samedi, juin 29, 2024

Marc 5, 23-41. Guérison de la femme qui perd du sang et retour à la vie de la fille de Jaïre. 13° dimanche du temps ordinaire. Juin 2024


 

C'est l'évangile "sandwich", où on a deux guérisons: une demandée verbalement par Jaïre dont la fille de 12 ans est en train de mourir; et une demandée du fond du cœur, mais sans mots, par une femme qui perd du sang depuis douze ans, qui n'a plus aucune ressource, qui est une pauvre au sens fort du terme: étant impure elle ne peut être recueillie par personne.  D'une certaine manière, elle est en danger de mort, comme la jeune fille. La guérison de cette femme est encadrée par ce qui se passe pour Jaïre.

 

Ce qui m'a frappée en relisant ce texte, ces textes, c'est le comportement de Jésus vis-à-vis de ses disciples qui lui font remarquer qu'il est impossible de savoir qui l'a touché puisqu'il est comme "enserré" je dirai presque inséré dans la foule, et qui doivent penser qu'il est fou de vouloir savoir qui l'a touché; puis ce qui se passe quand on annonce de manière plus que brutale à Jaïre que sa fille est morte, Jésus lui disant de ne pas craindre et de garder sa foi; et surtout quand Jésus déclare, alors que les pleureuses sont là, que la jeune fille n'est pas morte mais qu'elle dort.

 

J'ai donc eu l'idée de faire raconter cela par un disciple qui se demande vraiment ce qui se passe dans la tête de Jésus. 

 

Comme c'est un texte que j'ai beaucoup travaillé, peut-être qu'il y a beaucoup de redites par rapport aux analyses précédentes. 

 

 https://giboulee.blogspot.com/2007/05/la-femme-qui-perdait-du-sang-mc-515-25.html

https://giboulee.blogspot.com/2019/02/la-resurrection-de-la-fille-de-jaire-mc.html

https://giboulee.blogspot.com/2018/01/qui-ma-touche-mc-530.html

https://giboulee.blogspot.com/2022/02/marc-5-21-45-jesus-leur-ordonna.html

 

 

 Travail sur le texte

 

21 En ce temps-là, Jésus regagna en barque l’autre rive, et une grande foule s’assembla autour de lui. Il était au bord de la mer.

 

En général, quand la foule s'assemble, c'est que Jésus parle. Et la précision "au bord de la mer" renvoie aux discours en paraboles du chapitre 4.

 

22 Arrive un des chefs de synagogue, nommé Jaïre. Voyant Jésus, il tombe à ses pieds

23 et le supplie instamment : « Ma fille, encore si jeune, est à la dernière extrémité. Viens lui imposer les mains pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. »

24 Jésus partit avec lui, et la foule qui le suivait était si nombreuse qu’elle l’écrasait.

 

 

Changement de programme, mais la foule veut savoir; et elle est dense la foule. Ce qui est beau, et on trouvera cela ailleurs, c'est que lorsque quelqu'un a une demande pressante à faire, Jésus l'écoute, et est capable de changer son programme ou de le retarder. C'est ce qui se passe avec le jeune homme qui tombe aux pieds de Jésus alors que ce dernier prend le chemin de Jérusalem, et demande ce qu'il doit faire pour avoir la vie éternelle.

 

25 Or, une femme, qui avait des pertes de sang depuis douze ans… –

26 elle avait beaucoup souffert du traitement de nombreux médecins, et elle avait dépensé tous ses biens sans avoir la moindre amélioration ; au contraire, son état avait plutôt empiré –…

 

Description de l'enfer de cette femme, qui va de plus en plus mal et qui n'a plus de quoi vivre; qui est objet de dégoût et de rejet.

 

27 cette femme donc, ayant appris ce qu’on disait de Jésus, vint par-derrière dans la foule et toucha son vêtement.

28 Elle se disait en effet : « Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. »

29 À l’instant, l’hémorragie s’arrêta, et elle ressentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal.

 

Courage de cette femme qui doit fendre cette foule, trouver moyen de s'approcher, de toucher le vêtement et non les mains ou même les pieds de Jésus, pour ne pas transmettre son impureté, et la certitude qu'il y a en cet homme la guérison.

 

30 Aussitôt Jésus se rendit compte qu’une force était sortie de lui. Il se retourna dans la foule, et il demandait : « Qui a touché mes vêtements ? »

31 Ses disciples lui répondirent : « Tu vois bien la foule qui t’écrase, et tu demandes : “Qui m’a touché ?” »

32 Mais lui regardait tout autour pour voir celle qui avait fait cela.

 

Arrêt de Jésus (je me suis toujours demandé ce qui s'est passé pour la foule qui suit, face à cet arrêt du mouvement), et les disciples qui trouvent qu'il est un peu fou, car eux ne savent pas que Jésus a senti qu'une force était sortie de lui. Sauf que Jésus ne s'en laisse pas conter, et qu'il veut savoir et comprendre où est passée cette force qui est sortie de lui, cette force qui est peut-être celle qui fit tressaillir l'enfant d'Elisabeth dans l'évangile de Luc.

 

33 Alors la femme, saisie de crainte et toute tremblante, sachant ce qui lui était arrivé, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité.

34 Jésus lui dit alors : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal. »

 

Et la femme se manifeste; on a l'impression qu'après avoir touché le vêtement de Jésus et ressenti que quelque chose se passait pour elle, elle s'était fondue dans la foule, elle avait a disparu. Et Jésus a besoin de mettre les mots qui donnent la vie.

 

35 Comme il parlait encore, des gens arrivent de la maison de Jaïre, le chef de synagogue, pour dire à celui-ci : « Ta fille vient de mourir. À quoi bon déranger encore le Maître ? »

36 Jésus, surprenant ces mots, dit au chef de synagogue : « Ne crains pas, crois seulement. »

 

Brutalité de l'annonce, avec pour moi l'impression que ces gens-là, ne sont pas tellement d'accord pour le chef de leur synagogue vienne demander de l'aide à ce jeune homme sorti de nulle part et dont on ne sait rien ou si peu.

 

37 Il ne laissa personne l’accompagner, sauf Pierre, Jacques, et Jean, le frère de Jacques.

 

Les trois qui seront présents à la transfiguration et à Gethsémani. Curieux qu'André soit comme exclu. 

 

38 Ils arrivent à la maison du chef de synagogue. Jésus voit l’agitation, et des gens qui pleurent et poussent de grands cris.

39 Il entre et leur dit : « Pourquoi cette agitation et ces pleurs ? L’enfant n’est pas morte : elle dort. »

40             Mais on se moquait de lui.

 

Si l'agitation règne, c'est bien que le décès a été constaté, et Jésus les réprimande de cette agitation. On peut bien comprendre les moqueries, qui préfigurent les moqueries des prêtres quand Jésus sera sur la croix. Comment admettre que ce Jésus soit vainqueur de la mort? 

 

Alors il met tout le monde dehors, prend avec lui le père et la mère de l’enfant, et ceux qui étaient avec lui ; puis il pénètre là où reposait l’enfant.

41 Il saisit la main de l’enfant, et lui dit : « Talitha koum », ce qui signifie : « Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! »

 

Je me suis toujours demandée comment deux mots pouvaient donner une phrase aussi longue. Se lever est souvent synonyme de revenir à la vie.

 

42 Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher – elle avait en effet douze ans. Ils furent frappés d’une grande stupeur. 

43Et Jésus leur ordonna fermement de ne le faire savoir à personne ; puis il leur dit de la faire manger.

 

Prévenance de Jésus et insistance sur l'alimentation.

 

Un disciple raconte.

 

On venait de rentrer de la Décapole; le maître avait guéri un possédé, je dirais un possédé pas comme les autres qui ont au maximum sept esprits mauvais. Lui, il était possédé par une légion de mauvais esprits, qui par la suite étaient entrés dans un troupeau de porcs. Les porcs s'étaient enfuis et jetés dans le lac. 

 

Inutile de vous dire que les habitants, ils s'en moquaient un peu de la guérison du possédé. Mais par contre la perte de leurs cochons, ça ne passait pas du tout, et ils avaient supplié Jésus de quitter leur territoire. 

 

Peut-être aussi qu'ils l'ont pris pour un sorcier, parce que parfois les sorciers, pour délivrer un possédé font entrer le mauvais esprit dans le corps d'un animal; alors réussir à envoyer tous ces esprits dans plus de deux mille têtes, il y a de quoi avoir peur. 

 

Nous avons donc quitté cette contrée, en y laissant l'homme qui avait été guéri et qui aurait bien voulu nous suivre, et nous sommes rentrés chez nous à Capharnaüm. 

 

Je ne sais pas s'ils avaient su ce qui s'était passé là-bas, mais dès que nous avons débarqué, une foule a commencé à s'assembler autour de lui. Peut-être qu'ils voulaient entendre de nouvelles paraboles, peut-être qu'ils voulaient être guéris, je ne sais pas, mais du monde il y en avait. Je n'aime pas la foule, on se sent un peu comme des poissons dans une nasse: l'impression d'étouffer. Des fois, on essaie de faire comme un filet de protection autour de Jésus pour qu'il ne soit pas broyé par la foule, pour la mettre un peu à distance; mais là c'était difficile.

 

Est arrivé alors le chef de la Synagogue, Jaïre. On avait dû lui dire que Jésus était rentré et qu'il ne s'était pas noyé dans le lac, malgré la sacrée tempête qui s'était abattue ce soir-là. Il est tombé aux pieds de Jésus, et l'a supplié de venir chez lui pour qu'il impose les mains à sa fille, une toute jeune fille, qui était à l'article de la mort. Et nous nous sommes mis en route. 

 

C'est là qu'il est arrivé quelque chose où je me suis vraiment demandé ce qui se passait dans la tête du maître. Nous étions donc en route, et d'un coup il s'arrête net, et nous dit qu'il a senti qu'une force le quittait, et qu'il voulait savoir qui l'avait touché. Vous vous rendez compte? Comment savoir qui l'a touché alors que la foule était tout autour de lui, à se demander ce qu'il allait faire pour la jeune fille. Pardon, mais j'ai pensé qu'il était un peu fou. 

 

Sauf que… une femme s'est approchée de lui, s'est agenouillée devant lui, a dit qu'elle avait osé toucher son vêtement - pas lui pour ne pas le rendre impur, qu'elle perdait du sang depuis douze ans, que personne n'avait pu la guérir, et qu'elle avait senti que la source s'était enfin arrêtée. Un vrai miracle. Jésus l'a regardée avec son regard doux, bien différent du regard qu'il nous avait lancé quand on lui dit qu'il était impossible de savoir qui l'avait touché; il l'a appelée sa fille, lui a dit que sa foi l'avait sauvée, et qu'elle était guérie de son mal qui ne reviendrait plus.

 

Nous nous sommes remis en route vers la maison de Jaïre. Mais des gens de chez lui, en fendant la foule, sont venus lui dire de ne plus importuner Jésus, parce que sa fille était morte. Jésus a entendu; il s'est tourné vers Jaïre et lui a dit de ne pas craindre, de croire seulement. Cela m'a paru étonnant comme phrase, surtout qu'il nous avait dit à peu près les mêmes mots quand dans la barque qui nous menait vers Gérasa , dans le silence qui avait suivi la fin de la tempête, il nous avait demandé pourquoi nous étions si craintifs et où était notre foi. Là, il lui demandait quand même quelque chose de difficile, croire à l'impossible. Mais la tempête, il l'avait bien apaisée, alors pourquoi pas ne pas vaincre le tourbillon de la mort. Mais quand même.

 

Quand nous sommes arrivés à la maison, une grande agitation y régnait; il y avait déjà les pleureuses, les joueurs de flûte. Là Jésus a affirmé que l'enfant n'était pas morte, mais qu'elle dormait. Tout le monde l'a regardé de travers et s'est moqué de lui, comme s'il était fou. Je dois dire que malgré tout, je pensais un peu comme eux. 

 

Moi je suis resté dehors, parce qu'il a pris avec lui, Pierre, Jean et Jacques. Ce sont eux qui m'ont raconté. Il est entré dans la pièce où était étendue la petite fille, il paraît qu'elle était maigre à faire peur. Il lui a saisi la main et il a dit "Talitha koum". Les yeux de la jeune fille se sont ouverts, elle s'est levée, elle s'est mise à marcher, elle qui à cause de sa faiblesse ne pouvait plus quitter son lit. Elle avait douze ans, elle était promise, elle la fille du chef de la synagogue, à un bel avenir. Pourquoi avait-elle maigri comme cela? Le maître a dit aux parents de lui donner à manger. Mais il leur a dit aussi de ne pas parler de ce qui venait de se passer. Je crois qu'il rêve un peu, parce que donner la vie à un mort, seuls les plus grands prophètes l'ont fait, et c'est bien le signe qu'il est habité par le Très Haut.

 

Il n'est pas resté à Capharnaüm; il est parti à Nazareth. Mais moi, je m'en voulais: j'avais pensé comme tout le monde qu'il était un peu fou, et pourtant il est autre, il est autrement, il est celui qui sait, il est celui que je suivrai jusqu'au bout du monde et je l'aime. Il n'est pas fou, il est la folie qui révèle l'amour de notre Dieu. Qu'est ce que j'aurais aimé être à la place des trois qui ont vu la jeune fille revenir à la vie, et la joie des parents, parce qu'eux aussi sont revenus à la vie. Et faire revenir à la vie, c'est ça qu'il aime.

 

Annexe: comparaison des différents récits.

 

 

Matthieu 9, 18-26

 

Marc 5,21-43-

Luc 8, 40-56

 

21 Jésus regagna en barque l’autre rive, et une grande foule s’assembla autour de lui. Il était au bord de la mer.

40 Quand Jésus revint en Galilée, il fut accueilli par la foule, car tous l’attendaient.

 

 

8 Tandis que Jésus leur parlait ainsi, voilà qu’un notable s’approcha. Il se prosternait devant lui en disant : « Ma fille est morte à l’instant ; mais viens lui imposer la main, et elle vivra. »

19 Jésus se leva et le suivit, ainsi que ses disciples.

 

22 Arrive un des chefs de synagogue, nommé Jaïre. Voyant Jésus, il tombe à ses pieds

23 et le supplie instamment : « Ma fille, encore si jeune, est à la dernière extrémité. Viens lui imposer les mains pour qu’elle soit sauvée et qu’elle vive. »

24 Jésus partit avec lui, et la foule qui le suivait était si nombreuse qu’elle l’écrasait

 

41 Et voici qu’arriva un homme du nom de Jaïre ; c’était le chef de la synagogue. Tombant aux pieds de Jésus, il le suppliait de venir dans sa maison,

42 parce qu’il avait une fille unique, d’environ douze ans, qui se mourait. Et tandis que Jésus s’y rendait, les foules le pressaient au point de l’étouffer.

 

20 Et voici qu’une femme souffrant d’hémorragies depuis douze ans»

 

 

 

 

 

 

 

 

 

s’approcha par-derrière et toucha la frange de son vêtement.

 

21 Car elle se disait en elle-même : « Si je parviens seulement à toucher son vêtement, je serai sauvée. 

25 Or, une femme, qui avait des pertes de sang depuis douze ans… –

26 elle avait beaucoup souffert du traitement de nombreux médecins, et elle avait dépensé tous ses biens sans avoir la moindre amélioration ; au contraire, son état avait plutôt empiré –

27 cette femme donc, ayant appris ce qu’on disait de Jésus, vint par-derrière dans la foule et toucha son vêtement.

 

28 Elle se disait en effet : « Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. »

29 À l’instant, l’hémorragie s’arrêta, et elle ressentit dans son corps qu’elle était guérie de son mal.

 

43 Or, une femme qui avait des pertes de sang depuis douze ans, et qui avait dépensé tous ses biens chez les médecins sans que personne n’ait pu la guérir,

 

 

 

44 s’approcha de lui par-derrière et toucha la frange de son vêtement. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

À l’instant même, sa perte de sang s’arrêta.

 

 

 

 

 

30 Aussitôt Jésus se rendit compte qu’une force était sortie de lui. Il se retourna dans la foule, et il demandait : « Qui a touché mes vêtements ? »

 

 

 

 

45 Mais Jésus dit : « Qui m’a touché ? »

 

31 Ses disciples lui répondirent : « Tu vois bien la foule qui t’écrase, et tu demandes : “Qui m’a touché ?” »

 

32 Mais lui regardait tout autour pour voir celle qui avait fait cela.

 

Comme ils s’en défendaient tous, Pierre lui dit : « Maître, les foules te bousculent et t’écrasent. »

 

 

46 Mais Jésus reprit : « Quelqu’un m’a touché, car j’ai reconnu qu’une force était sortie de moi. »

 

2 Jésus se retourna et, la voyant, lui dit : « Confiance, ma fille ! Ta foi t’a sauvée. » Et, à l’heure même, la femme fut sauvée.

 

 

33 Alors la femme, saisie de crainte et toute tremblante, sachant ce qui lui était arrivé, vint se jeter à ses pieds et lui dit toute la vérité.

 

 

 

 

34 Jésus lui dit alors : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix et sois guérie de ton mal. »

 

 

47 La femme, se voyant découverte, vint, toute tremblante, se jeter à ses pieds ; elle raconta devant tout le peuple pourquoi elle l’avait touché, et comment elle avait été guérie à l’instant même.

 

48 Jésus lui dit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix. »

 

 

35 Comme il parlait encore, des gens arrivent de la maison de Jaïre, le chef de synagogue, pour dire à celui-ci : « Ta fille vient de mourir. À quoi bon déranger encore le Maître ? »

 

36 Jésus, surprenant ces mots, dit au chef de synagogue : « Ne crains pas, crois seulement. »

 

49 Comme il parlait encore, quelqu’un arrive de la maison de Jaïre, le chef de synagogue, pour dire à celui-ci : « Ta fille est morte. Ne dérange plus le maître. »

 

 

50 Jésus, qui avait entendu, lui déclara : « Ne crains pas. Crois seulement, et elle sera sauvée. »

 

 

 

37 Il ne laissa personne l’accompagner, sauf Pierre, Jacques, et Jean, le frère de Jacques.

51 En arrivant à la maison, il ne laissa personne entrer avec lui, sauf Pierre, Jean et Jacques, ainsi que le père de l’enfant et sa mère.

 

 

23 Jésus, arrivé à la maison du notable, vit les joueurs de flûte et la foule qui s’agitait bruyamment. Il dit alors :

24 « Retirez-vous. La jeune fille n’est pas morte : elle dort. 

 

 

 

 

 

» Mais on se moquait de lui.

 

 

38 Ils arrivent à la maison du chef de synagogue. Jésus voit l’agitation, et des gens qui pleurent et poussent de grands cris.

39 Il entre et leur dit : « Pourquoi cette agitation et ces pleurs ? L’enfant n’est pas morte : elle dort. »

 

40 Mais on se moquait de lui. 

 

52 Tous la pleuraient en se frappant la poitrine. Mais Jésus dit : « Ne pleurez pas ; elle n’est pas morte : elle dort. »

 

 

 

 

 

 

53 Mais on se moquait de lui, sachant qu’elle venait de mourir.

 

 

25 Quand la foule fut mise dehors, il entra, lui saisit la main, et la jeune fille se leva.

 Alors il met tout le monde dehors, prend avec lui le père et la mère de l’enfant, et ceux qui étaient avec lui ; puis il pénètre là où reposait l’enfant.

41 Il saisit la main de l’enfant, et lui dit : « Talitha koum », ce qui signifie : « Jeune fille, je te le dis, lève-toi ! »

2 Aussitôt la jeune fille se leva et se mit à marcher – elle avait en effet douze ans. Ils furent frappés d’une grande stupeur.

 

 

 

 

 

 

 

 

54 Alors il lui saisit la main et dit d’une voix forte : « Mon enfant, éveille-toi ! »

55 L’esprit lui revint et, à l’instant même, elle se leva. 

26 Et la nouvelle se répandit dans toute la région

 

 

43 Et Jésus leur ordonna fermement de ne le faire savoir à personne ; puis il leur dit de la faire manger.

Alors Jésus ordonna de lui donner à manger.

 

56 Ses parents furent frappés de stupeur ; quant à Jésus, il leur commanda de ne dire à personne ce qui était arrivé.

 

dimanche, juin 23, 2024

MARC 4, 35-41: LA TEMPETE APAISÉE. 12° DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE. JUIN 2024

La liturgie nous permet de cheminer dans l'évangile de Marc. La semaine dernière, c'étaient deux paraboles qui parlaient du règne de Dieu, de la confiance nécessaire, de la patience. Aujourd'hui c'est la tempête apaisée, Jésus étant dans la barque avec les disciples. Je dois dire que c'est un texte que j'aime beaucoup, parce qu'on peut vraiment imaginer Jésus debout dans la tempête et invectivant la mer, lui ordonnant de se taire: puissance du Fils de l'Homme...

J'ai travaillé sur ce texte il y a deux ans - https://giboulee.blogspot.com/2022/01/marc-4-35-41-la-tempete-apaisee.html, mais en relisant la manière dont le disciple racontait, j'ai eu envie de faire un peu autrement, et donc de faire comme si le texte je ne le connaissais pas, comme si je le découvrais. 

Il s'est fait des liens avec la première lecture qui parle de Dieu en disant qu'il s'adresse à Job au milieu de la tempête, avec des images de Moïse, mais aussi avec le livre de Jonas, avec Abram qui comme les disciples quitte la ville où s'est établi son père pour quitter son pays, et partir vers ce pays qui lui sera montré.  

Premières réflexions

 

La semaine dernière, c'étaient les paraboles qui permettent de comprendre - ou d'entendre un peu - à quoi on peut comparer le royaume de Dieu. Il nous avait été parlé de la graine jetée en terre, et qui pousse quoiqu'il arrive, à condition peut-être que le sol (la terre) soit préparé (et cela c'est au moins un peu de notre ressort), mais il faut du temps. Il faut accepter de ne pas voir, et de faire confiance. La confiance est peut-être le maître mot, d'autant qu'elle est l'antidote de la crainte, que Jésus va reprocher à ses disciples.  

 

Il nous avait aussi été dit que le royaume était le plus petite des graines, mais que d'elle pouvait naître une plante potagère assez grande pour permettre aux oiseaux du ciel de se trouver leur abri. Et là encore, il était question de confiance, avec une idée importante: Marc écrit pour les Romains, et la petite graine qui a été jetée en Israël commence à grandir: peu à peu la petite église va se développer, et cela demande une sacrée confiance.

 

Aujourd'hui, Jésus décide de semer ailleurs, et d'aller sur l'autre rive. Aller sur l'autre rive, c'est certainement l'inconnu, car à priori les disciples de Jésus, ces pécheurs de Galilée, ne vont pas sur l'autre rive, qui est occupée par d'autres habitants qu'ils considèrent comme des païens et qu'il ne faut pas fréquenter. Peut-être qu'il leur est demandé, comme Dieu l'a fait dans le passé avec Abram, de quitter la sécurité, de se mettre en route, pour aller vers un ailleurs qui peut faire peur.

 

Ce qui est étonnant dans ce texte, c'est le côté presque impérieux, impératif: il fait nuit, nous dit Marc, et il faut se mettre en route. Jésus qui a certainement dû enseigner toute la journée et qui a bien le droit d'être fatigué, ne s'écoute pas, et se met en route tel qu'il est, comme si quelque chose le poussait à partir immédiatement: "aussitôt" aurions-nous pu lire…..

 

Par ailleurs cette péricope s'appelle la tempête apaisée. Apaisée. Autrefois, et c'est ce qu'on peut lire dans le livre de Jonas, pour que la mer s'apaise, pour que les forces qui l'agitent cessent leur violence, il fallait lui donner quelque chose, quelqu'un. Il faut apaiser les forces du mal en sacrifiant celui qui est l'origine de ce déferlement. Jonas est jeté à l'eau, et la mer cesse de s'agiter. Si on relit le début du livre de Jonas, il est quand même étonnant :


Jon 1, 5-7

 

5 Les matelots prirent peur ; ils crièrent chacun vers son dieu et, pour s’alléger, lancèrent la cargaison à la mer. Or, Jonas était descendu dans la cale du navire, il s’était couché et dormait d’un sommeil mystérieux.

6 Le capitaine alla le trouver et lui dit : « Qu’est-ce que tu fais ? Tu dors ? Lève-toi ! Invoque ton dieu. Peut-être que ce dieu s’occupera de nous pour nous empêcher de périr. »

7 Et les matelots se disaient entre eux : « Tirons au sort pour savoir à qui nous devons ce malheur. » Ils tirèrent au sort, et le sort tomba sur Jonas.

 

Si j'ose continuer un parallélisme, les disciples pensent peut-être que cette tempête c'est de la faute de Jésus, et qu'il faudrait se débarrasser de lui pour que la mer se calme, mais c'est vraiment très osé. 

 

En soi, il est plus logique de penser que dans le combat qui se joue entre Jésus et les forces du mal, ces dernières, prennent peur en le voyant se mettre en route, se disent qu'il faut tout faire pour le bloquer dans son action, lui et ses disciples et le faire disparaître avant qu'il ne répande la semence dans une terre que ces esprits mauvais estiment être à eux.

 

Cet épisode se trouve chez Matthieu, Marc et Luc, et précède à chaque fois la rencontre avec le possédé de Gérasa, ce qui signifie bien son importance dans la lutte de Jésus contre l'esprit mauvais. 

 

La tempête apaisée dans les synoptiques.

 

 

Matthieu 8, 23-28

Marc 4, 35-41

Luc 8, 22-26

 

 

 

 

 

 

 

 

 

23 Comme Jésus montait dans la barque, ses disciples le suivirent.

 

 

 

 

24 Et voici que la mer devint tellement agitée que la barque était recouverte par les vagues. 

Mais lui dormait.

 

 

 

25 Les disciples s’approchèrent et le réveillèrent en disant : « Seigneur, sauve-nous ! Nous sommes perdus


 

 

26 Mais il leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs, hommes de peu de foi ? »

 

 

Alors, Jésus, debout, menaça les vents et la mer, et il se fit un grand calme.

 

 

 

 

 

 

 

 

27 Les gens furent saisis d’étonnement et disaient : « Quel est donc celui-ci, pour que même les vents et la mer lui obéissent ? »

 

 


 

 

28 Comme Jésus arrivait sur l’autre rive, dans le pays des Géraséniens, deux possédés sortirent d’entre les tombes à sa rencontre ; ils étaient si agressifs que personne ne pouvait passer par ce chemin.

 

35 Ce jour-là, le soir venu, il dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. »

 

 

 

36 Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres barques l’accompagnaient.

 

 

 

37 Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait.

38 Lui dormait sur le coussin à l’arrière

 

 

 

Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? »

 

 

 

39 Réveillé, il menaça le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi ! » Le vent tomba, et il se fit un grand calme.

 

 

 

 

 

 

40 Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? »

 

 

 

41 Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »

 

 

 


 

Mc 5, 1 1 Ils arrivèrent sur l’autre rive, de l’autre côté de la mer de Galilée, dans le pays des Géraséniens.

 

22 Un jour, Jésus monta dans une barque avec ses disciples et il leur dit : « Passons sur l’autre rive du lac. » Et ils gagnèrent le large.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

23 Pendant qu’ils naviguaient, Jésus s’endormit. Une tempête s’abattit sur le lac. Ils étaient submergés et en grand péril.

 

 

24 Les disciples s’approchèrent et le réveillèrent en disant : « Maître, maître ! Nous sommes perdus ! » 

 

 

 

Et lui, se réveillant, menaça le vent et les flots agités. Ils s’apaisèrent et le calme se fit.

 

 

 

 

 

 

 

 

25 Alors Jésus leur dit : « Où est votre foi ? » 

 

 

 

Remplis de crainte, ils furent saisis d’étonnement et se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour qu’il commande même aux vents et aux flots, et que ceux-ci lui obéissent ? »

 

 

26 Ils abordèrent au pays des Géraséniens, qui est en face de la Galilée.

 

 

 

 

Si on s'essaie au jeu des différences, on peut voir que seul Marc est dans l'urgence: on emmène Jésus tel qu'il est, et ce, bien que le soir soit tombé. On est au début de l'évangile de Marc, mais beaucoup de miracles ont eu lieu et peut-être parce que Jésus se sent déjà en danger, le discours en paraboles (début du chapitre 4) a été une sécurité pour lui, l'a mis dans la lignée des "rabbis".

 

Chez Matthieu la foule est dense autour de Jésus qui, il faut le dire, vient de guérir un lépreux et le serviteur d'un centurion, puis la belle-mère de Pierre et enfin un grand nombre de malades et de possédés qui sont tous guéris. Cette foule est comme un filet qui enserre Jésus dans ses mailles, qui le veut pour elle; mais cela ce n'est pas possible, alors Jésus, en pleine nuit, décide de prendre de la distance et d'aller sur "l'autre rive".

 

 Quant à Luc, tout se passe en plein jour.  

 Si chez Marc, les disciples sont remplis de crainte et chez Matthieu les gens d'étonnement, chez Luc, ce sera crainte et étonnement (mais chez Luc, c'est un mot qui revient assez souvent: 9 fois contre 2 fois chez Matthieu et 6 fois chez Marc)  et qui renvoie bien au bouleversement.

 

On trouve le même reproche dans les trois, exprimé différemment; mais si chez Matthieu, c'est "hommes de peu de foi", chez Luc c'est plus doux: où est votre foi. Mais cela nous oblige peut-être à plus de réflexion. Sommes-nous capables de garder notre confiance en celui qui semble absent (qui dort) quand la tempête s'abat sur nous? 

 

 

Travail sur le texte de Marc

 

35 Ce jour-là, le soir venu, Jésus dit à ses disciples : « Passons sur l’autre rive. » .

 

Il n'y a aucune transition. On sait juste que c'est le soir, un soir. Avant il y avait eu les discours en paraboles. On peut juste imaginer que Jésus a raconté (enseigné) et que là, au lieu d'expliquer aux disciples le sens des paraboles, il décide de quitter ce lieu, cette ville et d'aller ailleurs. Il est certain que pour nous, le "passons sur l'autre rive", ne veut pas dire grand-chose. Peut-être qu'il faut l'entendre comme ce que Dieu dit à Abram dans le livre de la Genèse: Gn 12, 1: Le Seigneur dit à Abram : « Quitte ton pays, ta parenté et la maison de ton père, et va vers le pays que je te montrerai.

 

Il s'agit bien de prendre la barque, et de partir, de quitter un environnement connu, pour s'embarquer pour quelque chose, peut-être pour aller semer si on prend le début du chapitre. 

 

36 Quittant la foule, ils emmenèrent Jésus, comme il était, dans la barque, et d’autres barques l’accompagnaient.

 

Manifestement, jésus doit se montrer assez intransigeant, c'est maintenant qu'il faut se mettre en route et tant pis s'il fait nuit. Après tout ce sont des pécheurs, donc ils connaissent leur métier, et la pêche se fait de nuit. Il s'agit donc bien d'aller pêcher quelque part, sur cette autre rive. Une nouvelle pêche se prépare, mais les disciples ne le savent pas, et c'est bien cette nouvelle pêche qui va provoquer la fureur des forces mauvaises; Jésus part, mais pas seul, puisque Marc nous dit qu'il y a d'autres barques. 

 

37 Survient une violente tempête. Les vagues se jetaient sur la barque, si bien que déjà elle se remplissait.

38 Lui dormait sur le coussin à l’arrière. Les disciples le réveillent et lui disent : « Maître, nous sommes perdus ; cela ne te fait rien ? »

 

Les vagues se jettent sur la barque, comme un adversaire se jette sur un autre adversaire, avec une grande violence. On sent bien là, qu'il s'agit d'un combat. Il s'agit de se débarrasser de cet empêcheur de tourner en rond, de l'éliminer lui et ses disciples, de les envoyer rejoindre les morts qui sont dans le fond de cette mer.

 

Mais il me semble que pour raconter la scène, il faut en inverser l'ordre. 

- Jésus est fatigué, on lui a préparé un endroit pour qu'il puisse se reposer et dormir, puisqu'il fait nuit et que lui n'est pas un navigateur. 

- La tempête se lève et elle est violente. La mer est démontée et les vagues sont comme à l'assaut de la barque, pour la faire couler puisqu'elle se remplit d'eau. Mais lui, il continue à dormir., un peu comme Jonas qui dormait d'un sommeil mystérieux dans la calle du bateau, alors que la tempête fait rage. 

- Eux écopent, mais ça ne sert à rien.

 - Ils réveillent Jésus, avec cette phrase qui sonne comme un reproche: "ça ne te fait rien?": Tu dors, toi! Mais qu'est-ce que tu fabriques! Comment peux- tu dormir alors que nous sommes en danger? Je peux imaginer quelqu'un lui disant: "Mais bon Dieu, réveille-toi Jésus, sois un peu présent dans cette m... et fais quelque chose.

 

39 Réveillé, il menaça le vent

et dit à la mer 

: « Silence, tais-toi ! » 

Le vent tomba, et il se fit un grand calme.

Jésus alors se lève, je l'imagine se mettre debout, un peu comme Moïse devant la mer des joncs, et avec d'abord une menace que nous n'entendons pas qui concerne le vent (la tempête), et une autre phrase adressée à la mer, qui serait presque "ta gueule". S'il y a menace, c'est je t'ordonne de t'arrêter ou tu vas voir ce qui va t'arriver; ou alors on fait un parallèle avec le livre de Job, Jésus est comme Dieu, debout au milieu de la tempête et il menace la mer, il lui ordonne de cesser son agitation. Et c'est le silence, le calme, le vent qui se calme, les vagues qui reprennent leur clapotis.

 

40 Jésus leur dit : « Pourquoi êtes-vous si craintifs ? N’avez-vous pas encore la foi ? »

 

Mais il n'en reste pas là. Il a engueulé le vent, la mer et là c'est le tour des disciples. Vous n'avez pas compris qui je suis. Si je suis avec vous, même si tout se déchaîne, rien ne peut vous arriver. Est-ce que je vais vous laisser tomber? 

 

41 Saisis d’une grande crainte, ils se disaient entre eux : « Qui est-il donc, celui-ci, pour que même le vent et la mer lui obéissent ? »

 

La réponse c'est le questionnement: qui est-il celui-là? Or nous, ce Jésus-là, qui est comme le Père debout dans la tempête, est-ce qu'il nous fait peur? Il me paraît important de ne pas oublier que même s'il se présente comme doux et humble de cœur, le combat contre le mal combat qui se fait ici avec cette parole "qui ne revient pas sans avoir accompli ce qu'elle a dit" (Is  55, 11), est un combat permanent; Jésus ne dort pas, il est là et il agit.

 

Un disciple raconte.

 

J'ai tout quitté (ou presque pour le suivre), je suis de Capharnaüm, et je suis heureux d'avoir fait ce choix. À nous qui sommes ses proches, il explique les paraboles; et des paraboles, il en dit beaucoup à la foule qui se masse autour de lui et qui l'aime bien, parce qu'il fait des choses que personne n'a jamais faites avant lui, qu'il accepte tout le monde, qu'il écoute, qu'il guérit, qu'il est là vraiment au milieu de son peuple. Tout serait parfait si les pharisiens ne passaient pas leur temps à lui mettre les bâtons dans les roues comme on dit, à chercher la petite bête, mais dans le but de le tuer. 

 

Ce soir là, je pensais que ce serait comme tous les soirs, à la limite que je passerais chez moi, mais il a décidé tout d'un coup qu'il voulait partir sur l'autre rive. Je dois dire que l'autre rive, ce n'est pas chez nous, c'est chez ceux qui ne connaissent pas le Dieu Unique, et qui d'après ce qu'on nous dit, vivent avec plein de mauvais esprits. D'ailleurs ils ne nous aiment pas, et nous évitons leurs villes. Mais Jésus ne nous a pas laissé le choix et nous sommes partis tels que nous étions et lui tel qu'il était, alors que la nuit tombait.

 

Il s'est installé sur les coussins à l'arrière du bateau et s'est endormi. Je dirais même qu'il s'est écroulé. Au début tout allait bien, les étoiles étaient là, la lune éclairait la surface du lac. Mais d'un seul coup, le ciel est devenu noir, le vent s'est levé, ce vent méchant qui change sans arrêt de direction, et les vagues ont commencé à se jeter contre le bateau, puis elles sont devenues de plus en plus fortes, et nous avions beau écoper, la barque se remplissait d'eau, et nous commencions à nous enfoncer. Les autres barques, elles avaient disparu dans les ténèbres. 

Croyez-moi ou pas, mais Jésus continuait à dormir. C'était incroyable; À croire qu'on lui avait jeté un sort. Nous ne savions vraiment plus que faire, nous avions l'impression qu'un combat se jouait, et que le but était de nous faire couler au plus profond du lac. Alors nous l'avons réveillé, mais à cause du bruit des bourrasques, des craquements de la barque, nous devions hurler pour nous faire entendre. Seulement, je ne sais pas comment le dire, mais nous avions aussi un peu peur de le sortir de son sommeil. Alors Matthieu l'a touché, l'a secoué en lui demandant si ça ne lui faisait rien de mourir avec nous? C'est un peu bizarre comme phrase, mais nous avions tellement peur de mourir…

 

Il s'est alors mis debout dans cette tempête, dans cette barque qui tanguait dans tous les sens, il était comme Moïse face la mer alors que les Égyptiens arrivaient au galop pour nous exterminer; il était comme Elie, il était comme Adonaï béni soit-il, quand il mettait de l'ordre dans le Tohu-Bohu, il était l'image de la puissance, de la force. Il a parlé à la mer en lui disant de se taire. Et le vent est tombé, les vagues ont perdu de leur force, et le silence est revenu. Mais quel silence. Je n'avais jamais entendu un silence pareil. Les nuages ont disparu, les étoiles ont repris leur place dans le firmament et nous étions là, sauvés, mais je dois dire sonnés par ce qui venait de se passer.  

 

Avant que nous ne reprenions les rames, il nous a regardés, avec cette manière qu'il a de regarder, où on a l'impression qu'il lit en nous comme dans un livre. Il nous a demandé pourquoi nous étions si craintifs, et si nous avions la foi. 

 

Il en pose des questions, lui. Il ne se rend pas compte. Oui, il était avec nous, oui, nous sommes ses disciples, oui, il nous a choisis, oui il nous a dit que nous étions pour lui des frères, mais la peur était tellement forte, et lui qui dormait, tellement loin, que nous avons pensé qu'il nous laissait seuls et que nous allions tous crever. 

 

Je dois dire que cette question, encore aujourd'hui, je me la pose et pourtant, ce jour-là, ou plutôt cette nuit-là, nous avons vu en l'homme qui nous avait appelé et choisi une présence qui était celle du Très Haut. Et nous nous demandions qui était vraiment ce maître, ce rabbi, pour que la mer et le vent lui obéissent. Nous connaissions bien la réponse, mais la réponse nous faisait peur.

 

Nous avons accosté, un homme s'est avancé vers nous, un homme possédé par un esprit impur, et ce fut un nouveau combat contre ces forces qui veulent faire vivre les hommes dans les ténèbres et dans la mort. Alors que lui, il vient pour la vie, pour donner la vie, la vraie.