Luc 1, 26-38. Annonciation.
J'avais commencé à me laisser "bercer" par le texte de l'Annonciation, avec l'idée de laisser une nouvelle fois, Marie raconter ce qui s'était passé pour elle ce jour; ce jour où, par son oui, des cieux nouveaux et une terre nouvelle sont advenus, même si les yeux humains ne pouvaient pas le voir. Je lui avais déjà laissé raconter en 2009 https://giboulee.blogspot.com/2009/12/lannonciation.html , et plus récemment j'avais laissé l'Ange Gabriel raconter ce qui s'était passé avec les différentes personnes que le très Haut lui avait demandé de rencontrer (Zacharie, Marie, Joseph)
https://giboulee.blogspot.com/2018/12/temps-de-lavent-lange-gabriel.html
Et il m'a brusquement semblé que l'annonce de la grossesse d'Elisabeth avait été le signe dont Marie avait besoin. Je ne peux pas justifier cela, mais les signes sont importants, et ils nécessitent aussi la foi. Alors j'ai su que je bâtirai cette histoire un peu autour de cela. Car quand on y pense, Marie venait d'entendre quelque chose d'impensable, de fou, et ce quelque chose de fou s'est déjà réalisé en cette vieille femme stérile, qui n'ose pas croire vraiment à la vie qui est en elle.
J'ai toujours pensé que c'est la présence de Marie, avec la vie qui est en elle, qui donne vraiment vie à cet enfant qui certes était bien dans le ventre d'Elisabeth mais qui était immobile. Le tressaillement dont parle Luc, je l'ai toujours ressenti comme si l'enfant se mettait enfin à vivre, à se mouvoir, à devenir vraiment un bébé à naître pour sa mère.
C'est d'ailleurs pour cette raison que j'ai eu envie d'encadrer le texte de l'Annonciation, d'une part par les versets 24 et 25 qui disent qu'Elisabeth garde le secret sur cette naissance - comme si malgré ce qu'elle dit "sur cette honte qui a été lavée" elle n'est pas sûre que cet enfant vivra - et, d'autre part, par les versets 49-50, qui mentionnent l'entrée de Marie chez Elisabeth et qui renvoient à ce qui s'est passé avec l'entrée de l'Ange dans sa propre demeure: la manifestation de l'Esprit Saint.
Voici donc le texte, dans la version AELF.
24 Quelque temps plus tard, sa femme Élisabeth conçut un enfant. Pendant cinq mois, elle garda le secret. Elle se disait :
25 « Voilà ce que le Seigneur a fait pour moi, en ces jours où il a posé son regard pour effacer ce qui était ma honte devant les hommes. »
26 Le sixième mois, l’ange Gabriel fut envoyé par Dieu dans une ville de Galilée appelée Nazareth,
27 à une jeune fille vierge, accordée en mariage à un homme de la maison de David, appelé Joseph ; et le nom de la jeune fille était Marie.
Tout est posé là. Un ange, une ville, une jeune fille promise, deux prénoms, trois prénoms: Gabriel, Marie, Joseph et même quatre: David. C'est par Joseph que se fait l'appartenance à la maison de David;
28 L’ange entra chez elle, et dit : « Je te salue, Comblée-de-grâce, le Seigneur est avec toi. »
29 À cette parole, elle fut toute bouleversée, et elle se demandait ce que pouvait signifier cette salutation.
Chaque fois que je lis ce début de verset, je repense à l'Ange du Seigneur qui était venu et s'était assis sous un térébinthe, et qui s'était adressé à Gédéon, occupé à battre du blé dans un pressoir pour le soustraire aux Madianites (Jg 6, 11-12): "Le Seigneur est avec toi vaillant guerrier!" Et le dialogue qui s'instaure Gédéon et l'Ange, ne montre pas de crainte chez Gédéon - alors qu'il y en a chez Marie - mais un étonnement intense lié au qualificatif: "vaillant guerrier" d'un côté; et "comblée-de grâces" de l'autre... Comment le Très Haut peut-il voir en Gédéon, le petit dernier d'un clan sans notoriété, celui qui sauvera son peuple de Madian? Comment le Très Haut peut-il voir en Marie celle qui portera le sauveur d'Israël?
30 L’ange lui dit alors : « Sois sans crainte, Marie, car tu as trouvé grâce auprès de Dieu.
31 Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils ; tu lui donneras le nom de Jésus.
32 Il sera grand, il sera appelé Fils du Très-Haut ; le Seigneur Dieu lui donnera le trône de David son père ;
33 il régnera pour toujours sur la maison de Jacob, et son règne n’aura pas de fin. »
Si je me souviens bien, cela correspond point par point au livre de Daniel 7,14: "Et il lui fut donné domination, gloire et royauté; tous les peuples, toutes les nations et les gens de toutes langues le servirent".
"Sa domination est une domination éternelle, qui ne passera pas, et sa royauté, une royauté qui ne sera pas détruite."
34 Marie dit à l’ange : « Comment cela va-t-il se faire puisque je ne connais pas d’homme ? »
35 L’ange lui répondit : « L’Esprit Saint viendra sur toi, et la puissance du Très-Haut te prendra sous son ombre ; c’est pourquoi celui qui va naître sera saint, il sera appelé Fils de Dieu.
Le questionnement de Marie, on le comprend. Il ne met pas en doute la parole de l'ange, contrairement à ce qui se passe pour Zacharie; elle demande une sorte de dévoilement. Et la réponse de l'Ange est bien un dévoilement, puisqu'il annonce quelque chose de mystérieux, mais qui est présence de Dieu.
36 Or voici que, dans sa vieillesse, Élisabeth, ta parente, a conçu, elle aussi, un fils et en est à son sixième mois, alors qu’on l’appelait la femme stérile.
37 Car rien n’est impossible à Dieu. »
Voilà le Signe, donné à la jeune fille.
38 Marie dit alors : « Voici la servante du Seigneur ; que tout m’advienne selon ta parole. » Alors l’ange la quitta.
L'ange la quitte, son travail est accompli, il peut rentrer à la maison.
39 En ces jours-là, Marie se mit en route et se rendit avec empressement vers la région montagneuse, dans une ville de Judée.
40 Elle entra dans la maison de Zacharie et salua Élisabeth.
Marie prend le relais en allant visiter sa cousine et en entrant dans la maison de celle-ci et en la saluant, de même que l'Ange entré chez elle et l'avait saluée. Elle aussi va en quelque sorte permettre la vie, chez l'enfant à naître.
Je me suis aussi demandée si les trois "voici" du texte ne pouvaient pas servir de piliers à la lecture, qui permet de voir et de contempler.
Le premier voici, c'est celui de l'ange: voici que l'Ange Gabriel, qui en quelque sorte donne sa feuille de route à la jeune fille qui est là, devant lui. Il y a la triade classique: engendrer, enfanter nommer. Marie va être mère, elle va enfanter celui qui sera le Fils du Très Haut; bref celui qui incarne ce qui est dit de lui par Daniel, mais qui est le Messie de Dieu.
Le second c'est ce qui précède le signe donné: voici que dans sa vieillesse ta cousine Élisabeth a conçu, qui pour moi renvoie au texte d'Isaïe, Voici que la jeune fille est enceinte. Is 7, 14. Marie est la jeune fille qui est enceinte, et le signe pour elle, c'est Elisabeth.
Le troisième c'est le plus connu: c'est la réponse de Marie, Voici la servante du Seigneur qu'il me soit fait selon ta parole.
Et cela c'est un modèle pour nous.
Marie raconte.
En ce début d'après-midi, j'étais au frais dans la maison. J'avais ramené de l'eau de la fontaine qui est peu éloignée de chez nous et j'étais heureuse. Je pensais à Joseph, cet homme à qui j'ai été accordée en mariage et qui est descendant de David.
Les volets étaient fermés, car il faisait déjà chaud. Tout à coup, j'ai ressenti une présence. J'ai levé les yeux, et j'ai vu un être qui me paraissait éclairé de l'intérieur, d'une lumière très douce. Sa voix était à l'image de tout ce qui émanait de lui. Il m'a saluée en m'appelant "comblée de grâces". Jamais personne n'aurait pu me dire cela. c'était presque un nom d'amour. Quand il a ajouté, le Seigneur est avec toi, j'ai pensé à Gédéon le Juge, qui avait été abordé aussi par l'Ange du Seigneur, il y a bien des siècles. A lui, il avait été dit "Salut à toi vaillant guerrier, le Seigneur est avec toi. Etait ce le même ange qui venait me parler? Mais malgré tout, en moi montait une crainte.
Il m'a dit de ne pas avoir peur, que j'avais trouvé grâce auprès de Seigneur, que j'allais concevoir et enfanter un fils et que je lui donnerai le nom de Jésus. Moi, j'aurais un fils, moi le le mettrai au monde, moi je lui donnerai son nom, un nom voulu par Très Haut. J'étais abasourdie, j'entendais bien ce qu'il disait.
J'entendais qu'il disait que cet enfant sera grand, qu'il sera appelé Fils du Très Haut, qu'il aura le trône de David son père et qu'il règnera pour les siècles. Mais les mots voletaient un peu autour de moi. J'entendais, mais cela me dépassait.
C'était comme si un plan avait été prévu pour moi, mais comment cela pouvait-il se réaliser puisque j'étais une simple jeune fille de Nazareth promise à un homme. Cela me semblait impossible, impensable.
Seulement, alors que je me sentais perdue, cet être de lumière m'a annoncé quelque chose qui a fait danser mon cœur de joie.
Il m'a dit que ma cousine Élisabeth, cette femme qui est un modèle pour moi, mais qui est stérile, ce qui fut une véritable honte pour elle et pour son mari, le prêtre Zacharie, allait être mère.
Mais il ne s'est pas contenté de dire cela, il a dit "Voici que ta cousine Élisabeth, a conçu un fils dans sa vieillesse" et ce "voici" a fait écho à un autre voici, prononcé par le prophète Isaïe: Voici que la jeune fille est enceinte. Elle enfantera un fils et elle lui donnera le nom d'Emmanuel. Et j'ai su que cette jeune fille, c'était moi! N'est-ce pas le rêve de toutes les jeunes filles en Israël? Être la mère de celui qui sauvera notre peuple. C'était pour moi un signe, mon signe. Je pouvais avoir une confiance totale.
Alors, mon cœur s'est mis à sauter de joie, et quelque chose s'est passé en moi. L'ange avait dit que l'Esprit Saint viendrait sur moi et que le Très Haut me prendrait sous ombre, et c'est ce qui s'est passé. Ce que l'ange avait dit prenait corps en moi. Oui, rien n'est impossible à Dieu.
Moi qui désirais le plus au monde être la servante du Seigneur, être son esclave, cela se réalisait. Immense était ma joie, immense était mon désir d'aller trouver ma cousine pour partager avec elle ma joie. Et je me suis mise en route.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire