samedi, février 09, 2019

L'appel des premiers disciples - Lc 5,1-11

Dans l'évangile de Luc, Jésus est loin d'être un inconnu pour Pierre, puisqu'il a séjourné dans la maison de ce dernier et a guéri sa belle-mère (Lc 4,38); mais curieusement le récit de ce qu'on appelle "la pêche miraculeuse" semble ne pas avoir de relation avec ce vécu plus intimiste. Peut-être ne faut il pas chercher de réelle chronologie dans ces récits. Mais on sait que Luc, bien souvent, quand il veut mettre en évidence un personnage, le mentionne d'abord un peu comme en passant.

Là il se joue quelque chose d'autre: Jésus désormais ne sera plus seul. Cette pêche figure ce qui se passera après la Pentecôte (où trois mille personnes reçoivent le baptême); elle annonce le début de l'Eglise.

Mais je n'ai pensé à cela qu'après avoir laissé Pierre, ou plutôt Simon, raconter les événements.

Pierre raconte.

Je n'en reviens pas, je n'en suis pas encore revenu. Avec André, on avait passé la nuit sur le lac; et pas un seul poisson dans les filets. Enfin, si peu que ce n'est pas la peine d'en parler. On était découragés; et on a comme d'habitude lavé et plié les filets pour la prochaine pêche. C'est là qu'on a vu Jésus, cet homme qui parle de Dieu comme personne, en tous cas pas comme les scribes. 

J'ai eu l'impression qu'il cherchait quelque chose. Nos regards se sont croisés. Il est monté dans ma barque sans rien demander, et m'a dit de la pousser dans l'eau. C'est ce que j'ai fait. Il s'est alors assis, moi je veillais à ce que la barque ne bouge pas, et il a parlé. Je ne sais pas trop de quoi il parlait, j'étais fasciné par cet homme, car il se dégageait de lui une sorte de force. 

Puis il m'a dit de jeter les filets. Là j'ai pensé qu'il était un peu fou. On ne pêche pas dans la journée, mais ça, lui il ne devait pas le savoir. En fait j'avais eu l'impression qu'il voulait me dire merci de lui avoir prêté ma barque. Alors avec Jean, on a sauté dans l'eau, on est allé reprendre les filets, et on est parti avec lui là où sait qu'il peut y avoir du poisson. Et du poisson, on en a pris. J'avais l'impression que les poissons se jetaient dans les mailles, je voyais leur masse argentée qui allait vers mes filets. Je ne comprenais pas. Et quand on a voulu remonter les filets, ils étaient tellement pleins, tellement lourds qu'on a fait de grands signes à Jacques et Jean, qui sont venus avec leur barque et qui nous ont aidés. 

Les deux barques étaient tellement chargées qu'elles enfonçaient. 

Une sorte de panique m'est tombée dessus. J'avais juste prêté ma barque, je n'avais rien demandé, et voilà que la barque était pleine, trop pleine. J'ai eu peur du pouvoir de cet homme, et en même temps quelque chose se passait en moi, sans que je puisse dire quoi. J'ai dit une phrase bizarre, qui ne me ressemble pas, je lui ai dit de partir, de s'éloigner de moi, parce que je ne méritais pas un tel cadeau, parce que je me sentais tellement petit, tellement insignifiant. 

Mais lui, il m'a dit de ne pas craindre, et qu'il ferait de moi un pêcheur d'hommes. Là je ne sais pas ce qu'il veut dire, mais je sais que je vais le suivre. 

Quand nous sommes arrivés à terre, tous les quatre nous l'avons suivi. Et lui qui était seul, il ne l'était plus. Il nous avait; il nous avait sortis de notre lac, de nos habitudes, et nous allions être avec lui. 

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