus devant cet endurcissement du cœur;

 

Pour en revenir à ce chapitre, Jésus pose une question qui met l'assemblée plus que mal à l'aise. Devant le silence, Jésus décide de guérir cet homme. 

 

Le texte est intéressant : il est dit que Jésus tient l'homme. Ce qui laisse à supposer que l'homme a du mal à rester debout, et nous savons par d'autres textes, que de Jésus sort une force (je pense au chapitre 6 où les foules qui se sont déplacées, cherchent à le toucher parce qu'une force sortait de lui et les guérissait tous", cette même force que Jésus dira être sortie de lui, lorsqu'il est touché par la femme sui perd du sang Lc 8.  46 Mais Jésus reprit : « Quelqu’un m’a touché, car j’ai reconnu qu’une force était sortie de moi. »

 

 

Et voilà l'homme guéri et donc capable de rentrer chez lui, comme le paralytique. Mais Luc ne rapporte aucune phrase que Jésus aurait dit. 

Alors avant de continuer, je vais laisser un convive, un de ces pharisiens convié à la déroute de Jésus, raconter la scène.

 

 

Les versets 7-11 : ne pas choisir ce qu'on pense être la meilleure place.

 

Le texte.

 

7 Jésus dit une parabole aux invités lorsqu’il remarqua comment ils choisissaient les premières places, et il leur dit :

8 « Quand quelqu’un t’invite à des noces, ne va pas t’installer à la première place, de peur qu’il ait invité un autre plus considéré que toi.

9 Alors, celui qui vous a invités, toi et lui, viendra te dire : “Cède-lui ta place” ; et, à ce moment, tu iras, plein de honte, prendre la dernière place.

10 Au contraire, quand tu es invité, va te mettre à la dernière place. Alors, quand viendra celui qui t’a invité, il te dira : “Mon ami, avance plus haut”, et ce sera pour toi un honneur aux yeux de tous ceux qui seront à la table avec toi.

11 En effet, quiconque s’élève sera abaissé ; et qui s’abaisse sera élevé. »

 

Je viens de lire que parfois les convives étaient par trois à table,  et que la meilleure place était la place centrale. Mais j'ai beaucoup de mal à me représenter cette scène. Je suppose que plus on est près du maître de maison, plus vite on est servi et avec les meilleurs plats. Pour les autres, ceux qui sont plus au fond, ça peut arriver froid et il peut ne plus en avoir assez pour tout le monde. À la limite, cela fait presque penser à une foire d'empoigne, où il faut se précipiter dès qu'on a ouvert les portes, pour être à la meilleure place. 

 

Là, ce qui est pointé c'est un peu l'image que l'on a de soi. On peut se croire appartenir au- dessus du panier et donc pouvoir être assis près de Maître de maison ou même à sa table. La déconvenue doit être importante, si on est délogé par la suite pour céder sa place. 

 

Quant à la finale, si on pense à l'évangile de Jean, et au lavement des pieds, c'est bien cette place-là que Jésus prendra et qu'il nous demande de prendre.

 

 

Les Versets 12-14 : inviter les démunis

 

Le texte

 

12 Jésus disait aussi à celui qui l’avait invité : « Quand tu donnes un déjeuner ou un dîner, n’invite pas tes amis, ni tes frères, ni tes parents, ni de riches voisins ; sinon, eux aussi te rendraient l’invitation et ce serait pour toi un don en retour.

 

Pas simple de s'abstraire des règles de la politesse, du savoir vivre. Et pourtant, ce serait tellement plus simple, de plus normal.

 

13 Au contraire, quand tu donnes une réception, invite des pauvres, des estropiés, des boiteux, des aveugles ;

14 heureux seras-tu, parce qu’ils n’ont rien à te donner en retour : cela te sera rendu à la résurrection des justes. »

 

Et une béatitude : prendre l'autre comme il est, ouvrir la porte, inviter à sa table. Et l'espérance peut-être, d'agir un peu à la manière de Dieu, (et on verra bien au chapitre 15), qui lui , nous  ouvre sa table, alors que nous n'avons rien à lui apporter. 

 

 

Le texte et quelques commentaires.

 

Cette péricope évoque pour moi d le chapitre 25 du livre d'Isaïe:  6 Le Seigneur de l’univers préparera pour tous les peuples, sur sa montagne, un festin de viandes grasses et de vins capiteux, un festin de viandes succulentes et de vins décantés. 7 Sur cette montagne, il fera disparaître le voile de deuil qui enveloppe tous les peuples et le linceul qui couvre toutes les nations Mais il y a bien des différences, car il s'agit des nations et des peuples qui sont autour d'Israël, et tous n'y participeront pas. 

 

Là le repas est préparé pour un seul peuple, et encore pas pour tous. Et ce repas est quand même un repas eschatologique. C'est un dîner, qui peut d'ailleurs évoquer le repas du début du Sabbat. Enfin c'est le cas pour moi.

 

Reprenons le texte de Luc.

 

15 En entendant parler Jésus, un des convives lui dit : « Heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu ! »

 

Au verset précédent, Jésus a donné une piste pour devenir juste. Un des convives, montre qu'il a compris, que cela se passera dans un futur dont personne ne connait la date, mais que celui qui participera à ce repas, sera heureux. Et cela évoque pour moi, le prophète Isaïe, qui parle de ce repas plantureux…

 

 

16 Jésus lui dit : « Un homme donnait un grand dîner, et il avait invité beaucoup de monde.

17 À l’heure du dîner, il envoya son serviteur dire aux invités : “Venez, tout est prêt.”

 

Ce qui est un peu compliqué, c'est qu'il y a bien eu une invitation, mais que manifestement la date n'a pas été fixée. Et que quelque part, on revient à la nécessité de veiller, d'être prêt. Peut-être que tout est prêt, mais eux, ils ont oublié, ils sont pris par la vie de tous les jours. Ils sont un peu comme nous. Nous ne savons pas, alors nous vivons, nous nous occupons et le dîner auquel nous étions conviés, il est sorti de notre tête. Et il est certain que lorsque l'invitation arrive, quelque part c'est trop tard . 

 

 

 

18 Mais ils se mirent tous, unanimement, à s’excuser. Le premier lui dit : “J’ai acheté un champ, et je suis obligé d’aller le voir ; je t’en prie, excuse-moi.”

19 Un autre dit : “J’ai acheté cinq paires de bœufs, et je pars les essayer ; je t’en prie, excuse-moi.”

20 Un troisième dit : “Je viens de me marier, et c’est pourquoi je ne peux pas venir.”

 

Ils ont de bonnes raisons, mais quand même. Quand il s'agit d'une telle invitation, est ce qu'on ne peut pas faire un effort, se débrouiller? Et c'est peut-être cela qui ne va pas. Certains disent qu'un choix est toujours possible. Ceux-là ont choisi eux-mêmes. Il se sont fait leur centre. 

 

Dans la suite du texte, Jésus dira que pour être son disciple, il faut le préférer lui, et ce qui nous est dit dans cette parabole, c'est que ceux-là se préfèrent eux. 

 

21 De retour, le serviteur rapporta ces paroles à son maître. Alors, pris de colère, le maître de maison dit à son serviteur : “Dépêche-toi d’aller sur les places et dans les rues de la ville ; les pauvres, les estropiés, les aveugles et les boiteux, amène-les ici.”

22 Le serviteur revint lui dire : “Maître, ce que tu as ordonné est exécuté, et il reste encore de la place.”

 

On peut comprendre que le maître ne soit pas content, surtout si on pense au texte d'Isaïe, qui invite à un repas avec des viandes savoureuses et des vins capiteux. Il se retrouve seul, et c'est peut-être cela sa peine. Mais la colère c'est eux n'entreront pas,  ils ne seront pas accueillis. 

 

Ceux qui entrent, ce sont ceux que Jésus avait demandé d'accueillir parce qu'ils ne peuvent pas rendre, mais aussi parce qu'ils sont les exclus. Ils n'ont pas le droit d'entrer dans le Temple, et là, ils sont enfin accueillis.  Ceux-là on pourrait dire que ce sont les pauvres, les vrais pauvres, ceux qui appartiennent au peuple choisi.

 

23 Le maître dit alors au serviteur : “Va sur les routes et dans les sentiers, et fais entrer les gens de force, afin que ma maison soit remplie.

24 Car, je vous le dis, aucun de ces hommes qui avaient été invités ne goûtera de mon dîner.” »

 

 

Mais il reste encore de la place, et là, c'est pour nous que la salle s'ouvre. Et c'est finalement parce que le peuple élu n'a pas écouté, que nous avons eu une place, mais nous l'avons perdue?? 

 

Un autre récit : Jésus raconte.*

 

Il y a quelques jours j'avais scandalisé un chef de synagogue parce que j'avais guéri une pauvre femme, tellement voûtée qu'elle ne pouvait voir que ses pieds, un jour de sabbat. Je dis voûtée, mais elle était envoûtée par le malin depuis dix-huit ans, et il m'était impossible de ne pas la délivrer. Mais cela, j'étais le seul à le savoir. Comme certains étaient remontés contre moi et se demandaient s'il ne fallait pas me mettre à mort parce que j'avais osé guérir le jour du repos, je leur ai fait remarquer que même le jour du sabbat, il leur fallait bien délier leur âne ou leur bœuf pour le conduire à l'abreuvoir et qu'ils m'interdisaient eux de délier cette pauvre femme, qui par ailleurs n'avait rien demandé, elle qui malgré tout venait prier dans cette synagogue. 

 

Je n'étais pas très loin de Jérusalem, des pharisiens peut-être bien intentionnés m'ont fait dire qu'Hérode cherchait à me tuer, mais je n'allais pas me laisser intimider, et j'ai continué ma route vers cette ville qui tue les prophètes, cette. Ville dont j'aimerai tant rassembler les enfants comme une poule rassemble ses poussins sous ses ailes. 

 

J'ai continué mon chemin et un jour de Sabbat, je suis entré dans la maison d'un pharisien qui m'avait fait parvenir une invitation pour y prendre mon repas avec certains des miens; cette fois, j'ai pratiqué les ablutions rituelles pour ne pas choquer, et mes disciples ont fait de même. Devant moi, il y avait un infime, un homme tout gonflé d'eau. Je ne pouvais pas le laisser comme cela, shabbat ou pas, et eux les pharisiens, ils avaient tous les yeux fixés sur moi, pour savoir ce que j'allais faire. Vivre tous ces regards, croyez -moi c'est difficile. Cet homme; il avait du mal à tenir debout, alors je l'ai tenu contre moi, je l'ai appuyé contre moi, pour qu'il se sente soutenu. Je leur ai demandé s'il est permis ou non de faire une guérison le jour du sabbat. Ils ne pouvaient pas me répondre, parce que dans la Tora, notre père Moïse, parle de travail. Et là, est ce que c'est un travail? Tenir un homme qui ne tient pas debout, est-ce un travail? Lui rendre la santé, est-ce un travail? La force qui est en moi a guéri cet homme et je l'ai renvoyé chez lui. Je voyais dans le regard des autres qu'ils n'en revenaient pas, mais que la colère était en eux, et non la joie de voir un homme délivré de ce poids, un homme qui pouvait reprendre sa vie. Je leur ai demandé si l'un d'eux, si son bœuf ou son fils tombaient dans un puits le jour du sabbat, ils n'iraient pas les délivrer? Bien sûr, ils ne savaient pas que dire. Je dois dire que cela me rendait triste. 

 

Quand j'ai voulu prendre place, il n'en restait plus de libre ou seulement quelques- unes, très loin du maître de maison. Je me suis dit que ce serait peut-être bien qu'ils se rendent compte que ce n'est pas ce qu'il y a de mieux, se précipiter pour être le mieux servi, sans se préoccuper des autres. C'est un peu leur problème à ces saints hommes, ils sont tellement remplis d'eux-mêmes que les autres ils ne les voient plus, ils ne les regardent plus. Et moi, je voudrai tellement que ça change. Je peux sembler très dur envers les pharisiens, mais eux croient à la résurrection après la mort, ils font de mon Père, le centre de leur vie, même si certains d'entre eux, finissent par se prendre pour Dieu eux-mêmes et cela c'est bien dommage. Mais je ne désespère pas.

 

Il y a dans la Tora une phrase qui dit : "tu ne te présenteras pas devant ton Dieu les mains vides". Alors j'ai eu envie de leur faire comprendre qu'inviter à leur table, non pas "des qui pensent comme eux, qui sont comme eux, et qui ont largement de quoi vivre et qui peuvent donc rendre", mais "des estropiés, des aveugles, des boiteux, des qui ne peuvent pas rendre", tous ces pauvres qui sont interdits de Temple depuis le Roi David, qui n'ont même pas de lieu pour prier, pour être en présence du out puissant, c'est ceux-là qu'il faut inviter. C'est faire cela qui permet de se présenter devant Dieu, les mains pleines. Je sais qu'ils me reprochent de manger avec les pécheurs, les collecteurs d'impôts, les femmes de mauvaise vie, mais ceux-là, ceux qui ne peuvent pas rendre, ils ont le cœur ouvert et la parole peut entrer en eux et les changer. Ce qui me désole, c'est qu'ils sont devenus hermétiques.  Ils sont tellement plein de parole, que la parole nouvelle, glisse sur eux et ne les atteints pas. Un psaume dit  : mon Dieu, je te cherche dès l'aube, mon âme a soif de toi ; après toi languit ma chair, terre aride altérée sans eaux. Ils sont comme cette terre aride, mais certaines paroles glissent sur eux, et cela me rend si triste. 

 

Peut-être qu'un des convives s'en est rendu compte, car il a bien compris que je parlais des temps du jugement; il a dit " heureux celui qui participera au repas dans le royaume de Dieu".  Je pense que lui, il pense qu'il en fera partie ce ceux-là, de ceux qui ont peut-être les mains vides sur cette terre, mais les mains pleines dans le royaume, les mains pleines d'amour, de compassion, de pitié et qui ne s'en vantent pas. 

 

Une parabole est venue en moi, et elle m'a étonnée moi-même, mais quand l'esprit souffle en moi, il souffle. Je leur ai parlé d'un homme qui avait depuis toujours invité beaucoup de monde pour un grand dîner qu'il avait l'intention de donner. Il voulait remplir toute sa maison avec les invités. Mais quand le temps est venu, tous se sont dérobés, avec certes de bonnes excuses, des excuses qui paraissaient valables, se marier, s'occuper de ses champs et des nouvelles bêtes qui venaient s'ajouter au bercail, seulement ils avaient oublié l'invitation. Cela a mis le maître de maison de très mauvaise humeur. Le repas était prêt, ce repas que le prophète Isaïe avait prédit, ce repas de viandes savoureuses et de vins capitaux. Alors ce repas serait donné, mais à d'autres. Il y aurait d'abord tous les laissés pour compte, ceux qui ne sont jamais invités, les pauvres de cœurs, et comme ceux-là ne seraient pas assez nombreux pour remplir la maison, alors d'autres seraient invités, d'autres qui n'auraient jamais imaginé participer à un tel repas, tous ceux qui étaient de passage, je veux dire tous les étrangers, tous ceux qui n'ont pas reconnu en mon Père, le Père de tout homme. 

 

Je ne sais pas s'ils ont compris, je crains que non. J'ai repris ma route, vers ce lieu où je serai moi considéré comme le dernier des derniers, ce lieu où je donnerai ma vie pour eux aient en eux la vraie vie, la vie éternelle, la vie qui la mienne. 

 

*faire parler Jésus n'est jamais simple; peut-être que je lui prête des sentiments, des émotions qui sont plus les miennes que les siennes, qui correspondent au "Jésus qui est le mien". Ce chapitre qui se termine par des versets un peu rudes sur celui qui veut être disciple, et qui cela doit réfléchir avant de se lancer, se complète par les trois paraboles sur la miséricorde, sur ce Père qui se jette au cou de son fils et qui est certainement malheureux comme les pierres, parce que son aîné, ne peut pas se réjouir avec lui, et qui donnerait tout pour le cœur de ce dernier se des-endurcisse.