Luc 12, 13: "Maître, dis à
mon frère de partager avec moi notre héritage".
Le Prêtre qui commentait cet
évangile (Luc 12, 13-21), qui se termine par une parabole expliquant que l'on n'emporte pas les biens terrestres avec soi dans la mort, nous a dit que s'il s'écoutait il
ne ferait une homélie qu'une fois par mois. En effet il pense que pour
comprendre une parabole il faut rester dessus un bon mois pour qu'elle prenne sens
(pour lui) et donc qu'il puisse en parler.
Du coup il n'a pas ou peu commenté
cette parabole, mais proposé plutôt une manière de laisser le texte prendre corps en
soi. Il a juste fait un lien avec le chapitre 3 de l'Apocalypse; je crois
qu'il s'agit du verset qui s'adresse à l'église de Sardes: "Je sais que ton nom est celui d'un vivant, mais tu es mort", mais mis à part la notion de
se croire en vie quand on a des richesses et être mort parce qu'on ne s'occupe
que de soi, je n'ai pas trop compris le lien.
Par contre un autre lien s'est
présenté pour moi. Car la petite phrase du début du texte:
"demande à mon frère de…",
s'est mise à résonner avec autre phrase du même ordre et rapportée par le même
évangéliste: " dis à ma sœur de... ".
Et dans les deux cas, Jésus se
centre sur celui ou celle qui a fait la demande, comme pour le faire aller plus
loin. En aucun cas, il ne prend parti. Il ne parle pas à Marie, il ne parle
pas au frère, il ne fonctionne pas à l'autorité, il ne s'attribue pas non plus
la moindre autorité, lui qui pourtant commande aux éléments.
Par ailleurs, mais cela c'est mon
imaginaire, je peux aussi supposer que si Jésus est en train de parler, ce qui
est le cas dans la maison de Marthe, mais aussi le cas du chapitre 12, puisque
Jésus s'adresse à la foule, peut-être n'aime-t-il pas qu'on l'interrompe quand
il est en train de parler. Ce qui me fait penser que la réponse donnée ne l'est
pas forcément sur un ton très agréable, même si Jésus par la suite reprend son
enseignement à la foule à l'aide d'une parabole.
Peut-être que le projet de Jésus
est de permettre aux demandeurs, qui quelque part se sentent lésés, de leur
faire comprendre qu'ils n'ont pas à l'utiliser lui pour obtenir quelque chose de
l'autre. Qu'il ne sert pas d'intermédiaire, que personne ne peut se servir de
lui et de son autorité pour obtenir quelque chose.
Car la place de Marie est
bien aux pieds de Jésus, et pour l'héritage peut-être vaut il mieux que le frère
aîné le garde, puisque d'après la parabole - pardon pour l'expression - cet
héritage il ne l'emportera pas au Paradis. Et à quoi bon être riche si c'est
pour mourir sans pouvoir profiter de sa richesse? Il y a des soucis liés à la
richesse, et si elle vous coupe des autres (ce qui se passe dans la parabole du riche et de Lazare) et donc vous exclut de
la vie éternelle, alors à quoi bon.
Peut-être faut-il laisser faire
l'autre, accepter que les choses ne se passent pas comme on le voudrait. Et je
pense que c'est important, car c'est sortir de la maîtrise, du contrôle de
l'autre, de la mainmise sur lui.
Peut-être que l'on peut demander
des choses pour soi à Jésus, on peut demander d'accepter des situations qui
peuvent nous énerver, nous déranger, mais que nous n'avons pas à lui demander
qu'il "oblige" l'autre à changer, parce que cela nous arrange. Et
cela peut nous aider à regarder autrement ce qui se passe autour de nous dans
notre relation à l'autre.
Je pense que le refus de Jésus de
prendre partie est à prendre dans une optique de guérison. Marthe, comme cet
homme sorti du milieu de la foule, sont soit jaloux, soit envieux, soit en
colère. Et de cela, Jésus veut les guérir. Il leur fait comprendre qu'ils
doivent, eux, changer.
Mais je pense que lorsqu'on est
victime, au sens fort, de quelqu'un, il peut-être plus que légitime de demander à
Jésus (ou à l'Esprit Saint) de faire une brèche dans le cœur de l'autre, pour
que cet autre ouvre les yeux et se rende compte du mal qu'il est en train de
faire. Je pense aussi que ces demandes là doivent être des demandes collectives, parce qu'elles touchent à
l'expulsion du mal.
Mais ce texte finalement me
permet de comprendre que si j'en veux à quelqu'un, fut-il ou non de ma famille,
Jésus ne fera pas de miracle à ma place, il ne changera pas le cœur de l'autre,
mais il m'aidera à changer mon cœur, et de ce fait à sortir de la position de
victime; et c'est cela qui aujourd'hui est important pour moi.
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