"Mais
si tu m'apprivoises, ma vie sera comme ensoleillée. Je connaîtrai un pas, le
tien. « Les autres pas me
font rentrer sous terre. Le tien m'appellera hors du terrier, comme une
musique.
Et puis regarde!
Tu
vois, là-bas, les champs de blé? Je ne mange pas de pain.
Le
blé pour moi est inutile. Les champs de blé ne me rappellent rien. Et ça, c'est
triste!
Mais
tu as des cheveux couleur d'or. Alors ce sera merveilleux quand tu m'auras
apprivoisé!
Le
blé, qui est doré, me fera souvenir de toi. Et j'aimerai le bruit du vent dans
le blé... " Antoine de Saint Exupéry.
Ceci
c’est le dialogue entre le Petit Prince et le Renard. Le renard se crée un souvenir, il utilise un objet,
des objets pour faire vivre la présence de celui qui va partir, car il sait
bien que le Petit Prince qui n’est pas de cette planète ne va pas y demeurer. Il fait des liens: le blé, le doré, les cheveux,le Petit Prince.
Alors
moi pendant la messe, j’ai inventé un autre dialogue. Cela se passe bien sur le
jeudi que l’on appelle « saint » il y a Jésus, il y a les disciples.
D’une
certaine manière Jésus n’appartient pas à cette planète, il va la quitter. A la
fois cela le rend heureux parce qu’il a fait ce qu’il devait faire, à la fois
cela le rend triste, car il sait que ses disciples vont souffrir de son
absence, même si cette absence leur donnera une autre perception de qui il est
vraiment. Il faut qu'il trouve quelque chose pour que l'absence se transforme en présence, qu'il trouve quelque chose qui leur permette de penser à lui sans être tristes.
Sur
la table, il y a les coupes avec du vin, il y a du pain. Et c’est un repas de
fête, c’est du bon vin, du très bon vin, c’est du bon pain, du très bon pain,
même si c’est du pain sans levain. je veux dire que ce pain il a une épaisseur, un poids, une odeur, une couleur, une texture. Le vin qui normalement est du vin rouge, est aussi un vin de fête, un vin que l'on goute, que l'on déguste.
Alors Jésus peut se dire (inspiré par l'Esprit qui est en Lui et qu'Il donnera à ses disciples" je vais utiliser ce pain et ce vin, pour qu’en regardant ce pain, regardant ce
vin, pour que en sentant ce vin, en sentant l’odeur du pain, ils me voient, ils
se souviennent de ce repas, qu’ils revivent ce temps de partage.
Je vais leur donner cela en souvenir de moi, et je dirais les mots que mon Père m'inspirera pour que ce pain et ce vin qui célèbrent aussi le "passage" de mon Père qui a libéré de l'esclavage de l'Egypte, soient aussi signe de la libération que je vais leur apporter en leur donnant ma vie.
Je
vais leur dire que ce pain c’est mon corps, alors chaque fois qu’ils mangeront
ensemble de ce pain, ils seront heureux, ce sera comme si j’étais là. Et puis
le vin cela réjouit le cœur de l’homme, alors je vais leur dire que quand ils
boiront de ce vin, de ce bon vin, ce sera comme si j’étais là, comme s’ils
trinquaient avec moi, comme s’ils faisaient passer cette coupe de moi à eux.
Si
j’écris cela, c’est qu’il y a peu, je me suis rendu compte que si dans la
journée j’ai mangé quelque chose qui a du gout, du bon gout, je m’en souviens
parfois dans la journée et je me souviens de gout et cela me rend heureuse.
Et
je me dis que cela devrait être pareil pour ce pain et ce vin qui sont signes
de la présence et signe de partage. Et de fait, ce pain et ce vin sont
tellement « édulcorés » qu’ils ne laissent pas de trace en moi, que
je n’y pense plus dans la journée et cela finalement me gêne.
Ce
que je veux dire, c’est que cette hostie ce petit morceau rond, soit blanc soit brun,
n’a pratiquement aucune saveur. Bien sûr les hosties au blé complet surtout quand elles sont
croustillantes, ont une petite saveur, mais les anciennes, celles qui se
collent au palais, qu’il ne fallait pas toucher des dents sous peine de
sacrilège, que nous disent elle de Jésus, de sa présence, de son amour ?
D’accord on dit que c'est le pain des anges, mais théoriquement les anges ne mangent pas (voir
Raphaël, dans le livre de Tobie) et si on pense à la manne, elle était donnée
en quantité suffisante et elle avait du gout.
J’ai
l’impression que l’église s’est tellement méfiée du sensible, du sensoriel pour
tout miser sur le spirituel, que du coup elle nous « prive » de
quelque chose. Que le corps de Jésus soit maintenant un corps de gloire, oui,
que nous ne puissions pas le toucher oui, mais il nous a laissé une gestualité
(pardonnez moi si ce mot n’existe pas) pour que manger ce pain et boire ce vin
soit pour nous signe de sa présence, de son amour, et que cela nous réjouisse.
J’ajouterai
que au Prieuré Bénédictin où je vais en général le dimanche, le pain partagé, c'est l’hostie (les hosties car il y en a souvent plusieurs) qui est fractionnée en morceaux que les
participants se donnent les uns aux autres (comme Jésus l’a demandé) et qu’il
en est du même pour le vin qui est souvent un " bon vin" pas de la
piquette. Et on peut prendre son temps.. Cela aussi a de l'importance. Prendre le temps de déguster cette bouchée de pain, prendre le temps de déguster cette gorgée de vin.
Alors le poids de ce réel, permet de comprendre aussi le poids du
réel de l’amour de Jésus pour nous, de ce Jésus qui veut rester présent et de son désir que cela soit pour nous source de joie.
Il y a cette phrase que j'aime tellement: "quand nous serons nourris de son corps et de son sang et remplis de l'esprit saint accorde-nous d'être un seul corps et un seul esprit dans le CHRIST " et qui insiste bien sur "être nourris" et être remplis, pas avoir reçu une "goutte" parcimonieuse. Si le chrisitianisme n'est pas abondance alors il y a peut être quelque chose à revoir..
1 commentaire:
J'aime bien la finale de votre texte et la comparaison avec le "petit prince", un livre qui résume pas mal d'expériences de vies et que j'aime beaucoup....
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