dimanche, mars 20, 2022

Mat 1,16 18-21 24a. Ne crains pas de prendre chez toi Marie ton épouse.

 


Fête de Saint Joseph. L'évangile proposé est un évangile bien connu (Mt 1,16), déjà entendu pendant le temps de l'Avent. J'ai raconté comment l'Ange Gabriel pouvait parler de sa rencontre avec Joseph https://giboulee.blogspot.com/2018/12/temps-de-lavent-lange-gabriel.html, mais aussi j'ai écrit en septembre à l'occasion de la Nativité de la Vierge https://giboulee.blogspot.com/2018/09/mt-1-18-marie-fut-accordee-joseph.html.

 

Comme souvent j'ai essayé de relire ce texte, comme si c'était une première fois.

 

16 Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle fut engendré Jésus, que l’on appelle Christ.

18 Or, voici comment fut engendré Jésus Christ : Marie, sa mère, avait été accordée en mariage à Joseph ; avant qu’ils aient habité ensemble, elle fut enceinte par l’action de l’Esprit Saint.

19 Joseph, son époux, qui était un homme juste, et ne voulait pas la dénoncer publiquement, décida de la renvoyer en secret.

20 Comme il avait formé ce projet, voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : « Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit Saint ; 

21elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés. »

 24aQuand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit.


Bien entendu il y a des trous, puisque le verset 16 termine la généalogie et qu'il manque le commentaire sur le nombre de générations. il manque également les versets 22-23, avec l'autre prénom de l'enfant à venir: Emmanuel - mais je dois reconnaître que c'est peut-être plus facile; et la fin du verset 24. 


J'ai essayé dans la mesure de mon possible de ne pas me servir du tout ce que l'évangile de Luc raconte sur Marie, la jeune fille de Nazareth. 

 

Ce qui m'a frappé, c'est que le texte est comme structuré autour des prénoms. Joseph revient 5 fois et tout tourne autour de lui. 


Marie ne revient que trois fois, mais c'est presque sur un mode mineur. Il en est de même du nom que portera l'enfant: deux fois. 


Joseph est nommé fils de David, et c'est la suite du récit matthéen qui parlera de Bethléem, lors de la venue des mages. De Marie, on ne sait rien, sauf qu'elle avait été accordée en mariage. Mariage de raison? Mariage de rencontre comme jadis la rencontre de Jacob avec Rachel? On ne sait pas; on peut tout imaginer. 

 

On sait enfin que Joseph est un homme juste. Certains commentateurs pensent que c'est cette qualité de Joseph qui le fait penser à renvoyer sa future épouse, car il se sent indigne d'être le père choisi pour élever cet enfant qui est don de l'Esprit. Je trouve cela très beau, mais j'aime pour ma part à sentir le trouble qui a pu prendre cet homme, qui voit ses espoirs de fonder une famille s'évanouir. Peut-être apprécie-t-il la franchise de sa future femme, mais quand même. 

 

Alors j'ai laissé Joseph raconter.

 

Joseph raconte.

 

 

Mon prénom c'est Joseph; et celui qui est mon guide, c'est ce Joseph des temps anciens, ce Joseph qui était devenu le bras droit de Pharaon en terre d'Égypte; et qui lors d'une famine avait permis à son père Jacob (mon père porte le même prénom) et à sa famille de s'établir sur des terres fertiles et de devenir un véritable peuple, le peuple de la lignée des fils de Jacob. Aujourd'hui, comme je suis un descendant de la tribu de Juda, et donc du roi David, je réside à Bethléem, la ville du pain. 

 

Je suis le fiancé d'une belle jeune fille. Elle s'appelle Myriam, ses parents sont morts, et elle a peu de famille. Notre mariage doit avoir lieu dans les mois qui viennent, mais la date n'a pas encore été fixée; nous apprenons à nous connaître et plus je la vois et plus elle me ravit. Elle est instruite, elle connaît bien les écritures et comme moi, elle attend la venue du Messie, celui qui doit sauver notre peuple. 

 

Il me semblait que tout allait pour le mieux, sauf qu'hier elle est venue me voir, seule, ce qui n'est pas la coutume. Elle m'a souri, elle m'a regardé, et a baissé la tête et elle m'a dit qu'elle attendait un enfant, et que cet enfant était engendré par le Souffle du très Haut. J'ai entendu les mots qu'elle disait, j'ai eu l'impression que tout s'effondrait. Je n'ai pas posé de questions. J'avais l'impression qu'elle s'attendait à ce que je ne dise rien.  Elle m'a regardé avec son beau regard, son doux regard, et elle est partie, la tête haute. Je l'aurais imaginée honteuse, mais pas du tout. Cela m'a surpris.

 

Comme je l'ai dit, j'étais abasourdi, désemparé, moi un homme fait, un homme avec un métier, un beau métier d'ailleurs. Je construis des maisons et ma maison à moi, la maison que je voulais fonder, elle s'effondre avant même d'avoir vu le jour. 

 

Je n'ai rien pu avaler de la journée. Je ne savais que faire. La prendre, la renvoyer? Je ne savais pas. Nous ne sommes pas mariés, alors je ne peux rien faire de légal, mais je vais la renvoyer, le plus discrètement possible, qu'elle quitte ce village, qu'elle aille ailleurs, qu'elle donne naissance à cet enfant et que personne ici ne la montre du doigt. Je les connais les gens d'ici, ils jugent si vite; et je ne voudrais pas qu'elle prenne une pierre. 

 

Et en même remps, je me dis que si cet enfant est ce qu'elle dit, qui suis-je pour refuser de m'en occuper? 

 

Elle est orpheline Myriam, et Dieu ne dit-il pas qu'il faut prendre soin des orphelins? Je ne sais pas, je ne sais plus. 


J'ai imploré le Très Haut de me guider, je l'ai loué parce que je sais que toute épreuve a un sens pour lui, et je me suis couché en essayant de trouver le sommeil.

 

Tout à coup, j'ai eu l'impression que je n'étais plus seul; il y avait une présence. 

 

Et j'étais sûr, dans ce sommeil qui en était un sans en être un, que c'était l'Ange du Seigneur. Je voulais bouger, mais je ne pouvais pas. Puis j'ai entendu une voix qui me disait: "Joseph, ne crains pas de prendre chez toi, Myriam ton épouse, car l'enfant qui est engendré en elle, vient de l'Esprit Saint". 

Il y a eu un petit temps de silence, et une paix est venue en moi. Ma douce fiancée avait dit vrai, l'enfant était bien engendré en elle, non par un autre, mais par l'Esprit du très Haut, cet esprit qui planait sur les eaux et qui a permis à tout ce que je connais d'exister. 

 

Puis il a repris, et il a dit que cet enfant serait un garçon, et que moi Joseph, je lui donnerais le nom de Jésus, ce nom qui signifie "Dieu sauve", parce que m'a-t-il dit, il sauvera le peuple de ses péchés. 

 

Cette phrase a fini de me rassurer car je sais au fond de moi que le Messie, qui sera issu de ma lignée, la lignée de David, ne sera pas un simple roi, qui viendrait renverser un pouvoir existant, mais qu'il aurait une autre fonction, autrement plus importante, vraie, plus digne d'un roi berger, nous faire devenir un peuple saint en nous sauvant de nos péchés. 

 

Je me suis rendu compte que la Présence m'avait quitté, je me suis réveillé, mais je dois dire que maintenant j'étais bien, je savais ce que je devais faire. Myriam sera mon épouse et cet enfant, certes je l'élèverai comme s'il était le mien, je lui transmettai tout ce qu'un père peut transmettre à son fils; mais aussi je veillerai sur lui comme un berger veille sur un agneau sans pareil, un agneau qui portera le péché du monde et qui l'en délivrera. 

 
Que ma joie était grande quand le jour s'est levé et quand j'ai dit les premières prières pour accueillir ce jour nouveau, ce jour qui était pour moi comme un premier jour. 

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