dimanche, décembre 17, 2017

"Mon enfant, tes péchés te sont pardonnés" Mc 2, 5

"Mon enfant, tes péchés te sont pardonnés" (Mc 2,5)

En travaillant pour notre groupe "Autour de la Bible" les deux premiers chapitres de l'évangile de Marc, je suis tombée en arrêt devant cette phrase, qui est différente de celle qu'on trouve dans l'évangile de Luc, qui lui emploie le mot homme.

Je n'avais jamais vraiment remarqué que dans l'évangile de Marc, quand Jésus s'adresse à cet homme qui vient littéralement de tomber du ciel pour se trouver à ses pieds, il l'appelle "mon enfant". Appeler quelqu'un mon enfant, quand il s'agit d'un pair, cela me semble très étonnant; mon ami, oui; mais mon enfant... Et en même temps je me dis que cet infirme, après un passage qui a dû être éprouvant pour lui et pour les porteurs, est aussi comme un enfant qui vient de sortir de l'utérus et qui se trouve à l'air libre: il était dehors, il est dedans, même si c'est l'inverse de ce qui se passe pour une naissance.

Pour en revenir à ce mot "enfant", il est important de se souvenir qu'en latin "l'infans" est celui qui ne parle pas, qui est parlé par les autres. Et cet homme couché, ce n'est pas lui qui demande: on ne l'entend pas, il ne dit rien, il est porté, il est transporté il est posé. C'est Jésus qui lui adresse d'abord une parole qui est dite au passif, puis une seconde qui est une sorte d'impératif, qui met en marche.  

Aux paroles de Jésus, et au grognement des pharisiens, répond le silence de cet homme, qui passe d'un statut de chose (il est porté sur son brancard) et semble ne rien demander, à un statut de sujet, puisqu'il se lève, prend son brancard et rentre chez lui; ce qui provoque d'ailleurs la louange de ceux qui voient ce miracle, les "petits"; contrairement aux savants qui refusent de voir en Jésus celui qui vient.. Dans l'évangile de Luc, c'est lui, l'infirme guéri, qui loue; et cela me semble important qu'il puisse chanter les merveilles de ce que Dieu a fait pour lui, grâce à Jésus et à sa parole.

On dit souvent que Dieu est à la fois père et mère. Il me semble que, par ce "mon enfant", Jésus montre toute l'affection, toute la sollicitude qui est en lui, surtout quand il voit la confiance qui lui est faite. Mais il se montre aussi sous un jour nouveau, il est aussi Père, comme le père du fils prodigue qui en accueillant le fils aîné qui râle, l'appelle "mon enfant", comme s'il voulait restaurer avec lui une relation de tendresse et non d'autorité.

Si on revient au texte, on voit donc que ce qui surprend Jésus c'est la foi, la confiance de ces hommes, confiance qui leur a fait franchir les obstacles (porte close et trop de monde); et cela le pousse à dire quelque chose de totalement inattendu, la rémission des péchés de l'homme couché, homme auquel il s'adresse en l'appelant "mon enfant". C'est aussi peut-être un moyen, dès le début de cet évangile, de faire comprendre que le Jésus qui guérit les infirmités et chasse les démons, est bien autre que celui qu'ils ont devant les yeux. Il est figure d'autorité, et de même qu'il chasse les esprits mauvais, il a le pouvoir lui "le Fils de l'homme", comme il le dira à la fin de cet épisode, de remettre les péchés, même si la première phrase dite par lui, est une phrase passive. 

Par ailleurs, l'infirmité, qu'elle soit de naissance ou la conséquence d'un accident, est considérée comme une punition liée au péché. Remettre le péché ou les péchés, car ici il y a un pluriel, c'est comme si toute l'histoire de cet homme (qui peut-être à un niveau symbolique peut aussi évoquer l'humanité paralysée par le mal qui est en elle et qui l'aveugle) était comme purifiée, nettoyée, lavée. Quand Jésus lui dit que ses péchés sont remis, peut-être que l'on peut entendre que la paralysie intérieure qui l'empêchait d'être un être de désir, est levée, qu'il ne porte plus le poids de ses péchés, qu'il est allégé et qu'il pourra se mettre debout. Jésus lui redonne sa place d'homme vivant.
Commencer par la rémission des péchés, c'est donner une "âme neuve" une âme qui vient de naître, à cet homme dont finalement nous ne savons rien, et qui ne dit pas un mot durant toute cette scène.


Je pense que si ce texte, que je connais presque par cœur, a eu cet impact en moi, c'est que j'ai certainement envie de m'entendre appeler comme cela par celui dont on va fêter la naissance, l'incarnation. Alors je crois que ce passage donné au début du temps de l'Avent, c'est un  cadeau pour moi qui aime tant laisser résonner les mots, voire un mot. Et pour le dire un peu autrement, si cet évangile doit être mon fil rouge du ce temps de l'Avent, j'ai aussi à demander à l'Esprit de creuser en moi un trou suffisamment large pour que le Seigneur puisse passer de ma tête dans mon cœur, de manière à pouvoir rendre témoignage à la Lumière.


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