Quand tu étais sous le figuier…
En écoutant cet évangile qui parle de cet apôtre dont le nom est cité seulement dans l'évangile de Jean, je me suis dit tout d'abord que ce figuier devait représenter quelque chose; et l'image qui est venue est celle du jardin de l'Eden, ce jardin où poussaient tous ces arbres donnant du fruit, mais aussi ayant de belles feuilles, puisque Adam et Eve ont pu se faire des tuniques avec les feuilles; et je me disais que quand Jésus dit à Nathanaël, "Quand tu étais sous le figuier, je t'ai vu", peut-être que cette phrase a fait là celui-ci le même choc que lorsque Dieu appelle Adam dont les yeux viennent de s'ouvrir et qui ne sait plus où se mettre. De quel figuier s'agit-il? Peu importe, mais ce jour là, quelque chose aussi de l'ordre de l'ouverture des yeux s'est passé pour Nathanaël ("don de Dieu").
Ce qui est étonnant, si on regarde les phases de cette transformation, c'est qu'il y a d'abord ce que lui dit son ami Philippe: "Nous avons trouvé le messie, c'est Jésus de Nazareth". Alors là, le juif instruit que semble être Nathanaël, réagit au quart de tour: il est sûr que son ami se trompe, parce qu'il sait que Nazareth n'est pas la ville d'où doit sortir le messie.
Et fort de sa certitude,- celui là ne peut pas être ce que Philippe me raconte -, il va quand même voir cet homme, certainement pour faire plaisir à son ami.
Jésus commence alors par le féliciter pour sa culture, qui ne lui permet pas de prendre des vessies pour des lanternes, ce qui provoque un premier choc, d'où me connais-tu, comment sais-tu ce que je pense, comment connais-tu ce que je viens de dire à Philippe? Car la phrase de Jésus semble montrer qu'il a entendu (comme à la fin de l'évangile, il montrera à Thomas qu'il avait entendu ce que ce dernier avait dit à ses amis qui disaient avoir vu le Seigneur). On dirait que Jésus approuve sa réaction. Mais Jésus d'enfoncer le clou un peu plus loin, en révélant quelque chose que seul Nathanaël peut comprendre. Peut-être que le figuier renvoie à la connaissance, donc à la lecture de la Torah, peut-être que le figuier est un lieu que Nathanaël, aime, peut-être qu'il aime les figues, peut-être… Peut-être qu'il s'imaginait sous le figuier en train d'attendre que Dieu vienne lui parler, comme un ami à un ami, peut-être… . On peut fantasmer, mais seul Nathanaël savait. Et ce qui est dit là, lui permet de comprendre que même si Jésus est de Nazareth, il est bien ce que lui a annoncé Philippe. Alors à son tour, il peut proclamer: "C'est toi le Fils de Dieu, le roi d'Israël".
Jésus lui fait alors une sorte de reproche et une promesse: voir les cieux ouverts et les anges du ciel monter et descendre au dessus du Fils de l'Homme. C'est là une vision grandiose, qui à la fois montre que le ciel s'est ouvert, que Jésus fait le lien (l'échelle du songe de Jacob) entre le ciel et la terre, et que les temps nouveaux sont en train de s'accomplir.
Ensuite Nathanaël disparaît de la scène, et cela clôt le premier chapitre de cet évangile qui fait de Jésus bien plus qu'un homme, et ce dès le début.
Mais si on va au dernier chapitre de l'évangile de Jean, curieusement il se passe un peu la même chose avec Thomas. En effet, pour Thomas, jésus ne peut pas être ressuscité, même si les dix lui ont dit ce qui s'est passé (de même que Jésus vivant à Nazareth ne peut être le messie). Il y a le même déni. Puis Jésus apparaît, et fait comprendre à Thomas, qu'il sait ce que ce dernier à dit (de même qu'il a vu où était Nathanaël). Et il se passe pour Thomas ce qui s'est passé pour Nathanaël: les défenses tombent et la reconnaissance de la divinité est proclamée. Puis Jésus promet quelque chose. Au début de l'évangile, c'était de voir les cieux ouverts, avec le Fils de l'Homme faisant le lien, là c'est une promesse liée à la foi, il ne s'agit plus de vision, il s'agit de croire. Et cela fait de nous des "Heureux"..
Mais peut-être que l'important dans ce qui se joue dans ces chapitres qui ouvrent et ferment l'évangile de Jean, c'est le chemin proposé.
Jésus accepte que l'on se pose des questions, que l'on ne fonce pas tête baissée parce qu'un autre nous a parlé de lui. Il prend du temps, et il montre qu'il "sait" et c'est cela qui peut ou non provoquer le déclic, car la liberté reste intacte. Et une fois que la reconnaissance est faite, alors quelque chose d'autre s'ouvre, comme si le cœur pouvait se dilater à d'autres dimensions, et nous mettre dans ce temps nouveau.
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