vendredi, février 04, 2005

langage: entendre , écouter, parfois comprendre

Catherine LESTANG

Dr en Psychologie.

Psychologue clinicienne

Hôpital Saint Vincent de Paul

Chirurgie Infantile.

LANGAGE ET HANDICAP PHYSIQUE INVALIDANT.

INTRODUCTION.

Par handicap physique invalidant je fais référence aux enfants et adolescents, qui viennent de manière répétitive dans le service d'orthopédie chirurgicale et qui ne marcheront jamais. Leurs déplacements se font en fauteuil manuel ou électrique.Tous sont en quelque sorte tutorisés. Soit par des supports externes, tels que les attelles, les grands appareils, les corsets, soit par des tuteurs internes, avec des tiges qui maintiennent le rachis, ou des broches ou des clous. Leur marche, quand elle est possible, est une marche acquise, apprise, qui se perd presque toujours à l'âge adulte.

Je voudrai tout d'abord vous présenter trois vignettes cliniques.

Noémie est une jeune fille handicapée, qui se déplace en fauteuil. La pathologie est liée à des séquelles de prématurité. Il s'agit d'une Infirmité Motrice d'Origine Cérébrale. Elle ne sait ni lire ni écrire. Les dessins sont de l'ordre du gribouillis, mais elle parle relativement bien. Elle est d'ailleurs la seule patiente de l'institution[1] à me demander de mes nouvelles et à attendre ma réponse. Lors du dernier entretien, elle me dit qu'elle est très en colère. Une stagiaire lui a demandé de montrer ce qu'elle pouvait faire au moment de la toilette. Elle n'a pas pris le temps de se mettre au diapason de Noémie, qui est relativement lente. Elle lui a alors dit "qu'elle était bonne à rien", ce qui provoqué la colère. Ceci est repris plusieurs fois au cours de la séance, sans élaboration, un peu comme un disque qui se remet sur le même sillon. Il est d'ailleurs certain que cette phrase très blessante sur le plan du narcissisme, a eu un impact traumatique, ce qui peut expliquer l'importance de la répétition. Puis tout d'un coup Noémie reprend et me dit: "elle n'a pas le droit de me dire ça. J'ai des capacités". Je ne suis pas sûre qu'elle connaisse le sens de ce mot et des capacités elle en a très peu. Quelques minutes après elle me demande: "Qu'est ce que ça veut dire avoir des capacités"? J'explique mais je suis sûre que cette phrase, elle l'a entendue prononcer par sa mère et par les membres du personnel des dizaines de fois. Ici elle l'a employée dans le contexte, à bon escient, mais sans en comprendre le sens. Ces phrases que l'on pourrait appeler stéréotypées reviennent souvent avec de tels patients. Ce sont des phrases des autres, des phrases sans représentation. Je dirai presque des phrases qui nous laissent sur notre faim, parce qu'il leur manque quelque chose qui a à voir avec le symbolique. Et pourtant Noémie parle, le je est acquis, mais à quoi, mais à qui, son langage renvoie-t-il?

Marie est une petite fille de 10 ans, porteuse d'un Spina-Bifida[2]. Elle ne marche pas. Elle est incontinente et doit être sondée. Le handicap physique est très sévère. Il s'accompagnait lors de son arrivée, d'un comportement très évocateur de psychose. Elle a toujours vécu en institution. Si à 7 ans, le "je" était acquis, elle était pourtant incapable de dessiner un rond. Nous sommes deux psychologues dans cette institution et avons des modes de fonctionnement différents. Mon collègue emploie parfois une terminologie un peu complexe pour un personnel peu formé. Lors d'une séance, Marie me demande une fois de plus s'il y a réunion. Je lui rappelle que ces réunions sont régulières, et qu'elle le sait bien, le mercredi avec moi et le jeudi avec mon collègue. Elle me dit alors d'un ton très affirmatif: "Ton collègue, c'est celui qui parle chinois". Je n'ai pu m'empêcher de rire car elle répétait d'une manière tout à fait appropriée, ce qu'elle entendait dire de lui. Inutile de préciser qu'elle ne sait rien de la Chine et des chinois... Là encore la même question se pose. Au-delà de l'adaptation qu' y a-t-il? Où sont les représentations qui font que le langage est autre chose d'une succession de mots?

Alexandre a 14 ans. Lui aussi est porteur d'un Spina-Bifida. Il a une famille et une mère. Il vient à l'hôpital pour subir une greffe vertébrale. Ceci doit permettre la stabilisation de sa scoliose et surtout favoriser la position assise. Il est en 4 ème et sa scolarité se passe très bien. Alexandre en fait parle peu. Sa mère parle pour lui. Et curieusement l'intervention doit être reculée, car ce garçon qui n'a pas d'escarres depuis des années, dont la peau est constamment surveillée, se fabrique juste avant l'intervention, un trou tellement important, qu'il faut le refermer et faire une greffe de peau. Quel est le sens de ce trou? Ne s'agit-il pas là d'un autre langage, chez un garçon qui ne peut pas dire ce que son handicap l'oblige à vivre. Les soins déclenchent chez lui, qui est pourtant censé tout comprendre et tout savoir, de véritables réactions de panique. Il tremble de la tête aux pieds. Ceci montre la peur sous-jacente, peur qui ne peut se dire et s'exprimer autrement que par du somatique.[3]

Ces trois exemples posent d'emblée les difficultés que l'on rencontre et que le personnel hospitalier rencontre souvent, surtout en orthopédie avec des enfants porteurs de pathologies lourdes. Certes ils parlent, mais ils confrontent les soignants à un curieux sentiment. On communique avec eux, mais pas vraiment. On ne sait pas très bien s'ils sont ou non sujets de ce qu'ils énoncent. L'apparition de certains troubles somatiques rappelle que tous ont du mal avec les émotions, les affects. On peut aussi faire l'hypothèse que vivre avec un corps différent, un corps caractérisé d'importantes carences, aura des répercussions sur l'organisation mentale et donc sur le langage. Je veux dire par là, que ce type de langage, renvoie à un corps qui abesoin en permanence d'étayage, et qui a donc beaucoup besoin de l'autre pour avoir l'impression d'exister.

Je voudrai dans un premier temps proposer une réflexion globale sur l'incidence possible du handicap physique invalidant.

J'essayerai de montrer ensuite, comment chez les Spina-Bifida et les IMC le handicap physique fait "corps" dans les modes d'expression.

Je proposerai enfin un essai de compréhension du langage au-delà des mots employés.

I QUELQUES REFLEXIONS GENERALES.

Un individu ne se définit pas par son handicap, mais par la manière dont lui et sa famille, gèrent (ou ne gèrent pas) ce qu'il doit vivre du fait de sa pathologie. Les enfants et adolescents dont j'ai parlé dans l'introduction, sont par certains côtés des multihandicapés et c'est surtout à leur propos que s'est developpée ma réflexion sur le poids du handicap sur l'organisation psychique, donc sur le langage. Dans ses formes graves, le handicap physique déborde obligatoirement sur l'affectif, car vivre avec un enfant différent est insupportable pour beaucoup de familles et sur le cognitif, car pour se mettre en place dans de bonnes conditions, celui-ci a besoin d'un équipement moteur sain. En l'absence de support affectif fiable le handicap physique peut presque créer des conditions expérimentales de déclenchement de psychose.

I-1 Influence possible du handicap sur le développement psychoaffectif et cognitif.

L'importance et l'étendue du handicap physique, surtout quand il s'agit d'une atteinte congénitale visible à la naissance, a une incidence certaine sur le développement psychoaffectif de l'enfant. Etant ce qui se donne en premier à voir, il crée un traumatisme. Nous savons tous à quel point une mère suffisamment bonne est importante dans la constitution de l'appareil psychique et dans la mise en place de l'accès au temps. Or l'annonce de la malformation risque de provoquer une carence de la fonction contenante maternelle. Ceci aura des conséquences sur la constitution du narcissisme de ces enfants. L'incapacité chez certains adolescents, de communiquer autrement que par du comportement est souvent la trace d'une dépression qu'ils portent et qui n'est pas la leur, mais celle de leur mère. Il faudra aussi tenir compte de l'impact des interventions chirurgicales sur le développement psychoaffectif. Elles sont source d'une anxiété diffuse, à cause de l'immobilisation, du vécu de douleur et d'abandon, et aussi de l'angoisse des parents, angoisse souvent non verbalisée. Dans le meilleur des cas, le handicap physique provoque une grande fragilité narcissique[4] [5]. Beaucoup, sont d'une avidité affective énorme qui s'exprime par le langage, mais aussi par le comportement. Ils sont dans une demande permanente. Dans d'autres cas, le handicap s'accompagne de troubles relationnels importants, évocateurs de psychose.

Le handicap physique congénital, peut quand il est massif et si la famille n'est pas là pour compenser, pour mettre des mots sur les expériences, et pour les susciter, provoquer un retard cognitif. En effet pour que l'intelligence sensori-motrice se mette en place, une certaine fiabilité est indispensable. L'assimilation et l'accommodation décrites par Piaget[6] supposent la présence d'un appareil moteur de bonne qualité. Sur le plan cognitif que se passe-t-il quand on a du mal à saisir, à attraper. Que se passe-t-il quand la verticalisation n'est possible que grâce à un appareillage. Que se passe-t-il quand la marche n'existe pas. Que se passe-t-il quand il est impossible d'exprimer physiquement le non en prenant la fuite ou en se sauvant. Comment se met en place la pulsion épistémophilique si dans le réel du corps ces expériences sont impossibles.

I-2 Langage et pathologies invalidantes: repérages de l'atteinte.

Dans des pathologies pourtant très lourdes, mais qui atteignent essentiellement les déplacements moteurs, arthrogryposes, malformations congénitales, myopathies ou atteintes spinales infantiles, maladies des os de verre, le handicap n'a pas dans ma pratique, d'impact direct sur le langage. D'ailleurs le handicap qui est parfois mis en évidence au-delà de la deuxième ou troisième année de la vie, aura un impact différent de l'atteinte congénitale visible à la naissance. Le schéma corporel a eu le temps de se mettre à sa place, et même s'il y a perte de certaines acquisitions: marche, propreté, les zones motrices étaient à l'origine en bon état. Il s'agit de conserver ou de retrouver quelque chose qui a existé, ce qui n'est pas le cas des handicaps ou la carence est là d'emblée. J'ai pu constater qu'avec certains adolescents myopathes, il n'y avait plus de langage: tout passait par la mère. Cela peut s'expliquer par le fait que celle-ci se sentant coupable de transmettre la mort, essaye de réparer en reprenant une relation très symbiotique, qui se traduit par cette absente surprenante de langage qui ne s'explique pas uniquement par l'atteinte musculaire.

Donc en général, ces enfants atteints de ces pathologies parlent normalement, développent des processus cognitifs normaux. D'une certaine manière les capacités intellectuelles et langagières compensent le handicap physique. Mais il y a des manières de parler, qui peuvent traduire l'impact du handicap. Certains enfants fonctionnent d'une manière très séductrice. Comme cela "on sera gentil avec eux et on ne leur fera pas de mal". D'autres sont très agressifs, ce qui est un moyen d'exprimer la violence qui les habitent, voire leur souffrance. D'une manière très générale, les affects sont vécus comme dangereux. Ils renvoient à des émotions très archaïques et souvent très violentes, qui ont beaucoup de mal à se dire. Le vécu induit par la souffrance, souffrance physique liée à certaines opérations, souffrance psychique de sentir différent et "infirme", passe en général plus dans le comportement que dans les mots. Ce sont ces anorexies, boulimies, oppositions, dépressions, voir certaines atteintes somatiques: escarres, ulcères, qui se déclenchent à certains moments particuliers de leur histoire qui expriment le mal à être dans ce corps là. C'est un autre langage, mais c'est souvent le leur.

Certaines difficultés dans les apprentissages scolaires montrent aussi l'impact du handicap, de la maladie. Peut-on facilement avoir accès au déroulement temporel, quand on est atteint d'une maladie évolutive, et quand son frère aîné est déjà mort de cette maladie? Peut-on définir des mots comme inondations, catastrophe, quand on vit avec une vessie que l'on ne contrôle pas? Est-il envisageable de se projeter dans le futur quand on ne sait rien de son espérance de vie? Je repense à la phrase donnée par Françoise, atteinte d'une maladie de Friedreich, à la planche blanche du T.A.T.: " Cela me fait penser à tout ce que je n'ai pas eu le temps de faire aujourd'hui"...

II ATTEINTE SOMATIQUE ET LANGAGE CHEZ LES SPINA-BIFIDA ET LES IMC.

Beaucoup d'enfants et d'adolescents porteurs d'un Spina-Bifida ou d'une Infirmité Motrice cérébrale, ont un langage particulier. Ceci ne peut-il pas en partie s'expliquer par le poids de l'atteinte.

Ils parlent, ils parlent bien. Ils tiennent une conversation ou ce qui y ressemble. Mais quand on parle avec eux, on se demande rapidement ce qu'il y a derrière. Il y a des stéréotypies, des répétitions, des oublis aussi. On pense à un vernis, à un placage. Ce langage de placage est un peu à l'image des appareils qu'ils sont amenés à porter en permanence. Ces appareils permettent une certaine illusion, ils maintiennent mais ils ne peuvent remplacer ce qui n'existe pas et n'existera jamais. Les répétitions ont valeur de réassurance, chez ces patients si dépendants. Les oublis traduisent peut-être la fuite permanente d'un certain interne, car beaucoup ne sont pas continents.

On se demande, même si ce sont les bons mots, par quelle représentation ils sont sous-tendus. On dirait des mots appris, répétés à bon escient, mais qui comme la marche, restent appris. Une patiente me disait un jour:" Ce week-end, je vais aller à Paris avec Maman, pour 'changer les idées' ". J'ai imaginé un magasin tout plein d'étagères, où l'on pourrait prendre des idées et les changer la semaine suivante, si elles ne plaisent pas. Cela m'a donné à penser, mais pour Christine, il s'agissait de reprendre une phrase banale, utilisée par sa mère. Ce type de langage évoque l'identification adhésive de Melzer[7] qui je cite, "conduit à l'imitation étroite de l'apparence et du comportement de surface de l'objet, beaucoup plus qu'à ses états ou attributs mentaux". On répète les phrases de l'autre, mais on n'en connaît ni le sens, ni les possibles représentations. En répétant ces phrases de l'autre, on croit devenir l'autre, on se donne une carapace, ce qui montre à quel point il est difficile d'exister comme sujet distinct. Ce langage est aussi un langage très mimétique[8], qui reverrait si on accepte les hypothèses de Tobie Nathan à un vécu permanent de peur, ce qui n'est pas tellement étonnant chez de tels enfants qui ont tant de mal à maîtriser le monde externe et le monde interne.

Ce livre récent de T.Nathan, rappelle que l'un des rôle de la culture est d'opérer une séparation, une fermeture. Quand ceci échoue, la folie n'est pas loin. Ceci pose alors la question de l'organisation psychique lorsqu'on fuit, lorsque les sphincters ne peuvent jouer leur rôle. Et c'est bien ce qui se passe avec ces pathologies.

Chez les enfants porteurs d'un Spina-Bifida, l'incontinence est totale. Ils fuient en permanence. Cette carence ne peut-elle être en partie responsable des troubles de la mémoire. Se retenir et retenir nécessitent d'avoir des spincters de bonne qualité, qui ne font pas défaut, ce qui n'est pas le cas de ces enfants là. Ils ne sont pas fermés. Le dedans, soit s'écoule tout seul, soit doit être cherché. Il est dangereux, car il peut rendre malade, très malade. Le risque d'infection est permanent. Alors comment s'opérera la fermeture qui doit permettre à l'enfant de se sentir séparé, autonome, si les zones somatiques, support des pulsions anales et urétrales, ne fonctionnent pas. Que l'on retrouve chez eux, des fantasmes d'explosion, d'inondation, de cataclysme, n'a rien d'étonnant. L'autonomie d'une manière générale passe par l'accès à la marche et par la maîtrise des sphincters. Que se passe-t-il quand ces deux possibilités n'existent pas? Que des troubles du comportements soient présents paraît cohérent avec une telle pathologie. Il est vraissemblable que la réponse à l'atteinte somatique, se situe avec ce langage en placage qui est un décalque de la marche qui est une imitation. Souvent il colle trop à la réalité. Il permet certes la communication. Il est opérationnel. C'est un langage en fait non symbolique. L'imitation est une phase temporaire du développement. Chez eux, il s'agit souvent d'une phase qui perdure beaucoup trop longtemps, surtout quand il existe une débilité et une absence de support affectif. L' imitation permet de se coller au désir supposé de l'autre, et de se donner une impression d'exister. Elle maintient la bidimensionalité qui de fait est la leur, car ils ne sont pas "verticaux", et ne permet pas l'accès à une véritable relation objectale.

Cette analyse peut être faite pour les enfants porteurs d'infirmités motrices d'origine cérébrale. Ils ne peuvent contrôler totalement leur musculature. Le contrôle leur échappe. Bien souvent cela part tout seul! De ce fait eux aussi connaissent le vécu de fuite. Ils connaissent aussi un important vécu d'insécurité du fait de ce difficile contrôle. Ceci se retrouve dans une manière de s'exprimer qui renvoie à une espèce de doute permanent, et par une certaine lenteur. Ils ont du mal à décoller, mais ils vivent avec des membres qui sont bien souvent comme collés l'un à l'autre. La lenteur de la pensée est un peu à l'image de leur marche, qui nécessite d'énormes efforts. La dissociation de certains gestes est presqu'impossible et certains semblent parallèlement avoir de grandes difficultés à fonctionner de manière analytique.

Je vais essayer d'illustrer un peu ceci.

Dominique a 10 ans, elle est au CE2. Elle souffre d'un Spina-Bifida. Elle parle très bien Elle demande à me voir parce que dit-elle, elle a besoin de parler. Une des ses caractéristiques à ce moment là est de semer ses affaires comme le petit Poucet. Un peu comme les urines, elle perd tout. Sur le plan scolaire, elle a du mal à retenir, mais l'un dans l'autre avec beaucoup de travail et une famille très étayante, elle y arrive. Le C.A.T.[9] passé à ce moment là me donne une étrange impression de placage. Pas le placage descriptif, mais des histoires plaquées, faites de morceaux collés les uns aux autres. Quand je repense maintenant à Dominique en rééducation, c'est cette image qui me vient: des morceaux collés les uns sur les autres. Sa hantise d'ailleurs au moment d'une intervention très lourde sur la colonne vertébrale, était que ça ne se recolle pas, que ça reste ouvert. Le Je est acquis, mais est-elle vraiment fermée, elle qui fuit de partout? Est-elle sujet, est-elle objet? J'ai l'impression qu'elle essaye de me faire plaisir en employant des mots des phrases entendues, mais où est-elle dans ces phrases toutes faites? Ce qu'elle me fait quand même entendre, c'est qu'on ne tient vraiment compte d'elle que lorsqu'il lui arrive du somatique. Alors elle se plaint d'être malade, d'avoir mal à la gorge, de ne pas fermer l'oeil de la nuit. Là sa mère va la voir et s'inquiète. Mais quand elle a envie de pleurer parce que cette maladie là, c'est trop dur, alors là, elle a l'impression de ne pas exister. Et tout un travail sera à faire pour l'aider quitter un pseudo langage médical, pour entrer dans le domaine de l'affect.

J'ai déjà parlé de Marie qui a aussi 10 ans. Mais elle est en centre depuis sa naissance car il n'y a pas d'étayage familial. A son arrivée, il y a trois ans, elle disait aux enfants qui l'ennuyaient :"je vais le dire à ma mère". Le je était donc acquis et la phrase parfaitement adaptée, ainsi que le ton. Mais il n'y avait pas de maman à laquelle elle puisse se référer. Elle est incapable de décrire physiquement son père et sa mère. Elle peut parfois dire, elle qui appelle beaucoup de parents" maman" à quel point cela la fait souffrir. Outre une peur massive de l'extérieur et une relative anorexie, elle ne pouvait pas tenir un crayon et ne laissait comme trace que des petits points! Elle était capable de coller des gommettes avec beaucoup de précision. Comme pour Dominique, bien sûr à un autre niveau, cela montrait le corps en morceau, le corps qui existe par secteurs, le corps morcelé. Le collage chez cette enfant en manque d'étayage a certainement valeur de réassurance. Actuellement, le vocabulaire devient de plus en plus riche, de mieux en mieux adapté. mais les différentes personnes qui travaillent avec elle ont l'impression qu'elle fonctionne en fonction de l'attente de ceux qui s'occupent d'elle. Les apprentissages existent, mais il n'y a pas de souplesse. Il n'y a pas de possibilité de transfert. La mémoire existe, mais il manque quelque chose, car le placage est omniprésent. Et tout cela se trouve aussi dans le corps de cette petite fille, qui tient debout grâce à des appareils. On se colle, on se conforme à l'autre. Les représentations sont loin. Il n'y a pas ou très peu de possibilité de jouer avec les mots. Donc Marie parle. Mais ce qu'elle dit, le dit-elle vraiment? Le pense-t-elle vraiment? A qui fait-elle plaisir en parlant? Est-elle sujet de ce qu'elle énonce? Quand sortira-t-elle de l'imitation?

Etienne est un jeune IMOC tétraplégique, en fauteuil électrique. Il ne sait ni lire ni écrire. Il est un presque pur produit institutionnel. Il s'exprime relativement bien, emploie le je quand il parle, mais vit dans un éternel présent. Il n'y a pas de repérage dans le temps, comme il n'y a pas de repérage dans son corps. Etienne a un certain vernis qui fait illusion et qui lui permet de se faire apprécier, car il est très gentil et très poli. Mais il a du mal à terminer ses phrases qui restent en suspend, comme d'ailleurs ses gestes. Si on le pousse à aller au bout de qu'il dit, on trouve de manière répétitive une thématique liée à l'abandon, à l'incapacité de faire ce qu'il voudrait. Il dit: "moi je ne mourrai pas, parce que ça rend ceux qui restent trop malheureux". Il a déjà trop perdu de personnes qu'il a aimées, alors à quoi bon vivre dans le passé et dans le futur? L'équipe qui vit avec lui, s'est rendu compte qu'il pouvait être très exigeant. Il est aussi perpétuellement insatisfait. Il s'agit là non plus de langage, mais d'un comportement qui malgré la pseudo-socialisation renvoie à des mécanismes d'envie et d'avidité très archaïques, donc à une intense souffrance. Souffrance de ne pas avoir un corps de valide, de ne pas avoir une famille, d'être seul. Mettre cela en mots est impossible, alors le comportement parle! Ce comportement provoque du rejet, mais lui, ne se sent-il pas rejeté depuis toujours, lui que sa mère a placé sous X à la naissance?

Christine, la jeune fille qui va à Paris, "changer les idées" , a beaucoup de mal à supporter les soignants qui lui parlent sur un ton autoritaire. Elle aussi utilise des phrases toutes faites. Elle a beaucoup de mal avec le je et le tu, car elle se parle à la seconde personne, dès qu'elle se sent mal dans sa peau, ce qui est fréquent. A certains moments, elle arrive à créer une véritable confusion, qui est certainement la sienne, car on ne sait plus à qui elle parle, qui est qui. En me parlant d'un soignant homme qui s'occupe d'elle, elle me dit "il me fait peur". Il faut aussi savoir que lorsque Christine a "peur", elle se met en colère, avec une participation importante de tout le corps et une composante très hystéroïde. En reprenant les choses avec elle, il a été possible de mettre en évidence une explication. Lorsque le soignant lui demande d'aller se laver, le timbre de sa voix est interprété par elle, comme trop fort, trop autoritaire. Cela provoque une première réaction de type dépressif: "Si je n'étais pas handicapée, je ne dépendrais pas de lui, et il ne parlerait pas sur ce ton là, comme à un chien". Ceci est suivi par "Ce n'est pas de ma faute si je suis handicapée". Le mouvement dépressif se transforme alors en colère: "Si je n'étais pas handicapée, il ne me parlerait pas comme ça et surtout je pourrais moi me mettre en colère après lui et le taper". Or chez Christine, qui a beaucoup de mal à utiliser le "je" quand elle parle d'elle-même, il existe une mauvaise différenciation de soi et de l'autre. Par un mouvement d'identification projective, c'est le soignant qui devient elle, c'est-à-dire celui qui est en colère et qui risque de la taper et qui donc lui fait peur. C'est dire que la compréhension de ces mouvements est difficile. Le relativement bon vocabulaire de Christine et son adaptation font que l'on a tendance à oublier que ces mécanismes archaïques restent très actifs chez elle, comme chez beaucoup d'adultes ou d'enfants très handicapés.

L' atteinte se donne à lire dans l'organisation mentale de ces patients. Je me suis jusqu'ici attachée au contenu manifeste du langage, je voudrai maintenant parler du contenu latent, de l'au-delà des mots.

III D'UNE POSSIBLE INTERPRETATION DU LANGAGE: LA TRANSMISSION DES EMOTIONS.

Quand on vit avec des patients lourdement handicapés, on est souvent frappé par le ton sur lequel ils s'expriment. On dirait que tout leur est du. Ils sont dans une quête affective que l'on peut certes entendre, mais qu'il est impossible de combler. Cette manière de parler est irritante. D'une certaine manière, il faudrait être à leur disposition 24 heures sur 24, accéder à leurs demandes, à leurs besoins. Je dis besoin et non désir, car bien souvent ils nous demandent d'être dans le faire pour, alors que nous avons envie d'être dans l'être avec. Ils provoquent en nous un certain désir de réparation, mais ils nous renvoient aussi à notre impuissance. Surtout, à certains moments ils nous font vivre la sensation très désagréable d'être non pas des personnes, mais des objets dont ils se servent de manière relativement indifférenciée.

Cette manière d'être peut s'expliquer d'au moins deux manières. La première, la plus évidente est de faire l'hypothèse que du fait de leurs limitations physiques, les personnes, qui s'occupent d'eux, n'ont pas donné en leur temps, les interdits fondamentaux qui structurent et organisent le petit d'homme. Je fais là référence à la notion d'interdit donné par ANZIEU[10] dans le "Moi-Peau" et à F.DOLTO[11] dans "L'image inconsciente du corps". Ces enfants qui souffrent d'autant de limitations, de restrictions, ont beaucoup de droits, trop de droits, voir tous les droits. L'humanisation n'a pas été vraiment faite. Le langage montre que d'une certaine manière, la relation d'objet n'est pas acquise. Nous n'existons pas en tant que personnes différenciées mais en tant qu'objets interchangeables, qui doivent impérativement répondre à la demande, sous peine de déclencher des réactions comportementales violentes, qui montrent à quel point la fragilité est considérable.

Mais il y a une autre manière de réagir à ce mode de communication. On peut dire qu'il s'agit de l'analyse du contre-transfert. Je préfère parler de l'analyse de l'identification projective. car elle permet, par le biais de l'analyse de sentiments et surtout émotions qu'ils font naître en nous, de sortir du vécu persécutif qu'ils induisent si facilement. A.CICCONE et M.LHOPITAL[12] rappellent que celle-ci peut se faire suivant trois modalités. Je retiendrai la première. "Elle consiste à communiquer avec l'autre en lui faisant vivre, ressentir des émotions et des sentiments insoutenables, incompréhensibles, irreprésentables pour soi -éléments bêta- de BION, et à être dépendants de l'appareil psychique, de l'appareil à penser de l'autre".

Beaucoup de ces enfants qui ont connu des hospitalisations très précoces, et qui n'ont pas eu de mère "suffisamment bonne", sont restés à leur insu à des modes de communication infra-verbaux, même si la parole est acquise. et a fortiori quand elle ne l'est pas. Quand ils déclenchent en nous certaines colères, certains sentiments de rejet, certains sentiments de haine, on peut penser que ces émotions là, ils les vivent en permanence. Ils essayent de s'en débarrasser, en les projetant en ceux qui voudront bien les entendre, et leur donner enfin du sens. La permanence de ces comportements, qui provoquent trop souvent du rejet, montre à quel point ils se sentent malgré tout ce qu'ils peuvent dire, peu aimés, mal aimés, abandonnés. Les patients se servent de nous à ce moment là, comme d'un "sein toilette".[13]. Ils mettent en nous ce qui les gêne, pour s'en débarrasser. Ce qu'ils attendent de nous, c'est que nous leur rendions ce "mauvais sang" cette "mauvaise nourriture" épurés, consommables, digestes. Il y a donc transmission de quelque chose de très important. Il est alors indispensable d'accepter de mettre des mots sur les émotions qu'ils nous font vivre et qui sont quelque chose de leur vécu passé ou présent, pour leur permettre de sortir de la répétition. Nous nous sentons comme des objets pour eux, mais eux, avec leur corps malade, leur corps souffrant, ont-ils toujours été considérés comme des sujets? Ne se sont-ils pas sentis bien des fois comme des objets que l'on soigne, que l'on répare, mais qui n'ont ni le droit, ni le pouvoir d'exprimer ce qu'ils ressentent.

Malika a 17 ans. Elle est incontinente et paraplégique. Seulement il s'agit chez elle d'un médulloblastome opéré et soigné à l'âge de deux ans. La marche, le langage et la propreté étaient donc acquis, ou en voie d'acquisition, ce qui est très différent. Malika se bat pour continuer à marcher, elle se bat pour être indépendante, elle se bat pour vivre. Elle a des capacités intellectuelles et là aussi elle se bat, malgré son retard bien compréhensible. Bien entendu il n'y a pas de difficultés avec la verbalisation. Seulement, parfois, comme un certain nombre de handicapés physiques elle a un ton très autoritaire, elle ne dit pas merci. Tout lui semble dû. Elle provoque un important rejet chez certains soignants qui ne la supportent pas. Elle est comme on dit difficile. Cela montre peut-être du caractère, mais on peut se demander s'il ne s'agit pas d'une communication inconsciente de quelque chose d'autre. Comment a-t-elle vécu ce qui lui est arrivé dans la petite enfance? Comment a-t-elle ressenti l'angoisse de sa mère? Comment a-t-elle réagi à la souffrance engendrée par l'opération, la chimiothérapie, la radiothérapie? Comment accepte-t-elle son handicap qui la rend dépendante? Chaque fois qu'elle est confrontée à quelque chose qu'elle revit comme un abandon, elle réagit en déclenchant une anorexie fantastique, qui affole tout le monde et qui au bout d'un certain temps, provoque encore le même rejet. Bien sûr elle parle, mais que faut-il entendre dans ce qu'elle dit? Il faut entendre ce que nous ressentons. Il faut peut-être entendre cette haine, qui est sa propre haine, sa propre souffrance.

Daniel est un jeune adulte I.M.C. qui parle. Les soignantes me disent lors d'une réunion d'équipe, qu'il a recommencé à les insulter. L'une d'entre elle parle alors du soupir poussé par ce jeune homme au moment du lever, et ajoute "ce soupir ça fait mal". Il est alors possible de reprendre cette phrase. Et si c'était cela que Daniel voulait nous faire comprendre? Et si lui aussi avait du mal à l'intérieur? Et là aussitôt il apparaît que la présence d'un autre résident a mis Daniel en difficulté. Il a perdu son statut de leader. Il est donc en souffrance mais il ne peut le dire autrement que par le comportement et une certaine verbalisation qui induit le rejet, mais qui renvoie bien au rejet qu'il vit lui-même. Bien entendu compte tenu de l'histoire de ce garçon, ceci réactive un vécu beaucoup plus archaïque et abandonnique.

Eva est une jeune fille qui a vécu dans sa petite enfance des mauvais traitements. Elle a appris à marcher à l'âge de 10 ans. Depuis son arrivée en France, malgré tous nos efforts elle n'a jamais pu vraiment articuler un mot. Je dois dire que j'ai toujours eu tendance à la regarder comme une enfant sauvage. Au cours d'une réunion, les monitrices me disent qu'au cours d'un repas, Eva a été contrariée et qu'elle s'est bloquée mais que ses yeux étaient en colère. Alors pour moi cela a pris sens. Compte tenu de son passé, elle n'a pas le droit d'agresser les adultes car ils sont trop puissants, trop dangereux. Alors elle bloque, elle inhibe le geste de taper. Elle devient littéralement catatonique. La colère passe dans le regard. Je m'entends dire: "le jour où Eva pourra exprimer son agressivité envers les adultes sans être bloqués, elle se mettra à parler". Quelques heures plus tard, son éducatrice m'appelle pour me dire qu' après mon départ, Eva qui n'a jamais pu articuler le moindre mot, a dit distinctement Maman, plusieurs fois. Elle a dit aussi "à moi". Il est certain qu'il s'est produit un phénomène de groupe qui a permis à Eva de se sentir sujet.

Cette écoute du comportement au-delà des mots, et des sentiments qu'il fait naître en nous, permet de sortir d'une relation persécuteur, persécuté que ces enfants induisent très facilement. Elle permet de les reconnaître sujets de ce qu'ils vivent, si handicapés soient-ils.

CONCLUSION.

Il y bien des années j'ai reçu un coup de téléphone affolé d'une de mes stagiaires. Elle avait passé plusieurs heures avec Alexis, qui venait d'être opéré du dos. Il lui avait dit qu'il voulait se jeter par la fenêtre tellement il ne se supportait pas, alors que du fait du Spina-bifida il ne ressentait presque rien. Il lui avait parlé de son désir permanent d'être adopté, lui qui avait perdu sa mère à 2 ans. Il lui avait parlé de sa souffrance, de son sentiment d'abandon. Et ma stagiaire ne savait comment faire face à cette demande d'aide, d'autant qu'il l'avait appelée Maman... Cette demande elle existe toujours. Mais le handicap physique, surtout lorsqu'il s'accompagne de quelque chose qui ressemble à de la débilité, nous rend trop facilement aveugle au sujet qui essaye de dire quelque chose. Le langage n'est pas que verbal. Et bien des comportements qui nous paraissent incompréhensibles sont là pour nous faire entendre la souffrance qu'il y a à être dans un corps pas comme les autres. La souffrance de souffrir sans que cela soir reconnu, parce que ce corps là est un corps où il y a de la mort, est une souffrance sans nom. A nous d'entendre le langage qu'ils utilisent pour qu'ils se sentent non pas des objets que l'on opère, que l'on redresse, mais des sujets capables de dire et d'être entendus. Je voudrai terminer sur la phrase d'un petit Farid qui était venu me voir une après-midi. Il est lui aussi porteur d'un Spina-Bifida. Le handicap intellectuel est massif, malgré une bonne verbalisation. Il a demandé à écouter mon magnétophone. C'était du piano, du Bach. Il m'a dit" C'est triste la musique, ça donne envie de pleurer". Et cette tristesse là, m'a donné une grande joie, car cela me montrait à quel point, malgré son handicap, il y avait de la vie en lui.

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BIBLIOGRAPHIE

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PIAGET J. 1964. Six études de psychologie. Paris, Folio, Essais.

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[1] Outre le Service de chirurgie pédiâtrique,de l'hôpital Saint Vincent de Paul, je travaille dans des Institutions qui s'occupent de patients lourdement handicapés.

[2]SPINA-BIFIDA ou MENINGOCELE. Pathologie visible à la naissance, due à une malformation du rachis. Dans ses formes graves elle nécessite un intervention dans les premiers jours de la vie pour éviter une hydrocéphalie et une possible méningite. Elle provoque une paraplégie donc une paralysie des membres inférieurs avec une absence de sensations et une incontinence.

[3]LESTANG C., BIED-CHARRETON X. 1992 Manifestations somatiques des émotions chez les polyhandicapés. In Ce corps qui parle. Modes d'expression, communication création. GERSE; Dardilly. pages 49-57

[4]BALINT M.1967 Le défaut fondamental P.B.P.n° 350

[5]LESTANG C. 1991 "Alors ça marche? " Thèse de doctorat, Paris V.

[6] PIAGET J. 1964. Six études de psychologie. Paris, Folio, Essais.

[7]MELTZER et coll. 1975.Adhesive identification, in Contemporary psychoanalysis, n° 11, New-York, White Psycho-Analysic Institut, p.289-310

[8] NATHAN T. L'influence qui guérit. paris Dunod 1993.

[9]Children Aperception Test. Test projectif pour enfants. Ceux-ci doivent élaborer une histoire, à partir d'une image.

[10]ANZIEU D. 1985. Le Moi-Peau. Paris, Dunod.

[11]DOLTO F. 1984 L'image inconsciente du corps. Paris seuil

[12]CICCONE A. et LHOPITAL M. 1991 Naissance à la vie psychique. Paris, Dunod.

[13]MELTZER D. 1967. Le processus psychanalytique, tr. fr., Paris, Payot, 1971

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