Mt 26, 14-25.
La liturgie propose deux jours de suite la trahison de Judas.: évangile de Jean et évangile de Matthieu.
Ce qui m'a frappée hier dans le récit johannique, c'est qu'au cours du repas, Jésus est bouleversé en esprit, et c'est là qu'il annonce qu'il va être trahi par un de siens. Certes, nous, lecteurs des évangiles nous le savons déjà, puisque Jean écrit (Jn 13, 2): "au cours du repas, alors que le diable avait déjà mis dans le coeur de Judas, fils de Simon l'Iscariote, l'intention de livrer Jésus". Mais cela ne veut pas dire que Jésus, lui, le savait. Et pour moi, c'est comme si d'un seul coup, Jésus avait été comme prévenu que la trahison viendrait de l'intérieur, et par un des siens. https://giboulee.blogspot.com/search?q=Judas
Le texte d'aujourd'hui, Mt 26, est précédé de l'onction à Béthanie. Il m'a toujours semblé que cet événement avait été pour Judas, la goutte qui a fait déborder le vase.
Judas raconte.
Je dois dire que trop c'est trop. Je lui ai fait confiance, j'ai tout quitté pour le suivre. Et je l'ai suivi. Il m'a fait confiance, il m'a confié la gestion des finances et croyez moi, cela n'a pas plu du tout à Levi, cet ancien publicain. Mais c'est moi qu'il a choisi. Il m'a envoyé en mission avec Simon, pas celui qui a nommé Roc, mais l'autre, celui qui a été un zélote. On s'entend bien tous les deux. On a chassé des démons, on a guéri des malades. Cela me plaisait beaucoup, J'avais l'impression de pouvoir conquérir le monde.
Mais au fil des jours, Jésus a changé, Il s'est mis à parler de sa mission comme d'un échec. Il parlait d'être livré aux anciens, d'être condamné à mort, et de redevenir ensuite vivant. Mais ça, à d'autres; oui, lui il a redonné la vie à des enfants, la fille de Jaïre et le fils d'une veuve, mais à lui, qui va lui redonner la vie? Si encore il parlait de monter dans les cieux, de disparaître sur un char de feu, comme le prophète Elie, oui, ça ça aurait du panache. Mais non, il parle de mourir comme un malfaiteur. Et moi, je ne l'ai pas suivi pour ça.
Il y a quelques jours, nous étions invités chez Simon le lépreux à Béthanie. Juste avant, le Maître avait dit qu'il allait être crucifié, crucifié comme un malfaiteur, comme un impie. Alors si ça doit se terminer comme ça, moi, je ne veux pas participer à ça. Et en plus, pendant le repas, une femme est entrée, et elle a versé sur sa tête le contenu d'un flacon qui contenait un parfum hors de prix. Lui, il avait un air béat. Cela faisait un peu penser au cantique qui dit: "Qu'il est bon pour des frères d'habiter ensemble, c'est comme l'huile précieuse qui descend sur la barbe, sur la barbe d'Aaron, qui descend sur le bord de ses vêtements", sauf que si lui, il nageait dans le bonheur, nous tous, nous trouvions que cet argent qui avait servi à acheter ce parfum, il aurait mieux valu nous le donner pour que nous ayons un peu de sous soit pour nous, soit pour les pauvres qui nous suivent.
Et là, Jésus s'est fâché. Il nous a dit que des pauvres nous en aurions toujours, mais que lui, il allait partir, et que ce qu'elle avait fait là, c'était comme en prévision de sa mise en terre. Et pour moi ça a été trop. Comme je savais que les anciens et les grands-prêtres le veulent pour l'interroger, et qu'ils n'arrivent pas à lui mettre la main au collet, j'ai décidé de les voir, parce que moi, je sais où il aime se rendre quand il est à Jérusalem. Je leur ai demandé ce qu'ils me donneraient. Ils ont parlé de 30 pièces d'argent. Moi j'aurais préféré un petit morceau de terre. Mais bon c'est comme ça. Et j'espère que cela permettra de tout stopper. Mais la Pâque est proche et je ne sais pas trop comment faire.
Et voilà, que le premier jour de la fête des pains sans levain est arrivé et qu'il a fallu préparer le repas. Nous nous sommes installés dans une salle que Jésus connaissait. Et tout à coup il a dit que l'un d'entre nous allait le trahir. Là j'ai commencé à me trouver mal. Et certains demandaient si c'étaient eux qui feraient cela, comme si c'était pour dans dix ans. Mais le Maître ne répondait pas; il a eu par contre une phrase épouvantable pour moi. Il a dit qu'il aurait mieux valu que cet homme ne vienne pas au monde. Puis il a dit, que celui qui le trahissait avait mis la main dans le plat en même temps que lui. Je sais bien que sa main a touché la mienne, mais il n'y avait pas que moi. Peut-être que je ne suis pas le seul. N'empêche que quand j'ai senti ce contact, je ne savais plus trop ce que je devais faire. Aller voir les prêtres,? Ne rien faire?
Alors l'air de rien, je lui ai demandé: Rabbi, est ce que ce serait moi? J'ai dit Rabbi, parce que je n'arrive plus à lui dire Seigneur comme les autres. Et lui, tout doucement, il m'a dit, tu vois bien que tu le sais…
Alors, je n'ai pas pu rester. J'ai fait mine de devoir chercher quelque chose en ville, mais c'est cette nuit que je vais trouver les prêtres. Ils feront de lui, ce qu'ils voudront, mais cet homme n'est pas celui qu'il dit être. Et moi, je ne peux pas faire comme si c'était lui le sauveur du peuple. Je suis triste, mais je pense que je fais le bon choix.
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