Le levain des pharisiens et des hérodiens - Mc 8, 14-21
Un disciple raconte.
On avait débarqué à Dalmanoutha.
Juste avant, le Maître avait à nouveau donné à manger à une foule d'hommes et de femmes venus pour écouter son enseignement et demander des guérisons. Il y avait eu des restes, mais on était partis un peu dans la hâte, parce que Jésus avait peur que ces hommes et ces femmes ne fassent de lui leur chef pour aller réclamer justice aux Romains, et on a tout laissé sur place ou presque.
Et là, à peine avions nous mis pied à terre, qu'une fois de plus les pharisiens nous sont tombés dessus; enfin ils sont tombés sur Jésus… Ils voulaient un signe venant du ciel; comme si ce pain donné dans le désert, même s'il ne tombait pas du ciel comme la manne, ce n'était pas un signe de la présence du royaume. Jésus manifestement en a eu assez, et les a envoyés bouler. Il a juste répondu que pour le signe, ils pouvaient se brosser. Et je ne sais plus s'il a haussé les épaules, mais avant de répondre il a soupiré très longuement, et moi j'avais l'impression que c'était comme un sanglot, sanglot devant leur incompréhension, sanglot devant leurs cœurs qui ne s'ouvraient pas.
Et je pensais à ce qu'il avait dit à cet homme qui n'avait jamais entendu de sa vie, qui émettait des sons qui ne ressemblaient à rien, et qu'il avait guéri dans le territoire de la Décapole. Il avait dit à cet homme "ephata": ouvre toi. Et sa langue s'était déliée, ses oreilles s'étaient ouvertes, et il était devenu un homme nouveau, un homme ouvert aux autres. Il était sorti de son enfermement. Eux, ils sont dans leur enfermement, ils s'y trouvent bien et ils ne veulent pas en sortir. Quel miracle mon Rabbi devra–t-il faire pour qu'ils s'ouvrent?
Alors, on est repartis très vite. Du coup, pas le temps de faire de provisions. Et dans la barque, on a commencé à grogner. Normalement l'un d'entre nous aurait dû prévoir, et il ne l'avait pas fait. On avait juste un pain, et un pain ce n'est pas grand chose. Et en mer, on ne sait jamais ce qui peut se passer. On sait bien que Jésus est capable de faire taire une tempête, mais bon, il l'a fait une fois, est-ce qu'il le refera à chaque fois? Bref, on ne pensait qu'à ça.
Et voilà que lui, qui était comme d'habitude sur le coussin, il se met à nous parler. Il nous dit de nous méfier du levain des pharisiens et des Hérodiens. D'accord, parler de levain c'est parler de pain, et du pain on n'en a pas. Alors on n'a pas écouté, d'autant qu'on ne comprenait pas trop. Je pense qu'il parlait de ce que les pharisiens et les Hérodiens, qui veulent le faire mourir et ne s'en cachent pas, racontent sur lui: ces paroles de médisance. Un peu comme s'il avait peur que nous aussi nous finissions par y croire.
Il a bien vu qu'on était ailleurs. Et là, il a été dur envers nous. Je dirais qu'il nous a engueulés; il nous a dit que nous avions le cœur dur, que nous étions aveugles et sourds. Il nous a rappelé ces corbeilles pleines des restes… On a eu un peu honte… C'est vrai que tant qu'il est avec nous, nous devrions lui faire confiance, savoir que nous ne manquerons de rien. Après tout s'il a, avec 5 pains donné à manger pour 4000 personnes, avec un pain il peut bien faire pareil, mais en fait on était trop en colère contre Barthélémy qui n'avait pas prévu de prendre ce qu'il faut.
Oui, c'est vrai qu'on est bouché comme les pharisiens, seulement nous, on l'aime. Là où il ira, nous irons. Et même si on ne comprend pas, on ira - pour lui et avec lui - au bout du monde, pour que l'Amour de son Père, qui est notre Père, soit révélé.
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