mardi, novembre 20, 2018

La ville de Jericho: Luc 18 et Luc 19

Mes réflexions au fil des phrases des évangiles de semaine.

LUNDI 19 NOVEMBRE Lc 18, 34-43 L'AVEUGLE DE JERICHO.

On se retrouve à la fin du chapitre 18. On va avoir l'aveugle qui clôt ce chapitre, et Zachée qui va ouvrir le suivant qui se termine par l'entrée dans Jérusalem. On a lu cet évangile il y a peu de temps dans l'évangile de Marc, et ce dernier était beaucoup plus fourni en détails. Là c'est un peu comme s'il restait l'ossature. Il reste un homme aveugle (mais depuis quand), une foule qui accompagne un homme, une demande qui va dans le sens de "prier sans se lasser), une guérison sans gestes, qui est un échange de paroles.



35 Alors que Jésus approchait de Jéricho, un aveugle mendiait, assis au bord de la route

Il y a un lieu Jéricho, Jésus qui s'en approche avant d'entamer la montée à Jérusalem, un aveugle qui doit être là, où il est toujours, en espérant avoir sa pièce. Il est assis au bord de la route, ce qui évoque un peu le semeur qui jette sa semence sur le bord de la route, et où elle est piétinée; mais là, il va se passer autre chose. Celui qui parle, qui crie, c'est l'aveugle quand il apprend que Jésus approche.


36 Entendant la foule passer devant lui, il s’informa de ce qu’il y avait. 

Comme il n'a pas la vue, il doit être surpris par le mouvement, par le bruit. Peut-être a-t-il peur? Mais il n'a pas sa langue dans sa poche et il s'informe. Ce verbe s'informer me renvoie au tout début de l'évangile de Luc, quand l'auteur parle à Théophile et dit s'être informé. 

37 Onlui apprit que c’était Jésus le Nazaréen qui passait.

Phrase banale mais en ce jour étonnant. Elle sonne en moi comme si Jésus était comme un bateau, qui s'avance, la voile gonflée. La phrase qui chante c'est juste "Jésus qui passait". Le vent de l'Esprit qui le fait passer là. Il y a jésus qui passe, et cela évoque aussi Dieu qui passe devant Moïse (Ex 33), Moïse qui ne peut voir Dieu, Dieu qui lui dit de se cacher au creux du rocher. Mais l'aveugle lui, il ne voit pas; alors peut-être c'est ce qui lui permet de voir en Jésus Dieu qui demeure en Lui, et de crier. 

38 Il s’écria: « Jésus, fils de David, prends pitié de moi ! » 

S'écrier est différent de crier. Elisabeth s'écrie quand elle rencontre Marie Lc 1, 42), un peu comme si des paroles sortent, mais qu'en même temps elles vous envahissent. Alors il (l'aveugle) s'entend peut-être dire des mots qu'il n'avait pas prévus une reconnaissance aussi,  Fils de David (parce que ça, il ne le sait pas, et c'est un titre de messie) et une demande. On lui a parlé de Jésus de Nazareth et lui, il l'appelle fils de David. 

39 Ceux qui marchaient en tête le rabrouaient pour le faire taire. Mais lui criait de plus belle : « Fils de David, prends pitié de moi ! » 

Là c'est hélas fréquent: faire taire les gens qui gueulent ou qui montrent leur infirmité. Mais il ne se laisse pas faire, surtout s'il est rempli d'Esprit Saint. Car cette nomination de Jésus, Fils de David, elle est je crois unique dans cet évangile. Même le jour des Rameaux, ce n'est pas comme cela que Jésus sera nommé.

40 Jésus s’arrêta et il ordonna qu’on le lui amène. Quand il se fut approché, Jésus lui demanda 
41 « Que veux-tu que je fasse pour toi? » Il répondit : « Seigneur, que je retrouve la vue. » 

Importance de la demande. Importance aussi de savoir que Jésus entend, importance de crier même si les autres disent qu'il faut se taire. J'ai toujours aimé la simplicité du dialogue. Qu'est ce que tu veux que je fasse et la réponse, voilà ce que je veux. Il s'agit bien de retrouver, comme quelque chose qui a été perdu.

42 Et Jésus lui dit : « Retrouve la vue ! Ta foi t’a sauvé. » 

Importance de la foi dans cette guérison que se fait uniquement avec des mots, mais si peu. Un peu aussi comme si un dialogue silencieux s'était instauré, des mots pas dits, des mots pas entendus, mais qui sont là. Un homme guéri, un homme sauvé. 

43 À l’instant même, il retrouva la vue, et il suivait Jésus en rendant gloire à Dieu. Et tout le peuple, voyant cela, adressa une louange à Dieu.

Là, il y a la guérison mais cet homme que l'on faisait taire, il suit et il rend grâce à Dieu et il est moteur. Je ne sais si Luc a joué sur les mots, mais le peuple qui était aveugle à la souffrance, maintenant voit autre chose et comme cet homme se met à adresser une louange à Dieu. Tout retourne au Père, dans ce texte. 


MARDI 20 NOVEMBRE: Lc 19, 1-10 Zachée

Je me dis que les deux personnages présentés par Luc, alors que Jésus entame vraiment la montée vers Jérusalem ont des problèmes avec la vision. L'un est aveugle, alors c'est le son qui le guide, l'autre, voit, mais la taille fait qu'il ne peut pas vraiment voir, il a beau sauter, les autres l'empêchent de voir, même si c'est uniquement la curiosité. Peut-être qu'il connaît Matthieu qui a laissé son bureau et que ça lui a posé question, parce que après tout, il a bien fallu le remplacer cet homme là. Bien sûr Capharnaüm et Jéricho, ce n'est pas du tout les mêmes lieux, mais quand même. Alors le désir de voir, le désir d'apercevoir, cette curiosité qui peut parfois entraîner un changement total. Parce que Zachée passe de celui qui veut voir, à celui qui est vu, qui est remarqué, non pas en tant que chef mais en tant qu'homme et cela lui change la vie. De même pour l'aveugle qui lui aussi a vu Jésus, qu'il n'avait jamais vu. Voir et être vu, connaître et être connu.



01 Entré dans la ville de Jéricho, Jésus la traversait.
02 Or, il y avait un homme du nom de Zachée ; il était le chef des collecteurs d’impôts, et c’était quelqu’un de riche.
03 Il cherchait à voir qui était Jésus, mais il ne le pouvait pas à cause de la foule ,car il était de petite taille.

Comme quoi on peut être riche, mais ne pas être heureux. On peut souffrir de ce handicap. "t'es bien trop petit mon ami, t'es bien trop petit, dame oui" dit la chanson. Le métier qui donne du pouvoir, peut remplacer cela, mais pas totalement. Alors on a un homme qui semble avoir tout et qui pourtant doit envier ceux qui ont une taille normale. Bien sûr on ne se moque pas de lui par devant parce qu'il a du pouvoir, mais par derrière, sûrement.

04 Il courut donc en avance et grimpa sur un sycomore pour voir Jésus qui allait passer par là.

Il est peut-être petit, mais il sait ce qu'il veut et quand il veut quelque chose: voir ce Jésus, il se donne les moyens. Bravo Zachée.

05 Arrivé à cet endroit, Jésus leva les yeux et lui dit : « Zachée, descends vite aujourd’hui il faut que j’aille demeurer dans ta maison. »

Là on peut dire que l'incroyable se passe. Je pense qu' avoir été appelé par son prénom a dû être une sorte de bombe. "Il me connaît par mon nom, moi dont on se moque, il sait qui je suis, et il n'a pas honte de venir chez moi, quel honneur il me fait". J'ai toujours pensé que Zachée avait dû descendre bien plus vite qu'il n'était monté dans cet arbre. J'ai toujours aimé le " aujourd'hui, il faut". Il y a une nécessité vitale pour Jésus, transformer ce petit homme en un grand homme, ce petit riche en un grand pauvre. 

06 Vite, il descendit et reçut Jésus avec joie.

J'aime bien la symétrie: Zachée descend vite/ vite il descendit. Et la joie qui est là. Mais manifestement il reçoit Jésus et peut-être une partie de sa bande, mais peut-être aussi des notables. Et là, ça coince. On dirait que  la suite gâche en quelque sorte la joie qui devrait être là.

07 Voyant cela, tous récriminaient : « Il est allé loger chez un homme qui est un pécheur. »

Toujours ce récriminaient, mais c'est contre Jésus qui fait tout de travers: un bon juif ne doit pas pactiser avec l'impie, avec le pécheur. Jésus à ce moment là, ne dit rien, ne fait rien pour laisser à Zachée son espace, son espace de parole et cela c'est très beau. 

08 Zachée, debout, s’adressa au Seigneur : « Voici, Seigneur : je fais don aux pauvres de la moitié de mes biens, et si j’ai fait du tort à quelqu’un, je vais lui rendre quatre fois plus. »

Zachée ne s'adresse pas à ceux qui récriminent contre Jésus. Il s'adresse directement à lui, en lui donnant son titre de Seigneur, et surtout il est debout, ce qui est bien un signe de résurrection. Il change, il est autre, il le manifeste. Et il donne la moitié de ses biens aux pauvres. On a beaucoup écrit là-dessus, l'autre moitié c'est celle qui appartient à l'occupant.. Je ne sais pas.  Un peu comme la moitié du manteau de St Martin. Il ne dispose pas de cette moitié, peut-être, peut-être pas. Personne ne dit qu'il renonce à son métier. Et je crois que quand on fait tu tort à quelqu'un on rend à l'identique, pas quatre fois plus, et là, il est certain que le cœur de Zachée s'est ouvert. 

09 Alors Jésus dit à son sujet : « Aujourd’hui, le salut est arrivé pour cette maison, car lui aussi est un fils d’Abraham.
10 En effet, le Fils de l’hommeest venu chercher et sauver ce qui était perdu. »

Le dernier verset renvoie à l'image du bon pasteur. Ce qu'il rétorque aux "autres", c'est qu'ils n'ont pas le droit de dénier même à un pécheur son titre de fils d'Abraham, son titre de frère. Et l'impression aussi que Zachée n'est pas le seul concerné, mais toute sa maison, tous ceux qui logent là, qui habitent là, famille, serviteurs, peut-être esclaves parce que le regard de Zachée aura changé sur eux. Je pense que dans l'évangile de Luc, ce qui se passe à là, ce sont les deux derniers miracles de Jésus avant la passion.

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