vendredi, février 18, 2011

Illumination, transfiguration, mes balbutiements...

Transfiguration, illumination, unification.  

Il m’est venu une nuit, l’idée que l’illumination que cherchent et trouvent certains sages de l’inde et la transfiguration (de Jésus mais aussi de Moïse et d’Elie) pouvaient avoir quelque chose de commun ; d’une certaine manière le rapport à la mort change totalement.

J’ai essayé de mettre des mots, mais ceux ci sont plus un balbutiement qu’autre chose, mais malgré tout, cette perception d’une autre finalité pour ce que nous appelons la mort m’a d’une certaine manière ouvert les yeux, sans que je puisse expliquer comment et surtout a modifié ma perception de la mort.

            « Leurs yeux s’ouvrirent et ils le reconnurent »Luc 24,31

Ce verset de l’évangile des disciples d’Emmaüs, évoque un peu pour moi un bébé dont les yeux s’ouvrent, un passage de la mort à la vie. Leurs yeux s’ouvrent après que le pain ait été rompu, donc d’une certaine manière brisé,  mis en morceaux, donné pour être mangé, détruit. Ce que je veux dire c’est que le pain (figure du corps) est fait pour être mangé, détruit. On parle du pain de vie, mais ce n’est pas la seule dimension. Un peu comme si Jésus (qu’ils n’ont pas reconnu dans l’homme qui marchait avec eux) est reconnu dans le pain rompu, dans la mort. Ce n’est que partagé que le pain donne la vie..

La mort nous fait peur, nous n’aimons pas en parler. Jésus dit certes « Je suis le chemin, la Vérité et la Vie » mais cela n’a été rendu possible que parce qu’il a eu un rapport particulier à la mort. Parce qu'il l'a acceptée, désirée, peut être même aimée. 

L’écriture disait « Malheur à l’homme pendu sur le bois » maintenant il est possible de dire : «  Béni soit l’homme qui a désiré et accepté d’être pendu au bois de la croix », Béni celui qui a « fait » par la mort, la vie. Béni soit celui qui a rendu la mort source de vie. 

Je pense mais sans le démontrer qu’en Jésus le combat entre la mort et la vie s’est terminé, qu’il s’est créé autre chose  (une unification qui élimine le clivage et donc le conflit) et que c’est cela qu’est né pour nous ce que Celui que nous appelons l’Esprit Saint.

On raconte que lorsque Henri de Saux est tombé sur le sol en courant après un autobus, terrassé par un infarctus, son visage rayonnait… Ce rayonnement c’est peut être l’unification qui se produit et en particulier quand la mort  cesse  d’être rejetée mais quand elle devient soi. Je veux dire quand le clivage entre la vie et la mort cesse, quand il ne s’agit plus d’un combat entre l’une et l’autre, mais lorsque la mort devient visage de la  vie et la vie visage de la mort.

Je me suis alors demandé si je ne pouvais pas faire une sorte de parallèle entre la transfiguration et l’illumination. 

A partir de ce moment (la transfiguration), la manière d’être de Jésus change. Il y a juste avant dans l’évangile de Luc la première annonce de ce qui va arriver et Pierre réagit fort mal. Et même si Jésus interpelle Pierre (comme il a interpelé la tempête en son temps) peut être que pour Lui la tentation est là. 

Après la transfiguration c’est - du moins pour moi- un autre Jésus C’est comme un tournant. Et il est dit que Jésus parle avec Moïse (dont le visage reflétait la gloire de Dieu, Ex 32, 27-29) et Elie (qui disparaît sur un char de feu) de son départ à Jérusalem donc de sa mort( Lc 9, 31). Comme si à partir de ce moment là la mort devient ce qu’il y a de plus important pour Lui, parce que c’est non pas en la préférant à la vie, mais en en faisant partie intégrante de Lui même que la présence de Dieu qui était déjà là se manifeste autrement.

Or ce qui est frappant dans la transfiguration c’est que Jésus parle avec Moïse et Elie de son départ  à Jérusalem, donc de sa mort. Peut être que à ce moment là dans la vie de l’homme Jésus, il s’est produit quelque chose qui a fait que la peur de la mort qu’il devait avoir comme un tout à chacun s’est transformée. Il n’y avait plus la mort et la vie, il n’y avait plus la mort ou la vie, il y avait autre chose, il y avait la joie de la vie et la joie de la mort, la paix de la vie et la paix de la mort.

Cette Gloire qui est sur le visage de Moïse, peut aussi traduire quelque chose de cet ordre. Que s’est il passé après qu’il ait écrit de sa main à lui les nouvelles tables de la Loi ? Car « il fut donc là avec le SEIGNEUR, quarante jours et quarante nuits. Il ne mangea pas de pain, il ne but pas d'eau. Et il écrivit sur les tables les paroles de l'alliance, les dix paroles. Que s’est il passé pendant cette « absence » pendant ce temps de contact avec Dieu ? Quelle purification a t il vécu ? On raconte qu’à 120 ans Moïse ne voulait pas mourir et que c’est un baiser de Dieu qui lui a permis de partir..  Mais ce baiser montre la proximité de Moïse avec son Dieu, cette relation ou la mort devient vie

Peut être que la théophanie qui suit l’entretien de Jésus avec Moïse et Elie va dans ce sens. 

On parle souvent de combat, entre le bien et le mal, là peut être faut il sortir de cette notion de combat avec le triomphe d’une partie sur l’autre et passer à quelque chose ou la mort et la vie sont les aspects d’une même réalité. Jésus sur le Mont Thabor, parle de sa mort avec ceux qui représentent la Loi et les prophètes (et pour Elie qui est parti sur un char de feu, on peut aussi penser à l’illumination).

Or parler de sa mort, (de sa montée à Jérusalem) montre la place de celle ci dans la vie de Jésus. On peut presque dire que toute sa vie est ordonnée en fonction de sa mort, que celle ci a pour lui une dimension autre. C’est par elle qu’il va devenir Lui ce qu’Il était le Vivant.

Arrivée à ce point de là, je me rends compte que Là je ne suis pas capable d’expliquer cette intuition, de la mettre en mots. Mais que ce que les apôtres ont vu ce jour là, sur cette montagne là, c’est autant la Gloire de Dieu que l’homme totalement en union avec Dieu, sans conflit sans confusion, sans retour aussi.

Or je crois que Jésus est venu nous donner un autre regard sur la mort. La mort donne la vie, on n’a pas à la chercher parce qu’elle est là, mais elle est aussi importante que la vie.

Il y a un passage en nous qui se fait qui permet de comprendre cela, de la regarder non comme une mauvaise chose, mais comme une bonne chose, qui permet de ne pas la rejeter, mais de savoir que c’est par sa mort que Jésus est vivant à jamais et que cela nous est proposé, que si nous changeons (ou si l’Esprit change notre regard sur la mort et peut être aussi sur le mal) alors nous participons à la transfiguration, nous voyons le monde autrement et Dieu aussi.

Quand Jésus dit : celui qui veut être mon disciple qu’il prenne sa croix et qu’il me suive, peut être faut il entendre, qu’il reconnaisse que la mort n’est pas mauvaise, qu’il ne faut pas la fuir (puisque jésus ne l’a pas fui) qu’il en fasse quelque chose qui devienne de la vie.

En d’autre termes peut être que au lieu d’avoir honte de nos limitations, de nos fragilités, il nous faut les accepter comme partie intégrante de nous, ne pas les opposer avec culpabilité à une certaine idée de la vie, mais les bénir parce que les accepter, nous accepter, cela fait de nous des vivants.

6 commentaires:

TOURNESOL a dit…

J'aime bien votre méditation.
Il y a en effet dans nos vies des passages à faire car comme dit la Bible il y a un "temps pour tout".
Quand mon mari est décédé inopinément pendant la nuit j'ai encore en tête son visage au matin quand je le découvris:" son visage était serein..." un léger sourire aux lèvres.... J'ai déjà constaté cela chez d'autres personnes.
Le troisème âge est une bénédiction dans la mesure que l'éveil à une autre dimension est possible et peu à peu l'acceptation
non conflictuelle à la mort.
Jésus a-t-il eu conscience après la transfiguration qu'il allait vers la mort. Oui je le pense...
Mais comme vous le dites:c'est avec sérénité: "ma vie nul ne la prend mais c'est moi qui la donne.."Que Le SOUFFLE DU PERE LE VIVANT NOUS FASSE PEU A PEU ACCEPTER AVEC SERENITE LA MORT COMME "DESIRABLE"...
J'ai fait graver sur le colombarium de mon mari:"N'ayez pas peur" phrase des messagers de Dieu aux femmes effrayées dans l'évangile... FRATERNELLEMENT

Anonyme a dit…

Pourrions-nous comprendre que Jésus est venu nous apprendre que la mort n'existe pas ?... Qu'il s'agirait juste en quelque sorte d'un changement de vêtement ?...
FC

TOURNESOL a dit…

Oui, nous sommes nés pour franchir des étapes vers toujours plus de VIE...
Je suis en train de lire un livre qui a cette approche: "Une vie pour se mettre au monde" de Marie de Hennezel aux carnetsnord.
Mais ce sentiment d'accomplissement est plus du domaine du vécu, de l'expérience intime et n'est pas démontrable. Un don de l'Esprit à ceux qui cherchent CELUI QUI DONNE VIE.

Giboulee, a dit…

Bien sur que la mort existe, comme la naissance. mais peut être faut il changer notre regard sur elle. Elle est montrée dans la Génèse comme conséquence de la transgression, comme une chose mauvaise.. Peut être que nous la rendons mauvaise en la dissociant de la vie. Peut être ne pas lutter contre, mais lutter avec.

Amicalement

TOURNESOL a dit…

En fait notre compréhension du livre de la Genèse devrait être remis dans le contexte du vécu du peuple d'Israël...Attaché à la vie, l'auteur se pose la question: pourquoi la mort comme nous nous la posons aussi bien souvent aujourd'hui..Il donne une réponse qui est propre à son temps et que nous donnerions aussi comme "première" réponse: nous avons fauté.. c'est une punition
(trangression)Jésus.
est venu nous dire que nous n'étions pas punis
pour les fautes (la tour de Siloé
:ni lui ni ses parents n'ont péché...)NOTRE REGARD DOIT PEU A PEU CHANGER MAIS C'EST PAS EVIDENT;
CAR NOUS SOMMES TRES ATTACHES A "CETTE VIE"...
De plus ne pourrait-on trouver un point commun entre l'EVeil des sages de l'Inde, la Transfiguration de Jésus, l'espérience mystique de MoïSE ET
AUSSI LES NDE? LES EXPERIENCES A LA LIMITE DE LA VIE ET DE LA MORT.
Je pense que des signes nous sont donnés mais nous sommes aveugles...
P.S: je n'en ai jamais eu mais une certitude intérieure m'habite : nous allons vers plus de vie car Celui qui donne vie ne nous fait pas être pour le néant mais pour être avec LUI dans une plénitude d'être. Nous sommes des poussières mais des "poussières d'ETOILES" (Hubert Reeves)

Ange Andoh Kouakou a dit…

Editifiant!
J'ai aimé vous lire et j'ai aimé cette fragilité que vous mettez dans vos mots pour traduire ce qui reste de l'ineffable, de l'intuition, ce qui reste d'une quête continuelle et profonde du sens qu'il faut donner à la transfiguration.

J'ai une question qui me vient et qui est assez liée à votre raisonnement :

- L'homme, en mangeant de l'arbre de la connaissance du bien et du mal était-il donc condamné à errer et douter de son identité vis à vis de Dieu jusqu'a ce qu'il ne la retrouve dans la mort?

ou dit autrement,

Le plan de Dieu était-il, comme le peuple juif errant dans le Désert, de laisser le soin à l'homme de le découvrir, même en le laissant manger du fruit de l'arbre de la connaissance du Bien et du , jusqu'à ce qu'il soit fin prêt pour le rejoindre, prêt dans la mort, dans l'epreuve la plus grande de l'homme où il fait l'experience de sa petitesse, de sa misère et de la vanité de sa vie?

A très bientôt