I La parabole du semeur. Mat 13, 1-21
Ces paraboles, nous
les connaissons presque par cœur, et pourtant je continue à avoir du mal à les
faire miennes, à en faire du miel.
Prenons la
première, celle du semeur. Si on ne connaît pas l’explication,
qu’entend-on? On nous parle d’un semeur, donc de quelqu’un dont c’est le
métier de semer, on va dire un paysan, un homme de la terre. Ce semeur, il sème
un peu partout, et là c’est bizarre quand même, s’il connaît son métier: il perd
sa semence, il perd la graine.
Qu’espère-t-il en
semant au bord du chemin? Je ne sais pas comment étaient les bords des
chemins en Palestine du temps de Jésus, mais on peut supposer que la terre est
tassée par les passage, bien trop dure pour que la graine puisse s’enfouir,
alors elle reste en surface et elle nourrit les oiseaux du ciel.
Qu’espère-t-il en
semant dans les pierres, même si ces pierres retiennent dans leur creux un peu
de terre ? Que la graine s’enracine ? Mais pourtant il voit bien qu'il n'y a pas assez de terre. Alors il va avoir des espérances, ça va
lever un peu; on ressent même sa désillusion quand il voit le petit épi se
dessécher sous la chaleur du soleil. Ne fallait il pas commencer par enlever
les pierres, en admettant qu’il s’agissait seulement d’un terrain pierreux et
non pas d’une rocaille ?
Qu’espère-t-il en
semant dans les ronces et les épines ? Là en dessous il y a de la terre,
donc une partie pourra s’enfouir, pousser, mais les ronces elles aussi vont
pousser, empêcher le soleil de passer et les plants faute de lumière vont
péricliter. On peut même voir une sorte de combat entre la plante qui veut
vivre et la ronce qui veut l’étouffer. Alors là encore pourquoi? Ne
fallait il pas commencer par enlever les ronces?
Qu’espère-t-il en
semant dans la bonne terre, si celle ci donne des rendements si
différents? Là il va pouvoir récolter, engranger et faire son pain pour
lui et pour les autres.
Quant à la
finale : que celui a des oreilles pour entendre qu’il entende, c’est peut
être là que se trouve ce que certains appellent la « pointe de la
parabole ».
Il faut comprendre que la graine c’est la parole dite. Mais si
l’on se réfère au chapitre précédent, Jésus qui a fait des miracles le jour du
Sabbat, est déjà condamné à mort par les pharisiens. Pratiquement tout le
chapitre 12 montre comment le ton monte entre les tenants de la Loi et Jésus. Et
le premier différent rapporté par Matthieu c’est au sujet des épis arrachés.
Les disciples se nourrissent de ces épis. Ces épis ne sont ils pas la la parole
de leur maître? S’ils s’en nourrissent ils pourront un jour à leur tour
répandre la parole. Seulement les pharisiens restent à la surface:
interdit d’arracher quelque chose un jour de sabbat. Alors peut être sont ils
« le bord du chemin », trop dur pour que la graine fasse autre chose
que rebondir.
Bref, pas simple, si on reste au début du
chapitre, de comprendre que le semeur c’est Jésus envoyé par son Père, pour jeter
la parole. Et là si on repense à la scène, Jésus est dans une barque et sa parole est lancée de la mer vers la terre, pour être entendue de tous.
Quant à la suite elle
est déconcertante. On a déjà l’impression que les paraboles les disciples
n’aiment pas ça (les miracles c’est quand même beaucoup mieux, parce que le Maître montre sa puissance) parce qu’ils ne comprennent rien. Eux aussi ont les
oreilles bouchées. Et pourtant Jésus leur dit qu’il y a une différence entre
eux les disciples et les autres, la foule. Eux, ils ont tout quitté et
certainement leurs certitudes, alors ils sont ouverts et seront dans l’abondance
(l’explication est pour eux), alors que les pharisiens, car je pense que
c’est surtout d’eux qu’il s’agit, pensent avoir, posséder, et du coup ils vont
tout perdre, même s’ils ne s’en rendent pas compte.
Puis Jésus cite un
texte d’Isaïe qui renforce la finale de ce qu’il a dit à la foule : « entende
qui a des oreilles ». Or entendre et comprendre n’est pas facile.
Il s’agit d’un
texte du premier Isaïe, Is 6, 10. Isaïe vient d’être choisi comme prophète et
son premier travail est de dire au peuple qu’il écoute mais n’entend pas, qu’il
regarde mais ne voit pas (ici on peut penser aux idoles dont on dit qu’elles
ont des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas), et que le
prophète doit les empêcher de discerner jusqu’à ce qu’une catastrophe (liée en
grande partie au fait de se détourner du vrai Dieu) leur ouvre enfin le cœur et
que leur cœur se convertisse.
Les disciples avant l’explication ont
droit à une béatitude : mais vous heureux vos yeux parce qu’ils voient (ce
qui évoque ce qui un jour sera dit à Thomas), et vos oreilles parce qu’elles
entendent.
Quant à l’explication
nous la connaissons tellement que d’une certaine manière elle parasite l’écoute
de la parabole, puisque le sens nous a déjà été révélé.
Mais même là ne
serait il pas possible de dire aujourd’hui les choses autrement ?
La graine semée sur
le chemin est expliquée comme tombant dans le cœur d’un homme qui a entendu,
sans plus. N’a-t-il pas pensé cet homme: Oh il parle rudement bien ce type là,
il est intéressant, mais moi, bof… (œuvre du diable). Ce qui pourrait encore se
dire : cause toujours…
Le grain semé dans
les pierres serait le grain qui tomberait dans un cœur qui voudrait bien, qui
se réjouit, mais qui n’a pas bâti sa maison sur le roc, mais sur le sable. Je sais bien que le roc ou les pierres ce n'est pas la même chose, mais c'était tentant de faire le rapprochement. Alors le découragement est vite là. C’est le « « y en a
marre »…
Le grain semé dans
les épines, serait entendu dans le cœur. Au début il y a de la bonne volonté,
mais il y aurait trop à changer. Cela sera comme développé dans la rencontre
avec le jeune homme riche, celui qui avait de grands biens. Ce serait "moi j'ai des responsabilité Monsieur, ce que vous dites c'est très beau, j'aime bien mais soyez un peu réaliste..."
Quand au grain semé
dans la bonne terre, là les disciples ont dû se réjouir, car ils sont la bonne
terre.
Alors nous là dedans, puisque c’est censé être un texte actuel ?
Il y a surement en nous
des endroits où la parole ne fait que rebondir, d’autres où elle germe un peu
et s’étiole, d’autres où elle est étouffée par les soucis et d’autres où elle
prend racine. Le difficile est d’identifier ces lieux, et de demander à
l’Esprit Saint non pas de nous culpabiliser de ne pas être que de la bonne
terre, mais peut être de labourer ce qui est sec, ce qui est pierreux, ce qui
est envahi de ronces pour que la mauvaise terre se transforme petit à petit en
bonne terre.
A suivre....car des paraboles il y en a d'autres.
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