samedi, août 17, 2024

JEAN 6,52-58 20°DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE. AOÛT 2024

 

JEAN 6,52-58. discours dans la synagogue de Capharnaüm, suite.

 

  Si on lit le texte du livre des Proverbes, pour accompagner le texte johannique, on pourrait dire que Jésus est la Sagesse de Dieu. Mais une sagesse qui certes prépare sa table, mais qui ne se laisse pas saisir facilement! Faisons-nous partie des sots? Parfois je le crois...


Si la sagesse est un don de l'Esprit Saint, peut-être est-il nécessaire de lui demande une intelligence renouvelée, pour essayer de saisir un tout petit peu ce que Jésus veut transmettre ou faire transmettre par le rédacteur de ce quatrième évangile. 


Je sais bien que cet écrit, est un écrit tardif, et qui s'adresse à une communauté qui. a l'habitude de partager le pain et le vin et qui si on en croit la première épitre, est composée de ceux qui ont reçu l'onction de celui qui demeure en eux, n'ont pas besoin d'enseignement, (1jn 2,27). Il  n'en demeure pas moins que cette catéchèse, qui montre aussi que Jésus est plus que clairvoyant : c'est ce que nous entendrons la semaine prochaine: "Jésus savait en effet depuis le commencement quels étaient ceux qui ne croyaient pas, et qui était celui qui le livrerait".Jn 6,64), que si on s'imagine dans cette synagogue de Capharnaüm, cet enseignement reste difficile et nécessite la foi en celui dont la parole est rapportée.  

 

Une chose qui me frappe dans cette péricope ce sont ces juifs qui se querellent pour savoir "comment il va donner son corps à manger". Cela montre à quel point ils restent empêtrés dans une logique de la terre (du monde) et que l'esprit n'est pas en eux. Cela évoque  Nicodème au chapitre 3:, Jn 3, 4 "un homme peut-il naître quand il est vieux? Peut-il entrer une deuxième fois dans le sein de sa mère et renaître ? et cela se reproduira plus d'une fois. 


C'est peut-être cela l'important. Essayer d'entendre autrement ces paroles qui sont choquantes et difficiles. C'est d'ailleurs ce que voudrait montrer le récit qui suivra. 


Mais avant de laisser parler mon conteur, je voudrai parler de ce qui m'a frappée dans ces versets (et peut-être dans ceux qui précèdent). Il s'agit de l'insistance portée par Jésus  (ou par le rédacteur), sur le "vivre éternellement" qui est le don fait à ceux qui croient en Jésus, don qui se concrétise par la promesse de la résurrection, que seul Jésus pourra donner quand les temps seront accomplis. il ne s'agit pas de sa résurrection à lui, mais de la notre.


Dans tout l'évangile de Jean, on trouve 14 fois l'expression, vie éternelle dont 6 fois au chapitre 6. La promesse de la résurrection revient 3 fois. De fait c'est à la résurrection de Lazare que jésus reprend cela en disant qu'il est lui, la résurrection et la vie. Ego Emei. 

 

C'est peut-être cette insistance qui est comme la clé de ce chapitre. Jésus est la vie, Jésus est la résurrection et ce, dès maintenant. Mais la manière dont il exprime cela, avec le manger et la boire reste quand même, difficile à intégrer, même si on pense non pas manger, mais incorporer, ce qui pour moi est différent, car incorporer est aussi un mécanisme psychique, où l'on prend en soi, ce qui semble bon chez un autre, pour pouvoir être comme lui. Et cela, c'est quelque chose qui demeure. 

 

Que les "juifs" comme l'écrit le rédacteur, eux qui effectivement sont en quête de cette vie éternelle, (là je me réfère aux synoptique où cette question revient souvent), pensent obtenir cette vie en respectant parfaitement la loi, en la suivant au pied de la lettre, soient tellement obnubilés par cette manière de vivre, qu'ils en deviennent  incapables de se réjouir de la guérison d'un homme, parce que la guérison a eu lieu un jour de Sabbat et que l'homme a été surpris portant sa civière, pose quand même question. Pourquoi cet aveuglement? 

 

Le Pasteur Antoine Nouïs, qui commente cet évangile, dit que Jésus, en étant aussi brutal dans ses propos, qui sont plus que choquants, aurait pour but d'obliger son auditoire à entendre la nouveauté radicale apportée par l'évangile. Peut-être oui, peut-être non.


Dans les synoptiques, il est souvent frappant de voir comme Jésus fait feu de tout bois, pour enseigner des disciples. Il me semble que c'est ce qu'il fait aussi ici, passer de ce qu'il a accompli en donnant du pain, à la manne à la manne comme signe du don de Dieu, et au don de Lui, qui se met met à la portée de chacun, en se laissant incorporer totalement, est un enseignement qui se situe à un autre registre et qu'il n'est pas facile de suivre, car le style du rédacteur complique quand même un peu les choses. 

 

Si j'ai été plus sensible à la promesse de vie éternelle, c'est peut-être parce que ce surplus de vie nous le cherchons tous, il est cherché par beaucoup de personnes (j'en connais) qui passent beaucoup de temps, dépensent beaucoup d'argent à participer à des formations de développement personnel pour atteindre par leur propres forces une plénitude qui est fort utopique, alors que la vie est là, à portée de main, à condition de sortir aussi de sa propre toute puissance. Accepter de se laisser nourrir, accepter de se laisser aimer, accueillir sa propre faiblesse et se laisser faire. 

 

Ce n'est pas ce que dira cet auditeur anonyme que j'ai choisi pour raconter comment il a réagi en entendant cet enseignement, mais je voulais montrer qu'un homme de bonne volonté, un homme simple, un de ces petits dont parle Jésus dans les synoptiques, pouvait certes être choqué, mais aller au-delà. 

 

Ce sera juste un homme qui est là, dans cette synagogue, parce que c'est le jour où l'on se réunit et parce qu'il peut espérer que jésus prendra la parole et qu'il a envie de l'écouter. 

 

 

Un habitant de la ville raconte

 

Moi je suis venu à la synagogue, comme la loi nous le demande, pour louer notre Dieu,  écouter sa parole, chanter, prier. A ma grande surprise, j'ai trouvé la synagogue pleine à craquer. Il y avait ce Jésus qui habite chez nous depuis quelques temps et qui fait du bien autour de lui, ses disciples, il y en a de Bethsaïde, il y a des pêcheurs, il y a même un publicain, un type que je déteste, et d'autres et d'autres venus d'un peu partout. Il faut dire qu'avoir donné à manger à plus de cinq mille personnes, ça a fait du bruit. Et puis la fête, notre fête, de la Paque est toute proche, et nous partagerons l'agneau et nous mangerons des galettes de pain non levé, pendant une semaine. 

 

Jésus a pris la parole, mais ce que je peux dire, c'est que ce qu'il raconte, ça crée de remous, des vagues, que ça discutaille dans tous les sens et que j'ai bien l'impression que beaucoup se retiennent pour ne pas le lapider. Lui il reste impassible.

 

Il a affirmé qu'il était le pain vivant qui était descendu du ciel,  et que celui qui mangera de ce pain, vivra éternellement. Vous vous rendez compte, vivre éternellement, ce serait être comme Adonaï, ne pas connaître la mort l Des anciens disent que si Adam n'avait pas mangé le fruit de l'arbre il aurait vécu aussi éternellement, mais d'autres disent que si Adam mange, c'est que la nourriture est nécessaire à sa vie, donc que de toutes les façons il devait mourir un jour, mais comme les disent nos écrits, il a vécu de très nombreuses années, puisqu'il est mort à neuf cent trente ans. Mais ensuite Jésus a dit que le pain que lui donnerait pour que ce soit possible, ce serait sa chair, donnée pour la vie du monde. 

 

Je dois dire que ça, ça me dépasse complétement. Il parle de pain qui fait vivre, il parle de lui qui donnerait sa chair, que cette chair il faudrait la manger, la consommer, mais que pourtant elle serait livrée pour sauver le monde. Et là, moi, mais je pense que je dois être un peu fou, j'ai pensé à la Paque qui arrive, à cet agneau dont nos pères ont mangé la chair, dont le sang a écarté l'ange de la mort. Je sais bien que c'était un vrai agneau, mais je me demande, mais c'est bien là, où je vous dis que je suis un peu fou, que ce Jésus, il est peut-être cet agneau qui a permis de sauver le peuple de l'esclavage puisque son sang a permis la vie pour nous et la liberté. Mais je ne sais pas pourquoi j'imagine ça, sauf que ce Jésus, il me plait bien. 

 

Mais dans la synagogue, ça a mis un peu la zizanie, et la zizanie, moi je déteste ça; ceux qui étaient là, ont commencé à lever la voix, à hurler, tellement fort que Jésus on ne l'entendait plus et pourtant il a une sacrée voix, très puissante ; il aurait dû être chantre, la vie aurait été plus facile pour lui, mais ce n'est pas son appel.

 

Ils étaient à deux doigts de se battre; ils voulaient savoir comment jésus s'y prendrait pour donner sa chair à manger. Peut-être qu'ils le prenaient pour un pélican qui semble donner da chair à manger, sauf que c'est le poisson qu'il a attrapé qu'il donne; mais il donne tout à ses petits.  Et puis, je trouve qu'ils sont bêtes ceux qui se disputent. Il n'est pas nécessaire d'être mort pour donner sa chair à manger, il suffit juste de penser aux mamans qui se laissent manger par leur petits, mais qui restent bien vivantes.  Je crois qu'il faut juste accepter de se laisser nourrir par sa présence et d'accepter ce qu'il dit, parce qu'il fait vraiment des choses étonnantes. Enfin, c'est ce que je pense, mais je ne suis pas un homme instruit, loin de là.

 

De fait, il n'a pas répondu au comment, mais il a dit et répété, comme pour faire bien rentrer dans la tête de ceux qui écoutaient que si nous ne mangions pas la chair du fils de l'homme et que nous ne buvions pas son sang, nous n'avons la vie en nous. Je me demande ce qu'il entend par "la vie", ce doit être bien autre chose que simplement vivre. 

 

Il faut dire aussi que pour faire ce qu'il a fait avec le pain, mais aussi remettre debout un homme paralysé depuis trente -huit ans, il doit y avoir quelque chose en lui que nous n'avons pas et qu'il se propose de nous donner. 

 

Il a encore redit que ce manger et ce boire, donnait la vie éternelle, comme si sa chair à lui et son sang à lui étaient autres, et surtout que ce manger et boire assurerait la vie éternelle. 

 

Si comme il le dit, il est l'envoyé du Dieu vivant, qui vit de la vie de Dieu, que lui appelle Père, alors se nourrir de sa présence, par des moyens qui me dépassent, cela donnera de la vie, cette autre vie que je ne sais pas imaginer, une vie de présence, de relation. Si je dis cela c'est qu'il a dit quelque chose qui m'a ému, il a dit que celui qui se nourrit de lui, demeure en lui, et que lui, Jésus demeure en lui. 

 

Je me demande ce qui va se passer maintenant. Est-ce que ceux qui se disent disciples vont rester avec lui, et les autres, les douze, qu'est-ce qu'ils vont faire maintenant. 

 

 

 

Travail sur le texte;

 

51 Moi, je suis le pain vivant, qui est descendu du ciel : si quelqu’un mange de ce pain, il vivra éternellement. Le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour la vie du monde. »

 

C'est le dernier verset entendu la semaine dernière. Jésus affirme, (et cela est très proche de ce qu'il a affirmé à la Samaritaine au chapitre 4), que celui qui mange de ce pain là (comme celui qui boit de cette eau -là),  non seulement n'aura plus jamais faim (ou soif), mais qu'il vivra éternellement. Et c'est bien là, comme au chapitre 3, avec Nicodème, que Jésus change de registre. On n'est plus dans le matériel, mais dans un autre univers.

 

52 Les Juifs se querellaient entre eux : « Comment celui-là peut-il nous donner sa chair à manger ? »

 

Ce qui est frappant, c'est que le questionnement est sur le "comment" ce qui en soi est stupide, et qui ne permet pas de comprendre, d'entendre ce que Jésus leur annonce. 

 

53 Jésus leur dit alors : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous.

54 Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour.

 

La répétition montre bien l'importance de ce que Jésus affirme, d'autant qu'il y a aussi le doublement du Amen. Il faut se nourrir de lui, se laisser nourrir par lui, accepter aussi sa dépendance, le reconnaître comme le donateur, et recevoir ce qui permet à l'homme, comme le dira Irénée de Lyon, d'être un homme debout, un homme vivant.

 

55 En effet, ma chair est la vraie nourriture, et mon sang est la vraie boisson.

56 Celui qui mange ma chair et boit mon sang demeure en moi, et moi, je demeure en lui.

 

Importance du verbe demeurer. Il y a une permanence, une relation qui perdure et perdurera au-delà de la mort physique.  On peut dire que c'est un beau cadeau.

 

57 De même que le Père, qui est vivant, m’a envoyé, et que moi je vis par le Père, de même celui qui me mange, lui aussi vivra par moi.

 

Jésus affirme ici, le lien qui reste sans cesse présent entre lui et le Père. Il y a ce lien, le fils vit par le Père, et si nous voulons nous faire de même, il nous vivre par lui, en lui, en le prenant en nous.

 

58 Tel est le pain qui est descendu du ciel : il n’est pas comme celui que les pères ont mangé. Eux, ils sont morts ; celui qui mange ce pain vivra éternellement. »

 

Affirmation finale: la vie éternelle est donnée, maintenant, aujourd'hui, à condition de se laisser nourrir par cette présence. 

 

59 Voilà ce que Jésus a dit, alors qu’il enseignait à la synagogue de Capharnaüm.

 

 

  

 

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