jeudi, juillet 25, 2024

JEAN 20, 1-20. FÊTE DE MARIE-MADELEINE . S'APERCEVOIR/APERCEVOIR

Quand j'ai lu ce texte, j'ai été captivée par les trois "apercevoir" qui pour moi structurent le texte, aussi bien que les retournements, dont on parle si souvent. J'ai alors su que je devais écrire un billet, mais ça a tardé, faute de temps, malgré les vacances. J'ai commencé à écrire, après avoir travaillé le texte, et c'est à ce moment- là que j'ai recherché des textes plus anciens.  

 

Le dernier texte, écrit l'an dernier, à la même époque, me pose question. Il est certain que je l'ai écrit avec mon cœur, mais je pense qu'avoir fait de Marie, la sœur de Lazare. https://giboulee.blogspot.com/search?q=Jn+20%2C+1-20  ce n'était pas une bonne idéeSi le rédacteur parle de Marie Madeleine (Magdala) ce n'est pas Marie de Béthanie la sœur de Lazare, donc je pense avoir fait une erreur. 

 

J'ai parlé des "apercevoir". Le premier c'est dans la pénombre, avant que le jour ne se lève vraiment. Ce verbe est à la forme pronominale : elle s'aperçoit que la pierre a été enlevée, mais on aurait pu aussi bien écrire, elle voit que l'entrée du tombeau est ouverte. La formulation proposée, permet de mieux entendre la panique qui s'empare d'elle, pierre enlevée, corps enlevé. Et un corps qui disparait c'est une des pires choses qui puisse arriver. 


SI on prend le texte complet, Jean et Pierre s'aperçoivent que les linges ont été roulés, mais que pour l'un, cela signe de la résurrection, pas pour l'autre, et pourtant ils ont vu les mêmes choses. 

 Une autre remarque. Pierre et Jean ont leur signe, à savoir les linges pliés, bien à plat, l'un à la tête l'autre au pieds . Le fait que les linges soient pliés ou roulés, indique que cela n'a pas été fait à la va-vite. Ils se trouvent là où Marie, elle verra deux anges vêtus de blanc. Donc à chacun  son signe, qui sera vu et compris ou vu et pas compris, ce qui sera le cas de Marie-Madeleine qui voit, qui entend la question, mais qui à l'inverse de Jean, ne croit pas que l'impossible est arrivé. Cela c'est important pour nous. Il y a des signes, mais arrivons-nous à les voir et à les prendre pour ce qu'ils sont?



Les deux autres verbes qui renvoient à la vue, et que l'on trouve dans le texte de ce jour,  concernent les anges vêtus de blanc et Jésus, Il me semble que petit à petit, on va passer avec ces verbes de l'ombre à la lumière. 

 

Il y a une différence entre apercevoir et voir. De fait Marie aperçoit des personnes, mais de fait elle ne les voit pas tels qu'ils sont. Elle aurait pu se poser des questions sur ces anges, parce que ce n'est pas si fréquent d'en rencontrer. Il avait bien été questions d'anges au début de l'évangile: Jn 1, 51: Et il ajoute : « Amen, amen, je vous le dis : vous verrez le ciel ouvert, et les anges de Dieu monter et descendre au-dessus du Fils de l’homme. ». le fait qu'il y ait un ange à la tête et l'autre aux pieds, évoque peut-être ce qui avait été annoncé au début de l'évangile.

 

De fait, quand elle aperçoit les hommes dans le tombeau, la lumière commence à poindre, mais elle ne la voit pas. Il en va de même quand elle aperçoit celui qu'elle pense être le jardinier. Et pourtant la lumière est là, pleinement là. 

 

Pour laisser Marie parler, il est nécessaire de ne pas ôter ce qui se passe avec jean et Simon, Pierre, qui eux entrent dans le tombeau. Marie n'entre pas, mais ils confirment bien que le corps n'est plus là. J'ai donc remis les versets dans le texte travaillé et je m'en servirai pour le récit. 

 

Ce texte, je l'aime beaucoup. Ce qui m'a frappée en le relisant, c'est que même si les acteurs ne le savent pas, les verbes qui émaillent ce récit, où ça court un peu dans tous les sens, montre qu'après le repos de la mort, le repos du Shabbat, la vie reprend. 

 

Marie raconte.

 

Je crois que ces deux dernières nuits ont été les pires de ma vie. J'avais sans cesse ces images qui tournaient dans ma tête, dans mon cœur. Lui sur cette croix, lui avec des deux autres à sa droite et à sa gauche, lui avec cette atroce couronne d'épines, son nez brisé, ses plaies, et ce trou ce gros trou dans le côté. Comment les hommes peuvent -ils être aussi méchants. Je le voyais mort. Je voyais Joseph et Nicomède le déposer dans cette tombe, dans ce jardin. Et j'attendais que cette nuit sans sommeil, s'achève pour que je puisse, simplement le voir, le regarder, lui parler même s'il est mort. Il est mon Seigneur, mon Rabbouni. 

 

Je suis partie dans la nuit, juste avant que le jour ne se lève. C'était la ténèbre dehors et la ténèbre dans mon cœur. Il n'avait pas le droit de mourir, c'est moi qui aurais dû mourir à sa place, pas lui. J'en voulais au monde entier. J'étais à la fois triste, épuisée, lasse, et en colère. Ce n'est pas juste. Pourquoi celui qu'il appelle son Père, n'a-t-il rien fait? Pourquoi jésus a-t-il redonné vie à Lazare si c'est pour finir lui dans la mort? Peut-être que s'il n'avait pas fait ce miracle, les autorités auraient fini par se lasser et le laisser enseigner? 

 

Il ne faisait pas clair du tout, et dans ce jardin j'avais du mal à trouver mon chemin. Quand je suis arrivée au tombeau, il m'a semblé que la pierre n'était plus à sa place. Arrivée devant la tombe, j'ai vu que Je n'avais pas rêvé, la pierre avait été roulée, enlevée, elle ne protégeait plus la dépouille. La panique s'est emparée de moi; si la pierre a été enlevée, c'est que quelqu'un est venu, quelqu'un d'assez fort pour la rouler, que ce quelqu'un est entré dans le tombeau et qu'il a peut-être pris le corps de Jésus. Et sans entrer, j'ai bien vu, qu'il n'y avait plus de corps.

 

Alors j'ai pris les jambes à mon cou, même si ceux que j'ai croisé me regardaient comme si j'étais folle, je suis allée prévenir Simon Pierre et Jean. Je leur ai juste dit qu'on avait enlevé le Seigneur de son tombeau que je ne savais pas où on avait mis le corps. Moi, son corps, je veux le toucher, le regarder encore et encore avant que la mort ne fasse son travail en lui.  

 

Ils ont couru eux aussi, Jean est arrivé le premier, il n'est pas entré. Il attendait que Simon le fasse. Simon est entré, je ne sais pas ce qui s'est passé, il est sorti et Jean est entré. Lui, il avait l'air heureux. Il m'a dit que l sur la pierre, il y avait les linges posés bien à plat et le suaire qui avait entouré sa tête.

 

 Finalement Joseph et Nicodème avaient fait comme il fallait. Avec la hâte qui était le leur, j'avais peur que ce soit mal fait. Le corps de celui que j'aime a été mis dans sa demeure en suivant les règles.

 

Ils sont partis et moi je suis restée. Je me suis approchée de l'entrée et je suis entrée. Là j'ai aperçu deux hommes vêtus de blanc. Maintenant je sais que ces personnes que j'ai prises pour des hommes étaient des anges, et qu'ils étaient comme les anges qui sont dans l'arche de l'alliance, ces anges qui veillent sur le propitiatoire. 

 

Mais là, j'étais désespérée, incapable de me poser la moindre question. J'étais dans le noir, dans la mort. Ils m'ont demandé pourquoi je pleurai. C'était stupide comme question, je leur ai répondu qu'on avait enlevé mon Seigneur, celui que mon cœur aime, et que je ne savais pas où on l'avait mis. Ils auraient pu me dire quelque chose, mais ils n'ont rien dit. 

Je suis ressorti et là, j'ai aperçu un homme.

 

Il faisait grand jour. Il m'a posé la même question que ceux qui étaient dans le tombeau, pourquoi je pleurais. Mais bon, dans un cimetière ce n'est pas tellement étonnant de voir une femme pleurer, mais lui, il m'a demandé ce que je cherchais. Et ça c'était la vraie question.  J'ai alors pensé que cet inconnu était le jardinier, et qu'il avait enlevé le corps, puisqu'on l'avait mis dans une tombe qui était là, mais qui appartenait peut-être à quelqu'un. Je lui ai dit de me dire où il l'avait mis et que moi je le prendrai et je l'emporterai. 

 

Il a dû lui aussi, me prendre pour une folle, une femme porter un mort pour l'emporter . Et j'ai baissé la tête et j'ai continué à pleurer, en regardant la tombe, parce qu'il ne me répondait pas.

 

Et tout à coup, quelque chose est arrivé. J'ai entendu mon prénom. Ce n'était plus la même voix, c'était sa voix à lui. Et l'impossible s'est advenu, le jardinier c'était Lui. Les ténèbres sont parties, j'étais dans la joie, dans la lumière. Je le voyais dans cet homme debout devant moi. C'était "mon maître", il était vivant , et était le vivant. Il n'y avait plus traces de cette couronne, il n'y avait plus de traces des coups, c'était lui, bien lui. Je voulais le toucher, pas pour le retenir, mais comment vous dire, pour sentir sa chaleur, son poids, sa présence. 

 

Mais il n'a pas voulu. Il m'a dit avant même que je fasse un geste, de ne pas le toucher, de ne pas le retenir parce qu'il n'était pas encore monté vers mon Père. Cela voulait dire que j'avais été la première à le voir vivant, à le voir tel qu'il était devenu. Celui que je connaissais et pourtant quelqu'un d'autre. Mais c'est si difficile de trouver des mots. 

 

Il m'a demandé d'aller dire aux autres, à ses frères, qu'il montait vers son Père qui était notre Père, vers son Dieu et notre Dieu. Je n'ai pas trop compris, mais j'ai fait ce qu'il m'a demandé. Mais vous allez peut-être sourire, mais je n'ai pas couru, j'avais besoin de garder en moi cette joie toute neuve. J'ai pris mon temps, je leur ai raconté, les hommes en blanc, et celui que j'avais pris pour le jardinier. Je suis repartie. Je ne sais pas s'ils m'ont crue, mais peu importe. Moi je l'ai vu, le ressuscité. Mon Seigneur est vivant à jamais et je suis dans sa lumière.

 

 

Annexe: travail sur le texte(1).

 

(1)En petits caractères, la partie omise, pour la fête du 22 juillet. 

 

1 Le premier jour de la semaine, Marie Madeleine se rend au tombeau de grand matin ; c’était encore les ténèbres. Elle s’aperçoit que la pierre a été enlevée du tombeau.

 

C'est presque drôle, elle s'aperçoit que la pierre a été roulée, ce qui laisse à supposer que contrairement à l'évangile de Marc, où les femmes se demandent qui leur roulera la pierre, elle, voir que la pierre a été enlevée, ce qui provoque de la panique.

 

 

 

 

 

La partie omise.

 

02 Elle court donc trouver Simon-Pierre et l’autre disciple, celui que Jésus aimait, et elle leur dit : « On a enlevé le Seigneur de son tombeau, et nous ne savons pas où on l’a déposé. »

 

Et la voilà qui court. Le "nous" est un peu étrange. Elle s'aperçoit que la pierre a été enlevée, elle se serait mise aussitôt à courir pour prévenir, et pourtant elle affirme que le corps a été enlevé et qu'il a disparu. Est-ce que les disciples auraient bougé si elle avait seulement parlé de la pierre? 

 

03 Pierre partit donc avec l’autre disciple pour se rendre au tombeau.

04 Ils couraient tous les deux, ensemble, mais l’autre disciple courut plus vite que Pierre et arriva le premier au tombeau.

05 En se penchant, il s’aperçoit que les linges sont posés à plat ; cependant il n’entre pas.

06 Simon-Pierre, qui le suivait, arrive à son tour. Il entre dans le tombeau ; il aperçoit les linges, posés à plat,

07 ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place.

08 C’est alors qu’entra l’autre disciple, lui qui était arrivé le premier au tombeau. Il vit, et il crut.

09 Jusque-là, en effet, les disciples n’avaient pas compris que, selon l’Écriture, il fallait que Jésus ressuscite d’entre les morts.

10 Ensuite, les disciples retournèrent chez eux.

 

Ce qui est frappant, ce sont tous ces verbes de mouvement: courir, se pencher, entrer etc. 

 

 

 

Reprise du texte proposé par la liturgie.

 

11 Elle se tenait près du tombeau, au-dehors, tout en pleurs. Et en pleurant, elle se pencha vers le tombeau.

 

Eux partent, elle, elle reste, près de l'orifice, près de l'entrée. Et elle essaie de voir, sans entrer. 

 

12 Elle aperçoit deux anges vêtus de blanc, assis l’un à la tête et l’autre aux pieds, à l’endroit où avait reposé le corps de Jésus.

13 Ils lui demandent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle leur répond : « On a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l’a déposé.

 

Elle aperçoit ensuite  (forme active), qu'il y a là deux personnes, des anges vêtus de blanc, j'ai l'impression que ce verbe apercevoir, il me donne l'impression d'une vision furtive. Elle devine quelque chose, elle ne sait pas trop ce que font là ces hommes. Elle s'aperçoit qu'ils sont vêtus de blanc. Comment sont-ils entrés là, mystère. 

 Pierre et Jean, eux ont vu les linges roulés, bien à leur place, des objets. Elle, elle voit des personnes qui lui parlent. Et c'est le jeu question réponse: pourquoi pleures-tu? Parce qu'on a enlevé mon Seigneur, et je ne sais pas où on l'a déposé. Elle pourrait presque dire, on a volé mon Seigneur. Si vous pouvez, rendez-le-moi, si c'est vous; mais cela elle ne le dit pas.

» 

 

14 Ayant dit cela, elle se retourna ; elle aperçoit Jésus qui se tenait là, mais elle ne savait pas que c’était Jésus.

15 Jésus lui dit : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Le prenant pour le jardinier, elle lui répond : « Si c’est toi qui l’as emporté, dis-moi où tu l’as déposé, et moi, j’irai le prendre. »

 

Et c'est le troisième apercevoir. Elle voit Jésus, et de même que les anges n'ont eu aucun impact sur elle, voir cet homme, surgi de nulle part, ne change rien. Elle ne veut qu'une chose, récupérer le corps de son aimé.

 

16 Jésus lui dit alors : « Marie ! » S’étant retournée, elle lui dit en hébreu : « Rabbouni ! », c’est-à-dire : Maître.

 

Là c'est l'ouïe qui est sollicitée, mais cela a déjà été le cas avec les anges. Et ça n'avait rien changé. Là, ça change tout. Elle ne fait plus qu'apercevoir un homme, maintenant dans cet homme elle reconnait celui qui revenu à la vie. 

 

Mais peut-être qu'il y a plus que la voix. Peut-être qu'au lieu de rester à distance, du côté de la tombe vide, elle s'avance un peu vers celui qu'elle prend pour un employé. Et elle "sent" sa présence, elle le sent, lui. Et ses yeux s'ouvrent, elle sort de ses ténèbres, comme Thomas sortira des siennes la semaine suivante.

 

17 Jésus reprend : « Ne me retiens pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père. Va trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »

 

Là jésus ne "monte" plus à Jérusalem comme dans les synoptiques, mais vers son Père, qui est devenu par cet acte de la mort notre Père et qui demeure notre Dieu. Là aussi il se passe quelque chose. De Dieu qui réside dans son ailleurs, advient un Dieu qui est Père, mais pas au sens que l'on trouve par exemple quand on parle à quelqu'un à qui on doit du respect, qui a un certain âge, un certain savoir, mais Père celui à qui on pourrait dire papa comme le dira Paul plus tard.

 

18 Marie Madeleine s’en va donc annoncer aux disciples : « J’ai vu le Seigneur ! », et elle raconta ce qu’il lui avait dit.

 

 

Et pourtant, il n'a pas dit grand-chose. L'ont-ils crue? Ce n'est pas évident du tout, puisque pour Thomas, il est impossible que Jésus, dont le corps a été mortellement blessé, aie pu revenir à la vie, sauf que c'est une autre vie. 

 


 

 

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