Dans un de ses livres, « L’évangélisation
des profondeurs Simone Paccot, parle d’un homme qui a d’une certaine manière
« consacré »sa vie (ou son temps) à sa mère pour l’aider à vivre.
Cette personne a dû à un moment donné de sa vie déclarer un symptôme (peut être
bien une dépression) qui a nécessité un travail sur lui-même
L’analyse qui est
faire, montre qu’il a fait de sa mère une sorte d’idole (la servir elle et non
pas Dieu) qui a pris toute la place. S’être conduit ainsi, relèverait pour
l’auteur de la toute puissance et qui dit toute puissance, dit se prendre pour Dieu et donc péché, ce qui nécessite outre le
fait de changer de comportement de commencer par demander pardon à Dieu.
Je n’ai jamais été d’accord avec cette manière
de voir car je pense que celui ou celle qui prend sa mère pour objet d’amour
bien après l’époque où elle a pu l’être (normalement d’ailleurs) ne le fait pas
exprès. Par ailleurs il a été bien vu pendant des décennies de se
« sacrifier » pour ses proches.
Quand un enfant se trouve à tenir le rôle de
parent de ses parents, (sa mère), il n’a pas le choix, c’est cela qui lui
permet de vivre, de maintenir l’homéostasie familiale, et il n’est pas
responsable de cet état de fait, ni capable de faire autrement. Ses processus
intellectuels ne lui permettent pas de juger si c’est bon ou mauvais, pour lui
c’est bon.
Donc à mon avis pas question de demander
pardon à Dieu (se reconnaître pécheur et gouter ensuite la joie du pardon, de la miséricorde) d’avoir fonctionner comme cela ; ce serait plutôt à Dieu de
demander pardon à cet enfant de l’avoir mis dans une pareille famille.
Maintenant si à un moment de sa vie, une personne arrive à se rendre compte que cette position est mauvaise pour lui, mauvaise pour l’autre et
l’a coupé d’autres relations où il aurait pu aider, alors peut être que l’on
peut parler de repentance, une fois que les yeux se sont ouverts.
La toute puissance est un stade par lequel
passent (en tous les cas dans notre culture) tous les nourrissons du monde.
Dans leur impuissance physique, physiologique et psychologique, ils sont d’une
certaine manière, maître du sein maternel qu’ils font apparaître ou
disparaître, et qu’ils peuvent détruire ou au contraire magnifier. Au fil des
semaines cela se modifie et le bébé comprend que le sein qu’il détruit est la
maman qu’il aime, et si la maman a été capable de vivre cette agressivité sans
être détruite, alors certes la toute puissance demeure, mais elle n’est pas
maîtresse.
Il me semble à la lumière des travaux sur les familles dysfonctionnelles que
ce que S. Paccot décrit n’est pas du ressort de la toute puissance, mais de ce
qu’on appelle la codépendance[1],
voire de ce que l’on appelle les addictions. Si un membre de la famille va mal
(par exemple dépression) l’enfant va devenir en quelque sorte le parent de son
parent pour lui permettre de guérir.
Cela lui donne un rôle, une place, mais ce
n’est pas celle qu’il devrait avoir et en cela on est dans le
dysfonctionnement, le pathologique. Mais cela s’incruste tellement que ce type
de fonctionnement devient une deuxième nature. Le couple ainsi formé est
indestructible, l’un a besoin de l’autre et l’autre a besoin de l’un.. Celui
qui est dans la dépendance vit dans le manque et il fait tout ce qui est
possible pour le combler et utilise les autres comme des objets et non comme
des sujets.
Celui qui est « co dépendant » (qui rentre dans ce jeu)
va consacrer sa vie non seulement à le supporter avec les risques que cela
provoque, mais surtout va essayer de le sauver. Il se crée un lien pathologique
entre ces deux individus et ce lien là, même s’il est sous-tendu par les
meilleures intentions du monde est un lien mauvais, car personne ne peut faire
changer une personne qui est dans la dépendance si celle ci ne l’a pas décidé
(et les bénéfices sont en général bien trop importants pour qu’elle en change.
Celui qui est co dépendant est de fait victime d’une fausse croyance ;
croire qu’il va sauver l’autre et que lui seul peut le faire. Consacrer sa vie
et se laisser bouffer par un autre n’est jamais une solution.
D’une certaine manière, j’aurais envie de dire
que il n’y a pas de faute à vouloir essayer d’aider l’autre fait partie de la
relation, mais il y a péché car cet autre à la fois prend d’une certaine
manière toute la place et que Dieu est relégué loin derrière, et surtout que
cela revient aussi à prendre la place de Dieu en se croyant
« sauveur ».
Maintenant pour arriver à voir cela, je pense
qu’il faut être dans une souffrance énorme (échec total et risque pour sa vie)
pour se rendre compte que l’on s’est trompé de cible. Aider l’autre ce n’est
pas tout faire pour lui, c’est le mettre en relation avec un groupe qui pourra
l’aider et surtout c’est parfois cesser de faire à sa place.
Mais renoncer à la codépendance c’est aussi
renoncer à une place que l’on a eue.
Pour moi évangéliser les profondeurs ce n’est
pas pardonner à l’autre de vous avoir fait du mal et de ce fait vous avoir
poussé à avoir un comportement du même ordre avec les autres, mais c’est
d’abord de se pardonner à soi même, de comprendre qu’on a pas eu le choix,
qu’on a été non pas agresseur mais victime et apprendre petit à petit à s’aimer
parce que envers en contre tout il
y en en soi une petite flamme que personne n’a réussi à éteindre.
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