À moins de naître d’en haut on ne
peut voir le Royaume. Jn 3 , 3
À moins d’être né de l’eau et de
l’esprit, on ne peut entrer dans le Royaume. Jn 3, 5
Le début du chapitre 3 de l’évangile de Jean, l’entretien avec
Nicodème, mentionne deux fois le mot royaume. C’est Jésus qui prend l’initiative
d’employer ce mot qui est un mot pratiquement inconnu dans cet évangile. On ne
le retrouve que lors de l’interrogatoire avec Pilate Jn 18, 36 : « si mon
royaume était de ce monde », mais souvent ce mot royaume est remplacé par
royauté. Dans l’évangile de Matthieu, ce même mot est employé 48 fois…
Si on reprend un peu ce qui s’est
passé avant, Jean nous montre un Jésus qui a reçu le baptême de Jean, qui a
changé l’eau en vin à Cana, qui est allé à Jérusalem et qui y demeure et qui a
chassé les vendeurs du Temple. Il semble bien que ce jeune prophète qui parle
bien, mais qui parle haut et fort, pose question à Nicodème qui voudrait « comprendre »
de quoi parle cet homme et s’il ne serait pas celui que l’on attend, le
libérateur. Seulement on ne peut pas dire que Jésus remplisse les critères et
si Nicodème va lui-même chez Jésus de nuit (la peur des autres, de ne plus être considéré
comme un « bon » pharisien, ou la peur de devoir changer sa manière
de croire et de pratiquer la loi, la peur d’être vu avec Jésus), c’est bien
parce qu’il se pose des questions sur qui est ce jeune homme, qui a tant d’assurance
alors qu’il n’a même pas quarante ans, et qui est quand même très respectueux de la Torah puisqu’il
vient au Temple pour y prier comme cela est demandé par la Loi et qui est rempli d'une colère qui est peut-être aussi celle de Nicodème quand il voit le trafic qui se fait dans le Temple.
Le verset 3 est en partie censé
répondre à la salutation de Nicodème, qui est venu voir Jésus (c’est lui qui s’est
déplacé) et le reconnaît comme un Rabbi (enseignant de la Torah) venant de la
part de Dieu, et accomplissant des signes qui prouvent que Dieu est avec lui. Ce
verset « Amen Amen je te le dis (ce qui est une affirmation solennelle) à moins
de naître d’en haut, on ne peut voir le royaume de Dieu », est quand même désarçonnant.
il est difficile de savoir si
Jésus parle de lui, où s’il répond au désir profond de Nicodème (et à notre
désir) de voir le Royaume. Manifestement Nicodème, prend les choses pour lui,
parce que s'il prend le risque d’aller voir Jésus, c’est qu’il y a son désir à
Lui en découvrant qui est Jésus de découvrir ce qui l’habite cet homme et de devenir son disciple. Mais est-ce si simple quand on est un notable?
Alors la phase traduit peut-être un certain désespoir. Comment naître d’en
haut, comment renaître ? On ne peut pas revenir dans le ventre de sa mère,
alors c’est impensable, en tous les cas pour lui. C’est un peu comme s’il
disait à Jésus, que c’est fou ce que ce dernier propose. Peut-être que Lui
Jésus est né d’en haut (et c’est ce que Jésus fera comprendre par la suite),
mais lui, le pauvre Nicodème, comment va t il s’y prendre, alors qu’il sent
bien que cet homme là, est possédé par quelque chose, qui est radicalement
différent et qu’il aimerait tant avoir, avoir pour « voir », pour
contempler, pour être un peu comme Isaïe ou ces prophètes qui ont vu et
contemplé la Gloire de Dieu.
Le verset 5 complète la première
affirmation, mais il ne s’agit plus de voir, mais d’entrer : « Amen
Amen je te le dis, personne à moins d’être né de l’Eau et de l’Esprit, ne peut
entrer dans le royaume de Dieu »
Jésus, lors du baptême de Jean,
est si l’on peut dire né de l’eau et de l’Esprit. L’esprit, le souffle, est don
de Dieu. On ne peut pas se donner ce souffle tout seul. Il est donné par un
autre, et cet autre c’est Jésus qui le donnera mais bien plus tard, sauf que
dans le présent de Nicodème, la parole en tant que telle, la parole qui est
souffle est déjà transformante.
Entrer dans le royaume nécessite
donc une transformation. Pour entrer dans le royaume, la loi ne suffit pas ou
ne suffit plus. Quand Jésus affirme « le vent souffle où il veut, tu
entends sa voix mais tu ne sais pas d’où il vient et il va » peut-être
parle t il de lui, qui est celui qui donne le souffle, mais aussi de nous : nous entendons sa voix, et entendre la
voix transforme, même si la « connaissance » du phénomène qui crée le
vent, nous ne l’avons pas.
Ce désir de voir le royaume, d’entrer
dans le royaume, je pense qu’il est le notre, en tous les cas le mien. Ce que
dit Jésus dans la suite du texte, c’est ce qu’il développera tout au long de
cet évangile, c’est qu’il est celui qui est. C'est la foi en lui, qui en
changeant un peu le cœur profond, permet aussi de changer son regard, et de
passer de l’obéissance à l’amour (de passer du faire à l’être) et obtenir la
vie éternelle.
Parce que le royaume c’est
peut-être cela ; non pas vivre éternellement, juste pour ne pas être plus
fort que la mort, mais vivre dans ce présent et dans cet ailleurs qui est la
brise légère de la présence hors de soi et en soi de Dieu.
1 commentaire:
Tes 2 derniers § disent exactement ce que je crois et ce que je vis et expérimente (à ma mesure évidemment)
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